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Source: www.bahai-biblio.org
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Le Courage d'Aimer

Shoghi Ghadimi


Table des matières:

1. FASCICULE 1 - La Foi et l'Amour
1.1. Qu'allons-nous faire de cette Science
1.2. L'atome et la paix
1.3. Le vrai visage de la vie
1.4. La Foi et l'Amour
1.5. L'Amour est l'enfant de la liberté
1.6. Au pays merveilleux de l'Amour
1.7. Réponse aux contestations
1.8. L'homme de demain n'aura plus peur
1.9. Les preuves par l'Histoire

2. FASCICULE 2 - L'amour universel
2.1. Le but de la vie, c'est de se faire des amis
2.2. Un ami qui nous fait gagner la vie
2.3. Merci la vie
2.4. Pardonner, c'est comprendre
2.5. L'arche de Noé à l'ère de l'atome
2.6. Ce siècle de lumière
2.7. Le jardin de délices n'est pas une chimère
2.8. Une interview à la radio
2.9. L'homme a besoin d'image

3. FASCICULE 3 - l'amour et l'objectivité
3.1. Objectivité: Quand on aime, on n'est plus un rêveur
3.2. Gratitude: Quelle magie que celle du " Merci"
3.3. Recherche: L'homme, ce chercheur éternel
3.4. Optimisme: Les optimistes ont le monopole du succès
3.5. Le mensonge motivé, quelle calamité!
3.6. Notre chance est dans la confiance
3.7. Les bienfaits de l'oubli
3.8. La fatigue, cette ennemie de l'amour
3.9. Badi: Un martyr qui défie le roi

4. FASCICULE 4 - L'amour et l'amitié
4.1. Le monde de demain sera-t-il meilleur?
4.2. Votre meilleur ami?
4.3. Une nouvelle vie n'est pas utopie
4.4. Le paradis c'est la compagnie des amis
4.5. Les droits de l'homme à l'Ère de l'Atome
4.6. L'aube d'une nouvelle civilisation
4.7. La vérité c'est la recherche
4.8. La jeunesse - pionnier du monde à venir
4.9. Un événement sans précédent dans l'histoire

5. FASCICULE 5 - l'amour et la raison
5.1. La science devant la foi
5.2. L'athéisme est-il scientifique?
5.3. Les femmes et l'Âge Nouveau
5.4. Parents responsables (éducation)
5.5. Santé et guérison par la science et la religion
5.6. La clef du matin et le verrou du soir (Prière)
5.7. L'histoire se répète
5.8. Qui nous dira la vérité?
5.9. Martyre pour l'émancipation de la femme (Tahirih)

6. FASCICULE 6 - La lumière ne fait pas de bruit
6.1. La parole est aux humbles
6.2. La puissance de la patience
6.3. Le secret des foyers heureux
6.4. La joie par la foi
6.5. Le mystère des miracles
6.6. La magie du silence
6.7. La lumière ne fait pas de bruit
6.8. Les signes du jour promis
6.9. Tomber martyr - ce fut leur seul désir

7. FASCICULE 7 - Les Prodiges de ces temps merveilleux
7.1. Quel monde voulons-nous
7.2. L'écho de l'aventure scientifique
7.3. Le respect de la vie est un signe de la foi
7.4. L'islam et ses révélations
7.5. C'était prévu, le saviez-vous?
7.6. L'homme, ce talisman suprême
7.7. La conquête de l'espace ou la paix sur la terre
7.8. L'argent fait-il le bonheur?
7.9. La joie du martyre le poussa à danser

8. FASCICULE 8 - vivre et aimer ne font qu'un
8.1. Mille façons d'aimer
8.2. Quelle épreuve, ce langage imagé
8.3. En deux pages, une histoire en images
8.4. Nos petits candidats au bonheur
8.5. Le langage à tenir aux enfants
8.6. La récompense de la persévérance
8.7. La parole, cette arme à double tranchant
8.8. Les derniers seront les premiers (Humilité)
8.9. Le martyre d'un enfant surdoué (Ruh'u'llah)

9. FASCICULE 9 - La mesure de l'amour est l'amour sans mesure
9.1. L'amour n'est pas un luxe, c'est une loi
9.2. Ce récit est à lire. C'est le passé et l'avenir
9.3. Le bien le plus précieux (le temps)
9.4. Les voyageurs du pays des mages
9.5. Conflit des générations
9.6. L'homme face à la Nature
9.7. Le bonheur c'est croire au bonheur
9.8. "Et un petit enfant les conduira" (la vie de Shoghi Effendi)
9.9. Bahá'u'lláh


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1. FASCICULE 1 - La Foi et l'Amour

A mon cher ami, l'ingénieur Khabir-Pour, qui m'a encouragé pour la publication de cette modeste addition à tant d'ouvrages écrits sur l'Amour.

PRÉFACE

En 1954, l'éminent savant Einstein lançait dans "L'Express" de Paris, ce grave avertissement:

"La puissance déchaînée de l'Atome a changé tout, sauf notre façon de penser. Et nous glissons vers une catastrophe sans précédent. Si l'humanité doit survivre, il lui faut une nouvelle façon de penser."

Les pages qui suivent constituent une tentative timide d'exposer une nouvelle façon de penser qu'on trouve dans les Écrits baha'is.

Cette "Nouvelle Façon de Penser", j'ai essayé de l'exposer lors de quelques conférences données dans les pays d'expression française. Ce n'est donc pas un livre avec différents chapitres qui se suivent les uns les autres, mais un recueil de quelques conférences indépendantes. Et c'est à cause de cette indépendance qu'il arrive que le même sujet se répète sous différentes formes.

Je prie l'indulgence du lecteur d'excuser de telles répétitions et je serais profondément reconnaissant de toute critique et encouragé par toute suggestion permettant d'améliorer la présentation de l'éternelle question de l'AMOUR.


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1.1. Qu'allons-nous faire de cette Science?

Quand nous étudions l'histoire de la civilisation humaine, nous constatons que, depuis la deuxième moitié du XIXe siècle, la Science a commencé à faire des progrès sans précédent. Les découvertes se succèdent à une cadence vertigineuse dans tous les domaines, rendant la vie matérielle facile et agréable.

L'homme s'incline devant cette Science toute puissante, abandonnant de plus en plus la Religion qui dans le passé, a rendu tant de services à l'humanité mais dont il ne reste, à présent, qu'un ensemble de rites et de cérémonies sans le moindre effet sur le bien-être moral de l'homme. L'homme ne peut plus croire à l'impureté de l'enfant tant qu'il n'est pas circoncis, pas plus qu'à son "péché originel" tant qu'il n'est pas baptisé.

La Religion commence à perdre son prestige, au point que ses adversaires la baptisent "l'opium du peuple". Ceci pour dire que la Religion, comme l'opium, est la plus grande menace pour l'humanité.

On met donc tout son espoir en la Science et l'on croit en une loi sociologique du progrès par la Science, comme à la loi de la gravitation. Mais l'histoire ne justifie pas cet espoir. Bien au contraire elle apporte la déception et le désespoir, car c'est précisément à l'ère où la Science a fait le plus de progrès que l'on a vu le plus de divisions, de discorde de haine et de guerres.

C'est parce que - se sont dit les supporters de la Science - c'était une Science sans conscience. Il nous faut une Science avec conscience.

Et tous les efforts furent dirigés vers l'avancement de cette Science avec conscience.

Théoriquement, c'était bien beau, mais pratiquement voilà ce qui s'est passé. Chacun a commencé à interpréter le mot conscience à sa façon.

Sous le régime national-socialiste, les Allemands, sûrs de leur génie scientifique et par conséquent de leur prétendue supériorité raciale par rapport aux autres, se sentirent poussés par leur conscience nationale à aller conquérir le monde.

Conséquence: cinq années de souffrances sans précédent et le sang de millions de victimes innocentes répandu. Ceci n'est qu'un exemple parmi tant d'autres illustrant comment l'interprétation arbitraire du mot "conscience" est dangereuse et lourde de conséquences.

Aujourd'hui encore, on est devant la Science de l'Ouest avec sa conscience et la Science de l'Est avec sa conscience à elle. Et chacun, sûr de sa Science avec conscience, veut imposer au monde sa façon de penser et sa ligne de conduite. La conséquence de ce conflit des "Sciences avec conscience" est l'effusion du sang des innocents. En effet, ce ne sont pas seulement les partisans de ces "Sciences avec conscience" qui en souffrent, mais surtout les peuples des pays auxquels on applique le terme "en voie de développement". Hier, le sang coulait au Biafra, aujourd'hui il continue de couler au Vietnam. Et l'on ne sait de qui ce sera le tour demain.

Voilà le fruit de cette "Science avec conscience". Et c'est précisément cette expérience amère et le danger d'une catastrophe mondiale qui ont amené les savants matérialistes, pour qui seule la Science comptait, à tenir des propos tels que:

"La Science représente pour l'humanité à la fois le plus grand espoir et la plus grande menace. Le plus grand espoir parce qu'elle nous fait connaître les microbes et que, grâce à cette connaissance, nous pouvons lutter victorieusement contre les maladies. La plus grande menace parce que ces mêmes microbes peuvent servir à répandre de meurtrières épidémies" ("Institut de la Vie" préfacé par J. Rostand.).

Il en est de même en ce qui concerne l'Atome qui peut rendre tant de services à l'humanité et qui peut empoisonner l'atmosphère terrestre tel un poison mortel: autrement dit, devenir un opium pour le genre humain.

Ainsi, la même critique qui était adressée à la Religion, est cette fois adressé à la Science, dont la puissance inquiète de plus en plus les savants qui se demandent:

"Qu'allons-nous faire de cette Science?".

Cette noble inquiétude des savants nous permet elle de dire que notre civilisation est condamnée à l'effondrement par suite d'une guerre atomique ou microbienne?

Les Baha'is préfèrent être de bons historiens que de mauvais prophètes. Ils ne veulent pas affirmer qu'une guerre atomique est inévitable. Mais ce qu'ils peuvent affirmer, c'est que, selon l'expérience fournie par l'histoire, notre civilisation est menacée d'effondrement, non par suite d'une guerre atomique entre les nations, mais par suite d'une guerre apparemment non déclarée, une guerre sournoise entre les individus !

Permettez-moi donc de dire un mot sur cette guerre !

Les produits de la Science mettent à la disposition de l'homme tous les moyens favorisant la jouissance de la chair. Et comme la chair est faible, elle cherche à en profiter par tous les moyens et au maximum. On se demande, pour un instinct si naturel et si puissant, j'entends la volupté, pourquoi il y a tant d'excitants, tant de films dont les annonces soulignent "l'animalité" des grandes vedettes, pourquoi tant de panneaux publicitaires servant de coups de fouet pour la même volupté? Comment voulez-vous que les jeunes ferment les yeux à tout cela, comment voulez-vous qu'ils résistent à tant d'excitants? On doute même que les personnes plus âgées y soient insensibles !

Le pape Jean XXIII lorsqu'il était cardinal à Paris, racontait cette anecdote: "Chaque fois, disait-il, que je mange dans un restaurant, il suffit qu'une femme un peu trop décolletée entre pour que tous les regards se tournent vers moi".

Dans les conditions actuelles, à peine grandi, l'enfant commence à chercher une petite amie à lui, puis une voiture; et pour montrer qu'il est assez grand, il veut fumer comme les grands, sans oublier les surprise party et les nuits blanches à passer avec les copains. Tout cela demande de l'argent, qu'il ne peut se procurer auprès de ses parents qu'en disant un petit mensonge. Or, il est facile de dire un mensonge, mais très difficile de n'en dire qu'un. Il prend donc l'habitude de mentir, de tromper ses parents, sans négliger de temps en temps le chantage, ce qui est une sorte de guerre froide à l'échelon familial. Ainsi la guerre sournoise entre les individus commence au sein de la famille. Mais ce n'est qu'une petite guerre, en comparaison de ce qui se passe en dehors de l'ambiance familiale. En effet, la véritable guerre a lieu entre les adultes, puisque la triste formule: la fin justifie les moyens, étant admise par la majorité, tous les moyens (mensonge, hypocrisie, intrigues, chantage...) sont bons pour atteindre le seul "but" qui est la pleine jouissance de la "chair". C'est cette guerre dissimulée, sournoise entre les individus, estiment les penseurs, qui sera la cause de l'effondrement de notre civilisation. Car celle-ci n'est pas menacée par l'extérieur, à ses frontières géographiques, la puissance atomique ayant effacé ces frontières. Elle est menacée aux frontières même du coeur humain, comme ce fut le cas de presque toutes les civilisations du passé.

Permettez-moi de m'expliquer par un exemple.

Dans le passé, on faisait couramment des maisons en bois. Or, après un certain temps, elles s'effondraient brusquement sans la moindre cause apparente. Pendant longtemps, on n'en a pas connu la raison. Puis ayant étudié le phénomène de près, on a découvert qu'il y a un ver qui ronge le coeur du bois, et que c'est ce ver rongeur qui en causait le pourrissement lent.

Il en est de même en ce qui concerne l'édifice de notre civilisation. Elle est menacée d'effondrement par suite du pourrissement lent du coeur humain dû à la mort des forces spirituelles. L'éminent penseur Dr Gould écrit:

"Je ne crois pas que les pires dangers qui menacent notre civilisation soient les bombes et les engins téléguidés. Je ne crois pas que notre civilisation puisse périr de cette façon. Elle périra selon moi quand les forces spirituelles mourront dans le coeur des hommes."

Et il continue:

"Arnold Toynbee a fait observer que sur vingt et une civilisations d'importance, dix-neuf ont succombé à un mal intérieur et non à des invasions.

Elles tombèrent en décadence sans tambour ni trompette. La catastrophe se produisit lentement, dans le silence et l'ombre, sans que personne s'en rendit compte."

Une mise au point est nécessaire. Quand on dit que la civilisation actuelle disparaîtra, il ne faut pas croire que tous les progrès scientifiques réalisés jusqu'ici disparaîtront, que tout ce qui a été fait pour l'avancement de la Science et le bien-être matériel de l'homme sera anéanti sans laisser de trace et qu'il faudra tout recommencer. Ce serait contraire à la loi d'évolution qui est l'expression même de la volonté de Dieu. Ce qui disparaîtra, c'est le DÉSÉQUILIBRE entre les forces matérielles libérées par la Science et les forces spirituelles ranimées par la Religion pour céder la place à un état d'ÉQUILIBRE entre ces deux forces par suite de la collaboration entre la Science et la Religion.

C'est comme un bateau en mer. Il est soumis à deux forces: sa charge qui le tire vers le bas et la poussée de l'eau qui le pousse vers le haut. Si la charge l'emporte sur la poussée de l'eau, le bateau coule. Mais s'il y a équilibre entre la charge du bateau et la poussée de l'eau, le bateau tient bien à la surface de l'eau et avance vers lie but qui lui est assigné.

On peut citer un autre exemple. C'est l'image de l'homme se trouvant en mer. S'il coordonne ses mouvements afin de créer l'équilibre entre son poids qui l'entraîne vers le bas et la poussée de l'eau qui le pousse vers le haut, alors il tient bien à la surface de l'eau, il nage et il avance. S'il ne coordonne pas ses mouvements, son poids l'emporte sur la poussée de l'eau et il se noie. Le poids représente les forces matérielles, la poussée de l'eau, ce sont les forces spirituelles. Ce qu'il faut, c'est créer l'équilibre entre ces deux forces.

La question qui se pose est celle-ci:

"Qui apprendra à l'homme à "coordonner ses mouvements" pour tenir en équilibre sur cette mer tumultueuse. Qui est capable de produire en lui une mutation grâce à laquelle il sera en mesure d'établir l'équilibre entre ses forces matérielles et ses forces spirituelles?

Une telle mutation, selon l'expérience du passé enregistrée depuis plus de six mille ans, a été réalisée par des "Mutants" tels que Moïse, Bouddha, Jésus, Muhammad pour ne citer que quelques-uns parmi les plus connus. Ces "Mutants" sont donc des Messagers de Dieu, et le phénomène qu'ils inaugurent n'est autre que ce qui est connu sous le nom de Révélation.

Bien que le mécanisme précis par lequel opère ce phénomène reste inaccessible à la compréhension humaine, on peut le reconnaître à certains signes parmi lesquels nous citerons en premier lieu, la puissance unificatrice. Cette puissance se manifeste grâce à une force mystérieuse dont sont dotés lies enseignements du Fondateur de la Révélation. Ce qui veut dire que les mêmes enseignements annoncés par une autre personne n'auront pas le même effet unificateur. Ainsi, par exemple, les philosophes grecs prêchaient aussi la, loi du pardon au lieu de la loi du Talion mais sans arriver à unir les gens; tandis que Jésus: en faisant appliquer la même loi du pardon, a réussi à unir les différents peuples.

Eh bien, chers Amis, c'est la naissance d'un phénomène identique que proclament les Baha'is, ce que confirment les penseurs de notre époque qui, en étudiant les caractéristiques de ces deux phénomènes (chrétien et baha'i), les rapprochent l'un de l'autre. Et ceci surtout du point de vue de la puissance unificatrice.

En effet, l'une des preuves de la puissance unificatrice de la Révélation Baha'ie est que, malgré l'exécution de Son Précurseur le Bab, malgré l'emprisonnement à vie de Son Fondateur Bahá'u'lláh, malgré la terrible persécution de ses adeptes, malgré l'opposition des autorités civiles et ecclésiastiques et malgré bien d'autres facteurs absolument défavorables à sa diffusion, actuellement la Foi Baha'ie se trouve solidement établie et organisée dans plus de trois cents pays, territoires et îles indépendantes. Elle est enseignée en plus de quatre cents langues dans lesquelles sa littérature est traduite jusqu'ici, unissant ainsi des gens appartenant à des centaines de peuples différents. Ce qui a contribué puissamment à cette union, c'est l'application du premier principe de la Foi Baha'ie, principe de la recherche indépendante et personnelle de la vérité.

En effet, l'unité du monde ne peut être réalisée que par la VÉRITÉ et non par les préjugés et les imaginations personnelles lesquels étant incalculables, créent autant de divisions parmi les hommes. S'il y a trois préjugés différents, il y a trois divisions, s'il y a quatre imaginations différentes, il y a quatre divisions et ainsi de suite, autant il y a d'imaginations et de préjugés, autant il y aura de divisions. Tandis que la VÉRITÉ étant une, il ne peut pas y avoir de division.

La vérité, c'est comme le sommet d'une montagne où tous peuvent se rassembler. Mais pour cela, il faut que chacun continue à monter, les yeux fixés sur le sommet. Il en est de même en ce qui concerne la vérité sur laquelle tous les regards doivent se fixer et que chacun doit continuer à chercher. Comme en Science: pourquoi, du point de vue scientifique, les hommes de science ne sont-ils pas divisés? Parce qu'il n'y a qu'une vérité scientifique et que chacun la cherche personnellement et indépendamment.

Il faut, selon la Foi Baha'ie, qu'il en soit de même dans le domaine spirituel. Si l'on veut arriver à l'unité, il faut que la recherche personnelle' de la vérité prenne un caractère sacré. Il faut, que dans cette recherche, l'homme voit le sens de la vie, comme un savant voit le sens de sa vie dans ses recherches. Un savant cherche et il trouve dans une parcelle de suie, cette particule noire si peu agréable à la vue, les plus belles formes géométriques, les proportions les plus idéales devant lesquelles s'effacent le Taj Mahal des Indes et Saint-Pierre de Rome.

Le savant réussit dans ses recherches parce qu'il cherche partout.

On raconte qu'un jour, on a surpris un amant en train de tamiser de la terre.

- Qu'est-ce que tu fais? lui a-t-on demandé.

- Je cherche ma bien-aimée.

- Ta bien-aimée est une âme pure et tu la cherches dans une chose aussi basse que la terre?

- Je la cherche partout, peut-être la trouverai-je quelque part !

C'est une image pour dire que lorsqu'on cherche, il ne faut pas rester attaché à l'opinion généralement admise, au "qu'en dira-t-on", aux idées préconçues, à tout ce qu'on avait appris précédemment et, en bref, à tout ce qui entraverait les pas sur le chemin de la vérité. Si cela est nécessaire, disent les Écrits baha'is, on ne doit pas hésiter à recommencer toute son éducation.

Ainsi, par exemple, si un Zoroastrien cherche la vérité, il doit recommencer son éducation qui lui a appris que le soleil est Dieu; un Juif doit oublier que tout enfant incirconcis est impur et mérite la mort; un Chrétien doit écarter l'idée qu'on lui a inculquée et qui dit que tout enfant non baptisé est un pécheur, et que c'est Adam qui en est responsable parce qu'il a "fait la poire en mangeant une pomme...".

Derrière certains de ces rites (le baptême par exemple) se cachent de profondes idées; mais, dans tous les cas, ce ne sont que des formes extérieures auxquelles il ne faut pas s'attacher quand on cherche la vérité. Il faut abandonner les rites, disent les enseignements baha'is, car les rites divisent les peuples et tout ce qui divise doit être évité dans la recherche de la vérité où l'on vise précisément à l'unité.

Mais, abandonner les rites, ce n'est pas difficile, puisque pratiquement on les abandonne de plus en plus. Ce qui est difficile, c'est d'abandonner les préjugés qui constituent le plus grand obstacle dans la recherche de la vérité. C'est "la ruine du genre humain" a dit Bahá'u'lláh.

L'application du principe de la recherche personnelle de la vérité implique donc l'application d'un autre principe qui est celui de l'abolition des préjugés.

Quels sont ces préjugés? Ils sont nombreux.

Il y a d'abord le préjugé national selon lequel une nation, un pays, est considéré supérieur aux autres. Le préjugé "l'Allemagne au-dessus de tout" n'a-t-il pas coûté 45 millions de vies?

Il y a ensuite le préjugé religieux selon lequel une religion se considère comme la seule à détenir la vérité, les autres étant dans l'erreur. Qui peut calculer le nombre des victimes des guerres religieuses, conséquence du préjugé -religieux?

Il faut aussi mentionner le préjugé de couleur selon lequel la race blanche par exemple est supérieure à la race noire, ce qui crée des situations pires que les guerres, situations dont souffrent les pays les plus civilisés.

L'éminent savant Einstein n'avait-il pas raison en disant qu'il est plus facile de casser l'atome que le préjugé? La preuve, c'est que dans les pays civilisés on a cassé l'atome, mais le préjugé persiste; ce qui est bien illustré par cette anecdote attribuée au même savant:

- Un jour, l'épouse d'Einstein lui demande si sa théorie sera sanctionnée par l'expérience.

"De deux choses l'une, répond Einstein, si ma théorie est sanctionnée par l'expérience, alors les Allemands diront:

"C'était à prévoir parce qu'Einstein est Allemand."

Et les Français de leur côté feront remarquer:

"Mais naturellement, c'est un Juif."

Et si ma théorie est rejetée par la science, les Allemands diront:

"C'est un Juif !"

Et les Français de leur côté

"C'est un Allemand !"

Par cette anecdote, Einstein voulait dire que la Science a beau progresser à pas de géant, le public gardera tout de même ses préjugés de race ou de nationalité, et ce n'est pas à la science de "casser le préjugé".

Mais il n'y a pas que le préjugé de race ou de classe, il y en a bien d'autres parmi lesquels il faut citer en premier lieu le préjugé selon lequel "j'ai raison et les autres ont tort".

Tous nous avons plus ou moins ce préjugé. Et c'est le plus grand obstacle dans la voie de l'unité.

Un Baha'i lutte constamment, quotidiennement contre ce préjugé. Dans ses relations avec les autres, il s'efforce d'éviter ce préjugé. Pour lui, se laisser dominer par ce sentiment, c'est se salir les mains.

Quand on a les mains sales, on ne les tend pas à son prochain. Autrement dit, quand on sent qu'on est dominé par le préjugé du "moi", on s'abstient de parler, on garde le silence.

"Fais le bien par le silence opportun", dit Bouddha.

On nous fera remarquer: "Peut-on dans la vie quotidienne éviter de se salir les mains?". Sûrement pas ! et c'est pour cela qu'on les lave tous les jours. De même, un Baha'i s'engage à faire son examen de conscience tous les jours par des instants de méditation et de prière, comme on se lave les mains tous les jours.

Se laver les mains, il le faut, sans quoi on ne vous serrera pas la main. Méditer pour faire son examen de conscience, la vie moderne nous en laisse t-elle le temps? Il semble que non. Et pourtant, il le faut, le destin de notre civilisation en dépend.

Heureusement qu'il y a une minorité qui y pense. Cette minorité, l'éminent historien Arnold Toynbee l'appelle "minorité créatrice" et selon lui, c'est

cette minorité créatrice qui a toujours été à l'origine de la renaissance des civilisations.

Cette minorité créatrice a le temps pour méditer. Et toutes les activités baha'ies visent à la découverte de cette minorité. Ce qui est le cas ce soir, à cette réunion où nous sommes en présence d'un petit nombre de représentants de cette minorité créatrice. Vous me permettrez donc de finir cet exposé par une invitation, invitation à la méditation sur la question.

Qu'allons-nous faire de cette Science?

Cette Science en laquelle on a mis tant d'espoir, mais qui selon ses éminents représentants tels qu'Einstein, seule ne pourra pas nous sauver, étant donné que, toujours d'après le même savant, sans la religion elle reste estropiée.


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1.2. L'atome et la paix

Parfois dans la vie on voit des choses bizarres: On voit un Nobel qui invente la dynamite, et qui laisse une immense fortune pour récompenser les efforts de ceux qui travaillent pour la Paix. On voit un Einstein qui découvre la puissance destructrice de l'atome et qui jusqu'au dernier souffle de sa vie ne cesse de parler de la nécessité impérieuse d'établir la paix, pour que la survie de l'humanité soit assurée.

Et l'on continue d'écrire des ouvrages volumineux sur l'Atome et la Paix.

Mais le premier ouvrage qui parle de la paix et en même temps fait une allusion à la puissance atomique date de près d'un siècle. Je dis bien cent ans, si incroyable que cela puisse paraître, car il y a cent ans on ne connaissait pas encore la puissance atomique. Voilà ce que nous lisons dans cet ouvrage, dont l'auteur était un condamné à la prison à perpétuité, enfermé dans la prison de Saint-Jean d'Acre:

"En vérité, je dis: dans chaque chose la modération est requise, l'excès est une cause de mal. Voyez comment la civilisation occidentale est devenue la cause de l'effroi et de la terreur de l'humanité; un instrument infernal s'est glissé au milieu d'eux, une telle cruauté dans la destruction de la vie est apparue que les yeux et les oreilles du monde n'ont vu ni entendu rien de pareil.

"La réparation de ce mal qui a pris une puissance insurmontable est impossible, sinon par l'union des peuples dans un intérêt commun ou dans une religion. Écoutez la proclamation de l'Opprimé et attachez-vous à la PAIX UNIVERSELLE. Des choses extraordinaires existent sur la terre, mais elles sont cachées à l'esprit et à la raison. Ces choses ont le pouvoir de changer entièrement l'atmosphère terrestre, tel un poison destructeur."

En 1908, deux Américains, de San Francisco, en visite à Saint-Jean-d'Acre demandent au fils de l'Auteur de cet avertissement des explications concernant ces "choses extraordinaires capables d'empoisonner l'atmosphère terrestre". Et il interprète les paroles de son Père par l'existence de deux puissances dues à la fission et à la fusion: ce que nous appelons aujourd'hui la puissance de la bombe atomique (fission) et de la bombe à l'hydrogène (fusion) (Voir "Daily Lessons Recelved at Acca", édité en 1909).

Si à titre de curiosité nous consultons les dictionnaires édités à l'époque où cette interprétation a été donnée, nous y voyons que l'uranium (combustible nucléaire) y est défini comme "métal blanc sans valeur". Et ce n'est qu'une trentaine d'années après (en 1938) qu'on découvre que la puissance d'une poignée de ce "métal blanc sans valeur" est équivalente à l'énergie fournie par 10000 tonnes de charbon.

Quant à la contamination de l'atmosphère, prédite par le Prisonnier de Saint-Jean-d'Acre, disons que, par suite de la dislocation de l'atome, il se propage dans l'atmosphère des poussières radioactives, qui, respirées avec l'air, attaquent nos cellules et en particulier les organes donnant naissance au sang. La leucémie et le cancer n'en sont que deux conséquences.

Ajoutez-y le fait que, par suite de cette contamination de l'atmosphère, chaque année plus de 100000 enfants anormaux sont mis au monde, et vous verrez jusqu'à quel point chaque expérience atomique contamine l'atmosphère, expériences que Jean Rostand appelle "un crime dans le présent et surtout un crime dans l'avenir, et un crime dont les suites n'auront pas de fin, puisque ces mutations nocives, qui apparaîtront de la sorte, continueront indéfiniment à se propager."

Ceci concernait les caractéristiques de la force de FISSION. Quant à la force de FUSION prédite par le Prisonnier de Saint-Jean-d'Acre, et découverte bien plus tard par la science, c'est celle qui est connue aujourd'hui sous le nom de la bombe à hydrogène. Pour dire combien cette puissance est extraordinaire, rappelons-nous qu'avec une seule bombe à hydrogène on peut détruire un pays comme la Belgique. Quant à la contamination de l'atmosphère, elle est caractérisée par les mêmes effets néfastes que la bombe atomique. On a même constaté des cas de folie subite chez les aviateurs transportant la bombe H.

Voilà ce qu'entendait le Prisonnier de Saint-Jean d'Acre en parlant des choses extraordinaires capables de contaminer l'atmosphère tel un poison destructeur, prophétie qui fut réalisée par la science cinquante ans plus tard.

Mais une question se pose. Pourquoi, en lançant pour la première fois son appel à l'union des peuples, l'auteur de ces lignes met-il l'humanité en garde contre -les choses extraordinaires capables de contaminer l'atmosphère? C'est que, si l'on ne s'unit pas, cette "chose extraordinaire", c'est-à-dire la puissance nucléaire ne permettra plus à l'humanité de survivre.

Car si la puissance nucléaire intervenait dans une guerre, fatalement tout le monde, aussi bien celui qui attaque que celui qui est attaqué, en subirait les conséquences néfastes. Ce n'est plus un bombardement classique, dont on peut, avec des calculs précis, limiter les dégâts à une zone bien déterminée. Il suffit, - par exemple, que le vent change de direction pour que ce soit l'agresseur qui subisse les effets néfastes de son arme. Une guerre atomique est donc absurde. Et pourtant on s'y prépare, on continue de s'armer en bombes atomiques. Pourquoi? Pour la simple raison que c'est la crainte de représailles qui peut empêcher un belligérant d'utiliser son arme. En attendant, ces armements coûtent terriblement cher; ils ruinent l'économie du pays. Et s'il n'y a pas encore de guerre atomique, il y a une guerre économique où l'on est en train de nous plumer comme des pigeons.

Par quel moyen peut-on sortir de cette situation à la fois absurde et explosive? Il n'y a qu'une solution c'est de s'unir. C'est pour cela qu'aujourd'hui seulement on dit: s'unir ou périr. Et c'est ce que précisément le Prisonnier de Saint Jean d'Acre voulait dire, en invitant l'humanité à s'unir tout en la mettant en garde contre la puissance destructrice de l'atome.

Mais comment s'unir? Les hommes ont-ils fait quelques essais pour s'unir? Oui, et l'on peut ramener à quatre ces tentatives d'union.

D'abord, l'essai militaire. C'est Napoléon qui tenta par la méthode militaire de réaliser l'union des nations européennes en une Fédération d'États. Mais ses guerres ne firent qu'épuiser les pays d'Europe, et les pousser à la recherche d'une autre méthode pour se mettre d'accord. C'est alors qu'intervint une deuxième tentative qui fut l'Alliance des Grandes Puissances, connue sous le nom de la Sainte Alliance. L'Angleterre, la Russie, l'Autriche et la Prusse s'unirent pour tenir les nations en accord.

Mais cette tentative échoua aussi, parce qu'elles ne tinrent pas compte des aspirations des peuples. Ils donnèrent, par exemple, la Belgique aux Hollandais, la Finlande aux Russes, la Norvège aux Suédois, etc... Ce qui provoqua des luttes pour l'indépendance, des poussées révolutionnaires et finalement l'échec de la Sainte Alliance. Les troubles politiques, économiques et sociaux qui s'ensuivirent, aboutirent à la première guerre mondiale, premier avertissement démontrant qu'à l'ère de la machine, l'union des peuples devenait une nécessité. C'est alors qu'on eut recours à une troisième tentative pour s'unir.

Cet essai, c'est la formation de la Société des Nations. Cette tentative aussi, comme vous le savez, par suite du manque de sagesse des artisans des traités de paix, des réparations insupportables imposées aux vaincus, et, par conséquent, de la naissance de l'esprit de vengeance, échoua aussi. Elle ne sut pas empêcher la deuxième guerre mondiale. Et elle fut un deuxième avertissement aux nations du monde, avertissement soulignant la nécessité vitale de l'union des nations. C'est alors que nous assistons à un quatrième essai pour tenir les nations en accord. C'est la création de l'Organisation des Nations Unies.

Tout en rendant hommage à cette Organisation pour préserver la paix, tout en reconnaissant qu'il s'agit d'une étape par où l'humanité devait passer dans ses efforts pour l'établissement de la paix, posons-nous la question de savoir si nous nous trouvons en présence de nations réellement unies, ou plutôt de l'organisation des "nations dites unies", comme l'a baptisée le Président de Gaulle. Il faut avouer qu'il n'y pas d'union sincère entre les Membres de cette Organisation. Et c'est peut-être l'une des raisons pour lesquelles on se trouve toujours en état d'alerte, où, comme le disait Jésus concernant notre époque: "Les gens seront frappés de terreur dans l'attente de ce qui surviendra demain. Les nations seront perplexes et ne sauront quoi faire."

Tous les moyens pour tenir les nations en accord ont donc été utilisés, et ils n'ont pas donné le résultat désiré. Que reste-t-il alors?

L'histoire nous enseigne que c'est la force de la RÉVÉLATION dont l'exemple sublime a été fourni par Jésus, qui a uni deux camps aussi opposés que celui des adeptes de la Bible, et celui des adeptes de César. Que se passa-t-il? Quel courant traversa alors l'esprit tordu du Romain civilisé pour que, tel un aimant, il soit attiré par le camp des adeptes de la Bible? Nous n'en savons rien. Tout ce que nous savons, c'est que le Romain fut "aimanté" par Jésus.

En science, nous connaissons un phénomène semblable. Faites traverser un fil tordu - un enroulement - par le courant électrique, et vous voyez que ce fil tordu se transforme en aimant. Comment cela s'est-il produit? Que s'est-il passé à l'intérieur de ce fil tordu? Et puis, qu'est-ce que le courant électrique? Nous n'en savons rien. Mais nous constatons cette aimantation, et, tout en ne comprenant pas exactement son mécanisme, nous disons que pour aimanter un fil tordu il faut le faire traverser par le courant électrique. Il en va de même dans le domaine spirituel, où pour aimanter un individu, il faut que son esprit soit traversé par le courant spirituel dégagé par le phénomène appelé RÉVÉLATION.

L'histoire abonde en exemples illustrant ce genre d'aimantation, mais cette aimantation était à petite échelle à l'intérieur d'un pays ou de quelques pays. Or, aujourd'hui, il nous faut une aimantation à l'échelle mondiale. Il faut donc, comme dans le passé, que les esprits soient traversés par le courant spirituel dégagé par le phénomène de la révélation.

Mais où trouver cette révélation? L'histoire nous en parle-t-elle? oui, la même histoire, qui si injustement a passé sous silence la révélation de Jésus pendant plus de cent ans, abonde en références concernant la révélation de notre ère, j'entends la révélation de Bahá'u'lláh.

Les rois, les ministres, les chefs spirituels et les savants ont parlé de Lui. Et c'étaient ses paroles que j'ai citées au début de cet article, paroles pour lesquelles il a passé quarante ans en prison. Et c'est dans cette prison de Saint-Jean-d'Acre qu'Edward Browne, le célèbre professeur de l'Université de Cambridge, a pu le voir pendant quelques minutes. Permettez-moi, à titre d'exemple et de référence historique, de vous citer ce que ce professeur a, écrit sur cette visite:

"Je me prosternais, écrit-il, devant Celui qui fait l'objet d'une vénération et d'un amour auxquels les empereurs aspirent en vain. Une voix douce et pleine de courtoisie me pria de m'asseoir et continua: "Loué soit Dieu que tu sois parvenu au but. Tu es venu voir un prisonnier et un exilé. Nous ne désirons que le bien des nations, cependant on Nous suspecte d'être un élément de désordre et de sédition, digne de la captivité et du bannissement."

"Que toutes les nations deviennent une dans la Foi, et que tous les hommes soient des frères, que les liens d'affection et d'unité entre les enfants des hommes soient fortifiés, que la diversité des religions cesse et que les différences de races soient annulées. Quel mal- y a-t-il à cela? Cela sera malgré tout. Ces luttes stériles, ces guerres ruineuses passeront et la plus grande Paix viendra. N'avez-vous pas besoin de cela en Europe? N'est-ce pas ce que le Christ a prédit?"

"Cependant nous voyons les souverains et les chefs d'État gaspiller plus volontiers leurs trésors en moyens de destruction de la vie humaine, qu'en ce qui conduirait l'humanité au bonheur. Ces luttes, ces massacres, ces discordes doivent cesser et tous les hommes doivent former une seule famille."

Et Bahá'u'lláh finit par cette sublime parole "Que l'homme ne se glorifie pas d'aimer son pays, mais plutôt le genre humain!"

Et je voudrais terminer par une autre référence, non moins historique, celle de la Reine Marie de Roumanie, la première reine qui a accepté la Foi mondiale baha'ie, comme ce fut le cas pour l'Empereur Constantin face au Message du Christ. Voilà ce qu'elle écrit:

"L'enseignement baha'i apporte la paix et la compréhension. C'est comme un vaste rassemblement de tous ceux qui ont cherché longtemps une formule d'espérance. L'enseignement baha'i accepte tous les grands prophètes du passé; il ne détruit aucune croyance et laisse les portes grandes ouvertes.

"Attristée par les dissensions continuelles entre les croyants de plusieurs confessions et lassée par leur intolérance les uns envers les autres, j'ai découvert dans l'enseignement baha'i le véritable esprit du Christ, qui a été si souvent nié et méconnu.

"Unité, au lieu de lutte, espoir au lieu de condamnation, amour au lieu de haine, et une raison magistrale de rassurer les hommes: L'enseignement baha'i apporte la paix de l'âme et l'espoir pour les coeurs. Aujourd'hui, plus que jamais, au moment où le monde doit faire face à une crise d'égarement et d'insécurité, nous avons à demeurer fermes dans la Foi, cherchant ce qui peut relier les êtres au lieu de les faire s'entre-déchirer.

"A ceux qui sont à la recherche de la lumière, l'enseignement baha'i offre une étoile qui les guidera vers une profonde compréhension, une assurance, la paix et la bonne volonté parmi les hommes."


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1.3. Le vrai visage de la vie

La vie, dans tous les domaines, est due à l'équilibre. La rupture de l'équilibre entraîne la mort. Dans le domaine minéral, un corps prend naissance, autrement dit, sa vie commence quand s'établit l'équilibre dans la proportion des éléments qui le composent. Ainsi, par exemple, le sel marin, si nécessaire pour l'organisme, prend naissance à partir du moment où s'établit l'équilibre dans la proportion du chlore et du sodium qui le composent. Rompez cet équilibre, non seulement vous n'avez plus le sel marin si essentiel pour notre existence, mais vous avez du poison qui tue.

Dans le domaine végétal, la plante pousse, autrement dit, elle vit tant qu'il y a équilibre entre les éléments nécessaires pour sa croissance, et elle meurt lorsque cet équilibre est rompu.

Il, en est de même dans le monde animal où la vie se manifeste par les cinq sens, grâce à l'équilibre des éléments correspondants. La rupture de l'équilibre entraîne la perturbation dans le fonctionnement des cinq sens, pour aboutir finalement à l'arrêt de ce fonctionnement, autrement dit la mort.

Dans le monde humain la vie est également due à l'équilibre; mais, cette fois, il ne s'agit pas seulement de l'équilibre entre les éléments matériels qui constituent son corps, car, tout en réalisant cet équilibre, on constate que l'homme ne jouit pas pleinement de la vie, mais qu'il continue à souffrir de bien des maladies.

Parmi ces maladies, à titre d'exemple, citons les maladies dites psychosomatiques, à l'origine desquelles ne se trouvent ni microbes, ni bactéries, ni tumeurs, et pourtant les personnes atteintes de ces maladies souffrent physiquement, l'une de l'estomac, comme si elle avait un ulcère, l'autre des intestins, la troisième du foie. C'est le cas des gens qu'on appelle, dans le langage courant les grincheux, c'est-à-dire les gens qui cherchent toujours un sujet de mécontentement, voyant tout en noir, et ne pensant qu'à ce qui pourrait leur arriver, sans se soucier des autres qui sont pourtant des hommes comme eux.

C'est par la satisfaction simultanée et judicieuse des besoins du corps et de l'esprit que s'établit cet équilibre qui en définitive assure la vie de l'homme dans le vrai sens du mot. C'est cet équilibre qui nous manque aujourd'hui. Une grande revue médicale allemande écrit:

"Ce que l'homme a acquis grâce à la science, il a trois chances sur une de le perdre à cause de ce qui menace l'équilibre de son corps et de son esprit."

Il s'agit donc de rétablir l'équilibre du corps et de l'esprit par la satisfaction simultanée de leurs besoins. Or les besoins du corps, la science nous apprend comment il faut les satisfaire. Cette même science n'est pas en mesure de satisfaire les besoins de l'esprit, car elle n'arrive pas à changer ce que couramment on appelle l'état d'esprit.

La question qui se pose est donc celle-ci: De quel moyen l'homme dispose-t-il pour changer son état d'esprit ou plus exactement pour satisfaire les besoins de son esprit?

Afin de répondre à cette question, voyons d'abord quels sont ces besoins de l'esprit.

Ces besoins sont nombreux. Nous allons citer les deux principaux:

1) Le besoin d'aimer et d'être aimé;

2) Le besoin de pardonner et d'être pardonné.

En ce qui concerne le premier besoin, "s'il n'est pas satisfait, si l'homme n'aime pas et ne se sent pas aimé, s'il hait et s'il se sent haï, cela provoque des changements organiques et de véritables maladies", déclare l'éminent savant spiritualiste Alexis Carrel. De son côté, un autre Prix Nobel, et cette fois un savant matérialiste, Jean Rostand, attribue à la même cause "beaucoup de névroses et de déficiences mentales". Tous les savants" qu'ils soient spiritualistes au matérialistes, sont unanimes sur le fait que l'affection et l'amour constituent un besoin fondamental de la "nature intime" de l'homme au point où ce besoin insatisfait le rend malade. Ceci sur le plan individuel. Quant aux conséquences sociales, on attribue la délinquance juvénile et la désunion conjugale, ces deux fléaux du XXe siècle, à l'insatisfaction de ce besoin de l'esprit, c'est-à-dire au manque d'affection.

Un autre besoin de la "nature intime" de l'homme ou de son esprit, c'est le fait de pardonner et d'être pardonné.

Que la capacité de pardonner soit un besoin, cela découle de ce que la capacité d'aimer est un besoin, car pour arriver à aimer il faut être en mesure de pardonner, étant donné que celui qui ne peut pas pardonner ne peut pas aimer.

Celui qui est capable de comprendre est capable de pardonner. Et il en est de même en ce qui concerne l'affection et l'amour: Qui dit comprendre dit aimer.

Tout revient donc à nous comprendre les uns les autres. L'incompréhension entraîne les malentendus, le chaos et la décadence. Les pages de l'histoire en portent témoignage.

La civilisation Babylonienne s'effondra parce que les Babyloniens cessèrent de se comprendre, ce que la Bible rapporte en termes imagés, en disant qu'à un moment donné ils se sont aperçus qu'ils ne parlaient pas la même langue. Et ceci malgré tout leur progrès scientifique que la Bible rapporte également, en disant qu'ils allaient atteindre lie ciel par leur tour de Babel, ce que nous réalisons actuellement par nos fusées et satellites artificiels.

Le phénomène d'effondrement se produisit à Rome comme à Babylone, raison pour laquelle nos ancêtres l'avaient baptisée Babylone moderne.

Selon le témoignage des historiens la plupart des civilisations ont succombé à ce mal intérieur, et non par suite d'invasions. Elles succombèrent parce que les gens ne se comprenaient pas, ne s'entendaient pas.

Pourquoi aller chercher trop loin la paille dans les yeux des Babyloniens ou des Romains, ou d'une manière générale des anciens? Pourquoi ne pas voir la poutre dans nos propres yeux? Avons-nous un langage commun? A parler, franchement, sommes nous d'accord sur le mot franchise, par exemple? Ce qui pour les uns est la grossièreté même, pour les autres est la franchise. Sommes-nous d'accord sur le mot loyalisme? Ce qui pour les uns est le fanatisme même, pour les autres est le loyalisme.

Sommes-nous d'accord sur le mot paix? Je ne le crois pas, étant donné que chaque fois qu'il y a une ,guerre, c'est pour avoir la paix que les deux belligérants font la guerre ! Avouons que nous n'avons pas un langage commun; nous ne nous comprenons pas. Et à vrai dire, la majeure partie de nos ennuis, déceptions et échecs viennent de ce que nous ne nous comprenons pas, ou bien que nous nous comprenons mal.

Ce qui est regrettable, c'est qu'en principe non seulement on ne se comprend pas, mais on ne se donne même pas la peine de tenter de se comprendre, on n'y pense pas. D'où le chaos, la confusion, la "Babel" actuelle, le mot "Babel" signifiant précisément le chaos et la confusion. Il est bien temps que nous nous efforcions de nous comprendre les uns les autres.

Cet effort de compréhension doit d'abord commencer sur le plan familial.

L'homme doit comprendre avant tout sa femme, la comprendre quant à ses idées, facultés et capacités afin de contribuer à leur épanouissement. La femme aussi doit comprendre son mari, et toujours du même point de vue. La réciprocité est essentielle, car c'est de cette façon que l'entente est réalisée.

Nous avons dit que comprendre sa femme veut dire comprendre ses idées, facultés et capacités, afin de contribuer à leur épanouissement. Et quand peut on dire qu'on a compris sa femme? Lorsque ses capacités et facultés sont épanouies, l'homme sent combien ce qui lui manquait est complété. On peut donc dire que l'homme a compris sa femme s'il est arrivé à sentir qu'elle le complète, que sans elle il est incomplet, qu'il n'est pas ce qu'il est, sentiment qu'un mari a si bien exprimé le jour où à l'anniversaire de sa femme, il lui dit: "Je t'aime non seulement pour ce que tu es, mais pour ce que je suis avec toi".

Mais le fait de se sentir complété l'un par l'autre exclut tout sentiment de supériorité et implique l'égalité. C'est pourquoi le sentiment d'égalité de l'homme et de la femme doit les inspirer dans la vie conjugale. Et ce sentiment présente une telle importance dans la foi baha'ie, qu'il en constitue l'un des principes sacrés.

Nous arrivons donc à cette conclusion que c'est par un effort de compréhension mutuelle, inspiré du sentiment d'égalité, qu'on arrive à avoir une vie harmonieuse et bienheureuse au sein de la famille.

Mais dans une famille il n'y a pas que le mari et la femme, il y a encore l'enfant. Les parents doivent le comprendre afin de rendre la vie familiale encore plus agréable et plus délicieuse, rien que par la présence de l'enfant.

Mais qu'est-ce que cela veut dire, comprendre l'enfant? Une fois de plus, cela veut dire arriver à prendre conscience des capacités et des facultés de l'enfant, afin de contribuer à leur épanouissement.

Mais comment peut-on apporter cette contribution, si ce n'est par l'éducation et l'instruction? C'est pour cela que l'éducation et l'instruction de l'enfant constituent, selon les enseignements baha'is, le devoir sacré des parents, aussi sacré que le baptême chez les chrétiens. Et toute négligence à cet égard est considérée comme un péché impardonnable.

Les parents ne doivent pas croire que c'est à l'école que l'enfant reçoit son éducation (acquisition des qualités morales). Et ceci surtout de nos jours où, à l'école, on ne s'occupe que de l'instruction de l'enfant. Il est également de leur devoir de s'intéresser à l'éducation de l'enfant, et ceci surtout dans le cas où à l'école l'enfant ne reçoit pas l'encouragement dont il a besoin.

Un jour, un petit écolier de six ans rapporte à ses parents que son maître le trouve trop borné pour l'éduquer.

- Mon enfant n'est pas un imbécile je l'éduquerai moi-même, dit la mère. Elle tint parole. L'enfant devint Edison, cet homme qui a éclairé le monde.

Tous les enfants ne sont pas Edison pour éclairer le monde - pourrait-on nous dire.

Mais tout enfant déclarent les Écritures baha'ies - est une lampe pour la maison. Il a tout ce qu'il faut pour "éclairer" la maison, à la condition que les parents l' "allument", à la condition que les parents se soucient autant de ses qualités morales (éducation) que de ses notes en histoire et géographie (instruction).

C'est donc par l'effort de compréhension de la part des parents, effort stimulé par le caractère sacré de l'éducation et de l'instruction, que les capacités latentes de l'enfant se révèlent, apportant ainsi une lumière de plus à l'ambiance familiale, et permettant par là de mieux voir le vrai visage de la vie.

Mais n'oublions pas que ce n'est pas en famille que nous passons la majeure partie de notre temps. C'est plutôt en dehors de la famille, en contact avec notre prochain. Si donc nous cherchons à avoir une vie facile et agréable à vivre, si nous voulons voir le vrai visage de la vie, non seulement au sein de la famille, mais également en dehors de la famille, nous devons nous efforcer de comprendre notre prochain.

Mais que signifie comprendre notre prochain?

Une fois de plus, cela signifie prendre conscience de ses facultés et capacités latentes pour contribuer à leur épanouissement.

Mais comment peut-on y arriver si ce n'est en le fréquentant, en lui parlant, en entrant en dialogue avec lui, ce fameux dialogue, dont on nous parle aujourd'hui seulement, alors que pour les baha'is c'est un commandement sacré: "Fréquentez les gens de toutes les religions dans la joie et la sincérité", écrivait Bahá'u'lláh il y a plus de cent ans.

"Mais on ne fréquente pas les gens que Dieu ne fréquente pas, que Dieu rejette", disent certains.

Un tel commandement implique donc qu'on croit que Dieu ne rejette personne, que Pour Dieu, tous ses enfants sont égaux. Ce qui constitue pour les baha'is un principe sacré, principe Connu sous le nom de l'unité du genre humain.

Or, l'homme est homme par sa capacité de comprendre. Par conséquent, dire que les hommes sont égaux, c'est dire que tous ont la môme capacité latente de comprendre ce qui est bon et ce qui est mauvais. Moralement parlant, personne n'a le droit de croire qu'il possède plus de capacités latentes, et par conséquent qu'il est supérieur aux autres. Il doit croire qu'il est comme les autres et ceci à un tel point que les Écrits baha'is disent que si jamais du point de Vue moral il voit un certain défaut, chez Son Prochain, il doit penser que c'est lui-même qui a ce défaut, sinon il ne S'en serait pas aperçu. S'il croit que les autres sont des menteurs, c'est que lui-même a ce défaut.

Bernard Shaw dit: "Le malheur du menteur ce n'est pas tellement le fait qu'on ne le croit pas c'est plutôt le fait que c'est lui qui ne croit pas les autres".

Il faut cultiver ce sentiment suivant lequel on est comme les autres, et que Dieu ne nous a pas favorisé par rapport aux autres en nous accordant Plus de qualités morales qu'aux autres, et que pour Lui "Gus sommes tous égaux, sentiment inspiré par la Prise de conscience du Principe de l'UNITÉ DU GENRE HUMAIN.

Ce Principe semble difficile à appliquer dans la vie courante, où l'on a l'habitude de considérer toujours les autres comme responsables de ce qui nous arrive. Souvent même il semble impossible d'y croire, comme la télévision semblait impossible avant qu'on ne l'aie vue. Mais là, télévision on l'achète, on voit et on y croit.

Tandis que cette façon de penser est une expérience que chacun doit vivre personnellement. C'est l'expérience la plus merveilleuse qu'on puisse vivre. Car non seulement elle nous permet de voir nos propres défauts, pour nous efforcer de nous en débarrasser, de nous corriger, de nous améliorer, ce qui est le premier fruit de la prise de conscience de l'unité du genre humain, mais cette expérience a bien d'autres fruits, parmi lesquels citons les deux suivants:

L'un de ces fruits est l'entente générale. En effet, si on a le sentiment qu'aux yeux du Père tous ses enfants sont égaux, qu'Il les aime tous, étant donné qu'en chacun d'eux Il connaît des qualités qui restent latentes pour les autres, et que toute l'humanité n'est qu'une seule famille, un tel sentiment crée l'entente parmi tous les membres de la grande famille humaine, comme il crée l'entente au sein d'une famille malgré la différence de caractère et de tempérament des enfants de cette famille.
Ne voyons-nous pas qu'au sein d'une même famille deux enfants qui ont des tempéraments contradictoires s'entendent tout de même très bien, au moment même où, avec cette divergence de caractère, hors de l'ambiance familiale, ils seraient devenus des ennemis? Mais dans l'ambiance familiale, ils s'entendent bien. Pourquoi? Parce qu'ils ont le sentiment qu'aux yeux de leur père ils sont égaux, que leur père les aime tous les deux, étant donné qu'en chacun d'eux il connaît des qualités qui restent latentes à leurs yeux. Si cette unité, aux yeux du père de famille, est à l'origine de l'entente des enfants de la famille, par extension l'unité aux yeux du Père de la grande famille humaine sera la cause de l'entente de tous les enfants de cette famille.

Un autre fruit de la prise de conscience de l'unité du genre humain, autrement dit du sentiment que le genre humain ne constitue qu'une seule famille,

c'est que chacun pensera à assurer les besoins (spirituels et matériels) de l'autre, à nourrir (spirituellement ou matériellement) son prochain, et par voie de conséquence, son Prochain pensera à le nourrir à son tour, et en définitive tous les deux seront bien servis. Comme au sein d'une famille où le mari travaille pour bien nourrir sa femme et la femme aussi travaille (à la maison) pour bien nourrir son mari. Chacun passe à l'autre le produit de son labeur sans ,le monopoliser à sa propre personne. De cette façon' les membres de la famille sont bien servis, chacun jouit pleinement de la vie, en créant un heureux ménage qu'on appelle un petit paradis.

Rien ne saurait mieux illustrer cette façon de penser, ou plus exactement cette expérience merveilleuse, que cette histoire que nous a racontée M. Faizi, Main de la Cause en Terre Sainte (Instructeur éminent de la Foi baha'ie):

Deux hommes se rencontrent. L'un demande à l'autre:

- "Quelle est la différence entre le Paradis et l'enfer?

Il n'y en a pas, répond l'autre.

- Comment il n'y en pas? Tout de même il y a des choses qu'on trouve au paradis et qu'on ne trouve pas en enfer.

- Mais si, tout ce qu'on trouve au paradis se retrouve en enfer.

- Alors il y a une différence entre les habitants du paradis et de l'enfer,

- Non, il n'y a pas de différence entre eux. Ils sont pareils. Et ils se ressemblent même dans les moindres détails. Ainsi, par exemple aussi bien le bras des uns que celui des autres n'a pas de coude, de sorte qu'ils ne peuvent pas plier les bras, et par conséquent ne peuvent pas se servir eux-mêmes.

- Alors qu'est-ce qui fait que les habitants du paradis sont si heureux et que ceux de l'enfer sont malheureux?

C'est que, mis devant les délices qui leur sont destinées, Ils n'agissent pas de la même façon. L'habitant du paradis prend ces délices dans sa main, il sait qu'il ne peut pas plier son bras pour porter ces délices dans sa bouche, mais il sait que la bouche de son voisin est comme sa bouche, de sorte qu'il peut tourner son bras pour porter ces délices dans la bouche de son voisin, et comme tous les habitants du paradis pensent de la même façon, ils sont tous servis mutuellement l'un par l'autre.

Quant à l'habitant de l'enfer, pour lui, les autres ne comptent pas; il n'y a que lui qui compte. Il prend donc les délices dans sa main. Il ne peut pas plier son bras pour les porter dans sa bouche, et il ne veut pas tourner son bras pour les porter dans la bouche de son voisin. Et comme tous pensent et se comportent de cette façon, le résultat est que personne n'est servi, et tous crèvent de faim."

La morale de l'histoire est que le monde est fait comme ça, que c'est une loi: pour être nourri il faut nourrir les autres, pour être aimé il faut aimer les autres. La prise de conscience de cette loi qui s'exprime en trois mots: unité de tous, nous fait découvrir un monde d'intimité et de délices, ce que symboliquement on appelle le Jardin des Délices ou le Paradis. Cette prise de conscience nous fait revivre l'expérience la plus merveilleuse qu'on puisse vivre.

C'est à tenter cette expérience que la foi baha'ie vous invite.


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1.4. La Foi et l'Amour

Les Japonais disent: "Une image vaut dix mille mots". Si c'est ainsi, ne vaut-il pas mieux illustrer, autant que possible, dix mille mots par une image. C'est ce que je vous demande de me permettre de faire dès le début.

Un fermier fournissait le lait d'un ménage. Au début, tout allait bien. Mais avec le temps, la femme qui servait d'intermédiaire pour livrer le lait commença à y ajouter de l'eau. La maîtresse de maison s'en apercevait, mais tant qu'il y avait peu d'eau dans le lait, elle ne disait rien. Or, la quantité d'eau augmentait de plus en plus jusqu'au jour où la maîtresse de maison, ne voyant que de l'eau, s'écria:

"Mais dites donc, c'est de l'eau que vous m'apportez aujourd'hui."

"Oh, pardonnez-moi, Madame, j'ai oublié d'y ajouter du lait", répondit la livreuse.

Cette anecdote illustre bien ce qu'on constate quand on étudie l'histoire des civilisations des peuples. En effet, d'âge en âge, à l'heure la plus critique pour un peuple, nous voyons apparaître un homme génial, un Prophète (ou "Mutant" pour utiliser le terme des historiens matérialistes). Ce prophète apporte le "Lait d'Amour". Il instille l'Amour dans le coeur des hommes, qui s'unissent pour fonder une nouvelle civilisation. Et cette Nouvelle Civilisation, cet "enfant nouveau-né" grandit, s'épanouit tant que le lait reste pur.

Mais avec le temps, on y ajoute de l'eau sous forme de toutes sortes de rites et de superstitions. Alors commence l'affaiblissement de l' "Enfant" ou, si vous voulez, la décadence de la Civilisation. Cette décadence aboutit finalement à l'agonie lorsque, de la religion, il ne reste qu'un ensemble de rites et de superstitions. Et c'est à l'heure de l'agonie que vient un autre "Fermier" avec le "Lait Pur d'Amour" et le processus recommence.

Ainsi, par exemple, vient un Abraham avec le "Lait Pur d'Amour". Une nouvelle civilisation prend naissance. Elle s'épanouit tant que le "Lait d'Amour" reste pur; c'est-à-dire tant qu'on voit la FOI dans l'AMOUR et non pas dans les rites et les cérémonies. Mais, à partir du moment où l'on voit la FOI dans l'observance des rites et l'attachement aux cérémonies, autrement dit, à partir du moment où le "Lait d'Amour" perd sa pureté, l' "Enfant" commence à faiblir: la décadence de la civilisation commence et finit par l'agonie.

Une fois de plus, c'est à l'heure de l'agonie que vient un autre "Fermier" avec le "Lait d'Amour". C'est le tour de Jésus-Christ. Et le même processus recommence. Mais cette fois, c'est une civilisation sans précédent qui est fondée, et une décadence sans précédent qui est enregistrée. Décadence sans précédent, parce que les guerres les plus meurtrières ont eu lieu précisément parmi ceux qui se disaient Chrétiens. D'où la nécessité du renouvellement du "Lait d'Amour" afin de rebâtir une nouvelle civilisation.

Ce "Lait d'Amour", déclarent solennellement les Baha'is, est aujourd'hui apporté par la Foi Baha'ie. Et c'est là-dessus que je voudrais dire quelques mots.

Voyons d'abord ce qu'il faut entendre par l' "Amour". Cherchons à COMPRENDRE ce qu'est l'AMOUR. Est-ce un commandement religieux auquel il faut obéir sans en comprendre la raison? Alors l'homme d'aujourd'hui ne le suit pas, car, pour lui, la FOI doit être intelligible. Il y a 2000 ans, quand il traversait son enfance, il acceptait, il obéissait, peut-être dans l'espoir d'une récompense au paradis. Mais aujourd'hui, l'homme entre dans le stade de sa MATURITÉ et, avant tout, il veut COMPRENDRE, comprendre pourquoi il doit aimer. S'il le comprend, alors, même si la récompense de cet amour est le feu de l'enfer et non pas les délices du paradis, il accepte, il AIME. C'est comme lorsqu'il comprend pourquoi il doit se lever contre les agresseurs de son pays: vaillamment, comme partisan ou résistant, il se jette dans ce feu infernal qu'est la guerre. C'est pour cela qu'on a dit COMPRENDRE c'est AIMER. Et il veut comprendre parce qu'il est entré dans le stade de sa maturité.

Or, tous les enseignements baha'is sont précisément basés sur cette maturité de l'homme à notre époque, et il est temps que l'on en prenne conscience. C'est pour cela qu'avant de parler de l'amour, essayons de comprendre ce qu'est l'amour.

Les enseignements baha'is disent que l'AMOUR est l'essence même de l'homme, autrement dit, que l'homme quant à son essence est fait d'AMOUR. C'est comme un temple en béton, il est fait essentiellement de béton: mais sans ciment. le temple ne tient pas, il s'écroule. Sans l'amour, l'homme ne tient pas non plus; il s'écroule, il meurt; pas brusquement, mais lentement et sûrement. Ce qui fait qu'inconsciemment, l'homme est à la recherche de l'amour. Il va voir des films d'amour. Il écoute les chansons d'amour, il lit les romans d'amour. Mais il échoue toujours en amour. Pourquoi? Parce que ce qu'il prend pour l'amour n'est que pseudo-amour.

C'est comme un assoiffé qui court vers un mirage et souffre toujours de la soif. L'explication en est simple. En effet, toute notre société étant basée sur l'idée d'un échange profitable, l'homme applique cette idée en matière d'amour, et il ne veut pas donner son affection tant qu'il n'en reçoit pas.

C'est comme une fontaine dont le réservoir est rempli. Cette fontaine pourrait-elle recevoir de l'eau avant de faire jaillir la sienne? Non. Il en est de même en ce qui concerne l'amour. L'homme est pour ainsi dire rempli d'amour par sa création même. S'il n'en donne pas, il n'en reçoit pas. Mais quand il en donne, il ne peut pas éviter d'en recevoir. C'est ce fait que l'homme doit connaître, et il ne veut pas le connaître. Il est comme un commerçant méfiant, qui ne donne ce qu'il a qu'en échange d'un équivalent. Qu'il donne, et il recevra. L'homme ne veut pas être le premier à donner et, par conséquent, il n'est pas aimé. Il échoue en amour.

Ceci dit, voyons ce qu'il fait pour tenter d'être aimé, pour recevoir l'amour. Il a recours à tous les artifices. Si c'est une femme, elle prend soin de son corps, de sa toilette, elle se maquille. Si c'est un homme, il cherche la popularité, la richesse. Dans les deux cas, il s'agit d'un mélange de popularité et de sex-appeal (L'art d'aimer", par E. Fromm). Dans les deux cas, il a recours à tout, sauf au courage d'aimer, qui est la seule façon pour arriver à être aimé.

Remarquons qu'il y a des cas où l'homme n'attend pas d'être aimé pour aimer (aimer bien entendu selon sa conception d'amour). C'est lorsqu'il rencontre une personne qui lui plaît, un bon objet à aimer. Comme si aimer signifiait s'approprier. En tout cas, il faut qu'il découvre ce bon objet à s'approprier.

Et il attend la découverte de ce "bon objet" pour aimer, ignorant que préalablement il doit apprendre à aimer pour arriver à démontrer qu'il sait aimer. C'est comme lorsque quelqu'un prétend savoir peindre, et demande qu'on lui laisse découvrir un "bon objet" pour qu'il montre qu'il sait peindre. Cet homme ne perd-il pas son temps? Arrivera-t-il un jour à peindre? Sûrement pas. Il en est de même en amour. L'homme qui passe son temps à attendre la découverte d'un "bon objet" pour l'aimer, sans apprendre préalablement "l'art d'aimer", échoue toujours en amour ("L'art d'aimer", par E. Fromm).

En quoi consiste cet "art d'aimer"? Selon les enseignements baha'is, tout "l'art d'aimer" pourrait se résumer en deux mots: "devenir tel qu'on a été créé", revenir à son essence qu'est l'amour comme nous l'avons dit dès le début. Car l'homme par sa création même est un être aimant. Il a été créé pour aimer, comme l'aimant a été créé pour attirer. Si un objet épais s'interpose, l'aimant n'attire plus, n'est plus aimant, n'aime plus. Il en est de même en ce qui concerne l'homme qui est un aimant spirituel. S'il n'aime pas, s'il n'est pas aimant, c'est que des voiles se sont interposés. Et "l'art d'aimer" consiste à déchirer ces voiles pour devenir SOI-MÊME; tel qu'on est en réalité, par sa création même.

Le problème d'amour n'est donc pas un problème d'échange profitable de sentiments, pas plus qu'un problème de recherche de sex-appeal, ni celui de la découverte d'un "bon objet," qui plaît. C'est un problème d'attribut, de faculté innée à manifester.

Une image illustre bien cette idée d'attribut à manifester. Pour une fleur, l'attribut essentiel est son parfum.

Elle donne son parfum aussi bien à celui qui en prend soin qu'à la main qui l'écrase, parce que répandre un parfum est son attribut et cet attribut se manifeste tant qu'il n'y a pas de voile interposé. Il en est de même en ce qui concerne l'homme. Son attribut essentiel est l'amour. Et il doit le manifester aussi bien à l'égard de celui qui prend soin de lui que face à un ennemi. Je dis "ennemi" et je dois rectifier.

En effet, dans le langage baha'i, on évite autant que possible le mot "ennemi", car parler de l'amour pour l'ennemi avec le sentiment que c'est quelqu'un qui cherche à nous nuire, c'est faire un compromis avec ses sentiments et ce compromis est de l'hypocrisie. Tandis que si l'on considère ce même soi-disant ennemi comme quelqu'un qui, par son comportement, nous fournit l'occasion de nous entraîner au pardon, à la tolérance, à la patience, comme quelqu'un qui nous donne des leçons particulières d'entraînement à ces vertus, il devient tout naturel et sincère d'aimer cet "entraîneur bénévole".

Ceci dit, revenons à notre conception de l'amour. Du fait que l'amour est un ATTRIBUT de l'Homme, il découle qu'il est essentiel qu'il soit doté du caractère UNIVERSEL; autrement dit, que si l'on aime, on doit aimer toute l'humanité, sans distinction de race, de classe, d'origine religieuse, de pays de résidence et en toutes circonstances, comme le rayonnement du soleil, qui se fait pour tous et partout.

Un tel amour ne peut se manifester que par l'application d'un certain nombre de principes que je voudrais mentionner et qui, chez les Baha'is, ont un caractère sacré.

Le premier de ces principes baha'is, par l'application duquel on manifeste le caractère universel de son amour, c'est le principe de l'UNITÉ DU GENRE HUMAIN. En effet, si notre amour est universel comment pouvons-nous le manifester si ce West qu'en aimant tous les hommes tels qu'ils sont et non pas tels que nous voulons qu'ils soient.

Qu'ils soient croyants ou soi-disant incroyants, nous devons les accueillir tous, les bras ouverts. Alors pouvons nous admettre qu'il y en a que Dieu rejette, et que nous devons accueillir? Ça ne serait pas logique. On arrive donc à cette conclusion que Dieu aime tous Ses enfants, qu'à Ses yeux tous ne font qu'UN. Ce principe connu sous le nom du Principe de l'Unité du Genre Humain efface la frontière qui existait dans le passé entre les deux familles: la famille des sauvés et la famille des rejetés, pour les unir en une seule famille, la famille humaine.

Ce principe nous interdit de porter le moindre jugement sur qui que ce soit. D'abord parce qu'on ne connaît pas la fin, étant donné que les Saül - renégat - deviennent des Saint Paul, et les Judas -apôtre finissent par la trahison. Et puis, nous voyons aujourd'hui beaucoup de personnes qui se disent incroyantes mais qui, par leurs actes, peuvent servir d'exemple à ceux qui se disent croyants.

Un second principe par l'application duquel on manifeste le caractère universel de l'amour c'est le Principe de l'Unité des Prophètes.

En effet, si nous aimons tout le monde, nous devons aimer d'un amour égal les Bien-Aimés de tous les peuples. Or ces Bien-Aimés, vénérés depuis des milliers d'années, sont les Moise, les Bouddha, les Jésus, les Muhammad, etc. Et je dis bien "aimer d'un amour égal" sans les comparer les uns aux autres comme supérieurs ou inférieurs, car comparer de cette façon, ce n'est plus aimer.

Essayez de comparer la beauté d'une femme avec celle d'une autre femme. Vous aurez beau vous efforcer de la convaincre que vous l'aimez, vous n'y parviendrez pas, à, moins d'être psychologue comme ce mendiant qui demandait la charité à une dame sortant d'un institut de beauté.

"Mais voyons, lui dit-elle, je vous ai déjà donné en entrant."

"Excusez-moi, fait le bonhomme, vous êtes devenue tellement plus belle que je ne vous ai pas reconnue." Inutile de dire que le bonhomme a reçu une seconde pièce. Le compliment était bien à propos et juste; car il comparaît la femme à elle-même, qui indiscutablement était devenue plus belle.

Il en est de même en ce qui concerne les Messagers de Dieu lorsqu'on les compare du point de vue de ce qu'ils ont révélé en conformité avec la réceptivité de leurs contemporains. Si, par exemple, nous disons que Jésus était plus grand que Moise, c'est un compliment que nous adressons à Moise; car Jésus est le retour de Moise, ce qui est confirmé par le Nouveau Testament (voir Actes 15/16 où il est parlé du retour du Seigneur en la personne de Jésus).

Avec une telle façon de penser, un Baha'i aime les Fondateurs des Religions autant que leurs adeptes, et d'un amour égal puisque tous à ses yeux ne font qu'UN. Cette unité des Prophètes entraîne comme conséquence l'Unité des Religions. En effet, si c'est toujours la même Personne qui parle, Sa Parole est la même. Autrement dit, toutes les Religions sont les mêmes; avec cette nuance - qu'il faut les considérer comme les différents stades d'une même Religion, la Religion de Dieu toujours en évolution, et les différents Livres exposant ces Religions, comme les différents chapitres d'un même Livre: le Livre de Dieu. Indiscutablement, il y a des différences entre ces chapitres successifs. Mais ces différences ne concernent que le côté matériel de la vie, tel que le mariage, le jour du repos, etc. Mais sur le plan spirituel, ils sont identiques, tous enseignant l'amour du prochain. A ce point de vue, le meilleur exemple est fourni par l'Ancien et le Nouveau Testament.

Pour le premier, l'inobservance du sabbat et la non-circoncision constituent deux cas de condamnation à mort. Pour le second, tous les deux sont abolis.

Ce qui n'a pas empêché nos ancêtres de considérer les deux comme deux chapitres d'un même Livre le Livre de Dieu (la dénomination "Bible" signifiant Livre). Ce principe de l'unité des Religion, fait qu'on considère les adeptes des différentes religions comme nos coreligionnaires, comme nos frères dans la Foi. Et son application, une fois de plus, manifeste le caractère universel de l'amour.

Un troisième principe par l'application, duquel on démontre qu'on aime toute l'humanité, c'est l'accord de la Religion avec la Science et la Raison. En effet, l'une des principales causes des différends et des désaccords entre les hommes, c'est l'attachement d'un grand nombre de croyants à certains rites et formes extérieures que la Science et la Raison rejettent. Ainsi, par exemple, les ZOROASTRIENS continuent d'adorer le soleil comme Dieu ce qui est contraire à la Science et à la Raison et de plus, dresse contre eux les adeptes des autres religions. De même les Chrétiens, en prenant l'hostie, continuent de croire qu'ils mangent "réellement et substantiellement" la chair de Jésus ce qui révolte les savants et dresse contre eux les adeptes des autres religions.

Par conséquent, tant qu'il y a désaccord entre la Religion d'un côté et la Science et la Raison de l'autre, la désunion actuelle persiste et ceux qui contribuent à la réconciliation de la Religion avec la Science et la Raison, travaillent pour l'entente universelle, manifestant ainsi le caractère universel de leur amour.

Un quatrième principe baha'i par l'application duquel on démontre qu'on aime tout le monde, c'est la collaboration entre le Travail et le Capital, par la solution spirituelle des problèmes économiques.

En effet, le conflit entre le Travail et le Capital, connu sous l'appellation de la lutte des classes par ses théoriciens militants, est une autre cause de la désunion actuelle qui pèse si lourdement sur l'humanité. Il faut donc mettre fin à ce conflit, ce qui ne peut se faire que par une collaboration sincère et spirituelle. Et pour que cette collaboration puisse se réaliser, il faut que les deux mondes (celui du Travail et celui du Capital) se rencontrent régulièrement afin de se consulter sur les questions d'intérêt commun.
Cette consultation implique que chacun parle. Ce qui n i 'est malheureusement pas le cas de nos jours où aussi bien le Capital que le Travail parlent de moins en moins. En effet, n'est-il pas vrai que les vrais fournisseurs du Capital, je veux dire les actionnaires, ne sont pas au courant de ce qui se passe à l'intérieur des grandes entreprises? Et ce n'est qu'une bureaucratie directoriale qui dirige tout. Et cette bureaucratie directoriale ne pense qu'à augmenter son pouvoir plutôt qu'à augmenter la part des bénéfices des actionnaires en intéressant par exemple les ouvriers aux bénéfices de l'entreprise.

De même en ce qui concerne le monde du Travail, n'est-il pas vrai que ce sont les chefs des syndicats qui parlent, qui négocient, qui décident? Et les chefs des syndicats pensent à monter dans la hiérarchie politique plutôt que d'amener, par exemple, les patrons au partage des bénéfices avec les travailleurs, c'est ce que, récemment, les syndicats français ont baptisé de "duperie gouvernementale".

Bien qu'à l'état embryonnaire cette collaboration entre le monde du Travail et celui du Capital a commencé chez les Baha'is, par les rencontres régulières mensuelles entre ceux qui fournissent le travail et ceux qui possèdent le capital. Tout Baha'i a le devoir de prendre part à ces réunions mensuelles sans classes où après les prières et la lecture des Écrits sacrés (lesquels nous exhortent à l'entente et à la concorde), on procède à la consultation sur les questions d'intérêt commun. Ces réunions sans classe fournissent le meilleur moyen pour apprendre à se rencontrer et à se consulter dans un esprit de compréhension mutuelle, et, en définitive, à collaborer.

A noter que toute suggestion qui, ultérieurement, prendra la forme d'une LOI, émane de ces réunions sans classe.

Un cinquième principe baha'i par l'application duquel on manifeste le caractère universel de l'amour, c'est la valeur religieuse du travail. En effet, comment peut-on manifester son amour à l'égard de toute l'humanité et plus particulièrement à l'égard de ceux qui se trouvent à des milliers de kilomètres de nous, si ce n'est par la bonne qualité du produit de notre travail qui leur est destiné? Un pharmacien occidental, qui met toute sa conscience dans la préparation des produits pharmaceutiques destinés aux pays en vole de développement, fait un acte essentiellement religieux parce que,- de cette façon, il manifeste son amour à l'échelle universelle. Aujourd'hui, ce n'est malheureusement pas le cas, non seulement à l'échelle mondiale mais même à l'échelle locale: on en souffre et tout le monde se plaint. Le cas des plombiers est même devenu proverbial et les histoires traduisant le sentiment populaire sont abondantes. Permettez-moi de vous en raconter une.

On sonne. Madame va ouvrir. Devant elle, se tient un plombier souriant et chargé d'outils.

- "Bonjour, Madame", dit le plombier.

- "Bonjour" répond-elle, un peu étonnée. "Mais je n'ai pas besoin de plombier. Vous êtes sûr que vous ne faites pas erreur."

- "Je suis bien chez Madame Dupont?" déclare il plombier.

- "C'est bien ici, dit la dame, mais Madame Dupont a déménagé il y a trois mois."

- "Ce n'est quand même pas sérieux, dit le plombier. Elle me fait appeler pour un travail urgent et elle déménage."

D'après les enseignements baha'is, le travail fait honnêtement et consciencieusement équivaut à un acte d'adoration. Et comme pour tout croyant sincère l'acte d'adoration est un devoir sacré où il engage sa conscience, le travail devient pour lui un devoir sacré où il doit également engager sa conscience; ce qui est la plus belle manifestation de l'amour à l'égard de ceux à qui le travail est destiné.

Un sixième principe baha'i par l'application duquel on manifeste le caractère universel de l'amour, c'est l'acquisition d'une conscience universelle.

Cultiver en soi une conscience universelle, c'est s'efforcer d'arriver à considérer tous les pays comme sa patrie et tous les hommes comme ses compatriotes. Et par voie de conséquence, placer l'intérêt de la planète tout entière au-dessus de l'intérêt de son pays natal. C'est, comme au stade actuel de son évolution, où l'homme place l'intérêt de son pays au-dessus de l'intérêt de sa ville natale, ce qui n'était pas le cas dans le passé et qui semble si naturel aujourd'hui. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle il n'y a plus de conflit entre les différentes villes. Il en sera de même lorsqu'on placera l'intérêt de la planète tout entière au-dessus de l'intérêt de son pays natal, et ceci tout naturellement. Alors la guerre entre les différents pays sera bannie pour toujours.

Deux remarques à faire concernant la prise d'une conscience universelle.

1. La prise d'une conscience universelle demande beaucoup de maturité et ce n'est nullement le fruit d'un phénomène instantané, mais la conséquence de tout un entraînement permanent.

2. Une telle maturité n'aboutit à l'abolition de la guerre que si elle est atteinte à l'échelon planétaire et non pas à l'échelon isolé, à l'échelon d'un ou de quelques pays seulement.

Concernant la première remarque, il faut avouer que si l'humanité a mis des milliers d'années pour arriver à acquérir une conscience nationale grâce à laquelle elle a eu la maturité suffisante pour placer l'intérêt national au-dessus de l'intérêt de la ville natale, ce n'est pas en quelques années qu'elle arrivera à acquérir une conscience universelle grâce à laquelle elle placera l'intérêt mondial au-dessus de l'intérêt du pays natal. Il lui faut du temps et de l'entraînement.

Pratiquer cet entraînement, c'est l'engagement que prend tout Baha'i. Et cet entraînement est pratiqué par la participation à la vie sociale organisée, connue sous le nom de l'Administration Baha'ie. Et l'Administration Baha'ie commence par les réunions mensuelles sans classe que nous avons déjà mentionnées. A ces réunions sans classe, on se consulte non seulement sur les affaires d'intérêt local ou national, mais également d'intérêt mondial, et, souvent même, on apporte des contributions financières volontaires de caractère mondial. Ce qui permet à chaque participant de s'intéresser à l'univers tout entier et, par vole de conséquence, de s'entraîner à l'acquisition d'une conscience universelle.

Comme le but suprême de la Foi Baha'ie est l'établissement de la PAIX MONDIALE, et que cette PAIX MONDIALE implique la prise d'une conscience, universelle par tous, et qu'on n'y arrive que par une participation active à la vie sociale organisée (Administration), cette Administration fait Partie intégrante de la Foi Baha'ie et, sans elle, selon les textes, la Foi est mutilée.

Concernant le second point, c'est-à-dire le fait que l'acquisition d'une conscience universelle doit se faire à l'échelon de tous les pays et non pas à l'échelon d'un ou de quelques pays seulement, remarquons que dans ce dernier cas, la chance d'une paix universelle ne serait nullement augmentée. En effet, si par exemple, quelques pays, par suite d'une prise de conscience universelle, décident comme première mesure de procéder au désarmement au moment où les autres pays s'arment, cela ne peut qu'enhardir ces derniers et augmenter les risques de guerre.
Il faut donc que l'entraînement à l'acquisition d'une conscience universelle se fasse à la fois dans tous les pays. Et c'est l'une des raisons pour lesquelles les Baha'is ne cherchent jamais à former une collectivité nombreuse où que ce soit. Bien au contraire, ils se dispersent dans tous les pays afin de présenter aux hommes de bonne volonté leur modèle d'organisation sociale. Grâce à celle-ci, ils apprennent à travailler ensemble et à cultiver en eux une conscience universelle, sans laquelle on ne peut compter sur une paix durable.

Une mise au point avant de finir. Il ne faut pas croire que rien que par l'application de ces principes, on arrive à l'établissement de la Paix Universelle. Il y a bien d'autres principes. dans la Foi Baha'ie. Ce qu'on peut dire concernant tous ces principes, c'est que leur application demande beaucoup de courage, et surtout le plus grand courage: le COURAGE d'AIMER.


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1.5. L'Amour est l'enfant de la Liberté

Une vieille chanson française dit: "L'Amour est l'enfant de la Liberté". Qu'on interprète cette parole comme on veut si on réfléchit bien, elle traduit une idée très profonde dont l'étude fait l'objet du présent exposé. Cette idée pourrait se résumer en deux mots: c'est par la vraie liberté que l'homme arrive au véritable amour du prochain.

Mais qu'est la vraie liberté, qu'est l'amour vrai? Concernant la définition de la liberté la première question qui se pose est celle-ci: pour qui est-elle? Car la liberté pour un animal ne signifie pas la même chose que pour l'homme. Pour un oiseau, par exemple, la liberté consiste à faire son nid là où il veut, à descendre sur n'importe quelle prairie, à se nourrir des produits de n'importe quel champ. Peut on concevoir une telle liberté pour l'homme? Peut on permettre à l'homme de bâtir sa maison là où il veut, d'entrer dans n'importe quel domaine privé, de s'emparer des produits de n'importe quel champ cultivé? Indiscutablement, cela satisferait l'égoïsme de l'homme. Mais alors ce serait un désordre infernal et personne ne voudrait d'une telle liberté. La vraie liberté est donc dans l'ordre et l'ordre est établi par l'observance des lois, lois qui empêchent l'égoïsme de l'homme de se manifester; autrement dit: lois qui libèrent l'homme de son égoïsme pour le porter à penser aux autres, pour l'intéresser aux autres.

Citons un autre exemple: Pour une bête de la jungle, la liberté consiste à sacrifier les autres à son profit, à se servir des autres pour survivre. Peut-on concevoir une telle liberté pour l'homme? Peut-on permettre à l'homme de sacrifier les autres pour lui-même, de les asservir pour les exploiter? Indiscutablement cela aurait satisfait l'instinct de domination des forts au détriment des plus faibles.

Mais ce serait une fois de plus un désordre infernal et personne ne voudrait d'une telle liberté.

La vraie liberté est donc dans l'ordre et l'ordre n'est établi que par l'observance des lois, lois qui empêchent le bas instinct d'asservissement des autres de se manifester; autrement dit, lois qui libèrent l'homme de son bas instinct d'asservir les autres pour ramener à servir les autres.

Or, S'intéresser à son prochain, servir son prochain, sont là des signes de ce qu'on appelle L'AMOUR du PROCHAIN, cet amour du prochain pour lequel l'homme est fait. Il en a, par conséquent, la faculté, tout comme le miroir, qui est fait pour refléter, en a la faculté. Seulement, si la poussière le recouvre, il ne peut plus manifester cette faculté. Il en est de même en ce qui concerne l'homme. Ses bas instincts sont comparables à la poussière. Les LOIS permettent à l'homme de se dépoussiérer, de se LIBÉRER de la poussière pour refléter sa faculté principale qui est l'AMOUR. Nous voyons donc que l'amour du prochain est la conséquence de la LIBÉRATION de l'homme de ses bas instincts, de sa liberté face à ces bas instincts, ce que la chanson française traduit en disant:

"L'AMOUR est l'enfant de la LIBERTÉ".

Ceci dit, voyons quelle est cette LOI qui libère l'homme de ses bas instincts pour l'amener à manifester sa faculté principale qui est l'AMOUR.

Ce n'est pas en philosophant que nous allons découvrir cette LOI. Nous allons simplement recourir à ce que l'expérience a démontré. Or, une expérience longue de plus de six mille ans nous montre que cette LOI a toujours été apportée par un homme génial appelé Prophète (ou "Mutant" par les historiens matérialistes. Et c'est cette loi qui a permis aux hommes de se libérer de leurs bas instincts, instinct d'égoïsme, instinct d'asservir les autres. Et, une fois libérés de ces bas instincts, de devenir ce qu'ils sont en réalité, par leur création même: c'est-à-dire s'intéresser à leurs semblables, servir leurs semblables, ce que les savants matérialistes appellent s'HUMANISER, et ce que, depuis des milliers d'années, on a pris l'habitude d'appeler SE SPIRITUALISER. Remarquons que les deux termes signifient la même chose car l'homme étant un être essentiellement spirituel, s'humaniser ou devenir homme veut dire devenir un être spirituel, se spiritualiser.

L'histoire fournit de nombreux témoignages de cette vérité. Citons-en deux à titre d'exemple.

Il y a 2000 ans, l'Occident était peuplé de tribus barbares et partiellement de quelques peuples civilisés tels que ceux de Rome et de Grèce. Les uns comme les autres étaient souvent en guerre et, en temps de paix, ce qui comptait pour les uns comme pour les autres, c'était le plaisir des sens; autrement dit, ils étaient tous prisonniers de leurs bas instincts, instinct guerrier, volupté, etc. Et aucune force ne pouvait les en affranchir. Mystérieusement, Jésus parvint à les en affranchir, leur permettant ainsi de devenir ce qu'ils étaient en tant qu'hommes, en tant qu'êtres aimants et, par conséquent, de s'entendre et de s'unir.

C'est ainsi que les tribus constamment en guerre s'unirent pour former les nations européennes actuelles. Ce rejet des bas instincts, cette liberté, résultent de la LOI de Jésus, et fut donc la cause de l'entente et de l'amour. Et c'est un témoignage éloquent de ce que l'Amour est l'enfant de la Liberté!

Bien entendu, tant qu'ils jouissaient de cette liberté tout allait bien. Mais le jour où ils redevinrent prisonniers de leurs bas instincts, les dissensions et les guerres recommencèrent.

Un autre témoignage fourni par l'histoire, c'est celui de l'Islam. Nous allons nous y arrêter un peu plus car en Occident, on n'est généralement pas bien renseigné sur l'Islam.

A l'époque de l'apparition de Muhammad, les Arabes étaient au dernier degré de la sauvagerie. Ainsi, par exemple, il y avait parmi eux des tribus pour lesquelles avoir une fille était une honte. De sorte que les femmes étaient souvent menacées de mort au cas où elles mettraient au monde une fille, et que c'était devenu une coutume d'enterrer les nouveau-nés si c'étaient des filles. Un homme pouvait avoir jusqu'à mille femmes, celles-ci en cas de défaite de leur tribu, devenaient des esclaves destinées à être vendues.
Les moyens de vie des tribus arabes consistaient dans le pillage et le vol: de sorte que, par l'exercice de leur "profession" même, les tribus arabes étaient constamment en guerre, se massacraient, pillaient les biens et capturaient les femmes et les enfants. Situation qu'on résume en disant que les Arabes étaient prisonniers des instincts les plus bas, qu'ils n'étaient plus des hommes.

Muhammad les a libérés de ces bas instincts: ils devinrent des hommes, ils s'humanisèrent et, au lieu de se détester, ils s'aimèrent, ils s'unirent pour former une grande nation.

C'est un second témoignage de ce que l'Amour est l'enfant de la Liberté, et qu'on arrive à cette liberté par l'observance des Lois révélées par les hommes géniaux tels que Moïse, Jésus, Muhammad, Bouddha, etc.

Si cela a été prouvé par des milliers d'années d'expérience, pourquoi alors l'homme d'aujourd'hui ne veut-il pas obéir à ces LOIS, et ceci au moment précis où il a tant besoin de se libérer de ses bas instincts afin de s'entendre, de s'unir avec ses semblables? C'est qu'il estime qu'aujourd'hui il est entré dans le stade de sa maturité, qu'il n'est plus l'enfant d'il y a 2000 ans, - ce qui est vrai -, et qu'il n'a pas besoin qu'on lui donne cette liberté, qu'il a cette liberté, ce qui reste à vérifier.

En effet, voyons si l'homme d'aujourd'hui a la liberté de s'affranchir de ses instincts. Il parait que non, car jamais l'homme n'a été aussi injuste, aussi égoïste, aussi insensible aux souffrances d'autrui. Dans le passé, s'il offensait son prochain, il en souffrait, aujourd'hui il n'en souffre plus. A ce propos, permettez-moi de vous raconter une petite histoire.

Un bonhomme entre dans un bar et demande une boisson. Il en boit la moitié et l'autre il la jette au visage du barman.

- Qu'est-ce qu'il vous prend? s'étonne le barman.

- C'est un geste impulsif, répond-il, auquel je ne peux pas résister et j'en souffre.

- Allez donc consulter un spécialiste.

Un mois après le bonhomme revient, demande une boisson. Il en boit la moitié et l'autre il la jette au visage du barman.

- Et alors, vous n'avez pas consulté un spécialiste, demande le barman.

- Si, dit-il, et quel succès, je ne souffre plus, je ne souffre plus.

Vraiment, jamais l'homme n'a été aussi égoïste qu'aujourd'hui C'est la raison profonde de toutes les discussions au sein d'un même pays, d'une même religion, d'une même classe, d'un même parti, d'une même famille. L'homme d'aujourd'hui devient de plus en plus prisonnier de ses bas instincts et il n'a pas de liberté pour s'en débarrasser.

Même si nous prenons le mot liberté dans son sens le plus commun, nous voyons que l'homme d'aujourd'hui n'a pas de liberté !

L'homme d'aujourd'hui est-il libre de dire ce qu'il pense? S'il est sous le régime dictatorial, il préfère se taire. Dans un de ces pays, cette anecdote se raconte très fréquemment:

Un citoyen s'installe dans le fauteuil du barbier. Celui-ci lui savonne la barbe puis demande tout en aiguisant soigneusement son rasoir:

- Qu'est-ce que vous pensez de notre Président? Croyez-vous qu'il restera au pouvoir.?

- Écoutez, je préfère me taire.

- Enfin, vous avez bien une opinion à ce sujet?

- Certainement, la même que la vôtre.

- Comment, vous connaissez la mienne?

- Aucune importance puisque c'est vous qui tenez le rasoir.

Quant au régime démocratique, on le définit ainsi:

La démocratie est un régime sous lequel on a la liberté de dire qu'on n'a pas de liberté.

Et c'est vrai. La Presse et la Radio ne nous disent-elles pas constamment que nous sommes privés de libertés les plus élémentaires? et nous en sommes inconscients. On nous nourrit de nourriture dénaturée, dévitalisée par l'adjonction des conservants, des solvants et des colorants.

Nous sommes donc privés de la liberté de nous nourrir d'une nourriture naturelle et saine et nous en sommes inconscients. Nous sommes condamnés à boire de l'eau polluée par les industries chimiques et les déchets radioactifs. Nous sommes donc privés de la liberté de boire de l'eau naturelle, pure, et nous en sommes inconscients.

L'air que nous respirons est de plus en plus pollué, car, d'un côté, on en augmente la dose d'anhydride carbonique par une circulation motorisée de plus en plus intense et dépassant les besoins normaux et, de l'autre côté, on détruit la végétation qui précisément absorbe ce gaz carbonique pour dégager, en échange, de l'oxygène. Nous sommes donc privés de la liberté de respirer l'air pur, nous sommes en présence d'une asphyxie certaine et nous en sommes inconscients. L'éminent savant Jean Dorst estime qu'à cette allure, l'humanité n'aura pas plus de trois siècles à vivre. Seuls, précise-t-il, les pygmées des forêts africaines et les Indiens de l'Amazonie ont la chance de sortir indemnes de cette aventure à la Seule condition que nous ne les contaminions pas (voir Télémoustique, No 2290).

L'homme d'aujourd'hui est-il libre d'avoir son travail, c'est-à-dire le travail pour lequel il est fait et que, par conséquent, il aime? Non seulement il ne peut pas exercer ce travail, mais souvent môme il ne peut pas obtenir de travail afin de se nourrir.

Et en tout cela on accuse les dirigeants.

- "Nous sommes dirigés par une belle clique dont la moitié n'est capable de rien, se plaignait un bonhomme."

- "Il reste tout de même l'autre moitié" lui a-t-on fait remarquer.

- "L'autre moitié est capable de tout."

Ce n'est pas ainsi que pensent les Baha'is. Ils estiment que les responsables sont tous ceux qui dans la situation actuelle adoptent l'une des deux positions:

1) Profiter égoïstement de la vie puisqu'il n'y a rien à faire "les carottes étant cultes".

2) Se retirer pour ne penser qu'à son salut personnel en attendant la vie future dans la demeure des bienheureux.

Les Baha'is désapprouvent aussi bien les uns que les autres. Les uns comme les autres portent la responsabilité de la situation troublée de notre époque. Sans doute, les premiers sont plus responsables que les seconds. Mais les seconds ne sont pas dégagés de responsabilité. Tous sont comparables aux gouttes d'un même étang dont l'eau est trouble. Et je dis bien "comparables aux gouttes d'un même étang" car aujourd'hui les hommes sont tellement liés les uns aux autres, tellement interdépendants les uns des autres que personne ne peut s'isoler pour mener une existence indépendante. Aucune goutte ne peut s'isoler pour se soustraire à l'influence du milieu où elle se trouve, pour se purifier toute seule sans se préoccuper du milieu où elle se trouve.

C' est professer une foi mutilée que de penser à sa purification seulement, à son salut personnel, sans se soucier du salut général. Selon les enseignements baha'is, chacun a un double devoir:

1) Purification ou spiritualisation personnelle.

2) Purification ou spiritualisation de la communauté.

Ce qu'on entend par la purification ou spiritualisation personnelle, on le connaît; mais ce qui demande à être expliqué c'est la spiritualisation de la communauté. On peut reconnaître une communauté spiritualisée par plusieurs signes. Nous en citons ici trois:

1. Une communauté est spiritualisée si elle reflète les sentiments nobles de l'individu; ce qui n'est malheureusement pas le cas de nos jours, ni sur le plan matériel et sur le plan spirituel. En effet, comme nous l'avons dit, l'individu veut l'air pur, l'eau pure, la nourriture pure et il ne les a pas. L'individu veut la paix et il ne l'a pas, il ne veut pas la peur et il est condamné à avoir peur. En bref, l'individu n'a de liberté ni sur le plan matériel ni sur le plan spirituel. Or une communauté spiritualisée est une communauté où l'individu jouit pleinement de toutes les libertés.

2. Une communauté est spiritualisée si, non seulement elle traduit à l'échelon social les sentiments nobles de l'individu, mais en Plus, elle encourage la manifestation de ces sentiments et, par voie de conséquence, contribue à ce que tous reprennent courage pour se libérer des bas instincts. De ce point de vue, une communauté spiritualisée accorde à l'homme la LIBERTÉ dans le sens le plus large de ce mot. Ce qui une fois de plus n'est pas le cas de nos jours, où la communauté n'encourage pas les porteurs de qualités spirituelles tels que Martin Luther King ou Albert Schweitzer, mais propose à l'admiration les hommes qui sont TOUT, sauf porteurs des qualités spirituelles.

3. Une communauté est spiritualisée si elle résout ses problèmes non seulement par lé raisonnement, mais également par l'inspiration: comme l'individu résout ses problèmes non seulement par le raisonnement mais également par inspiration. Archimède se souciant uniquement du problème qui lui avait été soumis par le roi, parvint à le résoudre par inspiration et il découvrit ainsi une loi qui rendit beaucoup de services à la science. De même, une communauté spiritualisée qui n'a d'autre souci que celui de résoudre les problèmes communautaires peut être inspirée.

Ce qui une fois de plus n'est malheureusement pas le cas de nos jours, où l'on croit de moins en moins à l'inspiration.

Ceci dit voyons comment on peut arriver à spiritualiser une communauté. Et c'est là l'un des rôles principaux du stade actuel de l'évolution spirituelle de l'humanité, stade représenté par la FOI BAHA'IE. Si les stades précédents où les religions du passé avaient pour mission la spiritualisation de l'individu, ce que Jésus appelle la résurrection de l'individu, la FOI BAHA'IE a en plus pour mission la spiritualisation de l'humanité ce que Bahá'u'lláh dans sa lettre au Pape Pie IX appelle la résurrection de l'humanité.

Et que fait la Foi Baha'ie pour spiritualiser la communauté? Qu'est-ce qu'il y a de nouveau dans la Foi Baha'ie, qui permet la spiritualisation de la communauté et, par voie de conséquence, octroie la liberté à l'homme, cette liberté dont l'enfant est l'amour?

A ce point de vue, ce qu'il y a de nouveau, de particulier dans la Foi Baha'ie, c'est cette vie sociale spirituelle organisée, connue sous le nom de l'Administration Baha'ie.

Expliquons en bref comment cette Administration contribue à la spiritualisation de la communauté.

Nous avons dit que le premier signe d'une communauté spiritualisée est le fait qu'elle traduit à l'échelon social les sentiments nobles de l'individu. Pour cela, il faut avant tout que l'individu exprime ses sentiments. D'où la nécessité des réunions où tous expriment leurs idées et leurs sentiments tout en apprenant à TRAVAILLER ENSEMBLE, nécessité sur laquelle les Écrits baha'is insistent beaucoup.

Indiscutablement une communauté spiritualisée ne peut être formée que par des individus spirituels mais cela ne suffit pas car il y a bien des individus spirituels qui sont incapables de travailler en groupe. Et ceux qui parviennent à travailler en groupe sont ceux qui, pratiquement, s'en tiennent à l'esprit de L'UNITÉ DANS LA DIVERSITÉ

Je m'explique! Vous pouvez dire que par vos connaissances scientifiques vous n'êtes pas comme Einstein, ou que par vos richesses vous n'êtes pas comme Rockefeller; mais vous ne pouvez pas dire qu'en tant qu'HOMME, par votre DIGNITÉ HUMAINE vous n'êtes pas comme Einstein ou Rockefeller. Donc il y a UNITÉ.

Et il est nécessaire que tous prennent conscience de ce sentiment d'UNITÉ; ce. qui ne peut pas se faire d'une manière instantanée, et ne peut être atteint que par tout un processus impliquant un entraînement persévérant. Il faut donc que les Einstein et les gens de peu d'instruction, que les Rockefeller et les pauvres apprennent à se rencontrer dans un esprit d'unité et d'égalité. D'où la nécessité des réunions mensuelles sans classe.

Voilà pourquoi ces réunions mensuelles sans classe sont à la base de la vie sociale spirituelle organisée des Baha'i.

Mais ce n'est pas encore tout car cette unité n'est pas une unité dans l'uniformité mais une unité dans la diversité. Je m'explique. Les enseignements baha'is disent que chaque être humain tout en ne faisant qu'UN avec ses semblables est essentiellement différent d'eux par ses particularités du point de vue de la façon de penser, de la manière de chercher et de voir la vérité. Donc il y a diversité.

Et c'est cette diversité qui permet de voir la vérité sous tous ses aspects, si toutefois chacun expose sa façon de voir et qu'il est écouté par tous. En effet, la vérité est comparable à une pierre précieuse à plusieurs facettes, chacun en voit une, qui peut être l'opposée de celle que je vois.

Si donc je veux voir la vérité sous tous ses aspects, il faut:

1° que je présente la facette que je vois, autrement dit il faut que je dise ce que je pense;

2° que je me représente la facette opposée vue par un autre, autrement dit que j'écoute et que je respecte l'opinion opposée d'un autre, dans un esprit de détachement du "moi". Ces deux qualités à savoir l'honnêteté et la franchise dans l'expression de ses idées et le détachement du "moi" clans la recherche de la vérité, caractérisent l'esprit de L'UNITÉ dans la DIVERSITÉ.

C'est avec cet esprit que les Baha'is tiennent leurs réunions sans classe, qui constituent la fondation même d'une communauté spiritualisée.

Avec ces deux qualités, chacun dit franchement comment il voit le problème, et écoute attentivement et sincèrement ce que l'autre dit: peu importe s'il y a choc des opinions. Bien au contraire, c'est par le choc des opinions que l'étincelle de vérité jaillit, cette vérité qui exprime l'avis de la majorité, et qui va être traduite à l'échelon social, manifestant ainsi l'un des signes d'une communauté spiritualisée.

Ceci dit, voyons comment les opinions et les désirs des individus exprimés à ces réunions sans classe sont traduits à l'échelon social. Pendant toute une année de rencontres mensuelles régulières tenues dans un esprit d'unité dans la diversité, on apprend à se connaître et, plus particulièrement, à connaître ceux qui sont faits pour traduire à l'échelon social les sentiments et les désirs des membres de la communauté.

A la fin de l'année, en toute liberté, sans candidature, sans propagande, au scrutin secret, on procède à l'élection de ces personnes qui forment ce qu'on appelle la MAISON de JUSTICE.

Pourquoi "justice"? Etant donné que c'est cette institution qui a le devoir de décider et de traduire à l'échelon social les différentes suggestions émanant des réunions sans classe, elle ne doit pas être guidée par l'amour qu'elle a pour telle ou telle personne mais par l'amour qu'elle a pour toute la communauté. Or, c'est la justice qui est la plus belle expression de l'amour pour toute la communauté. Voilà pourquoi dans les Écrits sacrés Baha'is, nous lisons:

"Ce que j'aime avant tout c'est la justice".

Nous avons dit que le second signe d'une communauté spiritualisée, c'est qu'elle encourage ceux qui fournissent le meilleur exemple par leurs qualités spirituelles, et non pas ceux qui ont le génie de satisfaire habilement les convoitises de la chair avec les films "enfants non admis" ou les boites de nuit. Une communauté spiritualisée ne devrait même pas admettre de telles activités, si préjudiciables à la moralité de la communauté. Là encore c'est la justice qui s'impose. Car la sympathie pour les "talents" de ces hommes "géniaux" pourrait faire pencher les dirigeants vers le pardon, mais l'amour de la communauté implique l'application de la justice et non le pardon. Voilà pourquoi les Institutions ne s'appellent pas "Maison de Pardon" mais "Maison de Justice".

Comme troisième signe d'une communauté spiritualisée, nous avons mentionné le fait qu'elle est inspirée. Et l'inspiration vient quand on concentre son esprit sur ce qui profite à tout le monde, quand on médite.

Voilà pourquoi toutes les réunions baha'ies commencent et finissent par l'expression de ce désir ardent adressé à Dieu, afin de Lui demander Son assistance: ce qui s'appelle PRIÈRE.

Nous pouvons résumer ce qui a été exposé en disant:

Pour arriver à voir réaliser pleinement sa liberté aussi bien sur le plan social que sur le plan personnel, il faut fournir un double effort:

1° Effort pour sa spiritualisation personnelle,

2° Effort pour la spiritualisation de la communauté.

A la base de ce deuxième effort se trouve l'engagement de se rencontrer mensuellement et régulièrement avec les gens de toutes races, classes, origine religieuse, aux réunions où la participation implique qu'on soit préalablement LIBÉRÉS des préjugés tels que :

1° Aux yeux de Dieu, tous Ses enfants ne sont pas égaux: il y en a qu'Il aime, d'autres qu'Il rejette;

2° Ma religion est supérieure aux autres;

3° Mon prophète est plus grand que les autres;

4° Ma patrie est plus grande que les autres;

5° L'homme blanc est supérieur à l'homme noir;

6° L'homme est supérieur à la femme;

7° La religion n'a pas besoin d'être intelligible;

8° Le Travail n'a rien à voir avec la Religion.

Libéré de ces préjugés et de bien d'autres et, par conséquent, appliquant les principes tels que l'Unité du Genre Humain, Unité Religieuse, Unité des Prophètes, Citoyenneté Mondiale, Égalité Raciale, Égalité des Sexes, Intelligibilité de la Religion, Valeur religieuse du Travail, ..., appliquant de tels principes, on voit qu'on est devenu SOI-MÊME.

On est devenu Homme en tant qu'être aimant, on s'aperçoit combien il est vrai que l'Amour est l'enfant de la Liberté.

Ces réunions mensuelles sans classe, où se rencontrent les gens libérés des préjugés, les gens LIBRES, s'appellent chez les Baha'is FÊTES.

Et c'est à ces FÊTES que les Baha'is vous invitent.


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1.6. Au pays merveilleux de l'Amour

De nos jours, les voyages sont devenus tellement simples à réaliser que tout le monde y voit l'un des plus grands plaisirs de l'existence. On travaille dur toute une année, on fait des économies, on se prive de beaucoup de choses dans le seul espoir de profiter des vacances en partant en voyage. Et pourtant bien souvent, rentrée de voyage, on se sent fatigué, on sent le besoin de se reposer.

"Madame, disait un médecin à sa patiente, cette année vous ne devez pas partir en vacances, vous devez vous reposer !"

Or, il y a un voyage qui est infiniment plus agréable, infiniment plus reposant, tellement plus reposant qu'à peine entrepris, on ne veut plus l'abandonner. C'est le voyage au Pays Merveilleux de l'Amour, c'est-à-dire en un mode de vie où l'on ne voit que l'amour partout, où l'on se voit aimé de tous. Pour ce genre de "voyage", il n'y a pas beaucoup d'amateurs, à cause de la peur. Les gens ont toujours peur de ne pas être aimés. En réalité, il faut dire qu'ils ont peur d'aimer, car s'ils aimaient sincèrement et réellement, ils ne pourraient qu'être aimés, l'amour étant régi par la loi de la réciprocité. Mais les gens n'ont pas le courage d'aimer et, par voie de conséquence, ils ne perçoivent pas l'amour qui leur vient des autres. Tout revient donc à avoir du courage.

Ce courage, il faut bien que quelqu'un nous l'apprenne. Or d'après le témoignage de l'histoire, les plus grands "Maîtres du Courage" sont ces Hommes géniaux qu'on appelle prophètes: Krishna, Bouddha, Moïse, Jésus, Muhammad, le Bab, Bahá'u'lláh, pour n'en citer que quelques-uns parmi bien d'autres. Ils viennent, d'âge en âge, au moment où l'homme cesse de croire que s'il aime vraiment son prochain, il est aimé; autrement dit au moment où l'homme perd le COURAGE d'AIMER.

Ces hommes géniaux, c'est avant tout par une influence mystérieuse qu'ils raniment le courage dans les coeurs, le courage d'aimer. Mais ce n'est pas de cette influence mystérieuse que nous allons parler, car le mécanisme par lequel elle opère nous échappe. Ce que nous pouvons comprendre, ce sont les enseignements dont l'application nous apprend le courage d'aimer, enseignements que nous allons étudier en les comparant au "guide de voyage".

Au temps de Jésus ce "guide de voyage" a été présenté sous forme du "Sermon sur la Montagne". Aujourd'hui, nous trouvons ce "guide de voyage" dans un petit ouvrage de Bahá'u'lláh intitulé "Les Paroles Cachées".

Et c'est de ce guide de voyage que nous allons parler.

Bahá'u'lláh commence Son livre en s'adressant à l'homme en ces termes:

"O possesseur d'intelligence et d'entendement".

Ce qui veut dire que, selon Lui, l'homme d'aujourd'hui a atteint l'âge de raison, qu'il est majeur. C'est cette prise de conscience qui lui permet d'entreprendre le "voyage" personnellement et indépendamment, sans avoir besoin d'être conduit par qui que ce soit.

Bien entendu, par le "voyage", nous entendons le mode de vie que l'homme doit adopter personnellement afin d'arriver à aimer et être aimé. Devenu majeur, l'homme d'aujourd'hui doit prendre conscience de sa maturité, que nous allons comparer au PERMIS DE CONDUIRE.

Ce permis de conduire est la pièce principale que tout voyageur doit posséder. En effet, s'il se considère comme mineur d'âge, il ne peut pas entreprendre ce voyage. Pas de permis pour les mineurs d'âge. Autrement dit, si pour lui, comme pour un enfant qui aime le chocolat, qui aime ses jouets, "AIMER" signifie "recevoir", "posséder", "s'approprier", ce n'est pas la peine qu'il se fixe comme but de la vie l'amour, ce n'est pas la peine qu'il se mette au volant pour arriver au pays merveilleux de l'amour. Car le vrai amour évoque l'idée de DONNER plutôt que celle de RECEVOIR.

Qu'est-ce que tout être humain est en mesure de donner? Le message d'amour, c'est-à-dire les paroles qui réjouissent le coeur.

L'homme doit donc avant tout prendre conscience du fait qu'il est assez grand, qu'il a assez de maturité pour dire des paroles qui réjouissent le coeur, qu'il est le "messager d'amour". Voilà pourquoi Bahá'u'lláh, dès le début de son "guide de voyage" s'adresse à l'homme en disant:

"O messager du Salomon de l'amour.

Ne choisis comme demeure que la Saba du Bien Aimé."

C'est un langage imagé rappelant la légende de l'oiseau fabuleux qui portait à la reine de Saba les messages d'amour du roi Salomon.

Un messager ne doit parler que de son message.

L'homme, en tant que messager d'amour ne doit tenir que le langage d'amour.

Le langage que nous devons apprendre pour notre voyage au Pays de l'Amour, c'est le langage d'Amour, ce langage que tout le monde comprend, ce langage que tenaient les apôtres de Jésus, et que le Nouveau Testament rapporte d'une manière imagée en disant "qu'ils parlaient toutes les langues".

L'homme est donc porteur du message d'amour et son pays est le pays d'amour. C'est vers lui qu'il doit se diriger, c'est cette direction qu'il doit toujours choisir quand il arrive à un croisement de chemins. Autrement dit, si dans la vie il est mis devant le choix: réjouir un coeur ou accomplir ce qu'il estime comme un autre devoir, c'est la première solution qu'il doit adopter.

Un jour, Abdu'l-Bahá observait le jeûne. L'ayant trouvé très affaibli, son médecin lui demande de rompre son jeûne à quoi Abdu'l-Bahá fait la sourde oreille.

"Mais vous êtes malade, insiste son médecin, et un malade ne doit pas jeûner."

Abdu'l-Bahá refuse toujours de rompre son jeûne.

"Maître, supplie le médecin, rompez votre jeûne, ne fût-ce que pour réjouir le coeur d'un serviteur."

"Mais bien volontiers", dit Abdu'l-Bahá; et il rompit son jeûne.

Cet exemple montre qu`Abdu'l-Bahá sacrifiait tout pour réjouir un coeur; ceci pour dire que réjouir un coeur (expression de l'amour du prochain) est la FIN, le reste n'étant que le MOYEN.

Et pour insister sur le fait que l'homme est fait pour réjouir le coeur de son prochain par le langage d'amour. Bahá'u'lláh le compare au rossignol.

"O rossignol mystique, écrit-il, n'habite que le jardin de l'esprit."

Le rossignol est un oiseau dont le chant est toujours très agréable, il réjouit le coeur.

En comparant l'homme au rossignol, Bahá'u'lláh ne voulait-Il pas dire que l'homme doit toujours avoir une voix agréable, autrement dit, il doit toujours dire des paroles agréables, qui réjouissent le coeur.

Et lorsque Bahá'u'lláh dit que ce rossignol est mystique, Il entend le fait que l'homme est un être spirituel plutôt que matériel. Or, en tant qu'être spirituel, l'homme ne peut être heureux que dans le milieu spirituel comme un poisson qui est un être aquatique et ne peut être heureux que dans le milieu aquatique.

Ce milieu spirituel, Bahá'u'lláh l'appelle le jardin de l'esprit. La question qui se pose est celle-ci: où l'homme peut-il trouver ce milieu spirituel?

D'abord dans son esprit, par son état d'esprit. Indiscutablement, le milieu spirituel extérieurement et pratiquement il faut le créer; mais, avant et surtout, c'est dans son esprit qu'il faut créer ce milieu spirituel, ce milieu qui réjouit le coeur.

Une image pour mieux nous expliquer. Un jardin où l'on n'entend que le chant des oiseaux, où l'on ne voit que de belles fleurs et des fruits délicieux, en principe doit réjouir le coeur. Mais si, pour une raison ou une autre, ce même jardin évoque de tristes souvenirs, il ne réjouit plus le coeur du visiteur.

De même les hommes absolument spirituels, comme les Prophètes qui aiment, qui pardonnent, qui soignent les malades, qui consolent les attristés, doivent en principe réjouir tous les coeurs, mais s'ils sont mis en présence d'un individu qui, par fanatisme ou préjugé, ne les aime pas, le coeur de cet individu n'est nullement réjoui par ce contact.

C'est donc avant tout l'état d'esprit qui doit changer, c'est dans notre esprit qu'il faut créer le milieu spirituel, le milieu qui réjouit le coeur.

Tout revient donc à nourrir de bons sentiments à l'égard de notre prochain, autrement dit à avoir un bon coeur symbolisant le siège des sentiments. Voilà pourquoi dans le même petit ouvrage Bahá'u'lláh dit:

"Avant tout possède un bon coeur."

Un bon coeur est donc la première provision que nous devons posséder pour notre voyage.

Mais les sentiments aussi purs et bons soient-ils, ne sont pas suffisants. Il faut les manifester. Et la meilleure façon de les manifester, c'est le service.

Voilà pourquoi lorsqu'on décide d'entreprendre le voyage vers le pays merveilleux de l'amour, il faut adopter le titre de SERVITEUR. Ce titre est rappelé aux Baha'is par une inscription symbolique gravée sur la bague qu'ils portent, ce qui signifie que chaque fois qu'une occasion se présente, ils doivent se tenir prêts pour servir.

Abdu'l-Bahá en fournissait le meilleur exemple.

A ce propos une Américaine raconte cette histoire:

Lors du séjour d`Abdu'l-Bahá en Amérique, un jour, par hasard, je me trouvais dans l'auberge où il était descendu. C'était un matin de très bonne heure. Sous le perche de l'auberge, il était en train de dicter une lettre à son secrétaire lorsqu'il vit passer non loin de l'auberge un vieillard misérablement vêtu. Il le fit appeler par son secrétaire, s'approcha de lui pour lui serrer cordialement la main. Il lui dit quelques mots pour le faire sourire. Le vieillard sourit mais d'un sourire plutôt triste.

Abdu'l-Bahá le regarda et lui dit: "Il semble que votre pantalon ne pourra plus vous servir longtemps". Et ceci dit, il passa sa main sous son aba (manteau) pour chercher quelque chose à la hauteur de sa ceinture. Il était très tôt dans la matinée de sorte qu'il n'y avait personne dans la rue. Un instant après, je vis tomber à terre le pantalon d`Abdu'l-Bahá. Il le ramassa vite pour le passer au vieillard en lui disant:

"Que Dieu soit avec vous."

Cette histoire montre qu`Abdu'l-Bahá cherchait la moindre occasion pour servir, pour justifier son titre de "Serviteur de Dieu". Il était pour ainsi dire toujours en possession de sa carte d'identité portant son nom en tant que serviteur.

Il faut qu'il en soit de même pour tout voyageur vers le pays de l'amour. Tout voyageur doit être porteur de sa carte d'identité portant son nom en tant que serviteur.

Résumons-nous jusqu'ici. Connaissant le langage nécessaire pour notre voyage (le langage d'amour), muni de notre permis de conduire (prise de conscience de notre maturité), en possession de la provision essentielle pour ce voyage (un bon coeur) et porteur de notre carte d'identité de serviteur, pouvons-nous nous mettre en route? Oui, si nous sommes assurés contre les accidents, si nous avons notre carte d'assurance. En effet, aussi habiles que nous soyons dans l'art de conduire, nous ne pouvons pas éviter les accidents. Par "accidents" nous entendons les vaines imaginations et les préjugés qui entachent nos sentiments à l'égard de nos semblables, qui souillent notre coeur, pour tenir un langage imagé. Dans la vie, il est difficile de tenir son coeur toujours pur comme il est difficile de tenir ses mains toujours propres. Si on se lave les mains avec de l'eau.

On purifie son coeur avec la prière et la méditation. De même dans la vie, il est difficile de tenir son corps en bonne santé à l'abri des maladies. Si l'on désintoxique son corps par des remèdes on purifie son coeur par la prière et la méditation.

"Le médecin de tous tes maux", lisons-nous dans notre "guide de voyage", "est ma mention" C'est-à-dire la prière).

L'effet de la prière est reconnu par les hommes de science; Alexis Carrel écrit:

"La prière est notre principale source de puissance. Mais elle est lamentablement inexplorée."

Deux fois Prix Nobel, l'éminent professeur Milikan écrit:

"La prière est là plus puissante forme d'énergie que l'on connaisse, mais l'homme, dans son ignorance, y attache peu d'importance."

Bien entendu, quand nous disons prière, nous entendons prière accompagnée de méditation, sans quoi la prière perd sa valeur.

D'abord, la prière elle-même a un effet qui est une question d'expérience personnelle. Cet effet ne se démontre pas, il s'expérimente. Et il peut n'être ressenti que pendant un instant après la prière, ou une heure après la prière, une journée ou plus. Peu importe s'il peut être limité en durée, mais il est toujours ressenti. Et cet effet devient durable quand la prière est accompagnée de méditation.

Quand, par la prière, nous demandons à Dieu de nous délivrer des préjugés et des vaines imaginations, par la méditation, nous faisons un effort personnel pour nous en affranchir. Nous méditons et, souvent, nous trouvons que nos suppositions et imaginations ne sont nullement fondées. Même lorsqu'elles sont fondées, deux cas peuvent se présenter et dans les deux cas, nous cessons d'être tourmentés durant notre voyage vers le pays de l'amour, tourments que nous avons comparés aux accidents de la route.

Le premier cas, c'est lorsque nous découvrons que la personne envers qui nous nourrissons des sentiments réprobateurs par suite de son comportement, ne voit pas ce qu'elle fait. C'est un "aveugle" qui marche sur notre pied. Pouvons-nous nourrir à son égard un autre sentiment que la pitié?

Le deuxième cas, c'est lorsque nous découvrons que la personne voit ce qu'elle fait et nous offense réellement. Pourquoi nous mettre en colère, puisque la colère est un acide plus corrosif pour le récipient qui le contient que pour l'objet sur lequel on le verse? Pourquoi nous tourmenter, puisqu'il y a la communauté avec ses lois et ses institutions qui nous défend? Ne vaut-il pas mieux considérer son comportement comme un défi que notre maturité permet de relever, nous entraînant ainsi en patience et en tolérance, vertus si appréciées de tous? La personne en question sert donc d'instrument qui nous permet de nous entraîner à pratiquer ces vertus, ce qui contribue à l'accroissement de notre force morale. Quand on se prépare pour un championnat, doit-on s'irriter contre celui qui nous présente des poids de plus en plus lourds à soulever? L'entraineur est-il l'ennemi du candidat au championnat'? Voilà ce que signifie la méditation.

Avec la prière et la méditation, nous sommes donc assurés contre tous les ennuis et accidents de notre voyage.

Une mise au point est nécessaire. Il est vrai que la prière et la méditation constituent la meilleure assurance contre les accidents de la route. Mais nous ne sommes pas couverts par cette assurance si nous ne respectons pas les feux rouges. Quels sont ces feux rouges? Ils sont nombreux.

A titre d'exemple, nous allons citer les deux plus importants. Les plus importants, en ce sens que si nous les brûlons, notre voyage vers le pays de l'amour est arrêté. Ce n'est plus vers le pays de l'amour que nous allons mais vers le marécage de la discorde et des dissensions.

En effet, comme il a été dit, il est vrai qu'un voyage vers le pays de l'amour, vers le "jardin de l'esprit", avant tout c'est dans son esprit, par son propre état d'esprit qu'il faut le créer. Mais ce n'est pas suffisant. Il faut contribuer à la matérialisation de ce jardin de l'esprit, autrement dit il faut contribuer à la spiritualisation de la communauté. Or une communauté est spiritualisée si ses membres savent travailler en groupe. Et pour ce travail en groupe, rien n'est aussi néfaste que la médisance et les disputes. On peut donc citer comme les deux feux rouges les plus importants la médisance et les disputes.

Par la médisance, non seulement on avilit son prochain, causant ainsi des dissensions, mais on s'avilit également soi-même. Car la psychologie nous dit:

"Veux-tu connaître les défaillances de quelqu'un? laisse-le parler des autres."

En parlant des défauts des autres, nous révélons donc inconsciemment nos propres défauts, ce qui nous avilit. Par la médisance nous nous avilissons donc, au lieu de montrer notre dignité, notre maturité. Nous prouvons que nous n'avons pas atteint la maturité, nous ne sommes pas majeurs, et par conséquent on est en droit de nous retirer notre permis de conduire. Si donc on brûle ce feu rouge, on nous retire notre permis et nous ne pouvons plus continuer notre voyage. Voilà pourquoi, dans Son "guide de voyage" (Les Paroles Cachées), Bahá'u'lláh dit:

"Ne vois pas mal et ne t'avilis pas."

Et pour justifier cette interdiction et, en même temps, insister sur la dignité et la maturité de l'homme, Il ajoute:

"Ton oeil est Mon oeil. Vois donc par Mon oeil."

En voyage vers le pays de l'amour, on doit par conséquent s'abstenir de toute médisance. C'est le premier feu rouge devant lequel on doit s'arrêter.

Le second feu rouge, c'est le fait de se disputer. En effet, une communauté est spiritualisée si ses membres savent se consulter. Or, se disputer c'est précisément empoisonner la consultation, ce moyen sublime pour découvrir la vérité. A partir du moment où l'on commence à se disputer, ce n'est plus la vérité qu'on s'efforce de défendre, mais sa personnalité. Se disputer, c'est vouloir montrer sa supériorité. Et le fait d'imposer sa supériorité ne veut pas dire unité, unité qui est justement la manifestation extérieure de l'amour. L'amour maternel, par exemple, ne se manifeste-t-il pas par le fait que la mère sent que son enfant et elle ne font qu'UN?

Si donc c'est la supériorité qu'on cherche et non l'unité, on s'écarte de l'amour, on néglige consciemment le chemin qui mène au Pays de l'Amour. Ce n'est plus un voyage qu'on effectue, c'est un vagabondage. C'est négliger le but de son existence.

"Le plus négligent des hommes, lisons-nous dans notre petit guide de voyage (Les Paroles Cachées), est celui qui cherche à se disputer et à s'ériger en supérieur vis-à-vis de son prochain."

Jusqu'ici, j'ai mentionné deux feux rouges. Il y en a bien d'autres. Permettez-moi d'en mentionner encore un. C'est l'abus de paroles qui, selon Bahá'u'lláh, est un poison mortel. Je vois ce feu rouge à ma montre et je ne peux que m'arrêter en résumant tout ce qui a été dit par l'expression d'un souhait.

A ceux qui connaissent le langage deux et agréable qu'on doit parler durant le voyage vers le Pays

Merveilleux de l'Amour, qui ont acquis leur permis de conduire par la prise de conscience de leur maturité et de leur indépendance, qui sont porteurs de leur carte d'identité précisant leur nom en tant que serviteur, qui n'oublient pas leur assurance, c'est à dire la prière et la méditation, qui respectent les feux rouges en s'abstenant surtout de se disputer et de médire: à ceux-là, que peut-on souhaiter si ce n'est un bon voyage?

Aussi, bon voyage, chers Amis.


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1.7. Réponse aux Contestations

De nos jours, en parcourant les journaux, on trouve un peu de tout: annonces publicitaires, nouvelles sportives, grèves des ouvriers, guerre du Vietnam, conflit israëlo-arabe, etc... tout mais bien, peu d'articles font, écho à la voix des jeunes dans le domaine de la contestation.

Il n'est donc pas étonnant que l'opinion publique ne soit pas bien informée sur les objectifs de leurs contestations et, qu'à cet égard, elle reste plongée dans le sommeil. De temps en temps, il lui arrive d'être éveillée par quelques slogans. Alors, elle se contente de se poser cette question:

Mais qu'est-ce qu'ils veulent ces jeunes?

Pourquoi contestent-ils?

Et ces contestations minent les fondations même de la civilisation actuelle, destinée à s'effondrer tôt ou tard.

Ceci nous rappelle une histoire orientale. Un voleur était en train de pratiquer un trou pour miner le mur d'une maison. Le propriétaire plongé dans le sommeil, se réveille et dit:

- Mais qu'est-ce que tu fais. là?

- Je joue de la trompette, répond le voleur.

- De la trompette? Mais je n'entends rien.

- Demain tu entendras, et comment

Et bien, chers Amis, demain on "entendra" ces contestations, demain on verra ce que signifient ces contestations des jeunes. Et elles sont significatives.

On a tort de croire que les jeunes par leurs contestations demandent plus de droits politiques, plus d'avantages économiques, plus de sécurité sociale, plus de possibilités d'approfondir leur culture générale par un plus grand nombre d'institutions culturelles... Non, ce n'est pas cela que demandent les jeunes ! Et ceci pour la simple raison que les droits politiques, les avantages. économiques, la sécurité sociale, les moyens d'approfondissement de la culture générale, tout cela ils l'ont déjà grâce aux contestations des peuples dans le passé.

En effet, dans le passé, les pays dont la jeunesse conteste aujourd'hui ont traversé des crises ayant successivement un caractère politique, économique, social et culturel.

On a commencé par réclamer des droits politiques pour tous. Les ayant obtenus, on a constaté que les choses ne se sont pas arrangées. On a pensé que la solution était dans l'obtention des avantages économiques car, s'est-on dit, à quoi bon avoir le droit de voter, par exemple, quand on reste privé de tant de nécessités de la vie, d'où contestations de caractère économique. Mais ayant obtenu les avantages économiques, on s'est aperçu que les difficultés ne se sont toujours pas dissipées. Car, parallèlement à l'augmentation des salaires, les prix montaient et le niveau de vie s'élevait.
On sentait le besoin d'avoir "beaucoup de tout", ce qui ne pouvait se faire que par des emprunts, d'où le recours aux mensualités. On fait donc son budget: et l'on voit que c'est le moyen de constater qu'on vit au-dessus de ses moyens. On n'est donc pas sûr du lendemain. Et si, par malheur, on perd son travail, si on tombe malade, ou si on fait un accident? Non, il faut absolument qu'on ait la sécurité sociale sous forme d'indemnité de chômage, d'assurance maladie, invalidité, etc.

D'où contestations de caractère social, contestations grâce auxquelles on a la sécurité sociale. Mais là encore on reste insatisfait. Car, à quoi bon, pense-t-on, qu'une société vous assure contre le chômage quand elle-même crée le chômage par l'augmentation du nombre des machines, ce qui diminue le besoin de main-d'oeuvre. L'homme ne doit donc pas compter sur ses capacités physiques, mais plutôt sur ses capacités intellectuelles. D'où contestations pour populariser l'instruction, pour faciliter l'acquisition des connaissances dans le domaine de l'art et de la science, contestations de caractère culturel.

Ayant obtenu satisfaction de ce côté là, une fois de plus on a constaté que la crise continue. Et il a fallu que cette fois, ce soit la jeunesse qui s'aperçoive que la crise n'est pas d'un caractère politique, économique, social ou culturel, mais purement HUMAIN. Cette crise de caractère purement humain est due à plusieurs facteurs, qui font l'objet des contestations des jeunes. Nous allons en citer quelques uns:

1° Le premier objet des contestations des jeunes (et c'est l'objet principal de leurs contestations) présente un aspect purement qualitatif et nullement quantitatif. Les jeunes ne demandent pas une quantité de choses mais ils demandent avant tout la qualité, la qualité d'homme, homme avec sa dignité, homme à respecter, à écouter, à comprendre, à aimer. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui où l'homme est devenu une marchandise, marchandise recherchée, appréciée en raison des bénéfices qu'on peut en tirer. Autrement dit, l'homme est apprécié selon ses aptitudes pour le succès, par tous les moyens, dans le travail qu'on lui demande. Je dis bien par "tous les moyens". Car tous les moyens sont bons, la fin justifiant les moyens, ce qui est triste.

La fraude, le mensonge, l'hypocrisie, ... tout est bon, a la seule condition de sauver les apparences.

"Cherchons mécanicien pour garage. Apparence honnête indispensable", lisait-on dans un journal humoristique, ce qui illustre bien la situation actuelle.

Si donc un homme a beaucoup de qualités morales, puisque ces qualités morales ne sont pas recherchées, puisqu'elles ne sont pas appréciées, l'homme doit aller contre sa personnalité, il doit sacrifier sa dignité humaine, il doit consentir à perdre sa qualité d'homme. Peu importe si quantitativement il a acquis beaucoup de choses: ses droits politiques, ses avantages économiques, sa sécurité sociale, ..., qualitativement il ne lui reste rien, ou, plus exactement, il n'est rien; car il n'est plus lui-même en tant qu'homme, fait pour être juste, honnête, pour s'entendre avec tout le monde, pour aimer tout le monde. La société le pousse à tricher, à être injuste, à faire la guerre à ses semblables, à servir de chair à canon. C'est cet état de chose que les jeunes contestent avant tout. C'est cet aspect qualitatif de leurs contestations qui doit faire l'objet de l'admiration générale.

2° En second lieu, les jeunes contestent les conditions sociales actuelles qui, en standardisant les goûts, les sentiments, les pensées... abolissent l'individualité. Car il ne faut pas oublier que chaque être humain tout en étant par sa qualité homme comme les autres, a cependant ses particularités, ses aptitudes, ses sentiments, son goût, son tempérament à lui, qui font de lui un être en quelque sorte unique, qui font de lui une individualité dont l'abolition ne peut être que désastreuse pour la société. Et c'est malheureusement ce qui se fait dans la société d'aujourd'hui où tout se standardise: le travail, la distraction, les sentiments, le raisonnement par l'endoctrinement.

Et l'homme se voit contraint de rester aussi proche que possible du standard, et de ne s'en distinguer ni par sa profession, ni par ses distractions, ni par sa façon de penser. Ce qui révolte tout être humain conscient de sa personnalité. S'il a des dons en musique et qu'il aime la musique, il se voit contraint d'étudier le droit pour devenir avocat ou notaire car ce métier est très recherché. Ne dit-on pas: "Impossible de vivre sans notaire. Impossible surtout de mourir sans eux"?

Si, par contre, il n'a pas le moindre goût artistique, il doit se lancer dans l'architecture car pour l'architecte, il y a toujours du travail.

Si, comme distraction, ce n'est pas le match de football qui l'intéresse, partout il n'entend parler que de football, exalté par la presse, la radio et la télévision, au point que même à la T.V., souvent, il se voit contraint de suivre un match dans sa chambre à contre coeur, comme le suivent des milliers de spectateurs au stade avec enthousiasme. C'est que les distractions aussi sont standardisées.

Dans le domaine vestimentaire aussi il y a standardisation. On l'appelle la mode. L'an dernier, c'était la mini jupe qui était à la mode. Brusquement, cette année, c'est la maxi qui la remplace. Et les pauvres parents ou les maris doivent en supporter les frais.

Mais ce n'est pas la standardisation dans le domaine vestimentaire que les jeunes contestent car ce n'est pas la standardisation vestimentaire qui abolit l'individualité. Ils contestent toute standardisation dans le domaine des aptitudes intellectuelles, des sentiments, du goût, de la pensée, ce qui est si néfaste pour l'épanouissement de la personnalité. Remarquons que la standardisation de la façon de penser est la plus dangereuse de toutes. Elle est connue sous le nom de l'endoctrinement, pratiqué surtout dans les pays de l'Est où l'on n'a même pas le droit de contester.

Mais partout la jeunesse conteste et se révolte. Poussée à l'extrême contre tout ce qui sert de standard de pensée, de goût, de sentiment, de vêtement, bon ou mauvais dans la société actuelle, cette contestation prend la forme de tout ce qu'il y a de plus triste, j'entends le non conformisme absolu des hippies, qui n'admet et n'applique qu'une règle: ne rien adopter comme façon de penser qui rappelle celle des autres, ne rien porter qui ressemble de près ou de loin au costume "monsieur" ou à la robe "madame".

3° Le troisième objet des contestations des jeunes, c'est la rigidité face aux implications de l'évolution.

De nos jours, il est rare qu'un voyageur, qui a une destination en vue, échoue dans ses projets. Et ceci pour la simple raison qu'il ne voyage plus à cheval, il se sert disons de la voiture qu'il apprend à conduire grâce à l'assistance d'un instructeur qui se met à côté de lui, qui l'observe, qui l'oriente, qui détermine sa course. Si donc le voyageur réussit dans ses projets, c'est qu'il se sert des moyens mis à sa disposition par l'évolution.

Il faut qu'il en soit de même pour tout jeune qui fait des projets d'avenir. Il est naturel qu'il veuille réussir à tout prix. Ce n'est malheureusement pas le cas de nos jours où le nombre d'échecs à l'école et, après l'école, dans la vie, croît de plus en plus. Ces échecs, les jeunes ont le droit de les attribuer, ne fût-ce que partiellement, à ce que l'enseignement n'est pas adapté à l'évolution, à ce que l'on continue d'enseigner à peu de choses près, comme à l'époque où l'on voyageait à cheval. En effet, les matières qu'on enseigne comprennent encore l'histoire des guerres, par exemple, au moment où les jeunes en ont assez des guerres et n'aspirent qu'à la paix.

Quant à la méthode d'enseignement, c'est pire encore que dans le passé.

Car, autrefois, le professeur pouvait encore s'occuper de l'élève, mais aujourd'hui, avec le grand nombre d'élèves qu'il a, matériellement, il ne peut pas s'occuper de chacun d'eux, observer chaque élève, l'orienter, l'assister à tous les points de vue pour qu'il réussisse aussi bien à l'école, et après récole, dans la vie.

C'est contre cette situation, qui est la conséquence de l'inadaptation à l'évolution, que les jeunes manifestent.

Concernant les implications de l'évolution, il faut dire que les étudiants ne sont pas les seuls à contester. Il y a un domaine où tout le monde conteste, c'est le domaine vital de la foi. Cette contestation se fait soit silencieusement, soit à haute voix.

Quand nos disons "silencieusement", nous voulons dire que l'homme évolué d'aujourd'hui, dans son coeur, conteste cette opinion selon laquelle par suite du péché d'Adam, sa postérité en porte la responsabilité comme péché originel; et que ce péché s'efface par un rite qu'on appelle baptême; et que dans l'hostie, il y a "substantiellement" et "réellement" la chair de Jésus; et bien d'autres rites non conformes au stade actuel de l'évolution de l'homme.

Quant à la contestation à haute voix, par ironie du destin, il a fallu que ce soit les prêtres contestataires qui se mettent au premier rang, parmi ceux qui réclament la conformité de la foi religieuse à révolution.

4° En quatrième lieu, les jeunes contestent pour obtenir la participation dans la recherche de la solution des problèmes intéressant la vie estudiantine, participation par CONSULTATION.

Là encore, il faut comprendre les jeunes, car la consultation est devenue l'esprit même de notre époque. Sur le plan juridique, on a recours à la consultation, étant donné que 'ce n'est plus le juge qui juge, mais les jurés. Sur le plan politique, on a recours à la consultation, étant donné que ce n'est plus le roi qui établit les lois, mais le parlement.

Indiscutablement, il y a encore beaucoup à faire en matière de consultation. D'abord parce que la consultation ne produit pas toujours ses fruits attendus: l'unité et l'harmonie; au contraire, des discussions intérieures persistent; de plus, pour beaucoup encore, se consulter, c'est se faire écouter, c'est se faire approuver et ne jamais se voir contrarier, ce qui n'est pas du tout le sens de la consultation. Mais ceci n'empêche que le processus de consultation soit engagé dans tous les domaines. Pourquoi alors l'écarter dans le domaine de l'enseignement? Pourquoi ne pas consulter les étudiants sur les questions pour lesquelles leurs opinions *pourraient constituer la solution même des difficultés universitaires?

Voilà, chers Amis, quelques-uns des objets des contestations des jeunes. Et ce qu'il y a de méritoire dans ces contestations de jeunes, c'est l'esprit de sacrifice qui les anime. En effet, on voit les jeunes qui acceptent de tout sacrifier à leur idéal, préférant tout risquer, quitte à tout perdre, plutôt que de se voir contraints à renoncer à leur idéal pour un monde nouveau.

Mais ce qui est regrettable, c'est l'action savamment agencée par des individus étrangers aux milieux estudiantins dont le seul but est de semer la peur de l'avenir parmi les jeunes, de maudire les structures existantes, afin de pouvoir tirer un profit personnel d'un désarroi où personne ne gagne.

Ne vaut-il pas mieux allumer une chandelle au lieu de maudire l'obscurité, disent les Japonais?

Cette chandelle, permettez-moi de l'allumer par une tentative d'exposer quelques réponses baha'ies aux contestations principales que j'ai mentionnées.

Nous avons dit que ce qu'il y a d'admirable dans les contestations des jeunes, c'est avant tout l'aspect qualitatif de leurs revendications, c'est-à-dire le problème de la qualité d'homme plutôt que la quantité pour l'homme. Autrement dit, la question de la dignité humaine.

Tous les enseignements religieux sont basés sur le fait que l'homme n'est pas un animal et que l'espèce humaine est une espèce distincte, aussi distincte que l'est l'espèce animale de l'espèce végétale et que, par conséquent, il doit prendre conscience de cette distinction, de cette dignité humaine.

Et le rôle de la Religion, c'est d'amener l'homme à prendre conscience de sa dignité, ceci malgré tous ses défauts héréditaires et l'influence déplorable du milieu, facteurs auxquels il ne peut pas échapper.

Une image nous ferait mieux comprendre le rôle de la religion.

La religion fournit à l'homme un PATRON d'après lequel il doit se faire un vêtement. Le tissu auquel est destiné ce patron est fait de deux facteurs: l'hérédité (formant les trames) et le milieu (formant les chaînes). L'homme ne peut rien faire avec les chaînes et les trames de ce tissu, mais il a le choix du patron, dont il s'inspire pour se faire un vêtement comme le demandent les Écritures.

Revétez-vous en Jésus Christ, dit le Nouveau Testament.

Ce patron est donné en conformité avec l'âge de l'humanité. Pour l'enfance humaine (il y a plus de 1000 ans), il y avait un patron; pour l'âge adulte, il y en a aujourd'hui un autre. On doit choisir le patron d'après son âge.

Un adulte ne peut pas s'habiller du vêtement cousu suivant le patron fait pour un enfant S'il le fait, le vêtement se déchire. C'est ce qui se passe avec les Religions du passé fondées pour l'enfance humaine ! Il faut donc chercher un patron qui permette de faire un vêtement qui ne se déchire pas. Ce patron, disent les adeptes de la Foi Baha'ie, est fourni par les enseignements de cette Foi, tous basés sur le fait que l'humanité, dans son évolution, est entrée aujourd'hui dans le stade de sa maturité et que, par conséquent, plus que jamais, elle doit prendre conscience de sa dignité, dignité qu'elle a oubliée.

"Je t'ai créé noble et puissant, comment t'avilis tu? Je t'ai créé riche, pourquoi t'estimes-tu pauvre?" lisons-nous dans les Écrits sacrés de la Foi Baha'ie. Malheureusement, ce n'est pas le langage que tient la société d'aujourd'hui à l'égard de ses membres. Et, par vole de conséquence, l'estime de soi, cet élément majeur de réussite, est oubliée.

L'homme d'aujourd'hui n'a plus confiance en lui-même, ni en personne. Il ne se croit pas capable de se changer lui-même, pas plus que le monde. Désespéré, tout lui semble utopique. Là encore, les Écrits baha'is lui viennent en aide, lui inspirant confiance en ses immenses possibilités, au point qu'ils le comparent au soleil capable de donner la vie à tous les êtres. Il faut donc qu'il prenne conscience de sa dignité humaine, de sa qualité d'homme avec ses pouvoirs infinis. Vous pouvez dire que par vos richesses, vous n'êtes pas comme Rockefeller ou par votre science, vous n'êtes pas comme Einstein, mais, par votre qualité l'homme, vous êtes comme eux. Et c'est cela qui est pris en considération dans les Communautés baha'ies. Ceci sur le plan théorique.

Sur le plan pratique, la vie communautaire baha'ie est organisée de telle façon qu'aussi bien aux réunions mensuelles sans classe qu'aux institutions dirigeant les affaires sociales, on voit réellement qu'il n'y a que la qualité d'homme qui est prise en considération et, qu'à ce point de vue, tous ne font qu'UN.

Ainsi, par exemple, il arrive souvent que les membres les plus humbles de la communauté, sans grande instruction, ni possibilités financières, soient élus au sein des institutions qui dirigent les affaires sociales.

Nous voyons ainsi comment théoriquement et pratiquement, c'est la dignité humaine qui est mise en valeur, à quel point c'est la qualité d'homme qui est recherchée (et non pas la quantité de choses qu'il possède).

Ne trouvons-nous donc pas là une réponse aux contestations qualitatives des jeunes? N'est-ce pas cela que demandent les jeunes? Cette demande une fois satisfaite, c'est-à-dire lorsque tous prendront conscience de leur dignité humaine, cette estime de soi constituera l'élément majeur de la réussite dans la vie.

Quant au deuxième objet des contestations des jeunes, c'est-à-dire la standardisation de la pensée, des sentiments, du goût, des capacités et en bref de tout ce qui caractérise l'individualité, cette standardisation qui abolit l'individualité, les enseignements baha'is insistent autant sur le respect de l'individualité avec ses particularités que sur la dignité humaine en général. Autrement dit, la Foi Baha'ie exalte L'UNITÉ dans la DIVERSITÉ.

et non pas l'unité dans l'uniformité. Ce qui veut dire que si, par votre dignité humaine, vous êtes comme les autres, par vos capacités latentes et vos particularités, vous êtes en quelque sorte unique dans le monde. Il s'ensuit que chacun a sa contribution à apporter à l'amélioration de la vie sociale et à l'avènement de la civilisation mondiale.

Et nous insistons sur la contribution individuelle à l'avancement de la civilisation mondiale, car selon les Écrits baha'is, "L'homme est une mine riche en gemmes d'une valeur inestimable. Et cette mine doit être exploitée, autrement dit, les idées et les capacités de chacun doivent servir à tous."

Sur le plan pratique, les idées de chacun peuvent être exposées aux réunions mensuelles sans classe où tous sont encouragés à exprimer leurs opinions Et cet encouragement va jusqu'au point où les Écrits baha'is disent clairement que, non parfois, mais souvent même, l'opinion émise par le membre le plus humble de la communauté, même s'il a peu d'instruction, constitue la solution des problèmes de la communauté.

Quant à l'exploitation des capacités individuelles, lies Baha'is s'opposent à toute orientation des aptitudes vers le standard financièrement bien coté par la société. Que chacun ait du travail, cela ne garantit pas le bien-être général. Que chacun ait son travail et alors tout le monde est satisfait. En effet, quand à un homme on demande de faire le travail pour lequel il a des capacités particulières, il ne demande pas mieux que de le faire, car c'est pour lui une occasion de montrer sa maîtrise, ce qui lui fait toujours plaisir. Tout comme un homme éloquent, à qui on demande de donner une conférence; ou une femme voilée et ravissante, à qui on demande de se dévoiler... Lui, il ne demandera pas mieux que de montrer ses talents, et elle prendra plaisir à révéler son charme et sa beauté.

En conclusion, si par son travail, on a l'occasion de montrer ses dons et ses talents, on fait son travail avec enthousiasme à la satisfaction de tout le monde. Et le travail prendra, comme on le dit, une valeur religieuse. Ce qui n'est malheureusement pas le cas de nos jours où le travail est devenu un objet de marchandage.

Le plombier fait du marchandage, l'électricien fait du marchandage et même certains médecins font du marchandage. Un journal humoristique racontait cette anecdote:

- Docteur, j'ai une crise de foie. J'en souffre terriblement. Pourriez-vous me recevoir demain?

- Demain, ce n'est pas possible, tous mes rendez vous sont pris. Je ne peux vous donner un rendez vous que la semaine prochaine.

- Mais d'ici une semaine, je serai morte.

- Oh, vous savez, on peut toujours annuler un rendez-vous.

Revenons à notre sujet. Si d'après les enseignements baha'is, personne ne se voit 'contraint de se conformer par ses pensées, ses sentiments, ses aptitudes professionnelles au standard en cours, mais bien au contraire si chacun est encouragé à manifester son individualité avec ses particularités et capacités, cela n'enrichira-t-il pas la société avec de nouvelles idées, cela ne permettra-t-il pas à chacun de faire son travail à lui et, par vole de conséquence, une fois de plus, cela ne contribuera-t-il pas au succès dans la vie?

N'est-ce pas cela que les jeunes demandent? Une fois de plus, la Foi Baha'ie ne donne-t-elle pas une réponse à leurs contestations?

Quant au troisième objet des contestations, c'est à dire le problème de l'évolution et la nécessité de s'y conformer, là-dessus lies Écrits baha'is ne sont pas moins explicites que sur l'unité dans la diversité. Selon la Foi Baha'ie, l'idée d'évolution dans un certain sens évoque l'idée de Dieu, et s'opposer à l'évolution, c'est s'opposer à Dieu. Et les Messagers de Dieu viennent pour proclamer anticipativement les lois qui régissent l'évolution de l'humanité. Ce sont non seulement les Connaisseurs Infaillibles des lois qui régissent l'évolution de l'humanité, mais aussi les premiers contestataires de l'ordre existant à leur époque.

Ainsi, par exemple, à un moment où partout la Loi du Talion était en vigueur, Jésus l'abolit pour la remplacer par la Loi du Pardon; ce qui a radicalement changé les relations humaines contribuant ainsi à l'union des tribus et des peuples. L'expérience a donné raison à Jésus, au point qu'avec le temps, Rome même a dû s'incliner devant lui. Jésus a donc été le premier à contester les lois en vigueur et à établir anticipativement de nouvelles lois conformes a révolution. Nous disons que Jésus était l'un des Connaisseurs Infaillibles des lois qui régissent l'évolution de l'humanité.

De même, il y a plus de cent ans, à une époque où le nationalisme était non seulement une loi, mais faisait partie de la foi, Bahá'u'lláh ra remplacé par la citoyenneté mondiale. A une époque où la femme était considérée comme inférieure à l'homme, Il a proclamé l'égalité des droits des deux sexes. A une époque où personne n'osait parler au Vatican du mariage des prêtres, Il a écrit au pape Pie IX une lettre où, entre autres, Il demande que les prêtres se marient et qu'ils choisissent un travail comme les autres; et bien d'autres défis aux lois et traditions de l'époque. Et qu'est-ce que nous voyons aujourd'hui? On conteste le nationalisme, les femmes contestent la supériorité des hommes, les prêtres contestent le célibat et, de plus, ils veulent avoir un travail comme les autres. En résumé, tout ce qui, il y a cent ans, était considéré comme défi ou utopie, devient aujourd'hui l'esprit même de notre époque. Bahá'u'lláh n'était-il pas, comme Jésus, un autre Connaisseur Infaillible des lois qui régissent l'évolution de l'humanité?

En ce qui concerne les problèmes d'éducation et d'instruction, la Foi Baha'ie y attache une telle importance que, selon les Écrits, l'éducation de tout enfant a la même valeur que l'éducation de l'enfant du Fondateur même de la Foi. De plus, il est recommandé que tout testament prévoie une part pour le cadre enseignant.

Sur le plan humain, les rapports entre le professeur et l'élève sont des rapports d'amis, puisqu'aux réunions mensuelles sans classe, ils se rencontrent régulièrement comme des amis, ils se parlent, ils se consultent, ils écoutent l'un l'autre, ils s'invitent l'un l'autre, ils se servent mutuellement. Ces rapports amicaux n'empêchent pas qu'au sein de l'établissement scolaire, la discipline soit strictement observée et que le rang du professeur soit strictement respecté.

Quant à la méthode d'enseignement, étant donné que chacun doit déterminer son avenir professionnel conformément à ses aptitudes, c'est au professeur d'observer, d'orienter son élève. Pour cela, naturellement, dans-les écoles baha'ies, on lui fournit les moyens nécessaires. Ce qui n'empêche que ces moyens d'observation, d'orientation aboutissant à la détermination, évoluent avec le temps.

Quant aux matières à enseigner, indiscutablement, c'est au cadre enseignant d'en décider. Car le fait même qu'on a des études à faire, implique que l'on n'est pas qualifié pour déterminer ce qu'il faut étudier. Mais là où les enseignements baha'is sont catégoriques et ce à quoi les responsables des écoles baha'ies se tiennent scrupuleusement, c'est à l'éducation du caractère qui est bien plus importante que la science traitant des fossiles et que l'étude des fondements d'une paix durable ne doit plus laisser de place à l'étude de l'histoire des guerres. N'est-ce pas cela qu'implique l'évolution de l'humanité à son stade actuel? Ne trouvons-nous pas dans tout cela la réponse aux contestations des jeunes relatives aux implications de l'évolution?

Et nous arrivons au quatrième objet de contestations, c'est-à-dire la demande de participation, participation en pensée naturellement, ce qui veut dire consultation.

Savoir se consulter, selon les enseignements baha'is, est une vertu. Mais entendons-nous sur l'esprit de consultation.

La consultation doit concilier deux qualités apparemment contradictoires: l'expression de la personnalité et l'effacement de la personnalité.

En effet, exprimer sa personnalité veut dire exprimer franchement et courageusement sa pensée: peu importe si elle peut ne pas être partagée par la majorité, ou même être carrément contrariée par une autre personne.

Effacer sa personnalité veut dire qu'on accepte l'opinion admise par la majorité, quelle qu'elle soit, comme si c'était notre propre opinion qui avait été admise.

Concilier ces deux qualités apparemment opposées, e t facile à comprendre quand on réalise que la vérité est comme une pierre précieuse à plusieurs facettes. Chacun voit une de ces facettes et, forcément, il 'y en a qui voient les facettes opposées, qu'ils doivent présenter; autrement dit ils doivent exprimer leurs opinions opposées. De cette façon, la vérité se présente à tous et sous tous ses aspects. Et les différents avis exprimés contribuent à ce que cette vérité soit découverte par tous.

Par conséquent, chacun apporte sa part dans la découverte de la vérité, et il devient facile d'admettre l'opinion votée comme le fruit de la contribution de chacun, comme l'opinion de chacun des participants. D'une manière imagée, les différents courants d'idées se rejoignent dans l'opinion votée comme les différents cours d'eau dans un océan OÙ il devient impossible de les distinguer. Cela signifie qu'après le vote définitif, les différentes personnalités bien exprimées par différentes pensées, s'effacent et l'unité est assurée, unité clans la diversité.

C'est dans cet esprit qu'aux réunions baha'ies, mensuelles et sans classes, se consultent patrons et ouvriers, professeurs et élèves, tous sans la moindre exception. Conduite de cette façon, la consultation ne peut plus laisser de prétexte aux contestations. Voilà, chers Amis, quelques réponses baha'ies aux contestations d'aujourd'hui. "Aujourd'hui" n'est peut-être pas le mot, car la voix de la contestation s'est levée il y a plus d'un siècle et elle a fait couler le sang de plus de 20000 martyrs qui préférèrent renoncer à leur vie plutôt qu'à leur contribution pour un MONDE NOUVEAU.

- un monde où la dignité humaine est respectée par TOUS, faisant sentir à chacun qu'il ne fait qu'UN avec tout le monde;

- un monde qui tout en contribuant à cette unité, combat tout ce qui abolit l'individualité et, par conséquent, s'achemine vers l'unité dans la diversité;

- un monde qui avance avec l'évolution; un monde où il y a participation et collaboration de tous, autrement dit un monde dirigé par la consultation.


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1.8. L'Homme de Demain n'aura plus peur

Chaque fois qu'on étudie le problème de la peur, il y a une histoire qui me revient à l'esprit et qui se trouve dans les Écrits bouddhistes. Permettez-moi de vous la raconter comme introduction à mon exposé.

Un jour, un lièvre s'installe sous un manguier et s'endort. Soudain, il entend un grand bruit. Il pense que c'est la fin du monde et il se met à courir. Quand les autres lièvres le voient courir, ils lui demandent: "Pourquoi cours-tu si vite?". Il répond: "La fin du monde arrive". A ces mots, ils se joignent tous à sa course. Quand les daims voient les lièvres courir, ils leur demandent: "Pourquoi courez-vous si vite?". Et les lièvres répondent

"Nous courons parce que la fin du monde arrive". Sur ce les daims se joignent à leur course. Ainsi chaque espèce, l'une après l'autre, se joint aux animaux qui courent affolés par le bruit de la fin du monde. Voyant tout le règne animal dans une course panique qui le conduirait à sa destruction, Bouddha intervient:

"Pourquoi courez-vous?" demande-t-il au dernier groupe qui s'était joint là la course.

"Parce que la fin du monde arrive" répondent ils.

"Ce n'est pas la fin du monde, se dit Bouddha. Cherchons pourquoi Ils pensent ainsi." Il s'informe alors auprès des espèces, l'une après l'autre, suivant la rumeur à la trace jusqu'aux daims et enfin jusqu'aux lièvres. Quand les lièvres lui disent qu'ils couraient parce que la fin du monde arrive, il leur demande quel lièvre avait dit cela. Ils lui désignent celui qui avait lancé la nouvelle. Alors il demande à ce dernier: "Où étais-tu et que faisais-tu quand tu as pensé que la fin du monde arrivait?". Le lièvre répond: "J'étais installé sous un manguier et je dormais".

"Tu as probablement entendu une mangue tomber, lui dit Bouddha, et tu as pensé que la fin du monde arrivait. Retournons à l'arbre où tu étais installé et cherchons s'il en est bien ainsi?". Ils se rendirent tous les deux à l'arbre et ils trouvèrent qu'effectivement une mangue était tombée où le lièvre s'était installé.

Ainsi Bouddha sauva tous les animaux de leur destruction.

Evidemment cette histoire ne devrait pas être prise à la lettre et l'on pourrait l'interpréter de plusieurs façons. L'une des interprétations ne serait elle pas celle-ci:

La peur est un attribut de la nature animale de l'homme, les lièvres et les daims sont les hommes pour qui un rien est la fin du monde, tant la peur les domine. Et la mission des Bouddhas 'est précisément de combattre la peur pour sauver le inonde.

Et je dis bien "la mission des Bouddhas" car pour les Bouddhistes tous les Hommes géniaux tels que Bouddha sont des Bouddhas, ces Hommes géniaux que nous appelons Prophètes. Quelle charmante façon de penser, qui revient en somme à dire que tous les Prophètes sont UN. Ce que Jésus a laissé entendre à ses disciples en disant:

"Avant qu'Abraham fût, je suis."

Ce que Muhammad a dit plus clairement:

"Tous les Prophètes, c'est moi."

Nous disions donc que la mission des Bouddhas ou des Messagers de Dieu, c'est d'apprendre à l'homme à maîtriser sa peur, car la peur conduit à la destruction, destruction de la santé, destruction de la personnalité avec ses capacités et sa moralité, et enfin, aujourd'hui, destruction de l'humanité.

Reprenons l'étude de ces points un par un.

D'abord les effets néfastes de la peur sur la santé; et cela est essentiel, étant donné que tous les enseignements religieux visent avant tout la santé du corps, ce serviteur de l'esprit. Si le serviteur est malade, le maître n'en souffre-t-il pas?

Or nombreuses sont les maladies dues à la peur. Ces maladies dans le passé étaient qualifiées d'imaginaires, aujourd'hui on les appelle psychosomatiques. "Imaginaires" parce qu'on n'y voyait aucun indice matériel, aucun microbe, aucune bactérie, "psychosomatique" "parce qu'à l'origine, il y a principalement la psychose de la peur. Et aujourd'hui les médecins estiment que la peur est à l'origine de 30 à 60 % des maladies." Quelques exemples illustrent bien ces maladies.

Une neurasthénique, persuadée d'être atteinte d'une maladie de coeur et craignant la mort par une crise cardiaque, s'adresse à un cardiologue:

- Je regrette de vous l'avouer, lui dit le médecin, votre mal me semble incurable.

- Je le sais bien, mais dites-moi au moins comment il s'appelle !

- La PEUR, répond le docteur.

La peur est un facteur destructeur de la personnalité, de ses capacités et de sa moralité.

Le meilleur pianiste, à l'instant où la peur s'empare de lui et qu'il n'est plus sûr du mouvement de ses doigts, échoue lamentablement dans son concert, à moins que, confiant en ses capacités, Il laisse ses doigts se mouvoir naturellement sur les touches.

Un autre exemple. On marche facilement sur le bord d'un trottoir surélevé d'une dizaine de centimètres par rapport à la chaussée, mais on a peur de marcher sur le bord de la terrasse d'une maison surélevée disons d'une dizaine de mètres par rapport à la même chaussée. Et cette peur paralyse tellement nos capacités qu'on se sent soumis à une force qui nous tire vers le bas et nous fait tomber.

La peur affecte la personnalité humaine au point de vue moral.

La peur fait que les fabricants de produits dont nous avons besoin baissent de plus en plus la qualité de ces produits. Avec la majoration des salaires, ils pourraient majorer les prix de leurs produits dans la même proportion, mais ils ne le font pas car ils ont peur que leur clientèle diminue. Et le pauvre client satisfait de ce que, malgré la majoration de son traitement, il paie presque le même prix pour une voiture, par exemple, s'aperçoit de son erreur peu de temps après quand il commence à avoir affaire au garagiste pour les réparations inévitables.

Un garagiste disait:

- J'achète les voitures d'occasion les moins chères et je les revends moins cher que je ne les achète.

- De quoi vivez-vous alors? lui a-t-on demandé.

- Des réparations.

Nous disions donc que, après avoir acheté des, produits de mauvaise qualité, en se voit trompé et on ne peut pas résister à prendre sa vengeance. Si on est commerçant, on se dit: "Moi aussi, pour ne pas perdre un client, je peux bien mentir une fois".

Or, il est facile de dire un mensonge, mais très difficile de n'en dire qu'un. Si' on est employé, mécanicien, plombier, on se venge à sa façon. Bernard Shaw dit:

"Les gens croient difficilement que le plomb puisse se changer en or jusqu'au jour où ils reçoivent la facture du plombier."

La peur, non seulement, est un facteur destructeur de la santé et de la personnalité mais, de nos jours, elle menace même la survie de l'humanité. En effet, les Super Grands, de peur d'être surpris par une attaque nucléaire, accumulent très dangereusement les armement thermonucléaires. Et il suffit d'une erreur ou d'une folie passagère d'un Super Grand pour qu'il ordonne d'appuyer sur un bouton et l'espèce humaine est anéantie.

Les savants et les penseurs d'aujourd'hui sont d'avis que, même s'il n'y a pas de guerre atomique, les dépenses militaires avec leurs conséquences telles que la misère et la famine à l'échelon planétaire, le mécontentement général, la violence, la révolte, les sabotages, les incendies, sont suffisants pour assurer l'anéantissement de l'humanité.

En résumé, nous voyons que la peur est un facteur destructeur de la santé, de la personnalité et, Dieu nous en garde, de l'humanité. Il faut donc nous en débarrasser. Je dis bien "nous" car tous nous sommes plus ou moins tourmentés par la peur.

Si nous jouissons d'une bonne santé, de peur de la perdre, nous nous disons qu'il faut bien manger et nous mangeons trop, ce qui nous expose davantage à toute sorte de maladies dues à la suralimentation. Quelqu'un a dit, non sans raison, que la moitié de ce que nous mangeons suffit pour nous nourrir, l'autre moitié sert à nourrir les médecins.

Si nous sommes employés, nous avons peur de perdre notre emploi. Si nous sommes patrons, nous avons peur de la chute des affaires. Si nous sommes à l'école, nous avons peur d'échouer aux examens. Quel que soit le manteau sous lequel la PEUR se déguise, elle nous atteint toujours et elle est devenue le MAL DU SIÈCLE.

Qui guérira ce mal? Qui nous apprendra à maîtriser la peur?

Puisque ce n'est pas la première fois dans l'histoire que les hommes sont tourmentés par la peur, voyons ce qui les en délivra.

Eh bien ! l'expérience du passé montre que c'est l'apparition d'Hommes géniaux qui produisait une telle mutation dans la nature humaine. Alors les hommes cessaient d'avoir peur, même de la chose la plus terrible, je veux dire de la mort. C'est la raison pour laquelle les historiens matérialistes appellent ces Hommes des MUTANTS, mutants que les croyants appellent PROPHÈTES.
Quelle que soit leur appellation, nous voyons que c'est par la FOI qu'ils inspirent à leurs adeptes que ceux-ci apprennent à maîtriser la peur. La Foi devient ainsi la première force qui permet de maîtriser la peur. Et, comme nous l'avons dit, sa puissance est telle que ceux qui s'y soumettent ne craignent même pas la mort. Nous comprenons donc pourquoi selon les Fondateurs de la Foi, ceux-là ont réellement la Foi qui n'ont pas peur même de la mort.

"Ceux-là sont mes adeptes qui portent leur croix", dit en substance Jésus.

"Suppliez la mort, si vous êtes véridiques", dit le prophète Muhammad.

Non moins catégorique est Bahá'u'lláh, le Fondateur de la Foi Baha'ie qui, de même, n'adresse Son Message qu'aux volontaires au martyre.

Et à son appel, il y a plus d'un siècle, non moins de 20000 personnes ont répondu. Vingt mille têtes sont tombées pour qu'aujourd'hui, nous n'ayons plus PEUR de quoi que ce soit. Ils nous ont inspirés par leur exemple, eux qui, par leur Foi, sont arrivés à maîtriser admirablement la peur.

Mais qu'est-ce que la FOI?

La foi consiste-t-elle à observer des rites? Précisément pas. Et ceci pour la simple raison que la première chose que font les Fondateurs de la Foi, c'est d'abolir le ou les rites en vigueur.

Ainsi, pour dire que la Foi n'est pas l'observance du sabbat, Jésus l'abolit, convaincu qu'Il était de ce que ce n'était qu'un symbole extérieur, avec un sens spirituel très profond, destiné à être révélé au Jour Promis.

Selon Jésus, la Foi se reconnaît à l'AMOUR, peu importe si on observe le sabbat ou non. Et ceux qui ont peur qu'on touche à ce commandement de Moise,

à ce "talent" laissé par Moise, sans en saisir le vrai sens qui est l'AMOUR, ceux-là perdent leur foi. Alors, dans sa bonté infinie, afin de faciliter la reconnaissance du Promis, Jésus énonce sa fameuse parabole des cinq talents. Il y prédit qu'il en sera de même en ce qui concerne ses disciples, qui auront "peur" qu'on "touche" aux "talents" laissés par Lui, voulant qu'on les garde intacts, sans y voir le sens spirituel qu'est l'AMOUR, ce signe sublime de la Foi.

A titre d'exemple, permettez-moi de mentionner le baptême, considéré par les Chrétiens comme aussi sacré que le sabbat par les Juifs.

Ce baptême, le Fondateur de la Foi Baha'ie l'abolit aujourd'hui, comme Jésus a aboli le sabbat il y a 2000 ans.

Seulement, compte tenu de la maturité de l'humanité, Bahá'u'lláh en a expliqué la vraie signification: ce que Jésus n'avait pas voulu faire pour le sabbat, étant donné que l'humanité se trouvait encore au stade de son enfance et n'était pas en mesure de "porter" cette explication selon les termes mêmes de Jésus.

Voyons quelle est, selon les enseignements baha'is, la vraie signification du baptême.

D'abord l'Évangile parle de deux baptêmes, baptême d'eau et baptême du feu. Si l'on fait les deux baptêmes, tout en les prenant à la lettre, comme l'eau détruit le feu, l'un abolit l'autre. On en conclut que le baptême d'eau et le baptême de feu ne sont que des symboles cachant un sens profond qui est le même dans les deux cas. Quel est ce sens? C'est l'AMOUR. Je m'explique. L'eau signifie ce qui donne la vie. Il y a de l'eau dans tout ce qui existe, même dans la pierre. Or l'amour aussi signifie ce qui donne la vie. Saint Jean dit:

"Nous sommes passés de la mort à la vie car nous aimons" I Jean 3/4. Et aujourd'hui la science démontre que, sans l'attraction et l'amour, rien ne peut exister. Par conséquent, être baptisé d'eau signifie être baptisé d'amour. Autrement dit, engager sa conscience en tout ce qui contribue à l'AMOUR, ce qui confirme la définition des Chrétiens donnée par Jésus:

"A ce signe vous reconnaîtrez qu'ils sont mes adeptes, s'ils ont de l'amour les uns pour les autres."

Avec cette explication du baptême, il ne reste plus de contradiction entre le baptême d'eau et le baptême du feu.

En effet, lorsqu'on a de l'amour en tant qu'attribut, on aime tout le monde sans distinction de race, de classe ou de couleur. On brûle tous ces préjugés. L'amour brûle comme le feu tous les préjugés. Le baptême devient le baptême de feu.

Chers amis, dans le monde d'aujourd'hui qui a tellement besoin d'amour, ne vaut-il pas mieux abandonner le baptême physique pour l'interpréter spirituellement c'est-à-dire adopter le baptême d'amour?

Ceci dit, revenons au problème de la FOI en tant que première puissance qui permet de maîtriser la peur.

Lorsqu'on a la foi, on a la conviction, aussi bien mentale que de coeur, qu'on n'est pas seul, abandonné à son sort, qu'il y a quelqu'UN Qui nous aime, Qui se soucie de nous et en Qui on peut avoir confiance en toutes circonstances. Et ce quelqu'UN n'est pas quelque part dans les cieux mais Il nous accompagne toujours, Il est par Ses attributs en nous-mêmes. Là-dessus, , les citations baha'ies sont abondantes. Mentionnons-en quelques-unes:

- "Je suis ton compagnon et tu désespères de Moi?"

Dieu nous tient donc toujours compagnie et nous n'avons pas à désespérer de notre solitude apparente.

- "Tu es Ma lampe et Ma lumière est en toi."

Dieu que est la Lumière qui guide est donc en nous pour nous guider.

- "Tu es Ma forteresse; pénètres-y pour que tu puisses demeurer en sécurité."

Nous devons donc pénétrer dans notre "forteresse" c'est-à-dire nous devons prendre conscience de ce que nous sommes assurés contre tout danger et que, par conséquent, nous n'avons rien à craindre.

A part l'influence mystérieuse de la Foi, on peut rapprocher la lecture de ces textes, de la lecture d'une lettre qui nous parle de notre force morale, de nos capacités au moment où nous nous sentons faibles et abandonnés. Cette lettre peut-elle nous laisser insensible? Ne nous encourage-t-elle pas? Ne remonte-t-elle pas notre moral?

Élevés dans un tel esprit, convaincus de l'existence d'une "forteresse" en nous qui nous protège, confiants en nos capacités et en notre puissance, pouvons-nous nous laisser dominer par la peur? Non ! La peur n'a pas d'accès là où il y a la FOI. Voilà pourquoi les anciens disaient

La PEUR a frappé à la porte.

Il n'y a personne, a répondu la Foi.

Une deuxième force qui permet de maîtriser la PEUR, c'est la RAISON.

En effet, puisque la FOI doit être en accord avec la RAISON, si la FOI contribue à ce qu'on arrive à maîtriser la peur, la Raison doit agir dans le même sens. Autrement dit, la Raison aussi doit collaborer avec elle, elle doit contribuer à ce qu'on arrive à maîtriser la peur. Avant d'aller plus loin, notons que cet accord de la Foi avec la Raison prend une importance particulière à notre époque où l'humanité dans son évolution a atteint l'âge de raison. Et c'est pour cela que l'intelligibilité de la Foi constitue l'un des principes sacrés chez les Baha'is dont les Écrits s'adressent à l'homme en tant que "possesseur d'intelligence et d'entendement."

Ceci dit, voyons comment la Raison contribue à ce qu'on maîtrise la peur.

"Une maîtresse d'école assez âgée, étant en vacances, s'arrête dans une auberge vieillotte. A peine arrivée, d'un naturel craintif, elle se met à parcourir les corridors à la recherche d'une sortie de secours en cas d'incendie. La première porte qu'elle ouvre donne dans une salle de bain où un vieillard était en train de prendre une douche. Surprise par la vue d'un vieillard nu, la dame s'écrie: "Oh, pardon, je cherchais une sortie de secours en cas d'incendie." Et elle s'enfuit à toutes jambes.

Mais elle n'a pas fait dix pas qu'elle se voit poursuivie par le vieillard nu qui hurle: "De quel côté est le feu?"

Que le vieillard désire protéger sa vie, c'est normal, ce n'est pas de là peur. Mais là où il s'affole, où il perd la raison au mot "incendie", çà, c'est de la peur. Et cette peur, il pouvait la maîtriser en raisonnant un peu, en ayant recours à sa raison. Platon a donc raison en disant que le courage (contrepoison de la peur vient quand on met un pont entre la RAISON et le désir de se protéger.

La Raison est donc une force qui contribue à ce qu'on arrive à maîtriser la peur.

A ce propos, l'histoire du Bouddha est très instructive. Les "lièvres et les daims" (symboles des gens peureux) avaient peur parce qu'ils ne savaient pas raisonner. Et Bouddha est intervenu pour leur apprendre à raisonner et, par voie de conséquence, leur apprendre à maîtriser leur peur.

Une troisième force qui permet de maîtriser la peur, c'est FAMOUR. Mais entendons-nous sur le terme AIMER.

Quand nous disons: "J'aime les bonbons, j'aime les femmes", est-ce vraiment de l'amour? Non, pour la simple raison que dans le premier cas, il s'agit de notre gourmandise et dans le 'second, de notre convoitise. Gourmandise ou convoitise une fois satisfaites, le soi-disant amour, qui en réalité n'est qu'un désir passager, disparaît quand cesse le plaisir. Tandis qu'entendre un mot gentil, ou se sentir l'objet d'une sollicitude, cela fait toujours plaisir et ce n'est plus un désir passager. On aime toujours, et à tout moment, ces mots gentils et cette sollicitude. C'est donc là qu'il faut chercher l'amour. Un bon exemple est fourni par l'amour maternel.

Une mère pense toujours à son bébé, elle se soucie de lui, elle ne fait que le réjouir; s'il tombe malade, c'est comme si elle-même tombait malade, s'il pleure, c'est comme si elle-même pleurait, s'il rit, c'est comme si elle-même riait. L'enfant et la mère ne font qu'UN. C'est cet esprit d'unité qui manifeste l'amour maternel.

L'unité est donc la manifestation extérieure de l'amour.

Si l'on arrive à un tel état d'esprit, c'est qu'on a de l'amour. Et lorsqu'on arrive à un tel état d'esprit, la peur disparaît. Car la peur vient de ce que, non seulement nous ne pensons pas que nous et les autres ne faisons qu'UN, mais de ce que nous oublions totalement les autres, comme s'ils n'exis talent même pas.

Pour éliminer la peur, nous devons donc penser qu'il n'y a pas que nous qui comptons, que les autres sont aussi comme nous, que nous devons nous soucier des autres comme de nous-mêmes, autrement dit il faut que nous ayons de l'AMOUR pour les autres.

Cette façon de penser, qui manifeste l'amour, est appliquée pratiquement dans la vie communautaire baha'ie grâce à la participation régulière de tous à des réunions mensuelles sans classe où tous, patrons et ouvriers, professeurs et élèves, apprennent à se sentir UN.

Et c'est cette même façon de penser manifestant l'unité de tous qui est rappelée dans les prières baha'ies destinées à être récitées quand on a des difficultés à affronter et que l'on veut maîtriser la peur en attendant qu'elles soient aplanies; ou bien lorsqu'on a une décision grave à prendre et que l'on a peur qu'elle ne soit pas la bonne.

Ainsi, par exemple, la prière que les Baha'i ont l'habitude de réciter lorsqu'ils ont de graves difficultés à surmonter, dit:

"Qui hormis Dieu dissipe les difficultés? Dis: Loué soit Dieu, Il est Dieu. Tous sont Ses serviteurs et tous dépendent de Son commandement."

Nous voyons ainsi qu'au lieu de dire "Ne suis-je pas Ton serviteur" la prière en question précise "Tous sont Tes serviteurs" ce qui Evidemment traduit l'esprit d'unité avec les autres, esprit d'unité manifestant PAMOUR.

Dans le même ordre d'idées, la prière qu'on récite avant de prendre une grave décision dit entre autres:

"Guide-moi, dans toutes les affaires, vers ce qui conduit à l'élévation du rang de Tes serviteurs." Une fois de plus, on ne demande pas à Dieu l'élévation de son propre rang, mais l'élévation de tom les serviteurs: ce qui traduit toujours l'esprit d'unité, manifestation extérieure de l'amour.

Après cette étude succincte des forces qui permettent de maîtriser la peur: la foi, la raison et l'amour, ne pourrait-on pas conclure qu'au fond toutes ces forces se résument en une et une seule: la force de la FOI; car la vraie foi est intelligente (une foi inintelligente n'est pas la foi) et de plus elle se reconnaît à l'amour, l'amour étant le premier signe de la foi.

C'est donc dans la foi intelligente, se manifestant par l'amour qu'on doit chercher l'ultime moyen pour maîtriser la peur, en tant que facteur destructeur de la santé et de la personnalité. Il reste la peur de la destruction de l'humanité. Là encore, il n'y a pas à s'inquiéter, si l'on applique un des principes de la Foi baha'ie, principe qui exige la constitution d'un gouvernement mondial, doté d'une Force Armée capable d'arrêter tout agresseur aussi puissant ou super-puissant soit-il. Ce principe paraissait utopique il y a cent ans, quand Bahá'u'lláh l'a proclamé. Et depuis, Ses disciples, je veux dire les Baha'is, à part les milliers de martyrs qui se sont offerts, n'ont cessé de travailler pour la préparation de l'opinion publique dans ce but.

Vous vous imaginez combien aujourd'hui ils sont heureux de constater que l'on commence à ne plus y voir une utopie, mais une nécessité; que votre voix et celles des Baha'is ne font qu'UNE. Et lorsque l'opinion publique est bien préparée, aucune force ne peut lui résister. Il n'est donc pas loin, le Jour béni, où il sera mis f in à cette terrible course aux armements avec ses conséquences néfastes. Et l'homme de demain n'aura plus peur, car vous et nous, nous ne faisons qu'UN.


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1.9. Les Preuves par l'Histoire

Un bédouin, assez naïf, décide d'offrir un cadeau au roi. Qu'est-ce que je vais lui offrir, se demande t-il? Ma fille? il a tout un harem; mon chameau? il en a des troupeaux; un bijou? il a des trésors. Je vais lui offrir, décide-t-il, quelque chose de rare. C'est de l'eau que je vais lui offrir, elle est tellement rare dans le désert où nous habitons ! Et il remplit son pot d'eau, qu'il présente au roi. Celui-ci très touché par sa simplicité, le récompense généreusement. Mais au moment de le congédier, il dit à ses serviteurs de ne pas le reconduire par le chemin traversant son palais, et le long duquel courait une large rivière, mais par un autre chemin qui ne lui permet pas de voir cette rivière.

Chers Amis, le bédouin c'est moi, le roi c'est vous, le pot d'eau c'est cet extrait de l'histoire des Martyrs de notre chère Foi, histoire que vous connaissez dans toute son entièreté, histoire en comparaison de laquelle le présent exposé n'est qu'un pot d'eau devant une immense rivière.

Je vais donc vous exposer le récit des Sept Martyrs de Téhéran qui figurent parmi les premiers Martyrs de notre Foi. Pour plus de simplicité, nous allons les appeler par leurs petits noms.


- 1° Le premier de ces martyrs, c'est SIYYID ALI.

C'est l'oncle maternel du Bab (Précurseur de la Foi Baha'ie). Il serait plus exact de dire que, pratiquement, il servait de père au Bab, étant donné que c'est à lui que le Bab fut confié quand, tout petit, il perdit Son père; que c'est grâce à lui que l'arrestation du Bab, après Sa déclaration, ne fut pas maintenue; que c'est lui qui, avec dévouement, servait d'intermédiaire entre le Bab et les disciples qui venaient Le voir à Shiraz. Comme profession, il exerçait le commerce, où il jouissait d'un grand crédit aussi bien dans sa ville natale qu'à Téhéran, la capitale. Devenu adepte de son neveu, le Bab, il Le visita dans la prison forteresse de Chihriq. De retour, il s'installa dans la capitale jusqu'au jour où il fut arrêté comme disciple du Bab, avec d'autres coreligionnaires. Et il fut le premier à être amené devant le Premier Ministre.

- Le magistrat en chef, lui dit le Grand Vizir, est peu disposé à infliger la moindre peine aux descendants du Prophète, ce qui est votre cas. D'éminents commerçants sont impatients d'offrir votre rançon. Un simple désaveu verbal de votre foi suffit pour vous rendre la liberté. Et je vous promets qu'alors vous passerez le restant de votre vie dans l'honneur et la dignité, sous la protection de votre souverain.

- Excellence, répondit Siyyid Ali, si d'autres avant moi ont rejeté une telle offre, préférant le martyre au désaveu de leur foi, je vous assure que je désire aussi ardemment la même chose. Car renier la foi en Bab signifie renier tous les Messagers de Dieu qui l'ont précédé. D'autant plus que tout ce que j'ai entendu dire sur les Messagers du passé, j'ai eu le privilège de le retrouver chez le Bab, et ceci depuis Sa tendre enfance. Tout en Lui me rappelle Ses illustres prédécesseurs.

Comment puis-je Le renier? Je vous demande de nie permettre d'être le premier à être sacrifié pour Son amour.

Stupéfait d'une telle réponse et emporté par le désespoir, le Vizir ordonna de l'emmener pour le décapiter.

Au moment où on le conduisait vers le lieu de l'exécution, il récitait ces vers de Hafiz:

"Je te loue ô Seigneur D'avoir exaucé ma prière Quelle joie, quel bonheur Car enfin j'ai l'objet de ma requête."

Arrivé au lieu d'exécution, il s'adressa d'abord à la foule en ces termes:

"Durant plus de mille ans, vous avez prié et vous continuez à prier pour que le Promis se manifeste. Maintenant qu'Il est venu, vous L'avez exilé dans un coin perdu et isolé et vous voulez exterminer Ses compagnons."

Puis levant la tête vers le ciel, il s'exclama:

"0 Dieu, mon Dieu, Tu vois comment ils sont en train de tuer un descendant de Ton Prophète sans qu'il ait commis de faute. Je Te demande de leur pardonner ce qu'ils font et de leur permettre de sortir du sommeil de négligence."

Après cette prière, il s'adressa au bourreau en récitant ces vers:

Jusque quand resterai-je séparé de Lui?
Otez-moi cet obstacle qu'est la vie.
Et cette tête coupez-la je vous prie
C'est l'Ami qui donnera une autre tête, c'est l'Ami..

Ces paroles touchèrent profondément le bourreau qui, sous prétexte d'aiguiser son épée, se retira précipitamment pour ne plus revenir." Car, expliquait il, c'est un saint qu'on me demande de décapiter, et non pas un criminel comme c'était convenu lors de mon engagement.


- 2° Après lui vint le tour de QURBAN ALI.

C'était un derviche considéré comme un chef religieux jouissant du respect de tous par sa piété et la noblesse de son caractère. Il avait beaucoup de disciples qui l'acclamaient partout où il allait, ce qui ne lui plaisait nullement. Car il aimait la simplicité et ceci au point que même, comme vêtement, il portait une tunique blanche recouverte d'un aba (manteau) de tissu grossier.

Ayant embrassé la foi Babie, il s'y donna corps et âme, consacrant tout son temps à sa propagation. Le jour où il fut arrêté, la foule assiégea la résidence du Grand Vizir devant lequel on l'amena.

- Depuis la nuit dernière, lui dit le Premier Ministre, je suis assiégé par des gens de toutes les classes, ce qui est la preuve de la haute position que vous occupez grâce à votre savoir et à votre influence. Vous n'êtes donc pas inférieur au Bab Lui-même. Pourquoi alors vous déclarer Son adepte?

- Précisément, rétorqua avec hardiesse QURBAN ALI, c'est le savoir que j'ai acquis qui m'a amené à m'incliner devant le Bab comme mon Seigneur. Quant à mon influence sur les, gens, bien que j'aie des milliers d'admirateurs, je ne suis pas capable de changer le coeur du plus petit d'entre eux. Tandis que le Bab transforme les meurs au point que les gens se sacrifient pour Lui.

- Que vos paroles soient de Dieu ou pas, l'interrompit le Premier Ministre, je n'ai pas envie de prononcer la sentence de mort contre un homme comme vous qui possède un rang si élevé.

- Pourquoi hésiter? s'écria la victime impatiente. Ne savez-vous pas que les noms descendent du ciel?

Mon nom est QURBAN ALI, c'est-à-dire "sacrifié pour ALI". Depuis les temps immémoriaux mon nom a donc été inscrit sur la liste de ceux qui sont destinés à se sacrifier pour ALI (le Bab). Et, aujourd'hui, le jour du sacrifice est arrivé. N'hésitez pas, et soyez assuré que je ne vous blâmerai jamais pour votre acte. Bien au contraire, plus tôt vous me ferez décapiter, plus grande sera ma reconnaissance.

- Sortez d'ici, s'écria le Premier Ministre. Un moment de plus, et je serai victime de votre magie.

- Pour ça, ne vous inquiétez pas, car cette magie ne peut agir que sur ceux qui ont le coeur pur.

Exaspéré par une telle réponse, le Premier Ministre se leva de son siège, et tout en tremblant de colère dit au bourreau:

- L'épée seule peut faire taire ces égarés ! Ce n'est plus la peine de me les amener. Relâchez ceux que vous arriverez à persuader de renier leur foi; quant aux autres, décapitez-les.

Amené sur le lieu de son martyre, il s'adressa à la foule en ces termes:

- Écoutez-moi, vous qui prétendez être disciples de l'Apôtre de Dieu. Le Prophète Muhammad qui était venu de Hijaz, aujourd'hui est revenu de Shiraz en la personne du Bab. Une rose n'est-elle pas une rose de quelque jardin et à quelque temps qu'elle apparaisse?

A la vue du corps de SIYYID ALI, décapité et saignant à ses pieds, il ne put s'empêcher de se jeter sur lui pour le prendre dans ses bras, et s'écria:

- Salut, ô jour de réjouissances mutuelles, jour de notre réunion avec le Bien-Aimé.

Puis s'adressant au bourreau:

- Approche-toi et porte ton coup, car mon fidèle compagnon ne veut pas me lâcher, et me dit de me hâter pour arriver ensemble à la cour du Bien Aimé.

Pour en finir, le bourreau ne put que lui porter son coup par derrière, à la nuque. Mais ce coup fit tomber son turban. Et la victime s'écria dans une extase inimaginable:

Quel bonheur pour moi en ce jour !
Enivré par le vin de l'Amour,
Je ne sais: mon turban ou la tête,
Dois-je offrir à l'Ami, à cette fête.

C'étaient ses dernières paroles. Le coup fatal le frappa et il devint réellement QURBAN ALI, c'est à dire sacrifié pour ALI (le Bab).


- 3° Vint alors de tour de MULLA ISMA'IL

C'était un mulla (théologien musulman'. Il avait adhéré à la Cause du Bab à Shiraz même. Après quoi, il était parti pour la province de Khurasan afin d'y enseigner la Foi. Il participa au fameux congrès de Badasht, où les adeptes du Bab comprirent le caractère indépendant de la nouvelle Foi en tant qu'une nouvelle Révélation avec Ses Écritures, Ses Lois, comme ce fut le cas des Révélations mosaïque, chrétienne ou islamique.

Après ce congrès, son ardeur pour la Foi redoubla, ce qui l'amena finalement au champ de martyre.

Avant qu'il ne soit décapité quelqu'un vint pour lui dire:

- Il y a un homme qui est prêt à payer ta rançon afin de te sauver la vie. Quel mal y a-t-il, quand il s'agit de la vie, de dire deux mots: Je ne suis pas Babi?

- Même sans rançon en m'aurait libéré si seulement j'avais voulu rejeter ma foi ! Et il récita ces vers:

Informe donc Isma'il ô Zéphir.
Qu'engagé sur le chemin de l'Ami
On ne peut plus reculer, on ne peut plus revenir.
On ne doit plus s'attacher à la vie.

Puis tournant son regard vers les corps des deux martyrs qui gisaient immobiles dans les bras l'un de l'autre, Il s'écria:

- Bien fait, mes chers amis. Vous avez transformé Téhéran en paradis. Si seulement j'avais pu vous précéder.

Ceci dit, il tira de sa poche quelques pièces qui lui restaient pour demander au bourreau de lui acheter un peu de candi. Il en mit quelques-uns dans sa bouche et le reste, il le donna au bourreau afin de lui adoucir la bouche.

- Je t'ai pardonné, lui dit-il. Approche et porte ton coup. Il y a trente ans que j'attends ce jour béni et je craignais ne pas y arriver.

Puis fixant son regard vers le ciel, il s'écria:

- Accepte-moi, ô mon Dieu, aussi indigne que je sois, et inscris mon nom sur la liste de ceux qui ont sacrifié leur vie par amour pour Toi.

Il était en train de prier lorsque le bourreau mit fin à ses supplications.


- 4° La quatrième victime conduite à l'échafaud fut un docteur en théologie islamique SIYYID HUSAYN.

Avant d'être décapité, il s'adressa à la foule en ces termes:

- Écoutez-moi ô adeptes de l'Islam. Je m'appelle HUSAYN. Je suis descendant de l'Imam Husayn. Les juristes les plus éminents des lieux saints de l'Islam m'ont donné le titre de MUJTAHID (docteur en théologie islamique) m'autorisant ainsi à interpréter les enseignements islamiques. Ce n'est que récemment que j'ai appris le Message du Bab.

Et c'est sur la base des prophéties accomplies que je L'ai accepté comme le Promis de tous les Messagers du passé: Moise, Jésus, Muhammad. Si donc je Le renie je Les ai reniés tous.

Demandez à vos chefs religieux qu'ils se rassemblent en une réunion où je leur prouverai la véracité de cette Cause. Si j'y arrive, qu'on cesse de verser le sang des innocents. Si j'échoue, qu'on m'inflige la punition que je mérite.

À peine avait-il prononcé ces paroles qu'un officier au service du Premier Ministre intervint avec orgueil:

- Je porte sur moi ton arrêt de mort signé par sept des plus éminents docteurs de la loi islamique. Ils t'ont condamné à mort comme infidèle. Je répondrai donc moi-même devant Dieu, au Jour du Jugement, de ton exécution.

Ceci dit, il tira son poignard et frappa le condamné avec une telle force que celui-ci tomba aussitôt raide mort à ses pieds.


- 5° Peu après MUHAMMAD TAQI fut amené sur la scène d'exécution. Avec un sentiment de mépris provoqué par le spectacle lugubre devant lequel il se trouvait, se tournant vers le bourreau, il s'écria:

Dépêche-toi de me tuer, car je suis impatient de rejoindre mon bien aimé HUSAYN. Vivre après lui est une torture que je ne puis supporter.


- 6° A peine eut-il prononcé ces mots que SIYYID MURTADA se jeta sur son corps allongé par terre pour être décapité.

- Non, dit-il, c'est à moi d'offrir ma vie avant lui, car je suis descendant du Prophète et mon martyre serait plus méritoire aux yeux de Dieu.


- 7° Au moment où ces deux héros se disputaient la coupe du martyre, se précipita en avant MUHAMMAD HUSAYN.

- Jamais je ne consentirai à me séparer de mon ami chèrement aimé, de qui j'ai reçu tant d'affection, s'écria-t-il en se jetant sur le corps décapité de MULLA ISMA'IL.

Leur impatience à se devancer l'un l'autre afin d'offrir leur vie pour leur Foi étonna la foule, qui se demandait lequel serait décapité avant les deux autres. Et finalement on les a décapités tous les trois en un seul et même moment.

En lisant l'histoire, rarement on trouve une page relatant la manifestation d'une si grande foi parmi toutes les classes de la société: théologiens, derviches, commerçants, tous jouissant du respect et de la considération de leurs concitoyens. Malgré toutes les promesses alléchantes faites pour les détourner du danger qui menaçait leur vie, malgré toute la pression que les milieux influents exerçaient sur eux, malgré les scènes d'atrocités dont ils étaient témoins, ils n'ont pas voulu consentir à un simple désaveu verbal. Bien au contraire, tous, empressés de sacrifier leur vie, s'offrirent à l'épée du bourreau.

Ils ne furent pas sept seulement. Ils furent plus de 20000 qui, originaires de toutes les religions et classes, tombèrent martyrs pour une CAUSE COMMUNE. Quelle est la nature de cette cause? C'est la question qu'on ne peut s'empêcher de se poser. Afin d'y répondre nous allons envisager les différents cas qui se présentent à la naissance d'une nouvelle doctrine. D'une manière générale, chaque fois qu'on est en présence d'une nouvelle doctrine qui réussit pour un temps plus ou moins long, on peut envisager l'un de ces quatre cas.

Premier cas. La doctrine en question est contraire à la Foi et à la Raison, mais elle satisfait les désirs temporels de l'homme.

Elle peut réussir pour un certain temps, surtout si elle est appuyée par la force militaire.

Comme exemple, on peut citer la doctrine nazie qui exigeait l'anéantissement de toute une race (la race juive), ce qui est contraire à la raison et ce qui est en contradiction avec la Foi. Mais comme elle prêchait la supériorité du peuple allemand et la nécessité de sa domination sur les autres peuples, appuyée par une gigantesque force militaire elle a eu du succès pendant un certain temps, ce qui est compréhensible.

Deuxième cas. La doctrine en question est contraire à la raison mais conforme à la Foi, telle qu'elle est apparemment exposée par les Écritures. Une telle doctrine peut également réussir.

A titre d'exemple, citons la doctrine de l'ascension corporelle de Jésus, à laquelle croyait fermement le monde chrétien, parce que l'Évangile dit que Jésus est monté au ciel. Cette doctrine a bien réussi dans le passé, mais elle commence à perdre du terrain à cause de sa contradiction avec la raison.

Troisième cas. La doctrine en question est contraire à la Foi mais apparemment satisfait la raison. Elle peut également réussir pour un certain temps.

Comme exemple, citons les doctrines qui préconisent la lutte des classes, afin de les supprimer et d'arriver à l'uniformité. De telles doctrines sont contraires à la Foi qui enseigne la collaboration et le service au lieu de la lutte et de l'antagonisme et qui est d'accord avec l'existence des classes dans la société. Mais comme la répartition des biens et l'uniformité satisfont apparemment la raison, de telles doctrines peuvent réussir pour un certain temps.

Quatrième cas. La nouvelle doctrine est apparemment en contradiction avec la Foi telle qu'elle est professée par les gens et avec leur façon de raisonner.

De plus, elle ne satisfait nullement leurs désirs temporels et n'est appuyée par aucune force militaire.

Une telle doctrine, en se plaçant du point de vue purement humain, ne doit pas avoir la moindre chance de réussir. Et, si elle réussit, c'est qu'il y a une force invisible surhumaine, surnaturelle qui l'assiste. Cette force invisible, surhumaine, surnaturelle, on l'appelle Force Divine. Et c'est le cas des différentes doctrines religieuses.

Ainsi, par exemple, il y a 2000 ans, un homme (Jésus Christ) vient et apporte une doctrine qui dit: "Si on te frappe sur la joue gauche, présente la joue droite", ce qui ne paraissait pas en accord avec la raison de Ses contemporains pour qui "oeil pour oeil, dent pour dent" était bien plus raisonnable. De plus. cette doctrine abolissait le sabbat ce qui était contraire aux textes de la Foi Judaïque. Elle ne satisfaisait pas non plus les désirs temporels, mais, bien au contraire, exigeait de ses adeptes qu'ils "portent leur croix". Quant à l'usage de la force militaire, elle l'interdisait en termes catégoriques. "Remets ton épée à sa place, car tous ceux qui prendront l'épée périront par l'épée." La doctrine chrétienne ne jouissait donc d'aucun des facteurs habituels qui contribuent à la propagation de toute nouvelle doctrine. Et malgré cela, la doctrine chrétienne s'est propagée magistralement et elle dure encore. C'est que cette doctrine était d'origine divine et assistée par Dieu.

De même, il y a plus d'un siècle, un Homme (Bahá'u'lláh) vient et apporte une nouvelle doctrine qui, entre autres, abolit les rites de toutes les religions, rites considérés jusqu'alors comme faisant partie intégrante de la Foi.

Donc, contradiction avec la Foi telle qu'elle était professée par Ses contemporains.

Il place la citoyenneté mondiale au-dessus de l'amour de la patrie, Il proclame l'égalité des femmes et des hommes, l'égalité raciale et bien d'autres principes qui, à Son époque, ne paraissaient pas du tout raisonnables. Donc, contradiction avec la raison.

Loin de satisfaire les caprices et les désirs temporels, comme Jésus Il dit "Il vaut mieux être tué plutôt que de tuer".

La doctrine Baha'ie ne jouissait donc d'aucun des facteurs habituels qui contribuent à la propagation de toute nouvelle doctrine. Et malgré cela, elle a triomphé, se propageant mystérieusement dans tous les pays, parmi tous les peuples, toutes les races et toutes les couches de la société. De sorte qu'aujourd'hui, le nom BAHA'I est connu partout. La Presse, les hommes d'Etat, les philosophes en parlent en termes des plus élogieux.

La revue "Planète" dans son numéro de janvier février 1970, écrit en conclusion de son article sur la Foi baha'ie:

"... Il faut bien constater que l'unité religieuse et l'édification d'une société pacifique ne sont pas une utopie puisqu'elles sont réalités au sein de la foi mondiale baha'ie qui est établie dans 265 pays et territoires. Là, des millions d'hommes et de femmes de toutes races, nationalités, classes, croyances, dont les parents étaient Hindouistes, Bouddhistes, Zoroastriens, Juifs, Chrétiens, Musulmans, libre penseurs, athées ou autres, se sont unis et travaillent aux mômes buts."

Selon Gandhi, "la Foi Baha'ie est la consolation de l'humanité".

Selon Tolstoï, "La Foi Baha'ie se présente comme la forme la plus pure et la plus élevée du sentiment religieux".

Une doctrine religieuse qui, à sa naissance, comme la Foi Chrétienne, abolissait les rites en vigueur, défiait la "foi" de ses contemporains, combattait les structures sociales établies, contrariait leur façon de "raisonner", qui ne satisfaisait pas leurs désirs temporels, qui n'était appuyée par aucune force militaire et qui, malgré tout cela, a triomphé, pouvait-elle ne pas être de Dieu?

Maison d'Éditions Baha'ies - D / 1971 / 1547 110


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2. FASCICULE 2 - l'amour universel

A mon cher ami A. Nakhjavani, qui par ses précieux conseils m'a donné le courage d'ajouter cette deuxième goutte aux sources intarissables des commentaires baha'i sur l'AMOUR UNIVERSEL.

PRÉFACE

Les encouragements des amis m'ont incité à ajouter les pages suivantes à celles déjà présentées sous forme d'un fascicule intitulé: LE COURAGE D'AIMER.

Ce recueil s'inscrit dès lors dans la même conception que le précédent. Il ne se présente donc pas, lui non plus, comme un livre avec différents chapitres, mais regroupe quelques conférences indépendantes les unes des autres. C'est à cause de cette indépendance, et du fait que le courage d'aimer, abordé sous quelque aspect que ce soit, implique l'application de principes tels que:

- la recherche personnelle et indépendante de la vérité;
- l'abandon des préjugés;
- l'unité du genre humain;
- la citoyenneté mondiale;
- la valeur religieuse du travail;
- l'intelligibilité de la foi; ...

qu'il arrive que le même sujet se répète sous différentes formes. Pour cette répétition, je demanderai donc à nouveau l'indulgence du lecteur.


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2.1. Le but de la vie c'est de se faire des amis

Comment se faire des amis est la question que l'homme se pose depuis que le monde est monde. Et la réponse en est toujours la même: il faut avoir le courage d'aimer et de montrer qu'on aime. Je dis bien: et de montrer qu'on aime, car aimer sans montrer qu'on aime n'est pas suffisant.

Concernant cette question, j'ai lu dans le périodique Sélection une histoire vécue, racontée par un médecin de campagne. Si vous le voulez bien, c'est de cette histoire que je vais vous parler d'abord.

"Je connaissais, raconte le médecin en question, un riche fermier un peu naïf qui s'était marié à une jeune fille, serveuse dans le restaurant où il prenait ses repas. Au début du mariage, il semblait que tout allait bien. Mais peu de temps après, la santé de sa femme commença à l'inquiéter: elle se plaignait de terribles maux de tête. Je fus appelé auprès d'elle, mais ne découvris rien. Je pensai alors qu'elle pouvait ne pas être heureuse. Aussi, lors de ma seconde visite, lui demandai-je si son mari était gentil et attentionné à son égard. Elle me répondit que son mari était gentil, mais qu'il ne disait pas grand chose, alors qu'une femme voudrait bien que son mari lui parle un peu.

"Peu de temps après, elle fut atteinte d'une crise aiguë d'appendicite, et je dus l'opérer d'urgence. L'opération réussit, mais comme elle était déjà faible, son état restait critique. Deux transfusions de sang s'avérèrent nécessaires, sans succès cependant.

- A quoi bon ces transfusions, me dit-elle, puisque mon mari n'a pas besoin de moi.

"De retour à mon cabinet, j'informai le mari de l'état critique de son épouse, tout en lui précisant cependant qu'elle n'avait pas envie de guérir.

- Mais il faut qu'elle guérisse, me dit-il. Si vous faisiez une transfusion de sang?

J'en ai déjà fait deux, mais sans succès, répondis-je.

Cette fois, vous allez lui donner de mon sang.

Si vous l'aimez à ce point, pourquoi ne lui en parlez-vous jamais?

C'est que je ne suis pas très bavard.

Parfait, lui dis-je alors, je vais essayer la transfusion de votre sang.

"Je pris donc un peu de son sang que j'analysais. Puis j'informai la malade que son mari insistait pour lui donner de son sang. Elle en manifesta un léger intérêt. Je mis l'infirmière au courant de ce que j'allais tenter pour sauver la jeune femme, tout en lui précisant que ni le mari, ni la femme n'avaient jamais assisté à une transfusion de sang.

"Je fis placer une table d'opération à côté du lit de la malade, avec un rideau tendu entre les deux. Lorsque le mari fut étendu sur la table d'opération, l'infirmière souleva le rideau, ce qui permit au mari de tendre le bras vers sa femme et de lui serrer la main. Ce qu'il fit en disant:

- Cette fois. c'est moi qui vais te guérir.

"L'infirmière laissa tomber le rideau, désinfecta le bras du mari, et y enfonça l'aiguille. De l'autre côté du rideau, j'avais planté l'aiguille dans le poignet de sa femme.

"Pendant que le mari continuait à parler pour dire à sa femme combien il l'aimait, j'examinais le pouls de celle-ci. Très irrégulier au début, il reprenait de sa régularité, jusqu'à devenir ferme et tout à fait normal. Ce qui me paraissait incroyable, car le sang que je transfusais n'était pas le sang du mari, mais le même sang qui, essayé à deux reprises, était resté inefficace. Je ne pouvais pas transfuser le sang du mari, car il n'était pas du même groupe que celui de la patiente, et sa transfusion n'aurait pu qu'entraîner la mort de celle-ci. C'était donc une mise en scène.

Et cette mise en scène réussit parfaitement, car c'est par ce subterfuge que la patiente a eu la preuve de l'amour de son mari, amour dont elle avait besoin pour guérir. C'est donc finalement la transfusion de l'amour qui l'a guérie. Tant qu'elle pensait que son mari ne l'aimait pas, elle en souffrait physiquement, elle en était malade. Mais à partir du moment où elle fut rassurée sur l'amour de son mari, ses souffrances cessèrent, et elle guérit."

En lisant cette histoire on ne peut s'empêcher de se rappeler ces paroles de l'éminent savant Alexis Carrel: "L'homme pense, aime, souffre, à la fois avec son cerveau et avec tous ses organes."

Ce qui veut dire que notre façon de penser affecte notre état de santé. Notre santé souffre si notre façon de penser n'est pas animée de sentiment d'amour. L'amour est donc un besoin de la nature humaine. Et ce besoin se manifeste dès la naissance. Les expériences scientifiques ont démontré que les nouveau-nés confiés à leurs mamans, autrement dit, jouissant de l'amour maternel, apprennent à parler, à manger, à marcher beaucoup plus vite que ceux qui sont confiés aux soins des infirmières engagées pour s'occuper des petits. Les grands ressentent ce besoin beaucoup plus encore que les petits, car chez eux l'insatisfaction de ce besoin provoque d'innombrables maladies, dont on ne connaissait pas la cause dans le passé, mais qui sont aujourd'hui attribuées à un état d'esprit malade. Il a fallu plus de deux mille ans pour que les médecins donnent raison à Platon quand il disait:

"La plus grande erreur des médecins, c'est qu'ils s'efforcent de guérir le corps sans penser à guérir l'esprit."

L'esprit est malade quand on voit tout d'un mauvais oeil. Demandez à un homme normal où il a acheté sa cravate, il vous en donnera l'adresse. Posez la même question à un homme dont l'esprit est malade, il vous dira:

- Pourquoi? Qu'avez-vous à reprocher à ma cravate?

Cet homme pense qu'il ne vous plaît pas. Et lui-même ne cherche pas à vous plaire, sinon il ne vous aurait pas parlé de cette façon. Son esprit est malade par manque d'affection. Pour le guérir il faut l'aimer, et lui apprendre à aimer.

L'esprit est malade quand on cherche toujours un objet de mécontentement et d'irritation.

Un monsieur décide de se présenter aux élections municipales.

- Tu es fou, lui dit sa femme. Tu n'auras juste que deux voix: la tienne et celle de ta femme.

Le soir du vote, on dépouille les bulletins: ce monsieur a trois voix.

- Ah! s'écrie son épouse, je savais bien qu'il y avait une autre femme dans ta vie!

Cette femme a l'esprit malade. Elle n'aime pas son mari sincèrement, et elle croit que son mari ne l'aime pas non plus. Pour la guérir, il faut lui montrer qu'on l'aime et lui apprendre à aimer.

L'esprit est malade quand on se sent humilié, offensé, et que l'on cherche à se venger.

Aujourd'hui, avec des instruments précis, un médecin peut constater les changements organiques provoqués dans le corps suite à un tel état d'esprit. Et il peut déceler le poison qui se forme dans les différents organes. Le corps souffre alors soit du foie, soit de l'estomac, soit du coeur ou de bien d'autres maladies incurables par un traitement matériel. Et les savants s'orientent de plus en plus vers le traitement par l'amour, traitement qu'ils estiment essentiel et le plus efficace.

Ceci sur le plan individuel.

Sur le plan social on attribue les maux actuels de la société, tels que la désunion conjugale, la délinquance juvénile ou la criminalité, au manque d'affection et d'amour. Les statistiques, en France, ont démontré que 85% des jeunes délinquants proviennent des foyers "dissociés". Là aussi, les sociologues commencent à préconiser le traitement par l'amour.

Nous arrivons donc à cette conclusion que pour guérir les maux apparemment incurables, tant de l'individu que de la société, il faut recourir au traitement par l'amour. Et comme tout traitement doit avoir un effet général et durable, il faut qu'il en soit de même en ce qui concerne le traitement par l'amour.

Autrement dit, il nous faut un moyen pour répandre l'amour parmi les hommes, et ce moyen doit avoir un effet universel et durable.

Où trouver ce moyen? Voilà la question à laquelle je vais essayer de répondre.

Il y a d'abord l'amour engendré par les liens de famille. Tout en ayant une importance capitale, son effet n'est pas universel, car sa manifestation implique des liens de parenté Cet amour n'est pas durable non plus. La situation actuelle en est la meilleure preuve. En effet, de nos jours, nous constatons que l'amour familial s'anémie de plus en plus, et il s'anémie parce que le mobile du mariage devient de plus en plus la convoitise ou l'argent, et non pas la constitution d'un véritable foyer familial, considéré dans le passé comme un petit paradis.

Ce paradis, les jeunes l'évitent de plus en plus. Ils raisonnent comme les héros de cette petite anecdote.

Désirant marier son jeune jardinier la châtelaine lui dit:

- Adam fut le premier jardinier. Et il s'est marié. Vous devriez en faire autant.

- Je voudrais bien, madame, mais après le mariage, combien de temps est-il resté au paradis?

C'est que le foyer familial devient de moins en moins un paradis; à tel point qu'un journal humoristique, pour nous en donner une image, le définit ainsi:

"C'est la réunion de gens qui viennent pour déjeuner et dîner, et qui ne sont pas des amis."

Or ces gens ont besoin de rester amis, d'aimer et d'être aimés. Ne trouvant pas cet amour au foyer, ils le cherchent ailleurs, ils se séparent. Cette séparation ne présente pas autant de danger pour les parents que pour les enfants. Car les parents peuvent se remarier, mais l'enfant privé de l'amour familial, va le chercher chez les "copains", parmi lesquels le plus agressif s'impose comme le chef du groupe, ou plus exactement de la bande. L'enfant qu'on croyait hostile à toute discipline, se soumet bien vite à la discipline de la bande, et c'est le début de la délinquance juvénile.

Tels peuvent être les effets néfastes de l'anémie de l'amour familial, effets aussi néfastes pour la société que pour l'individu; car, comme l'a si bien dit Alexis Carrel:

"La véritable unité sociale n'est nullement l'individu, mais la famille."

Malgré toute son importance, l'amour familial n'a pratiquement pas un effet durable, comme il n' a pas un effet universel.

Il nous faut donc trouver un autre moyen qui soit durable et universel et qui ranime l'amour familial. Quel est ce moyen? Continuons à le chercher.

Après l'amour familial il faut mentionner l'amour de la patrie. C'est surtout dans le passé que l'amour de la patrie servait de mobile, à ceux qu'on appelle compatriotes, pour s'entendre et s'aimer.

Mais là encore, l'effet de cet amour n'est pas universel car ceux qui ne font pas partie du territoire appelé patrie, ne profitent pas de cet amour. Et ce qui est bien plus triste, c'est qu'au nom de cette "patrie" on nous demande parfois de combattre ceux qui n'en font pas partie.

Pourquoi? On est bien en droit de se poser cette question, comme ce soldat naïf.

- Qu'est-ce que c'est que la patrie? demande le colonel à la première recrue.

- C'est notre mère à tous, mon colonel, répond la recrue.

- Très bien, mon petit. Et qu'est-ce que c'est que le drapeau? demande le colonel à une deuxième recrue.

- C'est l'image de la patrie, mon colonel.

- Très bien. Et pourquoi faut-il mourir pour la patrie? demande-t-il à une troisième recrue.

- Oui, mon colonel, pourquoi faut-il mourir pour la patrie9 s'étonne naïvement celle-ci.

L'amour de la patrie n'a pas un caractère durable non plus. La situation actuelle en est la preuve. Ne voyons-nous pas tant de pays déchirés à l'intérieur de leurs frontières, par des préjugés de race, de langue ou de classe?

On nous cite encore comme moyen de répandre l'amour parmi les hommes, l'attachement à un idéal politique commun.

Là encore, nous ne trouvons pas ce caractère universel, pour la simple raison qu'il existe plus d'un idéal politique, et que leurs adeptes respectifs sont fatalement amenés à lutter les uns contre les autres. Ce n'est même pas durable, car à l'intérieur d'un même parti politique, luttant pour un même idéal (par exemple, l'uniformité et l'égale répartition des biens), on trouve beaucoup de tendances antagonistes.

Tant et si bien qu'en définitive, ce qui leur reste en commun, c'est le suffixe "isme": gauchisme, titisme, castrisme, maoïsme...

En résumé, tous les liens d'attache, qu'ils soient de famille, de patrie, politiques ou autres, restent imparfaits et ne peuvent pas répandre l'amour parmi les hommes.

Il nous faut un amour universel, durable, qui dépasse les limites de la famille, de la patrie ou des formations politiques. Où trouver cet amour?

La réponse, nous allons la chercher dans l'expérience et non pas dans les théories qui abondent. Car la vérité il faut la chercher dans l'expérience et non pas dans la théorie. Une théorie peut ressembler à la vérité, mais si l'expérience ne la sanctionne pas, on ne peut pas l'accepter.

Or une expérience longue de 6000 ans nous enseigne qu'il n'y a que la foi religieuse qui peut créer cet amour universel et durable, cet amour qui unit les gens de toutes races, classes, nations ou opinions.

Et cette expérience est enregistrée par l'histoire. En effet, les historiens non juifs nous parlent en termes éloquents de l'amour répandu parmi les juifs après l'apparition de Moïse.

Les historiens non chrétiens expriment leur admiration devant l'esprit d'amour qui animait les gens de différentes races, classes, nations ou opinions après l'apparition de Jésus.

Les historiens non musulmans s'étonnent de la façon dont Muhammad (Mahomet) a pu unir des gens aussi éloignés que les Marocains en Afrique et les Pakistanais en Asie.

Allons-nous négliger cette expérience longue de 6000 ans pour nous accrocher à une expérience d'une centaine d'années seulement, cette courte expérience qui nous a tant écartés de la réalité confirmant la puissance unificatrice de la foi religieuse?

Mais quelle foi religieuse, allez-vous me demander. Est-ce le judaïsme? Est-ce le christianisme? Est-ce l'islam? Je vous répondrai: c'est le judaïsme, c'est le christianisme, c'est l'islam; pour la simple raison que toutes ne font qu'une. Elles ne sont que les différents stades d'une même religion, la religion de Dieu, toujours en évolution, et dont le stade actuel est la foi baha'ie (Du nom de son fondateur, Bahá'u'lláh ,l817-1892).

Cette évolution de la foi religieuse pourrait être comparée à l'évolution physique de l'homme. En évoluant, l'homme change d'aspect mais non d'identité.

Celle-ci reste inchangée, même si on prononce son nom différemment. Est-ce que Jean d'aujourd'hui n'est pas Jeannot d'il y a 20 ans? Est-ce que le baha'isme(Terme utilisé par quelques historiens pour désigner la foi baha'ie) d'aujourd'hui n'est pas le christianisme d'il y a 2000 ans?

La seule différence est qu'on ne peut pas demander à Jeannot de résoudre les problèmes que Jean est en mesure de résoudre. Et c'est malheureusement ce qui se fait à l'heure présente. Le résultat en est la crise de Jeannot: c'est la crise de l'Église, avec les critiques à l'égard du Vatican, les contestations des prêtres, et la déchristianisation de la masse.

La faute n'est pas au christianisme, la faute est à nous qui demandons au christianisme, révélé pour l'enfance humaine, ce qu'on doit demander à la foi baha'ie, révélée pour l'âge adulte.

Voilà pourquoi ce que les fondateurs des différents stades de l'évolution religieuse ont demandé à l'homme, ils l'ont fait en tenant compte de son âge, de sa maturité.

En effet, quand on est petit, ce qui s'impose c'est l'obéissance stricte au père, qu'on doit craindre parce qu'il punit si l'on désobéit. C'est le judaïsme.

On grandit. On doit prendre des leçons de morale sous la surveillance d'un maître tolérant qui tient un langage très doux. C'est le christianisme.

On grandit encore. On se crée des idoles: le vin, la femme, l'argent, la domination. Ce qui s'impose alors c'est la lutte contre cette idolâtrie avec le recours simultané à la discipline et à un langage doux, ce que les arabes traduisent en disant: "Prends un bâton dans la main, tiens un langage doux, et tu iras loin." C'est l'islam.

On arrive enfin à l'âge adulte. On voit que c'est par amour qu'il faut obéir Plutôt que par peur. C'est la foi baha'ie, qui demande l'obéissance aux lois par amour, et non plus par peur d'un châtiment ou de l'enfer.

On étudie ces lois pour voir si réellement on peut les aimer, et l'on constate qu'au fond elles nous apprennent toutes" directement ou indirectement, l'art de se faire des amis, partout dans le monde et dans toutes les couches de la société. On s'aperçoit que professer la foi religieuse au stade actuel de son évolution, c'est pratiquer cet art sublime qu'est l'art d'aimer, cet art qui nous permet de nous faire des amis, ce qui est le but même de la vie.

Quant aux "règles" de cet art, nous en parlerons durant quelques autres rencontres, que j'espère aussi agréables que celle de ce soir avec vous.


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2.2. Un ami qui nous fait gagner la vie

Un paysan rentrait chez lui lorsqu'il aperçut, abandonne au bord de la route, un vieillard malade, dont les jours étaient plus que certainement comptés. N'écoutant que son bon coeur, il l'emmena chez lui pour le soigner.

Quelques jours après, le vieillard lui dit:

- Tu t'es donné beaucoup de peine pour moi. Je voudrais t'en récompenser. J'ai caché dans le champ où tu m'as recueilli un sac magique. Cherche-le et garde-le. Il est à toi.

Peu de temps après, le vieillard s'éteignit. Se conformant à ses instructions, le paysan se mit à la recherche du sac en question, et finalement le trouva. C'était un sac sur lequel était écrit: "Il y a de l'or à l'intérieur de ce sac. Si tu en retires une pièce pour la donner à ton prochain, tu en trouveras une autre à sa place. Si tu en retires deux pour les donner à ton prochain, tu en trouveras deux autres à leur place. Si tu en retires trois pour donner à ton prochain, tu en trouveras trois autres à leur place..."

Rentré chez lui, le paysan mit la main dans le sac. Il en sortit une pièce d'or qu'il donna à son prochain. Il remit alors la main dans le sac et, effectivement, y trouva une autre pièce. Le lendemain, il en retira deux pièces d'or qu'il donna à son prochain. Cette fois encore, ayant remis la main dans le sac, il y trouva deux pièces d'or.

Il continua ainsi l'expérience avec trois, quatre, cinq... pièces d'or, toujours avec le même résultat, jusqu'au jour où il se dit:

- J'ai distribué assez de pièces d'or. Il vaut mieux maintenant que j'en garde pour moi-même, pour les jours où je serai vieux.

Ceci dit, il mit la main dans le sac Pour s'assurer qu'il en restait encore pour lui. Et il n'y trouva absolument rien!

Chers amis, si je vous ai raconté cette histoire africaine, c'était pour en tirer une leçon. Ne pourrait-on, en effet, comparer le sac magique à notre coeur, et l'or, à l'amour dont il est le siège. Vous avez sûrement remarqué que plus on donne son amitié n acquiert la capacité d'aimer. Par contre, plus on évite les aux gens, Plus on se fait des amis, plus on devient capable, plus gens, plus on devient ermite, plus on perd la capacité de se faire des amis, plus on perd sa capacité affective.

Et s'il arrive un moment où, continuant ainsi, on refuse son amitié à qui que ce soit, on constate que l'on en perd même la capacité, je veux dire la capacité innée d'aimer: dans le sac magique il ne reste plus d'or. Et permettez-moi d'insister sur le terme capacité d'aimer, car c'est la faculté qui caractérise le coeur humain: il doit porter son amour sur quelqu'un ou sur quelque chose. Si on n'est pas heureux avec son épouse par exemple, si on ne l'aime pas, on porte son amour sur son enfant. Si l'enfant, par son comportement, ne répond pas à l'affection qu'on lui témoigne, on porte alors son amour sur ses amis, son travail ou autre chose.

Et si on en arrive à ne manifester la moindre affection à l'égard de qui que ce soit ou quoi que ce soit, autrement dit, si la capacité affective s'atrophie, on en devient malade. Et sur ce sujet, tous les savants sont d'accord, qu'ils soient croyants ou matérialistes; peu importe même si cette capacité affective est appelée autrement aimance par exemple, pour utiliser le terme de Jean Rostand.

Nous pouvons comparer la capacité affective à la capacité de marcher. Plus nous prenons l'habitude de marcher, plus nous nous rendons compte que C'est naturel. Par contre, moins nous marchons, en restant constamment au volant de notre voiture, par exemple, plus nous constatons que la marche est une corvée; à un point tel, nous en perdons complètement l'habitude et en devenons malades, lentement peut-être mais sûrement. Ceci a été démontré scientifiquement.

Cultiver notre capacité affective, ce n'est donc pas seulement l'intérêt de la communauté, mais également notre propre intérêt.

Nous devons donc par tous les moyens manifester et développer notre capacité d'aimer.

Quels sont ces moyens? lis sont nombreux, et peu importe si tous ne font pas l'objet d'un accord unanime.

Il y en a un cependant sur lequel tous sont d'accord: c'est le travail, qui devrait être défini comme l'amour rendu visible. Et c'est surtout vrai de nos jours, où nous avons tellement besoin du travail de notre prochain, et où les distances ne diminuent nullement cette interdépendance. Quand un pharmacien belge, par exemple, s'abstient d'envoyer en Tunisie des produits pharmaceutiques dont la durée de validité est dépassée, et qu'il expédie des médicaments de première qualité, nous pouvons dire qu'il manifeste son amour à l'égard de son frère tunisien. De même, quand ce dernier, en empaquetant les dattes destinées à l'exportation vers la Belgique, élimine toute datte véreuse, nous pouvons dire qu'il manifeste son amour à l'égard de son frère belge.

Le travail devrait être comparé à l'amour, non seulement en tant que manifestation de l'amour, mais surtout en tant que loi qui régit le monde de l'existence.

En effet, si dans le monde de l'existence tout s'aime (j'entends par là l'attraction mutuelle des particules composant la matière), il en est de même en ce qui concerne le travail, car tout dans l'univers travaille.

Ce n'est qu'en apparence que la matière reste inerte, sans activité. En fait, la matière est tout ce qu'il y a de plus actif. En réalité même, ce qu'on appelle matière n'est qu'un ensemble dont les particules sont en mouvement tellement rapide qu'il nous donne cette impression de consistance et de passivité. Et ce qui est vrai pour la matière, cette chose apparemment sans vie, doit être vrai, à plus forte raison, pour tout ce qui est apparemment doté de vie.

Les animaux, par exemple, ne travaillent-ils pas lorsqu'ils se font des abris ou bien qu'ils élèvent leurs petits? Cette activité dans tous les mondes (minéral, végétal, animal) est cependant inconsciente. Reprenons le cas des animaux. Si les oiseaux construisent leur nid, ils le font toujours de la même façon, ni mieux ni pire.

Mais ce n'est pas le cas de l'homme qui fait sa maison bien, ou moins bien, suivant qu'il y met plus de conscience ou moins de conscience. De même si les animaux élèvent leurs petits, ce n'est pas que leur conscience le leur demande, c'est par instinct. Et ceci pour la simple raison qu'une fois que ces petits ont atteint un certain âge, ils les abandonnent à eux-mêmes, sans se soucier de leur sort, sans même les reconnaître. Mais ce n'est pas le cas de l'homme qui peut se soucier de ses enfants jusqu'au dernier souffle de sa vie, tout comme il peut les abandonner dès leur naissance. C'est chez lui une question de conscience.

L'activité de l'homme est donc une activité consciente.

Cette activité consciente peut avoir des conséquences merveilleuses, comme elle peut avoir des conséquences désastreuses. A titre d'exemple, puisque nous avons parlé de la façon dont les nouveau-nés peuvent être traités, prenons le cas de l'Arabe d'il y a quatorze siècles. Si son enfant nouveau-né était une fille, il l'enterrait vivante, parce que pour lui cette naissance était une honte. Et il le faisait avec une conscience absolument tranquille.

Que s'est-il passé pour que ce même Arabe éduque ses enfants, filles ou garçons, de façon à ce qu'ils contribuent à la naissance d'une nouvelle civilisation à la fois spirituelle et matérielle? Les savants croyants disent que c'est la révélation islamique qui a transformé la conscience arabe; les matérialistes déclarent que c'est la mutation islamique qui en est la cause. Mais peu importe la dénomination de ce phénomène: ce qui importe, et c'est indéniable, c'est que la conscience humaine a besoin d'être guidée, orientée et éduquée de façon à ce qu'elle contribue au progrès matériel et spirituel de l'homme.

A ce point de vue, pouvons-nous parler de progrès dans le monde d'aujourd'hui?

L'Arabe d'aujourd'hui est-il plus consciencieux que l'Arabe d'il y a mille ans (après Muhammad), qui, s'il voyait une épine sur son chemin, la ramassait pour qu'elle ne pique pas le pied de son prochain?

Le chrétien d'aujourd'hui est-il plus consciencieux que le chrétien d'il y a deux mille ans, qui se privait de tout pour venir en aide à son prochain?

Et pourtant, scientifiquement parlant, les uns comme les autres sont plus avancés qu'il y a mille ou deux mille ans. Ce n'est donc pas la science qui peut garantir le progrès de la conscience. Pourquoi alors, fiers d'une expérience scientifique d'un siècle, allons-nous oublier le fruit de milliers d'années d'expérience, du point de vue du progrès de la conscience. Pourquoi négliger le rôle déterminant de ce phénomène mystérieux, appelé révélation, qui produisait une mutation dans les consciences, raison pour laquelle, d'ailleurs, les matérialistes l'ont appelé précisément du nom mutation?

A l'état actuel des choses, pourquoi nier la nécessité d'une nouvelle mutation ou révélation? Cette nouvelle révélation, dotée de la puissance susceptible de transformer la conscience humaine existe-t-elle? Oui, disent les baha'is, car la révélation connue sous le nom baha'ie en a fourni des preuves irréfutables partout, parmi les hommes de toute race, classe, religion ou façon de penser. De plus, cette révélation est dotée des mêmes caractéristiques que les révélations du passé. L'examen de ces caractéristiques ne fait pas l'objet de mon exposé de ce soir. Voyons seulement ce que dit la révélation baha'ie concernant le travail.

Les Écrits baha'is nous disent:

"Chacun est enjoint de s'occuper d'une manière ou d'une autre: art, commerce, etc. Nous avons décidé d'identifier votre labeur avec un acte d'adoration envers Dieu."

Ou encore:

"Vous êtes les arbres de Mon jardin; vous devez porter des fruits merveilleux qui profiteront à vous-mêmes et aux autres. Ainsi donc chacun doit exercer une profession ou un art."

Le premier de ces extraits nous parle de la valeur religieuse du travail, ce qui est considéré comme un principe sacré chez les baha'is.

On pourrait se demander quelle relation existe entre la religion et le travail? Pourquoi un tel commandement? Est-ce encore une contrainte imposée par la religion?

Loin de là, disent les baha'is, pour qui "il n'y a pas de contrainte dans la foi" et pour qui l'intelligibilité de la foi est un autre principe sacré.

Quelle est donc leur réponse dans ce cas particulier? Cette réponse est donnée par le second extrait que je viens de citer.

En effet, d'après celui-ci, le travail pour l'homme est comme le fruit pour l'arbre. Le fruit ne fait-il pas partie intégrante de l'arbre? Est-ce une contrainte pour l'arbre que de porter des fruits? Non. L'arbre est ainsi fait, et même si un jour il devient malade, il continuera de porter des fruits, tout en restant sous la surveillance d'un habile jardinier.

Il en est de même en ce qui concerne l'homme. Sa nature intime, le maintien de son équilibre l'exigent. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les médecins ne prescrivent pas l'inactivité à leurs patients.

Le jour où le Président Eisenhower eut une crise cardiaque, on croyait que son médecin, un éminent cardiologie, allait lui demander de cesser ses fonctions présidentielles. Ce ne fut pourtant pas le cas, car suivant le conseil de son médecin, il continua ses activités jusqu'à la fin de son mandat, sans jamais quitter son travail, comme on ne quitte jamais un ami à qui on se sent inséparablement uni.

L'homme d'aujourd'hui voit-il dans le travail un ami qui lui reste inséparablement uni? Il paraît que non. Dans les pays en voie de développement, il n'y a généralement même pas assez de travail pour que l'homme y pense. Il se contente de peu, il végète. C'est un homme abandonné par son "ami" le travail. Dans les pays industrialisés, l'homme est un maillon dans une chaîne de production. Quand la chaîne n'est pas rentable, on la liquide, et, par conséquent, l'homme se voit abandonné par son "ami" le travail.

Dans un cas comme dans l'autre l'homme ne voit pas dans le travail un ami qui lui soit attaché.

Et l'homme d'aujourd'hui voit-il pour sa part dans le travail, un ami auquel lui-même est attaché? Il parait que non.

Il voit plutôt dans le travail un moyen qui lui permet de gagner sa vie. Et pour y arriver, toutes les façons pour faire son travail sont bonnes puisque la triste formule "la fin justifie les moyens" est à la mode. J'ai dit: triste, et là-dessus tous sont d'accord, car on a l'impression que les gens se voient contraints de l'appliquer dans la vie quotidienne, tout en avouant qu'en définitive tout le monde est dupé.

Les anecdotes populaires illustrent bien cette situation. Je vais vous en raconter quelques unes.

Un brave paysan emmène son fils, qui a huit ans, chez un marchand de costumes.

- Voilà un très beau costume pour le petit, s'écrie le marchand.

Il ne rétrécit pas à l'eau au moins? Oh, monsieur, mais non, voyons.

Le gosse met le costume, et le voilà parti avec son père. Tout à coup éclate un orage terrible. Le marchand voit revenir le paysan et son fils. Les manches du veston et les jambes du pantalon ont terriblement rétréci.

Le marchand s'élance alors au devant de son client:

- Oh, s'écrie-t-il, comme il a grandi ce petit!

Le paysan trompé se venge à sa façon. Il mélange, par exemple, de la margarine à son beurre. Il y a la loi qui l'interdit, allez-vous me dire. Parfait, disons qu'il est cité en justice. En revenant du tribunal il annonce à sa femme:

- On m'a collé une amende de dix mille francs.

- Seigneur Jésus, gémit la femme. Pour rattraper ça, il nous faudra ne plus mettre de beurre du tout dans les mottes.

La margarine est donc vendue au lieu du beurre. On la consomme, on s'en aperçoit avec le temps, et chacun cherche à se venger à sa façon. Parmi les consommateurs il y a, par exemple, le garagiste. Et voilà ce qui se passe le jour où ce paysan, ou un autre client, vient chez lui pour acheter une voiture.

Comme cet acheteur ne s'y connaît pas, il laisse parler le garagiste, lequel lui désigne une affaire magnifique.

- Regardez cette ligne, dit-il, ces chromes, ces portières, ces phares.

- Mais le moteur? demande l'acheteur.

- Le moteur? Ah oui, je vois que vous vous intéressez aux détails.

Le garagiste à son tour est trompé, volé d'une manière dissimulée par un autre, un plombier par exemple.

Et la tragi-comédie continue.

Au lieu d'insister, continuons plutôt notre exposé sur la solution du problème.

Nous avons dit que le travail fait partie intégrante de l'homme, que c'est un facteur garantissant le maintien de la santé et de l'équilibre intérieur de l'homme. Ceci est surtout vrai s'il donne tout son coeur au travail qu'il fait.

Deux cas peuvent se présenter.

Le premier, c'est lorsque les conditions sociales sont idéales au point que chacun a le travail pour lequel il a des talents, ce que précisément prescrit la foi baha'ie qui stipule: à chacun non seulement du travail, mais son travail (autant que possible bien entendu). Dans ce cas il est évident que chacun mettra tout son coeur, toute sa conscience dans son travail, et qu'il en ressentira, par voie de conséquence, cette joie intérieure tellement nécessaire au maintien de la santé. Simultanément, il réjouira les autres, ce qui est le but même de la religion. C'est le cas du virtuose qui, en interprétant un morceau de son choix, non seulement se sent profondément heureux, mais réjouit également son auditoire.

Le deuxième cas, c'est lorsque les conditions sociales ne permettent pas à chacun de nous d'avoir son travail. Alors ce serait une erreur d'attendre de notre travail qu'il nous intéresse. Bien au contraire, c'est nous qui devons nous intéresser à lui. C'est nous qui devons lui donner notre coeur. Et je dis bien lui, et non pas à son fruit, tout comme nous nous intéressons à une fleur, qui porte en soi le fruit. Autrement dit, quand nous nous intéressons au travail lui-même, son fruit ne peut être que bon. Quand nous nous intéressons à l'arbre, quand nous lui portons tous nos soins, son fruit ne peut être que bon. Ce n'est pas la peine que nous nous en fassions un souci. Ce souci créerait une tension nerveuse inconsciente, assimilable au freinage lorsqu'on conduit.

Accomplir un travail en se tracassant pour son fruit, sans prendre plaisir au travail lui-même, c'est rouler le frein serré. Il ne faut pas freiner quand on conduit, il ne faut pas se tracasser quand on travaille. Il faut y prendre plaisir, tout comme à la présence d'un ami intime. Alors le travail devient un ami qui nous fait gagner la vie, tout en nous faisant gagner notre vie.

Tout cela pourrait paraître bien théorique. Pratiquement, dans un monde où chacun, par son travail, cherche à tromper son prochain, à le voler d'une manière dissimulée, comment peut-on ne pas faire comme tout le monde, comment peut-on consciencieusement faire son travail, sans la moindre arrière pensée de tromper ou voler ceux à qui le fruit du travail est destiné? Pour un baha'i c'est une question de foi.

Je m'explique. Etant donné que, pour lui, le travail est un acte d'adoration envers Dieu, et que, par conséquent, le lieu du travail, c'est son église, il ne peut pas voler son prochain par son travail. Ce serait voler à l'église. Avez-vous jamais vu un chrétien se rendre à l'église pour voler son prochain. Non, il ne peut pas le faire, puisqu'il a reçu une formation qui ne le lui permet pas. Il en est de même pour un baha'i; il ne peut pas voler son prochain dans son "église", c'est à dire là où il fournit un travail qui, directement ou indirectement, est destiné à son prochain.
Il ne peut pas le faire parce qu'il a reçu et continue de recevoir une formation qui ne le lui permet pas. Il a reçu cette formation à l'école baha'ie, et il continue de la recevoir aux réunions mensuelles sans classe, pendant lesquelles le principe de la valeur religieuse du travail, parmi bien d'autres principes, lui est rappelé, que ce soit pendant la lecture des Écrits sacrés ou les périodes de consultation.

Notons que ces réunions mensuelles lui fournissent indirectement un moyen d'entraînement pour faire consciencieusement son travail. En effet, ces réunions, étant sans classe et ayant un caractère de fête, permettent aux membres des différentes couches de la société de s'inviter mutuellement, de se rencontrer amicalement, et avec le temps, de devenir des amis.

De cette façon, le paysan. le marchand, le garagiste, le plombier, ... deviennent des amis; et, en tant qu'amis, par leur travail, ils ne peuvent plus se duper les uns les autres avec des propos tels que:

- "Vous vous intéressez aux détails",

- "Tiens, comme il a grandi"...

Un mot encore concernant le travail, pour qu'il ne devienne pas fatigue mais reste toujours plaisir.

La fatigue, on l'évite si l'on change d'activité. A ce propos, la façon de travailler d`Abdu'l-Bahá (Fils et successeur de Bahá'u'lláh), dont le mode de vie est un exemple pour tous les baha'is, fournit un modèle à suivre.

`Abdu'l-Bahá écrivait des commentaires sur les Écrits de Bahá'u'lláh, s'occupait de la correspondance avec les disciples, visitait les malades, recevait les pèlerins, faisait du jardinage, etc...

Puisque nous parlons de jardin, comparons le changement d'activité au passage, dans un jardin, du soleil à l'ombre. On reste toujours dans le jardin, mais quelle sensation agréable!

N'a-t-on pas raison de définir le repos comme un changement d'activité. Ce qui ne veut pas dire qu'il soit permis d'abuser de cette définition pour éliminer absolument le repos. Non, le repos aussi est une prescription d'après les enseignements baha'is. En effet, un baha'i a le devoir de cesser toute activité lucrative pendant les jours fériés baha'is. Et ces jours fériés, il ne faut pas les confondre avec les jours de repos hebdomadaire, car pendant ces jours on reste libre en ce qui concerne l'activité lucrative. Mais pendant les jours fériés le repos doit être respecté par tous, tout comme le travail est prescrit pour tous.

Mais là encore le repos ne signifie pas paresse, nonchalance, ou divertissement seul. Car le repos, comme le travail doit porter son fruit. Le fruit de ce repos, aux jours fériés qu'on célèbre dans une ambiance d'allégresse et de spiritualité, doit être une oeuvre philanthropique, laissant une marque tangible de l'amour des baha'is pour toute l'humanité. Ce qui signifie qu'un baha'i se repose pour mieux servir tout le monde. Cette question devrait faire l'objet d'une autre conférence.

Vous voyez donc, chers amis, que non seulement le travail, mais aussi le repos a un aspect religieux.

Puisqu'il en est ainsi, je crois que le moment est propice de vous souhaiter BON REPOS!


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2.3. Merci la vie

- Mademoiselle, disait un humoriste à une cantatrice, j'aimerais comparer votre voix à l'essence de rose.

- Très flattée, mais comment l'entendez-vous?

- Avec un peu, on en a assez pour longtemps.

Eh bien, chers amis, si je regarde l'heure avant mon exposé, c'est pour que ce dernier vous rappelle "l'essence de rose". Entendez par là que je vais essayer, autant que possible, d'être bref.

A une vingtaine de kilomètres de Jérusalem se trouve une ancienne ville appelée Jéricho. Cette ville a une importance historique, en ce sens que c'est la première ville rencontrée par les Israélites à leur entrée en Terre Sainte; elle fut aussi le plus grand obstacle sur leur chemin, car les hautes murailles qui l'entouraient les empêchaient d'y entrer. La légende biblique rapporte qu'il a suffi qu'une seule voix unanime se fasse entendre de la part des Israélites, pour que les murailles tombent avec fracas. D'où l'emploi du terme "murailles de Jéricho", chaque fois qu'on parle de difficultés apparemment insurmontables, mais qui se dissipent tout à coup, comme par miracle.

Or les difficultés, nous en rencontrons tous les jours dans la vie. Qu'elles soient grandes ou petites, nous voudrions qu'elles se dissipent facilement, aussi facilement que tombèrent les murailles de Jéricho.

Comment faire? C'est la question que chacun de nous se pose. Quant à la réponse, ne seriez-vous pas d'accord pour dire qu'elle se trouve, d'une manière imagée, dans la légende biblique que j'ai citée?

En effet, ne pourrions-nous pas dire que cette voix qui a permis aux Israélites de surmonter leurs difficultés, c'était la voix de l'unité?

Et l'unité ne fait-elle pas la force?

C'est donc grâce à cette force que le plus grand obstacle sur la route des Israélites fut surmonté; ce que d'une manière imagée la Bible appelle l'effondrement des murailles de Jéricho.

Mais qu'est-ce que l'unité, et quand peut-on dire qu'il y a unité chez un peuple? On dit qu'il y a unité chez un peuple quand les gens s'entendent bien, quand ils s'aiment les uns les autres. L'unité est donc la manifestation extérieure de l'amour du prochain.

C'est donc la force de l'amour qui permet de surmonter les difficultés, quelles qu'elles soient, individuelles ou nationales. Ainsi, par exemple, l'histoire fait ressortir que tant qu'il y avait de l'amour entre les Israélites, amour qui se manifestait par leur unité, toutes leurs difficultés se dissipaient comme par enchantement.

Autrement dit, tant que les termes "amour du prochain" gardaient leur vraie signification, les Israélites triomphaient dans tous les domaines. Mais à partir du moment où ils négligèrent ou oublièrent l'exacte signification de cet amour du prochain, ils perdirent leur pouvoir de surmonter leurs difficultés. Celles-ci s'aggravèrent de jour en jour et entraînèrent leur décadence, décadence qui, finalement, les a amenés à tout perdre: leur liberté, leurs biens, leur pays.

Alors vint Jésus pour leur expliquer ce que signifiait exactement le mot "prochain", explication que nous trouvons dans la fameuse parabole du bon Samaritain.

Un jour, un docteur de la loi judaïque demande à Jésus: "Qui est mon prochain?"

Et Jésus lui répond par cette parabole:

"Sur le chemin qui menait de Jérusalem à Jéricho (ce chemin de la vie avec ses épreuves) gisait un homme, dépouillé, blessé par des brigands. Un prêtre passe, mais il ne s'arrête pas pour lui porter secours. Un Lévite, c'est-à-dire un Israélite de descendance la plus pure, passe; lui non plus ne s'arrête pas.

Arrive un Samaritain qui aperçoit ce malheureux, s'arrête, lui bande les plaies, l'installe sur sa monture, le conduit à l'auberge, et remet à l'hôtelier une petite somme en lui disant: . "Prenez soin de lui, ce que vous dépenserez en surplus, je vous le rembourserai quand je reviendrai."

"Lequel de ces trois a été le prochain du malheureux?" demande Jésus.

Question dont la réponse est évidente. Mais à l'époque, elle était très embarrassante pour un Israélite, qui considérait un Samaritain comme un damné rejeté par Dieu. Puisque Dieu le rejetait, qui aurait pu se permettre de s'approcher de lui? Qui aurait osé le prendre pour son prochain, même si ce dernier se comportait comme un ange?

Il fallait absolument changer cette façon de penser.

C'est ce que fit Jésus, en laissant entendre par cette parabole que Dieu ne rejette pas ceux qu'on a pris l'habitude de considérer comme des damnés, comme des rejetés. Mais étant donné qu'à cette époque l'humanité en était au stade de l'enfance, Jésus ne pouvait pas aller plus loin et dépasser ce langage imagé. Il fallait protéger cet "enfant" qu'était l'humanité, il fallait le mettre en garde contre les "loups".

"Je vous envoie, disait Jésus, comme des brebis au milieu des loups, soyez prudents." (Matt. 10/ 11)

En bref, nous voyons que, d'une manière parabolique, Jésus déconseillait à ses contemporains de rejeter à priori qui que ce soit, et, toujours d'une manière imagée, leur demandait d'éviter les "loups", attitude conforme à la psychologie à appliquer à l'égard de l'"enfant".

Jésus savait cependant que cet "enfant" deviendrait adulte, et qu'il faudrait alors abandonner ce langage parabolique et parler ouvertement.

"Je vous ai dit ces choses en paraboles. L'heure vient où je ne vous parlerai plus en paraboles, mais ouvertement du Père." (Jean 16/25)

De plus, Jésus prévoyait que ce qu'il ne pouvait pas dire aux "enfants" de son époque, il faudrait le dire plus tard, quand ils auraient atteint l'âge adulte.

"J'ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les porter maintenant.

Quand le Consolateur, l'esprit de vérité sera venu, il vous conduira dans toute la vérité." (Jean 16/12)

La question qui se pose maintenant est celle-ci: L'homme d'aujourd'hui n'a-t-il pas atteint l'âge adulte? N'a-t-il pas acquis une maturité suffisante pour qu'on ne lui parle plus en paraboles, et qu'on lui tienne un langage ouvert, pour qu'on lui dise toute la vérité?

Ce langage ouvert ne serait-il pas, par exemple, l'aveu franc qu'"aux yeux de Dieu tous ses enfants sont égaux", que "tous les peuples forment une seule famille'" et que, par conséquent, il n'y a pas la famille des rejetés et celle des élus. "La seule différence entre les membres de la famille humaine est une différence de degré: les uns sont encore comme des enfants, et doivent être éduqués; d'autres sont comme des malades, et doivent être traités avec tendresses (Causeries d`Abdu'l-Bahá - éd. 1970. M.E.B. Bruxelles).

C'est ce que précisément nous trouvons dans les Écrits baha'is, qui vont jusqu'à dire:

"Aucun n'est ni mauvais, ni méchant (Causeries d`Abdu'l-Bahá - éd. 1970. M.E.B. Bruxelles).

Si aucun n'est mauvais ni méchant, pourquoi alors perdre notre temps à chercher les défauts chez notre prochain, et, à plus forte raison, à considérer celui-ci comme rejeté par Dieu?

Le monde humain n'est-il pas comparable à une exposition d'"oeuvres d'art" de ce Grand Artiste qu'est Dieu? Avons-nous le droit de juger l'une de Ses "oeuvres d'art", et de dire qu'elle ne devrait pas être exposée, qu'elle devrait être éliminée? Une telle attitude plairait-elle à l'Artiste?

Sûrement pas, car ce droit c'est à Lui seul qu'il appartient. Si nous l'usurpons, nous ne pourrions que Le mécontenter. Ce serait même une attitude absolument répugnante d'après les Écrits baha'is, qui disent textuellement:

"Le défaut le plus répugnant, c'est de chercher les défauts des autres (Causeries d`Abdu'l-Bahá - éd. 1970. M.E.B. Bruxelles).

Il est à remarquer que Jésus exprime aussi cette idée lorsqu'il dit:

"Pourquoi vois-tu la paille dans ]'oeil de ton frère, et n'aperçois-tu pas la poutre dans ton oeil." (Matt. 7/3)

Jésus, une fois de plus, s'exprime en un langage parabolique. Une fois de plus, ce langage parabolique est remplacé dans les Écrits baha'is par un langage ouvert, accompagné de raisonnement.

Et il en est de même pour toutes les paraboles de Jésus, et plus particulièrement encore pour le sermon sur la montagne.

De telle sorte qu'on peut dire qu'une partie des enseignements baha'is pourrait être comparée au sermon sur la montagne, codifié et justifié par un raisonnement conforme à la maturité de l'humanité.

Je dis bien: codifié sous forme de lois, parce que les paroles de Baha'ullah, "N'écoute pas et ne vois pas le mal", par exemple, deviennent une loi pour tout baha'i, loi que Bahá'u'lláh justifie en ajoutant: "Et ne t'avilis pas."

De son côté`Abdul'l-Baha dit:

"Tout défaut que nous voyons chez les autres, nous devons l'attribuer à nous-mêmes, car si nous n'avions pas ce défaut, nous ne serions pas en mesure de nous en apercevoir."

Ce qui paraît logique. En effet, si dans une conversation, je m'aperçois que mon interlocuteur dit un mot chinois, c'est que je possède le chinois.

Mais rien n'illustre cette idée aussi bien que cette histoire que je vais vous raconter.

Un homme voyageait en première classe. A un moment donné, son vis-à-vis sort du compartiment pour quelques instants. De retour il trouve sa place prise par un nouvel arrivant. Il la réclame donc, à quoi l'autre répond que s'il avait pris un billet de première, c'était pour avoir une place assise, et que cette place étant libre il était en droit de l'occuper.

- Mais cette place n'est pas libre justement. Je l'occupais avant vous.

- Est-ce que vous avez une réservation?

- Non.

- Alors?

La situation étant sans issue, appel est fait au contrôleur. Mais celui-ci ne sait pas, non plus, comment trancher la question.

A ce moment intervient notre bonhomme qui dit au contrôleur:

- Demandez donc à ce monsieur qui réclame sa place avec tant de véhémence, de présenter son billet.

Tout confus celui-ci le présente. Il était de seconde classe!

- Comment avez-vous découvert que mon billet était de seconde? demande-t-il à notre bonhomme avant de se retirer.

- C'est que, répond celui-ci, le bout de votre billet sortait de votre poche, et j'ai remarqué qu'il avait la même couleur que le mien.

Si donc notre homme s'était aperçu que son voisin était un resquilleur, c'est que lui-même, il l'était.

Voilà pourquoi en psychologie il est dit: si tu veux connaître les défaillances d'un homme, laisse le parler des autres.

Parler des défauts de notre prochain, c'est donc parler de nos propres défauts et, par conséquent, nous avilir aux yeux de tous.

Par contre, l'attitude inverse, c'est-à-dire louer notre prochain, attire davantage le respect à notre égard.

Autrement dit, une telle attitude nous élève aux yeux des autres. Cela me rappelle le cas de ce mari à propos duquel sa femme disait:

"Mon mari avait deux habitudes qui me gênaient. Un jour je lui ai demandé de s'en corriger. En échange, je lui proposais de me guérir de deux défauts de son choix.

- Mais je ne t'en connais aucun, m'a-t-il répondu.

Après cela comment pouvais-je ne pas le respecter davantage, oubliant complètement ses défauts?"

Conséquence logique: on arrive à un second commandement baha'i qui nous demande de chercher les qualités des autres et non pas leurs défauts.

C'est Abdu'l-Bahá qui le recommande. Et toujours il a été le premier à en montrer l'exemple.

Faisant allusion aux défauts d'un homme, quelqu'un dit à `Abdu'l-Bahá:

- Il n'a pas eu honte de passer toute une nuit au jeu de hasard.

- Quelle patience! lui fit remarquer `Abdu'l-Bahá, quelle persévérance! Faire la même chose toute une nuit!

Pour nous résumer, disons qu'en cherchant les défauts des autres, nous nous avilissons; par contre, en cherchant leurs qualités, nous prenons de plus en plus conscience de notre dignité et de nos capacités latentes.

Et c'est précisément sur ce point qu'insistent le plus les Écrits baha'is, étant donné que l'humanité entre dans le stade de sa maturité. L'homme d'aujourd'hui n'est plus l'enfant d'il y a deux mille ans. Il est adulte et un adulte doit veiller constamment à ne pas commettre le moindre geste qui l'avilisse à ses propres yeux comme aux yeux des autres. La prise de conscience de sa dignité humaine doit l'emporter sur toute autre considération. Il doit donc y avoir une vérité qui conduit à cette prise de conscience. Cette vérité, l'homme peut-il la découvrir personnellement? Oui, disent les Écrits baha'is, puisque chacun a en lui une "lampe" qui, une fois allumée, lui permet de découvrir cette vérité directrice.

"Tu es Ma lampe, et Ma lumière est en toi. Sois donc illuminé par elle" disent les Écrits baha'is.

Quant à cette vérité, ne se présente-t-elle pas sous différentes formes? Et l'un de ses aspects, ne serait-il pas le fait de ne jamais se permettre de s'occuper des défauts des autres pour les juger, et, à plus forte raison pour les considérer comme rejetés par Dieu? Mais bien au contraire, être pénétré de cette idée que tous sont enfants de Dieu. Peu importe s'il y en a qui sont encore "enfants", ou qui restent encore "malades". Cet aspect de la vérité, dont nous avons déjà parlé, constitue le principe de base de la foi baha'ie. Il est connu sous le nom de principe de l'unité du genre humain.

Un autre aspect de la vérité ne serait-il pas le fait d'accéder à cette maturité qui permet de se considérer comme citoyen du monde? Ceci constitue un second principe de la foi baha'ie.

Un troisième aspect de cette vérité ne serait-il pas la prise de conscience de l'intelligibilité de la foi? Ce qui est encore un autre principe baha'i.

Un quatrième aspect de la vérité ne serait-il pas le fait de considérer le travail comme un acte d'adoration envers Dieu? Acte d'adoration qui, en tant que tel, doit être fait sincèrement et consciencieusement.

Voici encore un autre principe de la foi baha'ie. La vérité se présente sous bien d'autres aspects encore, chacun constituant un principe selon la foi baha'ie et tous ces principes étant l'esprit même d'aujourd'hui. Pourquoi, me direz-vous alors, pourquoi les gens n'allument-ils pas leur "lampe" afin de voir, afin de découvrir la vérité?

Là, je crois qu'il faut distinguer plusieurs catégories de gens.

Une première catégorie est constituée par ceux qui allument quand même leur lampe, mais moins pour voir que pour que les autres voient. J'entends par là les personnes qui reconnaissent la véracité des enseignements baha'is et qui en parlent partout. même par la voix de la presse. A titre d'exemple, je vous renvoie au périodique Planète de Paris, à La Presse de Montréal, à La Gazette de Lausanne, au Pourquoi Pas? de Bruxelles, etc...

Ce sont des gens qui, à force de faire l'éloge des enseignements baha'is, épouseront un jour cette doctrine. Ils me rappellent le cas de ce père qui était allé chercher une épouse pour son fils. L'ayant trouvée, il revint auprès de lui, et lui en paria avec tant d'ardeur et d'admiration que finalement il se dit: "au fond pourquoi ne l'épouserai-je pas moi-même?"

Une deuxième catégorie de gens est constituée par ceux qui ont allumé leur "lampe", mais qui voient à travers des verres tellement noirs que tout leur semble noir. C'est le cas de ce coiffeur dont je vais vous raconter l'histoire.

Un homme entre chez son coiffeur et lui dit:

- Coupez mes cheveux assez court, parce que je pars en voyage.

- Où partez-vous? demande le coiffeur.

- A Rome.

- C'est très bien d'aller à Rome. Mais pourquoi maintenant? Rome est mortelle à cette époque de l'année. Et comment y allez-vous?

Par la ligne Alita.

C'est une bonne idée de voyager par avion. Mais franchement, pourquoi Alita'? C'est la pire des lignes aériennes. Et où allez-vous loger? Chez des amis?

- Non, je descends à l'hôtel Excelsior.

C'est très bien de réserver une chambre à l'hôtel. Mais pourquoi justement Excelsior? On y est tellement mal servi. Et c'est tellement cher. Mais au fait, dans quel but vous allez à Rome et pas ailleurs?

- C'est pour être reçu par le Pape.

C'est une chance d'être reçu par le Pape. Mais, mon ami, vous serez perdu dans la foule, et le Pape ne vous verra même pas...

Un mois après le client revient pour se faire couper les cheveux.

Alors, votre voyage? demande le coiffeur.

Vol excellent. Rome est une merveille. Excelsior est un hôtel de première classe. Quant au Pape, il m'a dit quelques bonnes paroles, et lors de la bénédiction il m'a passé la main sur la tête.

- Et alors?

- Alors il m'a dit: "Qui vous a coupé les cheveux comme ça? C'est affreux. Vous devriez changer de coiffeur."

Eh bien, chers amis, si l'on soulève devant nous des objections telles que: "Comment ne pas juger les gens? Et ceux qui se disent incroyants, Dieu ne les rejette-t-Il pas? Et si Dieu les rejette, comment pourrions-nous les accueillir comme des frères?"

Si l'on nous tient un tel langage,... "changeons de coiffeur"! Car au fond, comment peut-on juger les gens, alors que personne ne peut dire qui, à la fin, sera jugé bon. Judas n'était-il pas le trésorier de Jésus? Et à la fin ne l'a-t-il pas trahi? Saül ne persécutait-il pas les chrétiens? Et à la fin n'est-il pas devenu un des apôtres les plus fervents du Christ?

Si l'on nous dit: "Occupez-vous de votre pays, ce qui se passe ailleurs ne vous regarde pas."

Si l'on nous tient un tel langage, "changeons de coiffeur"! Car ce qui se passe ailleurs, précisément nous regarde. Ce qui se passe au Vietnam, par exemple, nous regarde pour la simple raison que, mis à part le côté purement humain, les milliards de dollars qui s'y perdent ont entraîné la dévaluation de cette monnaie, et contraint les États-Unis à prendre des mesures qui ont affecté notre économie et, par conséquent, notre vie quotidienne. Nous devons donc considérer ce pays comme le nôtre, et ses habitants comme nos concitoyens.

Si l'on nous dit: "C'est bien beau d'accepter dans la foi ce qui est d'accord avec la raison, mais ne touchez pas aux rites. Peu importe s'ils ne satisfont pas votre raison, car en les abolissant vous détruiriez la foi."

Si l'on nous tient un tel langage, "changeons de coiffeur"! Car si à l'âge de la raison, on demande à un homme d'accepter ce qui contrarie sa raison, sa conscience n'est pas tranquille. Et le but de la foi qui est précisément la tranquillité de la conscience, n'est pas atteint.

Si l'on nous dit: "Faire consciencieusement son travail, ce serait idéal si tout le monde le faisait. Mais en attendant n'y pensez même pas. Sauvez les apparences, comme tout le monde, et profitez au maximum. Autrement vous êtes perdu."

Si l'on nous tient un tel langage, "changeons de coiffeur"! Car la fausse monnaie qu'on nous a encouragés à mettre en circulation, tôt ou tard nous sera rendue. Et nous en serons confus et écoeurés. Faisons notre travail consciencieusement, et nous verrons qu'en définitive, mystérieusement, c'est le travail consciencieux qui nous sera rendu.

On peut encore parler de bien d'autres aspects de cette vérité qui est l'esprit même de notre époque. Résumons-les en disant qu'il est temps de considérer tous les hommes, sans distinction de religion, de façon de penser, ou de pays d'origine, comme de bons Samaritains, tout en agissant, à leur égard comme le bon Samaritain.

Commençons cette expérience à l'échelon local, dans la vie quotidienne. Commençons notre journée par un geste qui réjouit un coeur: un coup de téléphone à un malade; une lettre d'encouragement à un homme accablé par les épreuves, une courte visite à une personne âgée et solitaire. Et nous verrons comment, intérieurement, nous en ressentirons une profonde joie; et comment, mystérieusement, nous serons réjouis par une bonne nouvelle inattendue. Continuons notre journée en venant en aide à un homme en difficulté. Et nous verrons comment, mystérieusement, nos propres difficultés, apparemment insurmontables, disparaîtront comme les murailles de Jéricho.

C'est à une telle expérience que la foi baha'ie nous invite, expérience qui, une fois tentée, nous amènera à nous écrier du fond du coeur:

QU'IL FAIT BON VIVRE,
LA VIE MÉRITE D'ÉTRE VÉCUE.
MERCI LA VIE!


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2.4. Pardonner, c'est comprendre

L'autre soir, en feuilletant d'anciens numéros du périodique Sélection, j'ai retrouvé un article qui parlait d'une histoire particulièrement instructive. Je voudrais vous la résumer pour dire combien, dans la vie, nous avons besoin de montrer de l'indulgence les uns à l'égard des autres, indulgence que je vous demande pour mon exposé de ce soir.

Un voyageur se trouvait par hasard assis dans un compartiment de chemin de fer, à côté d'un jeune homme visiblement très abattu qui finit par lui ouvrir son coeur.

C'était un ancien détenu qui sortait d'une prison lointaine. Sa famille avait honte de lui. Et ce n'est que très rarement qu'il en recevait une lettre ou une visite. Il gardait néanmoins l'espoir que cette absence et ce silence tenaient à ce que les membres de sa famille n'étaient pas assez riches pour faire ces voyages, ni assez instruits pour la rédaction de ces lettres. Il espérait contre toute évidence qu'ils lui avaient pardonné. Il espérait, mais il n'en était pas sûr. Aussi, soucieux de les mettre à l'aise, leur avait-il écrit de dresser un signal qu'il pût voir du train en passant devant la petite ferme: s'ils lui avaient pardonné, ils mettraient un ruban blanc sur le grand pommier en bordure de la voie ferrée; dans le cas contraire, ils s'en abstiendraient. Il resterait alors dans le train et s'en irait au loin, finir sans doute dans la peau d'un clochard.

Quand le train approcha de son village natal, l'angoisse du jeune homme prit de telles proportions qu'il se vit dans l'impossibilité de regarder par la fenêtre. Son compagnon changea de place et promit de surveiller l'apparition du pommier.

Un instant plus tard il posait sa main sur le bras du jeune homme.

- Le voilà, murmura-t-il les larmes aux yeux. Tout va très bien. L'arbre entier n'est que rubans blancs.

A ce moment, toute l'amertume qui avait empoisonné une vie se dissipa, et une nouvelle vie commença pour le jeune homme. Ses parents avaient compris que leur fils avait besoin d'être pardonné, que sa vie en dépendait, et qu'en le lui refusant, ce pardon, ils empoisonneraient toute son existence, qu'il deviendrait alors un délinquant, voire un criminel.

Chers amis, puis-je me permettre de vous demander ce que vous auriez fait à la place des parents de cet ex-délinquant? N'est-ce pas que vous auriez agi comme eux, n'est-ce pas que vous auriez oublié les souffrances du passé, pour pardonner? Et ceci pour la simple raison que vous êtes faits ainsi, vous ne pouvez pas changer, étant donné que le pardon est l'un des attributs de l'homme, de l'homme dans le vrai sens du mot.

J'entends déjà l'objection: il y a pourtant des cas où l'on sait qu'il faut pardonner, mais où on ne pardonne pas. Comment expliquer cela?

Les Écrits baha'is nous en donnent la réponse:

"L'homme possède deux natures, sa nature élevée ou spirituelle, et sa nature inférieure ou matérielle. Par l'une il approche de Dieu, par l'autre il vit uniquement pour le monde. On peut trouver les caractéristiques de ces deux natures dans l'homme Par son côté matériel il exprime le mensonge, la cruauté l'injustice ; tous ces traits proviennent de sa nature la plus basse. Les attributs de sa nature divine se manifestent par l'amour, la pitié, la bonté, la vérité, la justice, chacun d'eux et tous étant l'expression de sa nature élevée. Toutes les bonnes habitudes, toutes les bonnes qualités appartiennent à la nature spirituelle de l'homme. Quant à ses imperfections et à ses mauvaises actions, elles proviennent de sa nature matérielle (Causeries d`Abdu'l-Bahá).

Remarquons que le terme "spirituel" pourrait être rem placé par le terme "humain", étant donné que l'homme, dans le sens le plus profond de ce mot, est un être essentiellement spirituel.

C'est un être parfait par sa création, comme le précisent les Écrits baha'is:

"Par les mains de la puissance Je t'ai créé, et par les doigts du pouvoir Je t'ai engendré, et en toi J'ai mis l'essence de Ma lumière. Contente-toi donc de Ma lumière, et ne cherche rien d'autre, car Mon oeuvre est parfaite, et Mon commandement inviolable. N'aie ni doute, ni hésitation à cet égard (BAHÁ'U'LLÁH, Les Paroles cachées - éd. 1973. M.E.B. Bruxelles)"

On peut donc résumer le langage des Écritures d'aujourd'hui (Écritures baha'ies) en disant que l'homme, tout en étant créé d'une manière parfaite, a une double nature dont l'une, sa nature matérielle, par ses attributs, empêche l'homme de montrer ses perfections. C'est pour cette raison qu'il est appelé à la combattre.

Un tel langage ne pouvait cependant pas être tenu il y a deux mille ans, quand l'humanité traversait son enfance. C'est ainsi que, d'après l'Évangile, nous déduisons que l'homme en principe est bon, que s'il devient mauvais, c'est que le démon entre en lui, et que c'est donc ce démon qu'il faut chasser.

Ce langage absolument imagé convenait bien à l'enfance humaine.

Et pour expliquer l'idée selon laquelle la mission de Jésus consistait à apprendre à l'homme à combattre sa nature matérielle avec ses imperfections, l'Évangile nous dit que Jésus chassait les démons. Ainsi, par exemple, lorsqu'on amène deux démoniaques chez Jésus (Mat. 8/28), celui-ci chasse les démons en les transformant en cochons pour les noyer définitivement.

Cela ne veut-il pas dire que ces deux hommes avaient des caractères "cochons" que Jésus a fait disparaître? Il a même appris à ses apôtres à faire comme lui:

"Jésus ayant assemblé les douze leur donna force et pouvoir sur tous les démons." (Luc 9/11)

L'expérience a montré qu'à cette époque c'était la meilleure façon de présenter la double nature de l'homme, et de lui apprendre à lutter contre sa nature matérielle.

En effet, chaque fois qu'un chrétien se voyait poussé à la vengeance, à la haine, à la colère, il se disait: c'est le démon qui est entré en moi, il faut que je le chasse. Et il le chassait pour pardonner, au lieu de se venger, pour aimer, au lieu de haïr, pour rester doux, au lieu de se mettre en colère. Et c'est cela qui faisait l'objet de l'admiration des historiens et philosophes. Ainsi, par exemple, Galien, dans son Commentaire du Traité de Platon écrit:

"Il y a un peuple qu'on appelle chrétien. De cette secte émanent des actions de beauté comme celles qui accompagnent un vrai philosophe."

Ceci dit revenons à notre sujet concernant le pardon. La loi essentielle de l'Évangile est la loi du pardon, en remplacement de la loi du talion. Cette nouvelle loi a radicalement changé les relations humaines et, par voie de conséquence, la face du monde.

Mais une fois de plus, si cette loi a réussi, c'est que Jésus l'a présentée en tenant compte du fait que l'humanité traversait le stade de son enfance. C'est ce que nous allons voir de près. D'abord en prescrivant la loi du pardon, Jésus a bien précisé que la dérogation à cette loi entraîne le châtiment divin. Ainsi, par exemple, dans la parabole du serviteur sans compassion, qui fut livré aux bourreaux, Jésus dit:

"C'est ainsi que le Père céleste vous traitera, si chacun de vous ne pardonne pas à son frère de tout son coeur." (Mat. 18/35)

Langage qu'il fallait bien tenir à une humanité traversant son enfance, Mais à l'homme adulte d'aujourd'hui, il faut tenir au autre langage. C'est la raison pour laquelle la foi baha'ie demande l'obéissance aux lois, et plus particulièrement à la loi du pardon, non plus par peur du châtiment, mais par amour des enseignements volontairement acceptés.

"Ne néglige pas Mes commandements par amour de Ma beauté (BAHÁ'U'LLÁH, Les Paroles cachées - éd. 1973. M.E. B. Bruxelles) lisons-nous dans les Écrits baha'is.

Un second point à signaler, c'est qu'en prescrivant de pardonner à celui qui nous a offensé, Jésus dit: "Va et reprends-le entre toi et lui seul" (Mat. 18/15), attitude qu'on doit adopter à l'égard d'un "enfant", ce qui était le cas de l'humanité d'il y a deux mille ans.

Tandis que si l'on adopte une telle attitude à l'égard d'un adulte, on ne fait que le mettre sur la défensive, étant donné que 99 fois sur 100, l'homme se juge innocent, quelle que soit l'énormité de sa faute. Voilà pourquoi les Écrits baha'is, destinés à une humanité entrant dans le stade de la maturité, non seulement prescrivent le pardon, mais interdisent également de blâmer celui qui nous a offensés, ainsi que de lui imposer une ligne de conduite conforme aux enseignements de la foi.

C'est aux institutions dûment élues par la communauté de s'en charger.

Un troisième point à signaler, c'est qu'en nous exhortant à pardonner "non pas sept fois, mais septante fois sept" (Mat. 18/22), ce commandement pourrait nous donner l'impression qu'il n'y a pas de limite pour le pardon. Aujourd'hui cependant, il faut des précisions, car l'interdépendance est tellement étroite que l'inconduite d'un membre de la communauté peut avoir des effets néfastes pour toute la communauté. Dans ces conditions, une personne qui fait partie de l'institution dirigeant les affaires communautaires, ne doit plus appliquer la loi du pardon, mais la loi de la justice. C'est la raison pour laquelle ces institutions, chez les baha'is, s'appellent Maisons de Justice, et non pas "maisons de pardon".

Ainsi, par exemple, si je suis le père d'un garçon débauché, je lui pardonne les souffrances qu'il me cause. Mais en tant que membre de l'institution, je ne pardonne pas; je vote pour appliquer la justice, cette vertu que Bahá'u'lláh exalte au dessus de tout. "Ce que j'aime le plus, c'est la justice (BAHÁ'U'LLÁH, Les Paroles cachées - éd. 1973. W.E.B. Bruxelles) lisons-nous dans Ses Écrits.

De telles précisions concernant la loi du pardon face à la loi de la justice, nous n'en trouvons pas dans l'Évangile. Ce n'était d'ailleurs pas tellement nécessaire il y a deux mille ans car, à cette époque, tous n'avaient pas la possibilité de figurer parmi les dirigeants.

Tandis qu'aujourd'hui, selon l'administration baha'ie, tous, sans la moindre exception, en ont la possibilité et doivent, par conséquent, savoir à quelle occasion et comment appliquer la justice au lieu du pardon.

Un quatrième point à mentionner, en relation avec la loi du pardon, est la conséquence du principe de l'intelligibilité de la foi, principe qui porte un caractère sacré chez les baha'is. D'après ce principe, tout commandement religieux doit être en accord avec la raison et la science. La science démontre pour sa part, que le pardon est un besoin de la nature intime de l'homme, et que l'insatisfaction de ce besoin, autrement dit le manque de pardon, a des conséquences néfastes pour lui.

Quelles sont ces conséquences néfastes? Pour répondre à cette question, voyons quelques formes sous lesquelles se manifeste le manque de pardon.

Il y a d'abord la colère. La médecine explique le processus par lequel la colère provoque le refoulement du sérum sanguin vers la peau, lequel, une fois séché, forme des croûtes et occasionne des démangeaisons souvent très pénibles.

Il est également démontré comment, à cause de la colère, certains vaisseaux sanguins se resserrent et provoquent de terribles maux de tête. Et si cette contraction des vaisseaux sanguins se fait au niveau du coeur, elle entraîne la mort. Par ironie du destin, ce fut précisément le cas d'un grand savant en physiologie, John Hunter, lequel, lors d'un congrès médical, succomba à un accès de colère. Ce qui, entre parenthèses. prouve qu'il ne suffit pas que la science nous dise: ne te mets pas en colère. Il faut que la foi nous en donne la force.

Mais aucun organe ne souffre de la colère autant que le foie. "La colère brûle le foie" lisons-nous dans les Écrits baha'is qui nous demandent d'éviter la colère "comme on fuit le lion".

Une fois de plus, de telles précisions justifiant scientifiquement la nécessité du pardon, nous ne les trouvons pas dans l'Évangile. Ce qui est bien compréhensible, étant donné que ce livre a été révélé il y a deux mille ans, quand l'humanité, dans sa grande majorité, était illettrée, et n'était donc pas en mesure de comprendre la justification scientifique des commandements religieux.

Mais aujourd'hui que l'instruction est généralisée, l'esprit scientifique domine et ne peut donc pas être négligé.

L'incapacité de pardonner peut amener l'homme jusqu'à la médisance, ce qui est bien plus dangereux que la colère. Car si les effets de la colère sont néfastes pour l'individu, et si l'on peut encore y remédier dans une certaine mesure, les effets de la médisance par contre sont néfastes pour toute la communauté, et neutraliser ces effets devient infiniment plus difficile, souvent même impossible.

Un jour, un homme qui avait répandu des médisances demande à un saint comment réparer les préjudices ainsi causés à la communauté. Le saint lui dit de faire le tour du village, et de déposer une plume sur le seuil de chaque maison.

Le lendemain le saint l'appelle et lui demande alors d'aller les ramasser.

- Impossible, répond l'homme, le vent a soufflé toute la nuit et elles sont irrémédiablement dispersées.

- C'est exact, dit le saint. Et il en est de même de la médisance.

Concernant la colère et la médisance il est intéressant de faire un parallèle entre la foi chrétienne et la foi baha'ie. Comme la mission de la première était avant tout la formation de l'individu, elle insiste surtout sur le danger de la colère pour l'individu, et ceci au point qu'elle la compare au meurtre. Tandis que la mission de la foi baha'ie étant la formation simultanée de l'individu et de la communauté, si interdépendants de nos jours, celle-ci souligne avec force non seulement les dangers de la colère, mais surtout les dangers de la médisance, tant pour l'individu que pour la communauté. Selon les Écrits baha'is, la médisance est un crime.

De tout ce que nous avons dit, nous pouvons conclure que, sur le plan individuel, nous devons acquérir la capacité de pardonner.

Qu'est-ce qu'il faut faire pour y arriver?

La réponse baha'ie se résume en quelques mots:

"Oublie tout sauf Moi et entre en communion avec Mon esprit (BAHÁ'U'LLÁH, Les Paroles cachées).

Il faut donc oublier tout sauf Dieu et entrer en communion avec Son esprit.

Jésus a dit que l'amour est Dieu. On peut donc dire que, dans un certain sens, il nous est demandé d'oublier tout sauf l'amour. Il y a donc deux choses à faire: oublier et aimer. L'homme, par sa création même, en est capable. Dès la tendre enfance cette capacité d'oublier ce qui est désagréable pour ne retenir que ce qu'on aime, se manifeste chez tout être humain. A ce propos le comportement de l'enfant est proverbial.

Maman, dit le petit, je veux jouer avec Jojo.

Mais voyons, hier même tu disais que Jojo a été méchant avec toi. Et aujourd'hui tu veux jouer avec lui, s'étonne sa maman.

- Mais c'était hier, maman.

L'enfant oublie rapidement ce qui est désagréable. Les grands aussi ont une telle disposition d'esprit. De retour de vacances, on oublie les petits désagréments pour ne parler que des bons moments vécus loin des soucis quotidiens.

Cette merveilleuse disposition d'esprit, d'oublier ce qui est désagréable pour ne retenir que ce qui est agréable, il faut la garder toute sa vie, car c'est elle qui permet d'être en mesure de pardonner.

Supposez que vous êtes en route pour rencontrer votre bien-aimé, et que, par hasard, quelqu'un vous offense. Vous ne pensez même pas à réagir pour vous venger. L'idée d'amour supplante l'idée de vengeance. Et selon la foi baha'ie, c'est le seul moyen d'agir lorsque les mauvaises pensées viennent à l'esprit.

`Abdu'l-Bahá dit: "Les mauvaises pensées viennent de l'extérieur, et trouvent leur réflexion en l'homme. On ne doit pas servir de miroir pour elles. On ne doit même pas les réprimer, car c'est impossible, et les difficultés s'aggravent, se mettant de plus en plus en évidence. On doit constamment tourner le miroir de son coeur vers Dieu.

C'est le seul moyen contre les mauvaises pensées. La face du miroir doit être tournée vers Dieu et le dos vers les mauvaises pensées."

Toute notre vie est un voyage vers le pays merveilleux de l'amour, où l'on est heureux avec l'amour de Dieu, l'amour du prochain, l'amour du travail. Si sur cette route, on se voit offensé, on ne doit pas s'arrêter pour réprimer l'idée de vengeance. On doit continuer sa route, son voyage.

Ce voyage est infiniment facilité par la communion avec notre Bien-Aimé, par la prière, ce qui devrait faire l'objet d'une autre conférence. Je vous en fais grâce, car je ne voudrais pas vous amener au point où vous récitiez dans votre coeur cette ancienne prière zoroastrienne qui dit:

"O mon Dieu délivre-moi de l'homme qui est fatigant."


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2.5. L'arche de Noé à l'ère de l'atome

Un jour, alors qu'il visitait le Musée Royal en compagnie des ministres du roi, Confucius aperçoit un seau vide parmi les objets exposés. Il demande aux ministres ce que cela pourrait bien signifier.

Ceux-ci lui répondent que ce seau existe depuis des siècles, et que personne n'en connaît la signification. Alors Confucius prend le seau et se dirige, en compagnie des ministres, vers le grand bassin du musée.

Il remplit complètement le seau d'eau et le lâche. Le seau s'enfonce dans l'eau et s'y engloutit.

- Il se noie, leur dit-il, parce qu'il y a trop d'eau.

Ensuite il le vide complètement et le lâche sur la surface de l'eau. Le seau y reste un petit moment, puis, par suite d'un léger vent, se penche d'un côté pour s'enfoncer dans l'eau et s'y engloutir à nouveau.

- Il se noie, leur dit-il, parce qu'il n'y a pas d'eau du tout.

Enfin, il prend le seau, le remplit modérément d'eau et le lâche. Le seau reste en équilibre, sans sombrer, malgré le vent et les ondes.

- Cette fois, leur dit-il, il tient bien parce qu'il y a de l'eau juste ce qu'il faut.

Cette image illustre bien l'idée de l'équilibre d'un bateau en mer, qui pour ne pas sombrer et bien résister aux tempêtes, doit être ni trop vide, ni trop rempli. Mais ce qu'elle illustre mieux encore, c'est l'équilibre que l'homme doit maintenir pour affronter la vie avec ses orages. Et c'était cela l'idée de Confucius. En effet, notre vie est comparable à un voyage en mer, avec ses tempêtes et ses orages, toujours inévitables.

L'homme doit apprendre à faire ce voyage en toute sécurité. Pour cela, il faut qu'il soit ni "trop vide", ni "trop rempli".

"Trop vide", c'est le cas de celui qui se retire du monde, c'est le cas d'un ascète dont la vie n'a aucun sens, ni pour lui-même, ni pour les autres. C'est comme s'il n'existait pas. C'est un bateau déjà naufragé.

En effet, d'abord sa vie n'a aucune valeur pour les autres, car il ne travaille pas et, par conséquent, ne rend aucun service aux autres. Et puis il ne fournit pas un bon exemple à suivre.

A-t-il du mérite pour son soi-disant "détachement"?

Il semble que non, car le véritable détachement ne signifie pas être dépourvu de telle ou telle chose, mais bien au contraire, avoir cette chose, et ne pas s'y attacher. Détachement d'une chose inexistante ne veut pas dire détachement.

Un homme qui travaille pour s'enrichir, et qui dépense ses richesses pour le bien-être général, est un homme détaché. Tandis qu'un homme pauvre qui garde précieusement ses économies ne l'est pas.

Un ascète a-t-il du mérite parce qu'il est inoffensif? Non, pour la simple raison que même s'il voulait être agressif, il n'en aurait pas le pouvoir. On a du mérite, quand, étant puissant, on reste inoffensif.

Un ascète a-t-il du mérite parce qu'il ne regarde pas une femme avec convoitise?

Sûrement pas, car suite aux mortifications qu'il s'est imposées, il est impuissant. Celui-là a du mérite qui, en pleine possession de sa force physique, ne regarde pas une femme avec convoitise.

Le seau vide de Confucius symbolise donc le cas de l'ascète.

Quant au terme "trop rempli", il s'applique à l'homme qui se donne entièrement au monde et à ses plaisirs charnels.

Du point de vue purement humain, sa vie n'a pas de sens, car quoi qu'il fasse, même pour lui-même, il n'atteint jamais le bonheur de l'animal.

A ce propos, voilà ce que nous lisons dans les Écrits baha'is:

"Il n'y a dans le monde matériel, de richesse ou de fortune, de confort ou d'aise comparables à la richesse de cet oiseau.

parce que ces prairies et ces étendues sont la place de son nid, que toutes les graines des champs sont sa nourriture et son bien, et que toutes les terres, les villages, les prairies, les prés, les forêts et les plaines sont sa propriété.

Voyons qui est plus riche: cet oiseau ou l'homme le plus riche? Car malgré toutes les graines qu'il consomme, sa richesse matérielle ne diminue pas (Les Leçons de Saint-Jean-d'Acre, p. 80. P. U.F. Paris).

Et nous arrivons finalement aux termes "ni trop vide, ni trop rempli", ou, si vous voulez, au cas de ce bateau en équilibre qui avance sur cette mer houleuse qu'est la vie. Il s'agit de l'homme qui établit l'équilibre entre sa vie matérielle et sa vie spirituelle. Et c'est précisément ce qu'enseigne la foi baha'ie, qui n'admet ni l'ascétisme, ni le fait de se donner entièrement aux plaisirs de ce monde, tout en reconnaissant cependant à chacun le privilège légitime de profiter des multiples joies, beautés et plaisirs offerts par ce monde.

Voilà ce que nous lisons à ce propos dans les Écrits baha'is:

"Tout ce qui a été créé est pour l'homme qui est le sommet de la création et il doit être reconnaissant des dons divins. Toutes les choses matérielles sont pour nous afin que, par notre gratitude, nous apprenions à comprendre la vie comme un divin bienfait. Si nous sommes dégoûtés de la vie nous sommes ingrats, car notre existence matérielle et spirituelle est la preuve de la grâce divine. Aussi devons-nous être heureux et passer notre temps à louer et apprécier toutes choses (Divine Philosophy).

Comme on le voit d'après ces textes, la vie, avec ses bonnes et belles choses, est un cadeau qui nous est offert par Dieu. Quand on reçoit un cadeau on doit se montrer content et reconnaissant. Ce contentement et cette reconnaissance se manifestent par la joie. La joie devient donc un devoir pour tout baha'i.

"Vous avez le devoir, dit Bahá'u'lláh, de montrer sur vos visages la joie et la bonne nouvelle."

Et Abdu'l-Bahá, interprète de Ses paroles, écrit:

"La joie nous donne des ailes. Quand nous sommes heureux notre énergie est plus grande, notre intelligence est plus éveillée, notre compréhension est plus vive. Nous semblons mieux à même de faire face à la vie (Causeries `Abdu'l-Bahá - éd. 1970. M.E.B. Bruxelles).

C'est donc pour acquérir plus d'énergie, pour manifester plus d'intelligence, pour mieux comprendre les choses, pour être mieux disposé de faire face à la vie, que nous devons garder une joie inébranlable. Ce qui n'est malheureusement pas le cas ni à l'Est, ni à l'Ouest. Et pourtant l'homme a tous les plaisirs matériels à sa disposition.

A l'Ouest, la jeunesse mécontente a de plus en plus recours aux drogues pour s'évader. A l'Est, la presse, la radio, la télévision et autres organismes culturels sont officiellement invités à encourager les gens à rire. Et dans ce but on a recours à tout, et surtout à la science, oubliant le fait que ce n'est pas la science qui peut transformer une larme de tristesse en larme de joie.

Récemment, en Allemagne de l'Est, un médecin a ouvert, dans la presse, la campagne du rire par cette remarque:

"Il en coûte moins d'efforts pour rire que pour faire grise mine. Seize muscles seulement entrent en mouvement quand on éclate de rire, contre une bonne cinquantaine, quand on fronce les sourcils et le front sous l'emprise de la mauvaise humeur."

Pourquoi l'homme d'aujourd'hui, malgré tous ses efforts pour garder une joie inébranlable, n'y arrive-t-il pas? Parce que les plaisirs par lesquels il cherche à se réjouir ne sont pas de vrais plaisirs.

Ainsi, par exemple, le plaisir de la table ne semble pas être un vrai plaisir, car une fois rassasié, on ne prendrait aucun plaisir au meilleur repas du monde; c'est comme une chose qui tantôt est douce, tantôt amère. Peut-on l'appeler "douceur"? Sûrement pas. Et il en est de même en ce qui concerne tous les plaisirs matériels. Comment faire pour que les plaisirs des choses matérielles ne soient pas temporaires, pour qu'ils durent, et qu'ils ne lassent pas?

En les partageant avec les autres, en les donnant aux autres au lieu de les prendre uniquement soi-même. En effet, on ne se lasse jamais des plaisirs qu'on fait aux autres. On ne se lasse jamais d'un repas délicieux qu'on donne aux autres, mais on se lasse d'une même nourriture quand on en prend trop. Le plaisir de donner est donc permanent, et, par conséquent, c'est un vrai plaisir.

Mais pour donner, il faut être détaché.

En résumé, on peut affirmer que la véritable joie est dans la possibilité de profiter des plaisirs du monde (aspect matériel de la vie) tout en restant détaché pour les partager avec les autres (aspect spirituel de la vie). Et c'est précisément ce dernier aspect, cet aspect spirituel de la vie, qui est négligé par l'homme. C'est la raison pour laquelle il ne jouit pas d'une véritable joie.

Un baha'i, tout en menant une vie active pour s'enrichir, a le devoir de s'entraîner à ce détachement: aussi bien d'une manière privée en famille, parmi les siens, qu'en société, directement ou indirectement, par des contributions volontaires à l'échelon local, national ou mondial, au profit d'oeuvres de bienfaisance ou autres. Il se conforme ainsi à ces paroles de Bahá'u'lláh:

"Les hommes les meilleurs sont ceux qui gagnent leur vie par leur métier, et dépensent pour eux-mêmes ainsi que pour leurs parents et leur prochain dans l'amour de Dieu, le Seigneur de tous les mondes."

Il est à noter que c'est ce détachement qui doit empêcher l'homme de se donner entièrement aux plaisirs de ce monde, de "se noyer". Autrement dit, c'est ce détachement qui garantit l'équilibre entre la vie spirituelle et la vie matérielle de l'homme.

Cet équilibre entre la vie spirituelle et la vie matérielle est indissolublement lié à la modération dans ces deux aspects de la vie. En effet, dans le domaine matériel, si l'on ne s'en tient pas à la modération, on a de graves ennuis. Les meilleures choses prises avec excès se retournent contre nous. L'aliment le plus sain, le plus nutritif, pris avec excès nous cause de graves troubles digestifs. Le sel, si vital pour l'organisme, pris avec excès, devient toxique. Le tilleul est recommandé pour favoriser le sommeil; pris avec excès, il empêche le sommeil.

Sur le plan spirituel aussi il faut s'en tenir à la modération. Trop de franchise ne conduit-il pas à la grossièreté, trop de loyauté au fanatisme, trop de précaution à la timidité?

Voilà pourquoi, dans les prières baha'ies, nous demandons à Dieu de nous accorder la modération.

Combien vrai est cet aphorisme qui dit:

"La vérité n'a que deux ennemis: le trop et le trop peu."

Nous avons parlé de l'équilibre entre la vie spirituelle et la vie matérielle, ceci sur le plan individuel. Or aujourd'hui, plus que jamais, l'équilibre individuel dépend de l'équilibre général. Voilà pourquoi on ne doit pas négliger l'équilibre général, qui, malheureusement, se trouve rompu partout et dans tous les domaines. En Occident, on ne sait que faire de l'excédent des produits alimentaires. En Orient, on ne sait pas comment se procurer le minimum vital.

En Occident, les maladies sont dues principalement à la suralimentation. En Orient, c'est la sous-alimentation qui fait des ravages.

En Occident, on cherche à limiter les naissances. En Orient, on fait de plus en plus d'enfants.

En Occident, l'hiver est une saison pendant laquelle on essaie d'avoir une maison aussi chaude que possible, aussi chaude qu'en été quand on se plaint de la chaleur. En Orient, on n'a pas de quoi se chauffer.

Comme si ce déséquilibre dans le monde humain ne suffisait pas, l'homme crée le déséquilibre dans les mondes minéral, végétal et animal.

Ce déséquilibre, qu'il soit dans le monde humain, ou dans le monde animal, végétal ou minéral, est dû au fait qu'on néglige l'unité organique de l'univers en général, et du monde humain en particulier. "Organique" en ce sens que l'univers, en général, et l'humanité, en particulier, sont comparables à l'organisme humain, où la santé de chaque organe dépend de la santé des autres, où la souffrance d'un seul organe fait souffrir tout l'organisme.

En rompant l'équilibre du sol, on rompt l'équilibre des mondes végétal, animal et humain.

En effet, en utilisant les produits chimiques pour extraire plus de profit du sol, on dénature les plantes qui y poussent, on les empoisonne, tout comme on empoisonne le bétail qui s'en nourrit. L'homme qui consomme la viande et le lait de ce bétail n'échappe pas non plus à l'empoisonnement. De sorte que l'empoisonnement du sol entraîne l'empoisonnement de tout. L'unité organique des différents mondes est réellement frappante.

Quant à l'unité organique du monde humain, en particulier, peut-on nier, pour ne citer qu'un exemple, que le sort d'un Américain dépend de ce qui se passe au Vietnam, et que le coût de vie pour un Européen dépend de ce qui se passe en Amérique? Il y a une interdépendance, une unité organique plus manifeste que dans les autres mondes. Et toutes les souffrances de l'humanité viennent de ce qu'on néglige cette unité organique.

Parmi ces souffrances, la plus terrible de nos jours est la guerre du Vietnam. On nous demande souvent ce que font les baha'is pour arrêter cette guerre. Les baha'is répondent que lorsque vous avez un furoncle qui vous fait mal, il ne suffit pas de tuer ce mal apparent par un palliatif. Il y a un mal intérieur, bien plus dangereux, qui en est la cause. Et c'est ce mai intérieur qu'il faut tuer. Autrement, si vous tuez le mal apparent, je veux dire: si vous faites disparaître le furoncle, qui n'est qu'un symptôme, le mal intérieur qui ronge tout l'organisme se manifestera ailleurs, par un autre furoncle, par un autre symptôme.

Et bien, la guerre du Vietnam est un furoncle, symptôme du mal intérieur dont l'organisme de l'humanité est atteint, ce mal intérieur étant le manque d'unité.

C'est donc l'unité qu'il faut établir. Et c'est en cela que réside le traitement baha'i pour tous les "furoncles" tels que la guerre du Vietnam, les événements sanglants d'Irlande, le conflit israélo-arabe, etc...

Parallèlement à ce traitement, qui devrait faire l'objet de plusieurs conférences, les baha'is utilisent dans un certain sens les "palliatifs".

Ainsi, par exemple, pour reprendre le cas du Vietnam, les soldats américains baha'is qui y sont envoyés, ne portent pas d'arme, mais soignent les blessés, qu'ils soient du Nord ou du Sud; ils abritent les sans-abri, qu'ils soient du Nord ou du Sud. Mais je le répète, ce ne sont que des "palliatifs", le remède radical pour le rétablissement de l'équilibre et le retour à la modération étant la prise de conscience de l'unité organique.

Puisque je parle de la modération en général, il serait injuste pour un conférencier que lui-même n'en tienne pas compte. Il est donc temps que je termine mon exposé. Permettez-moi de le faire par la réponse à cette question que chacun a dû se poser: Où est-elle cette arche de Noé, capable de résister au déluge des maux qui nous accablent de tous côtés?

Cette arche, estiment les baha'is, c'est cette nouvelle civilisation, où il y a équilibre entre le côté matériel et le côté spirituel de la vie, où la science est mise au service de la religion, et la religion au service de la science, leur collaboration garantissant une vie facile et agréable à vivre, à la fois matériellement et spirituellement.


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2.6. Ce siècle de lumière

Imaginons, dans l'espace infini de notre univers, avec ses immenses corps célestes, un tout petit vaisseau spatial, une sorte d'Apollo, qui a une destination bien déterminée. C'est de ce vaisseau spatial que nous allons nous occuper plus particulièrement. Car il s'agit, comme vous l'avez peut-être deviné, de notre planète, dont la destination est la paix.

J'ai eu recours à cette image pour attirer votre attention sur ce qui suit. Tout comme un vaisseau spatial, qui ne peut atteindre sa destination que lorsqu'il y a collaboration entre tous les membres de l'équipage, ce qui se traduit par les termes "esprit d'équipe", notre planète ne pourra, elle aussi, atteindre sa destination que lorsqu'il y aura collaboration entre tous les membres de l'équipage, c'est-à-dire entre tous les habitants de la terre.

Car I'ère est révolue où l'équipage dirigeant était constitué par quelques individus. Aujourd'hui, toute la communauté doit faire partie de l'équipage. C'est une précision que nous trouvons dans les Écrits baha'is depuis plus d'un siècle.

Il faut donc qu'il y ait esprit d'équipe parmi tous les habitants de la terre, pour qu'enfin, on arrive à destination, c'est-à-dire à la paix.

Indiscutablement, pour tout, il y a un commencement, et comme disent les Grecs, le commencement est la moitié du tout. Ce commencement, c'est-à-dire l'apparition de cet esprit d'équipe, on le voit chez les adhérents des différents mouvements mondiaux. et plus particulièrement chez les fédéralistes pour qui "la terre n'est qu'un pays, et les hommes en sont les citoyens".

Le fait que cet esprit d'équipe existe déjà chez des gens de bonne volonté appartenant à différents mouvements, est digne d'admiration. Mais ce n'est pas suffisant. C'est comme ces ampoules, elles éclairent bien cette pièce, mais ce n'est pas suffisant. Il faut une lumière universelle, un esprit d'équipe universel. Où trouver la source de cette lumière universelle? Où trouver ce "soleil"?

Pour avoir réponse à cette question, profitons de l'expérience du passé, autrement dit étudions un peu l'histoire.

Supposons que nous sommes au stade de l'évolution où "Adam" avec "Ève" vont constituer ce qu'on appelle une famille. Indiscutablement, après cette union au sein de la famille, l'homme ne jouit plus de la liberté et de la souveraineté absolues dont il jouissait avant. Il a dû céder un certain nombre de ses droits au profit de la famille.

L'évolution continue. L'homme ayant appris à cultiver la terre n'est plus obligé à errer constamment pour assurer sa subsistance; il reste attaché à sa terre et ne peut s'enfuir devant l'attaque de la famille voisine. D'où la nécessité de l'entente entre les familles. Celles-ci se voient donc contraintes de céder une partie de leurs droits. de leur liberté, de leur souveraineté, au profit d'une nouvelle unité: la tribu.

L'évolution continue. Les besoins des tribus grandissent. Les unes se spécialisent en élevage, les autres ne font que cultiver la terre, les autres encore fabriquent des instruments d'agriculture et de chasse. Pour continuer à vivre, elles doivent s'entendre. D'où une nouvelle union pour former la nation. Les tribus cèdent donc une partie de leur liberté et de leurs droits au profit de la nation.

Nous voyons ainsi que chaque fois qu'il y a une nouvelle union, les parties en cause renoncent à leur souveraineté absolue, et cèdent un certain nombre de leurs droits au profit de la nouvelle unité.

Mais le témoignage capital de l'histoire est que toutes ces unions ne peuvent se réaliser définitivement que grâce à ce phénomène mystérieux, appelé révélation par les historiens spiritualistes, et mutation par les historiens matérialistes. Les Russes l'appellent phénomène social, tout court.

Quelle que soit l'appellation, ce qui est indéniable, c'est que ce phénomène produit une telle transformation dans les consciences, que celles-ci deviennent aptes à s'unir sur une plus grande échelle. Autrement dit, ce phénomène crée l'unité de conscience successivement à l'échelle familiale, tribale et nationale.

Ainsi, par exemple, personne ne nie le fait que c'est la révélation islamique qui a uni les tribus arabes pour former la nation arabe. De même les historiens sont unanimes sur le fait que c'est la révélation zoroastrienne qui a uni les princes prétentieux et les roitelets, chefs des tribus persanes, pour former la nation persane.

Cette leçon de l'histoire est oubliée, mais la voix de l'évolution et de ses implications se fait entendre. Ainsi, au dix-neuvième siècle, l'on s'aperçoit que, cette fois, c'est l'union des nations qui s'impose. On essaie d'abord de recourir à la force militaire. C'est Napoléon qui le fait, et il échoue.

Puis on pense à la faire par des alliances militaires entre les Grands. Ainsi, l'Angleterre, la Russie, l'Autriche et la Prusse s'unissent pour tenir les nations en accord. Mais là aussi on échoue. Et c'est la guerre de 1914, après laquelle il y a une troisième tentative pour unir les nations. C'est la Société des Nations. Ce troisième essai est également voué à l'échec, puisque les nations entrent de nouveau en guerre en 1939.

Et nous sommes aujourd'hui témoins du quatrième essai. C'est l'Organisation des Nations Unies. "Unies" ou "dites unies", c'est la question qu'on est en droit de se poser. Car d'abord s'il y a union, comme nous l'avons vu, les parties en cause, dans le cas actuel les nations, ne doivent plus garder leur souveraineté absolue. Ce qui n'est pas le cas jusqu'ici. Et puis, si les nations sont réellement unies au sein d'une organisation représentant la planète toute entière, chaque membre de cette organisation doit se considérer comme le représentant de la planète toute entière, et non pas en tant que le représentant de son pays natal.

Autrement dit, il faut qu'il y ait unité de conscience à l'échelle mondiale. C'est comme à l'échelle nationale où l'unité de conscience nationale fait que chaque membre de l'organisation représentant la nation (chaque ministre, si vous voulez) ne se considère pas comme le représentant de sa ville natale, mais en tant que représentant de toute la nation; il ne défend plus les intérêts de sa ville natale, mais ceux de tout le pays.

Or, comme nous l'avons dit, cette unité de conscience (à l'échelle nationale) est l'oeuvre de la révélation ou de la religion. Par conséquent, s'il s'agit de créer l'unité de conscience à l'échelle mondiale, il faut recourir à la même puissance (religion) qui a fait ses preuves durant plus de 6000 ans.

Mais quelle religion? Pour un baha'i, la question ne se pose pas. Car ce serait demander quelle science permettrait aux peuples de se rencontrer plus facilement, et, par conséquent de se rapprocher de plus en plus? Il va de soi que c'est la même science qu'il y a 2000 ans, car il n'y a qu'une science, la science universelle, toujours en évolution. Si cette science, il y a 2000 ans. mettait le char comme moyen de transport à la disposition des peuples, la même science, au stade actuel de son évolution, met l'avion comme moyen de transport à la disposition des peuples.

Il en est de même en ce qui concerne la religion: il n'y a qu'une religion, la religion de Dieu, toujours en évolution. Et le stade actuel de son évolution, c'est la foi baha'ie, qui est dotée des mêmes caractéristiques que les stades précédents (judaïsme, christianisme, islam ...). Autrement dit la foi baha'ie a son fondateur, ses Écrits sacrés, ses martyrs, ses prophéties accomplies, ses lois et bien d'autres caractéristiques dont l'exposé devrait faire l'objet d'une autre conférence.

Mais ce qu'il faut surtout retenir concernant la foi baha'ie, c'est qu'elle insiste plus particulièrement sur l'unité des religions, sans négliger l'unité dans les autres domaines.

D'après les Écrits baha'is, la lumière de l'unité mondiale se compose de sept lumières qui sont les suivantes:

1. l'unité dans l'ordre politique:

2. l'unité de pensée dans les entreprises mondiales;

3. l'unité dans la liberté;

4. l'unité dans la religion;

5. l'unité des nations, ce qui signifie que les hommes se considèrent comme les citoyens d'une même patrie, cette patrie étant notre planète;

6. l'unité des races;

7. l'unité des langues.

Quelques remarques s'imposent concernant ces diverses étapes vers l'unité mondiale.

Concernant l'unité politique, les Écrits baha'is recommandent la convocation d'une conférence mondiale, organisée par les dirigeants du monde afin de conclure un traité où les frontières de tous les pays seront fixées, ainsi que l'importance des armements de chacun d'eux et les obligations internationales.

Pour garantir le respect de ce traité, les Écrits baha'is prévoient la nécessité d'une force armée internationale assez puissante pour arrêter toute dérogation, d'où qu'elle vienne.

Concernant l'unité de pensée dans les entreprises mondiales, mentionnons, à titre d'exemple, le problème de la révolte et de la violence dans le monde.

La solution de ce problème doit être apportée à l'échelon mondial et de la même façon. La triste situation devant laquelle nous nous trouvons actuellement, vient de ce que les uns incitent les jeunes à la révolte, alors que les autres répriment impitoyablement les révoltes.

La solution actuelle que la foi baha'ie préconise, c'est la loyauté envers le gouvernement et la non-ingérence dans les activités politiques, car celles-ci ne font que diviser au moment où la foi baha'ie ne cherche qu'à unir.

La situation actuelle dans tous les pays est comparable à l'état d'un édifice qui est en train de s'écrouler lui-même; à quoi bon se révolter et prendre une pioche pour en accélérer l'effondrement? Ne vaut-il pas mieux plutôt consacrer son temps à l'édification d'un nouvel édifice dont humblement les baha'is présentent le modèle?

Concernant l'unité dans la liberté il faut avouer qu'actuellement on ne trouve nulle part cette liberté dont le signe est que les désirs des individus se trouvent réalisés pratiquement à l'échelon social. Dans les pays de l'Est, qui se présentent comme les vrais défenseurs de la liberté, la situation est illustrée par ce petit mot qui dit:

Alors Dieu, désignant Ève, dit à Adam: Choisis une épouse.

Quant aux pays au régime démocratique, on les définit ainsi: la démocratie est un régime sous lequel on a la liberté de dire qu'on n'a pas de liberté.

Quelle est la solution baha'ie à ce problème? J'en dirai un mot à la fin de cet exposé.

Et nous arrivons à la quatrième unité, l'unité dans la religion. Qu'est-ce que c'est que la religion?

C'est un code de lois révélé par Dieu afin d'assurer l'ordre, grâce à sa puissance innée (son esprit). Or l'ordre ne peut être établi qu'avec un même code de lois, et non pas avec plusieurs codes de lois. D'où la nécessité de l'unité dans la religion. Et quel est ce modèle d'ordre présenté par la foi baha'ie, j'en dirai un mot également à la fin de cet exposé.

Quant à l'unité des nations, on constate avec regret que les gens qui se considèrent comme les citoyens d'un même pays (je ne dis même pas du monde) restent en désaccord à cause des préjugés de race ou de langue. D'où la nécessité de l'unité de race et de langue, en plus de l'unité des nations.

Deux observations sont à faire à propos de ces lumières d'unité.

D'abord, comme pour la lumière solaire qui se compose de sept lumières dont chacune a son importance, le rouge restant le plus important, la lumière de l'unité mondiale se compose de ces sept lumières d'unité, chacune ayant un rôle à jouer et le rôle le plus important étant celui de l'unité dans la religion.

La deuxième observation est que, d'après les Écrits baha'is, ces lumières d'unité apparaîtront, chacune en leur temps, en ce "siècle de lumière (Terme utilisé par Abdu'l-Bahá).

N'en voyons-nous pas déjà les signes précurseurs? Ne voyons nous pas augmenter de jour en jour le nombre de ceux qui, tels les cosmonautes, voient notre planète comme un petit corps céleste, habité par un même peuple?

Tout cela pourrait paraître de la théorie pure, s'il n'y avait pas un mode de vie pratique qui engage chacun à s'entraîner à l'esprit d'unité au point de vue race, classe, nation, langue, religion, tout en apprenant à travailler en groupe, ensemble avec les autres, de manière que toute la communauté forme une seule et même équipe. Cet engagement est la participation active de tout baha'i à la vie communautaire organisée, régie par ce qu'on appelle actuellement l'Ordre administratif, embryon du futur Ordre mondial, comme nous allons le voir.

A la base de cet Ordre administratif se trouvent les réunions mensuelles appelées Fête des dix-neuf jours, où les baha'is se rencontrent régulièrement.

Ces réunions comprennent trois parties distinctes, chacune ayant une fonction bien définie, et les trois constituant un processus continu. Comme dans l'art du ballet (Image conçue par H. M. Balyuzi), il y a la musique, le mouvement et le décor, trois parties absolument distinctes, mais réunies ensemble pour composer une unité individuelle, exprimant magistralement tant d'idées. Ce n'est qu'une image illustrant le caractère de ces fêtes. Cependant il faut noter que si dans l'art du ballet il n'y a pas de paroles, à ces fêtes, c'est la parole, expression des idées, qui est encouragée.

Pendant la première partie, qui est purement spirituelle, on récite des prières et on lit les extraits des Écrits sacrés.

La deuxième partie, appelée administrative, est prévue pour exprimer et échanger des vues et des idées sur les divers problèmes de la communauté locale, ou nationale, ou même mondiale. Ces échanges de vues aboutissent à des suggestions aux institutions dirigeantes.

La troisième partie étant sociale, on y "rompt le pain ensemble", ce qui est un symbole de fraternité et d'affection.

Ces fêtes sont organisées à tour de rôle par chaque membre de la communauté, qui devient l'hôte de la partie sociale et reçoit les participants suivant ses moyens. Comme les participants à ces réunions sont des gens d'origines religieuse, sociale, raciale et éventuellement nationale ou linguistique différentes, et que tous, avec des droits égaux, s'y consultent et se servent régulièrement, c'est un entraînement permanent à l'esprit d'unité.

De plus, comme à ces réunions, on se consulte, quand les circonstances l'exigent, sur les questions intéressant d'autres pays du monde, où les habitants sont d'une autre origine nationale, raciale ou linguistique, et comme on leur vient en aide par des contributions volontaires, on voit que l'entraînement à l'esprit d'unité se fait à l'échelon mondial.

Un dernier mot pour justifier le fait que l'Ordre administratif baha'i est l'embryon du futur Ordre mondial, tout en assurant actuellement la liberté des individus.

Il est indéniable qu'aujourd'hui il n'y a pas d'ordre dans le monde. La meilleure preuve en est la situation paradoxale suivante. Les hommes, pris individuellement, désirent la paix, et peuvent servir utilement à l'érection de l'édifice de la paix. Mais du fait qu'ils sont soi-disant organisés en divers États, il n'y a plus de paix possible. C'est qu'il n'y a pas d'ordre dans leur organisation.

C'est comme les divers matériaux de construction (les briques, le sable, le bois, le verre, le fer, etc.): chacun pris séparément sert utilement à l'érection d'un édifice. Mais si on ne les arrange pas dans l'ordre, si, par exemple, on ne juxtapose pas les briques comme il faut, si on ne les lie pas ensemble avec un liant tel que le mortier de ciment, l'érection de l'édifice devient impossible.

C'est ce qui se passe actuellement chez les hommes qui, soi-disant organisés, n'arrivent pas à ériger l'édifice de la paix, cette paix qu'ils désirent si ardemment, pris individuellement.

Ce qui, par la même occasion, prouve qu'ils n'ont pas la liberté de traduire à l'échelon social ce qu'ils désirent individuellement.

Une telle situation ne peut pas exister avec l'Ordre administratif baha'i. En effet, aux réunions mensuelles dont nous avons déjà parlé, après une année d'association et de consultation, on arrive à distinguer ceux qui sont faits pour traduire à l'échelon social les désirs des individus. Et à la fin de l'année on procède à des élections absolument libres, c'est-à-dire sans propagande, ni candidature. Les neuf personnes qui obtiennent le plus grand nombre de voix dans chaque communauté de la ville ou du village, constituent l'institution qui dirigera les affaires de cette communauté. Cette institution s'appelle actuellement Assemblée spirituelle locale.

Élue de cette façon, cette Assemblée ne peut qu'être l'interprète véritable des sentiments des individus, et traduire à l'échelon social leurs désirs. Une telle organisation garantit donc la liberté individuelle.

Pour mémoire on peut noter qu'actuellement dans le monde il y a plus de dix-sept mille" Assemblées spirituelles. sorte de gouvernements locaux embryonnaires.

Ceci sur le plan local.

Sur le plan national, on procède de la façon suivante. A la fin de chaque année, les membres de la communauté de chaque localité procèdent à l'élection libre de leurs délégués à la Convention nationale. Et ce sont ces délégués, véritables représentants des membres de la communauté, qui élisent l'institution nationale qui dirigera les affaires de la communauté nationale. Cette institution qui s'appelle actuellement Assemblée spirituelle nationale, est pour les baha'is une sorte de gouvernement national embryonnaire. Le nombre de ces Assemblées spirituelles nationales est actuellement de plus d'une centaine (Statistiques de 1973).

Ceci sur le plan national.

Sur le plan mondial ce sont les membres de ces Assemblées nationales qui élisent l'institution dirigeant les affaires mondiales baha'ies. Cette institution existe actuellement et s'appelle Maison universelle de justice.

Pour les baha'is c'est une sorte de gouvernement mondial embryonnaire.

Quant au gouvernement mondial, représentant tous les pays de notre planète, il sera, selon les Écrits baha'is, constitué en ce siècle même, en ce "siècle de lumière". Et alors, cosmonautes que nous sommes tous par l'image que nous nous faisons de notre terre, nous verrons qu'effectivement LA TERRE N'EST QU'UN SEUL PAYS ET TOUS LES HOMMES EN SONT LES CITOYENS.


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2.7. Le jardin de délices n'est pas une chimère

Le paradis existe-t-il? Si oui, où est-il? Qui peut nous donner la réponse? Faut-il attendre la vie future pour le voir? Ce sont des questions que chacun de nous se pose, impatient d'avoir une réponse satisfaisante.

Je crois que rien ne répond à ces questions aussi bien que l'histoire suivante, racontée par un médecin (Résumé d'un article du périodique Sélection).

Une femme atteinte de dépression nerveuse, après s'être adressée aux médecins de sa ville natale, arrive dans une autre ville pour essayer le traitement d'un grand spécialiste. Elle se met à la recherche d'un hôtel confortable et bien tranquille.

Elle le trouve, s'y installe, et commence le traitement chez le spécialiste. Celui-ci, malgré le recours aux meilleurs calmants et tranquillisants qu'il pouvait prescrire, n'arrive pas à améliorer son état. Quelques jours après la femme vient auprès du patron de l'hôtel et lui dit:

- Je suis venue dans votre ville pour suivre le traitement de votre grand spécialiste. Celui-ci a tout fait pour calmer mes nerfs, mais sans succès. Je crois que c'est à cause du bruit que fait mon voisin, qui tape toute la journée sur les touches de son piano et m'empêche de me détendre. Avouez que c'est un enfer pour une malade des nerfs. Ne pourriez-vous pas me changer de chambre?

- Madame, lui répond le patron de l'hôtel, je croyais vous faire plaisir en vous faisant entendre d'avance, le concert que va donner le célèbre pianiste Paderewsky.

Vous voulez dire que c'est bien lui qui est mon voisin.

- Mais parfaitement, Madame.

Alors vous êtes un ange, et votre hôtel est mon paradis, car là où descend Paderewsky, c'est mon paradis, tellement je l'admire.

Et le lendemain le médecin constate une nette amélioration dans son état.

La conclusion que nous tirons de cette histoire vécue, c'est qu'en un clin d'oeil ce qui était enfer un instant avant, est devenu paradis, et ceci rien que par changement d'état d'esprit.

Le paradis n'est donc pas un lieu où l'on va après la mort, c'est un état d'esprit que l'on doit acquérir en ce monde pour continuer dans l'autre.

La question qui se pose maintenant est celle-ci: Cet autre monde existe-t-il, autrement dit, la vie continue-t-elle après la mort du corps, cette forme apparente de l'homme?

Ce qui nous fait penser que la vie continue après la mort, avant tout, c'est le bon sens.

Je m'explique.

Imaginons une immense usine fournissant tout ce qu'il faut pour la fabrication et l'entretien d'une voiture. Cette voiture, une fois fabriquée marche pendant un certain temps dans des conditions spéciales qui lui permettent d'être en mesure de fournir son plein rendement. C'est la période qu'on appelle rodage. Après le rodage la voiture entre dans le stade de sa "maturité". Serait-ce logique que, précisément à ce moment, on la fasse disparaître? Sûrement pas. Bien au contraire, c'est à ce moment-là qu'elle doit manifester toute la mesure de ses capacités pour montrer sa vraie valeur.

Il en est de même en ce qui concerne l'homme. Cette immense usine qu'est l'univers fait tout pour que l'homme prenne naissance, puisse vivre et progresser. Et l'homme, une fois né, grandit aussi bien physiquement qu'intellectuellement et moralement, au cours de son âge comparable à la période du rodage. Serait-ce logique qu'une fois arrivé à la maturité, il soit condamné à disparaître? Sûrement pas. Bien au contraire, c'est précisément à ce moment-là qu'il doit manifester toute la mesure de ses capacités pour montrer sa vraie valeur.

Si donc apparemment on l'enterre, c'est comme l'enterrement d'une graine qui permet à celle-ci de manifester sa vraie valeur par l'apparition d'une plante et, avec le temps, de fleurs et de fruits. Sans cet enterrement, la manifestation des capacités latentes de la graine aurait été impossible.

Une autre considération qui fait penser que la vie continue après la disparition apparente de l'homme, c'est la conclusion à laquelle on arrive après observation du monde de l'existence.

En effet, quand nous étudions le monde de l'existence, nous voyons que c'est un monde de progrès.

Le monde minéral n'est-il pas assimilé par le monde végétal? Par ce processus, le monde minéral, après la disparition de sa forme apparente, après la mort de son corps, ne progresse-t-il pas vers un autre monde, le monde végétal, qui lui est supérieur?

Le monde végétal, par la désintégration de sa forme apparente, par la mort de son corps, ne progresse-t-il pas vers un autre monde, le monde animal, qui lui est supérieur?

Le monde animal (contenu en abondance dans l'air, l'eau et la nourriture), par la désintégration de sa forme apparente, par la mort de son corps, ne progresse-t-il pas vers un autre monde, le monde humain, qui lui est supérieur?

Ainsi chaque monde inférieur, par la mort de son corps, progresse vers un autre monde, un monde qui lui est supérieur.

Pourquoi voulez-vous que ce progrès s'arrête pour l'homme après la mort de son corps? Est-ce parce que l'homme sait raisonner et qu'il n'arrive pas à conclure, que cet autre monde supérieur n'existe pas? Est-ce parce que l'homme ne peut pas le comprendre que ce monde n'existe pas? Mais le monde animal aussi ne comprend pas le monde humain où il progresse après sa "mort". Comme c'est le cas du monde végétal par rapport au monde animal. Chaque monde inférieur ne comprend pas le monde supérieur où il progresse après sa "mort".

Et ce qui est remarquable c'est précisément ce progrès après la "mort" qui donne un sens à la vie de chaque monde.

Ainsi, par exemple, c'est le progrès après la "mort" (conséquence de l'assimilation par le monde animal) qui donne un sens à la vie du monde végétal. Autrement, si les plantes poussaient pour pourrir et disparaître, quel serait le sens de leur existence'? De même c'est le progrès après la "mort" (conséquence de l'assimilation par le monde humain) qui donne un sens à la vie du monde animal. Autrement, si ces milliards de bactéries que nous absorbons ne prenaient naissance que pour vivre quelques instants et disparaître sans être utiles à l'homme, quel serait le sens de leur existence?

Et logiquement il en est de même en ce qui concerne le monde humain: c'est son progrès vers un autre monde, un monde supérieur, qui donne un sens à sa vie. C'est ce progrès vers un monde supérieur, qui symboliquement est présenté sous la forme de "récompense du paradis".

D'une manière générale, pour que ce progrès soit possible, il faut que chaque espèce commence par rester elle-même, quant à son essence.

Ainsi, par exemple, pour qu'une plante puisse progresser vers le monde animal, il ne faut pas qu'elle pourrisse mais, bien au contraire, qu'elle ait la possibilité de croître et de porter des fruits; et pour cela, il faut que ses besoins soient satisfaits. Parmi ces besoins il y a la chaleur du soleil. Si la plante la reçoit, elle a la possibilité de croître et de porter des fruits, ce qui est sa "récompense". Si elle ne la reçoit pas, elle ne peut pas croître, elle meurt. C'est son "châtiment". Il en est de même en ce qui concerne l'homme. Pour qu'il ait sa "récompense du paradis" il faut qu'il reste lui-même quant à son essence.

Or l'essence de l'homme c'est la capacité affective, comme l'essence de la plante, c'est la capacité de croissance. Pour que cette capacité latente de l'homme puisse se manifester l'homme a besoin de la "chaleur du soleil".

Cette "chaleur". c'est l'éducation que lui donnent ces hommes géniaux appelés prophètes par les spiritualistes, ou mutants par les matérialistes. Les uns comme les autres sont unanimes pour reconnaître le rôle qu'ont joué ces grands éducateurs dans l'histoire de l'humanité.

Zoroastre n'a-t-il pas uni les tribus de la Perse (avec leurs roitelets) pour en faire un empire (avec un "Roi des Rois")! Jésus n'a-t-il pas uni les tribus sauvages constamment en guerre qui ravageaient l'Occident?

Muhammad n'a-t-il pas uni les Arabes qui s'entre-tuaient?

Et ce ne sont que juste quelques exemples de l'éducation qu'ont donnée ces éducateurs à leurs contemporains, de la "chaleur" qu'ont apportée ces "soleils spirituels".

Ce qui est essentiel de retenir, c'est que cette "chaleur" est apportée en conformité avec la capacité réceptive de l'homme. Comme pour la plante, l'intensité de la chaleur du soleil du matin n'est pas la même que celle du midi. Le matin, la plante ne peut pas supporter la chaleur du midi. Voilà pourquoi, il y a deux mille ans, Jésus, en faisant allusion à ce qui restait à dire, reconnaissait qu'il ne pouvait pas le faire à son époque.

"Vous ne pouvez pas le porter maintenant" (Jean 16/12) précisait-il, tout en assurant ses disciples qu'il reviendrait (Jean 14/28) et qu'alors, un autre consolateur "enseignera toutes choses" (Jean 14/25) et "conduira dans toute la vérité" (Jean 16/13).

Apparemment, il y a contradiction: comment est-ce lui qui reviendra, et est-ce un autre qui parlera? En réalité il n'y a pas de contradiction, si nous interprétons le terme "retour" en tant que retour quant à l'esprit, et non pas quant à la chair, car:

"la chair ne sert à rien, c'est l'esprit qui donne la vie" (Jean 16/61) et l'esprit c'est sa parole:

"Ma parole est esprit" (Jean 6/6 1).

Nous arrivons donc à cette conclusion que, selon l'Évangile, la parole du Christ sera renouvelée par une autre personne comme lui, pour dire ce qu'il ne pouvait pas dire, il Y a deux mille ans.

Cette personne, selon les baha'is, c'est Bahá'u'lláh, fondateur de la foi baha'ie, et qui, il y a près de cent ans, a annoncé solennellement sa mission aux rois de la terre. L'image du soleil nous fait comprendre facilement cette revendication. En effet, le soleil d'aujourd'hui ne peut-il pas dire qu'il est le soleil d'il y a deux mille ans, bien entendu par sa chaleur et sa lumière, tout en n'étant pas matériellement le même soleil qu'il y a deux mille ans?

Il reste à répondre à cette question: mais qu'est-ce que ne pouvait pas être dit, ni fait, il y a deux mille ans?

`Abdu'l-Bahá, l'interprète des enseignements baha'is, nous l'enseigne en ces termes (Extrait des Écrits d`Abdu'l-Bahá):

"Bien que la concorde régnât au cours des cycles passés, le manque de moyens de communication appropriés rendait impossible l'organisation de l'unité de toute l'humanité. Les continents demeuraient largement séparés. Même entre les peuples d'un même continent, l'entente et les échanges de pensées étaient pour ainsi dire impossibles.
En conséquence, les rapports, la compréhension mutuelle et l'unité entre les peuples et les races ne pouvaient pas être envisagés. Par contre, de nos jours les moyens de communication se sont développés de telle sorte que les cinq parties du monde se sont virtuellement fondues en une seule.
De même, tous les membres de la famille humaine, peuples et gouvernements, villes et villages dépendent de plus en plus les uns des autres. Il n'est plus loisible à aucun d'entre eux de s'isoler avec la prétention de pouvoir se suffire à soi-même.
D'autant plus que les liens politiques qui unissent tous les peuples et nations, ainsi que les attaches du commerce, de l'industrie, de l'agriculture et de l'éducation sont tous les jours renforcés. Il paraît donc évident que l'unité de l'humanité peut être réalisée en cette époque.
Ceci n'est véritablement rien d'autre qu'un des prodiges de ces temps merveilleux, de ce siècle admirable. Le passé en a été privé, parce que ce siècle, celui de la lumière, a été favorisé de gloire, de puissance, de splendeurs uniques et jamais égalées. Cela explique le développement quotidien de nouvelles merveilles. La suite montrera avec quel éclat ses flambeaux éclaireront l'assemblée des hommes.

"Contemplez la lumière qui se lève sur l'horizon obscurci du monde.

Le premier flambeau est l'unité dans l'ordre politique, ses faibles lueurs sont déjà discernables.

Le deuxième flambeau est l'unité de pensée dans les entreprises mondiales. à l'accomplissement de laquelle on assistera avant qu'il soit longtemps.

Le troisième flambeau est l'unité dans la liberté qui sûrement se réalisera.

Le quatrième flambeau est l'unité dans la religion, c'est la pierre angulaire de la fondation en elle-même; la puissance de Dieu la révélera dans toute sa splendeur.

Le cinquième flambeau est l'unité des nations, unité qui sera sûrement établie dans le courant de ce siècle, elle amènera tous les peuples du monde à se considérer comme les citoyens d'une même patrie.

Le sixième flambeau est l'unité des races, qui fondra tous les habitants de la terre, peuples et races, en une seule race.

Le septième flambeau est l'unité de langue, elle consistera dans le choix d'une langue universelle qui servira à l'instruction de tous les peuples. C'est en cette langue qu'ils converseront tous.

Chacune aussi bien que toutes ces réformes s'accompliront inévitablement car la puissance du Royaume de Dieu leur portera aide et secours en vue de leur réalisation."

Un monde uni du point de vue de la politique commune à adopter, des entreprises à réaliser, de la conception de la liberté, de la religion à professer, de la citoyenneté, de l'égalité raciale à pratiquer et enfin de la langue à parler n'est-ce pas le paradis sur terre?

Précisons-le bien. Cette fois, il ne s'agit pas seulement du paradis individuel que nous avons expliqué au début de cet exposé, paradis réalisé par les messagers du passé dans les esprits des hommes. Il s'agit en plus du paradis à l'échelon mondial, paradis qui ne pouvait pas être réalisé dans le passé, paradis pour la réalisation duquel Jésus nous a appris à prier.

Mais quand ce paradis sera-t-il établi sur terre? La question a été posée à Abdu'l-Bahá, et il a répondu en ces termes:

"Cela dépend combien ardemment chacun de vous et vous tous ensemble, vous allez travailler..."

Ceux qui travaillent séparément sont comme des gouttes. Unis ensemble ils deviennent une immense rivière dont les eaux apportent la vie aux déserts stériles du monde, et dont les flots puissants balaient toute peine et affliction.

Soyez donc unis. Soyez donc unis.

L'établissement du paradis sur terre est donc le fruit et la récompense de nos efforts pour la réalisation de l'unité mondiale.

Cette récompense, disent les Écrits baha'is, ne s'arrête pas là. Car en travaillant pour la réalisation de l'unité, de l'harmonie et de la paix entre les hommes et les peuples, notre esprit s'y entraîne de mieux en mieux. Cet entraînement pour l'unité et l'amour procure à l'esprit une joie et un bonheur ineffables, qui l'accompagnent toujours, comme la chaleur accompagne le feu, et qui continuent dans la vie future où l'esprit progresse vers un monde supérieur. Et c'est ainsi qu'il faut concevoir le paradis pour toute personne qui aime tout le monde et qui travaille pour la fraternité et la paix universelles.

Or il n'y a qu'en ce monde que l'homme a toutes les possibilités, tous les pouvoirs pour cet entraînement qui lui garantit la joie ineffable et éternelle.

Il n'y a que durant cette très courte période de la vie terrestre qu'il est pour ainsi dire le roi avec les pleins pouvoirs; à lui d'en profiter pour assurer son avenir.

Pour mieux illustrer cette idée, permettez-moi de vous rapporter l'histoire suivante racontée par Abdu'l-Bahá.

Un étranger arrive dans une ville où il voit les habitants rassemblés sur la place du marché, les yeux fixés vers le ciel. Il en demande la raison à un homme qui était à côté de lui.

Tous les ans, répond celui-ci, à cette époque, les habitants de notre ville se rassemblent sur cette place. Et ceci parce qu'un oiseau apparaît dans le ciel pour faire quelques tours et se poser sur la tète de l'un de ses habitants, lequel devient alors notre roi pour un an. Restez et vous allez voir.

Après cette explication l'étranger voit effectivement un oiseau apparaître dans le ciel, et peu de temps après, se poser sur sa tête.

Il est alors acclamé comme roi et amené au palais royal.

Un jour l'homme qui lui avait conseillé de rester lui dit:

- Puisque c'est moi qui vous ai conseillé de rester, et que vous êtes devenu roi, prenez moi comme premier ministre. Le roi accepte et lui donne ce poste.

Devenu premier ministre, et voyant avec quelles bonté et justice le roi se comporte à J'égard du peuple, il lui dit un jour:

- Venez avec moi, j'ai quelque chose à vous montrer.

Il amène donc le roi au bord de la mer, d'où il lui montre sur une île abandonnée, un homme tout nu, mourant de faim et appelant au secours.

- Qui est ce misérable? demande le roi.

- C'est notre roi de l'an dernier, répond le premier ministre. A la fin de chaque année, nous exilons celui qui a régné pendant un an, sur une île isolée où il est condamné à périr.

Le roi, horrifié, dit qu'il n'aurait jamais accepté de devenir roi pour finir ses jours si misérablement.

- Puisque maintenant vous êtes roi, et que vous avez tous les pouvoirs, lui conseille le premier ministre, choisissez une île abandonnée. Dépensez vos richesses pour sa prospérité, faites cultiver ses terres stériles, abritez-y les sans-abri, et faites ériger un superbe palais. Ainsi, le jour où vous y serez conduit, vous allez y mener une vie royale et même meilleure que celle d'aujourd'hui, puisque vous n'aurez plus d'ennui, ni souci, et vous serez roi pour toujours.

Ce que fit le roi, et ce qui lui permit de continuer de vivre comme un roi.

`Abdu'l-Bahá raconte cette histoire pour faire comprendre que tout être humain, en ce monde, est comme un roi, en ce sens qu'il a tous les pouvoirs de se faire construire un palais pour le jour où il quittera ce royaume terrestre.

Nous pouvons donc conclure ainsi :

Le jardin de délices n'est pas une chimère. A nous de le préparer en ce monde par la fraternité universelle, et pour l'autre par une joie éternelle. Nous pouvons le faire tant que nous sommes rois.

A NOUS LE CHOIX.


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2.8. Une interview à la radio

En avril 1971, l'auteur de ces lignes a été interviewé à la radio C.F.L.S. de Québec.

Suite à la demande des amis d'en faire un résumé, voici succinctement les questions qui ont été posées et les réponses que j'ai pu donner.

* Question - Ce soir vous allez donner une conférence intitulée Le Courage d'aimer. Quelle est la relation entre la foi baha'ie et le courage d'aimer?

* Réponse - Être baha'i c'est reprendre le courage d'aimer son prochain, cet amour se manifestant aussi bien en paroles qui réjouissent son coeur, qu'en actes, par le travail qui lui est destiné.

Ceci sur le plan individuel. Sur le plan mondial, être baha'i signifie travailler pour la paix et la fraternité universelles.

* Question - Mais toutes les religions ont prêché cet amour. N'ont-elles pas échoué?

* Réponse - L'histoire dit que non, tant qu'on s'en tenait à l'esprit de la religion. Elles unirent les peuples, et c'est l'une des raisons pour lesquelles les rois les acceptèrent et contribuèrent à leur diffusion. Ainsi, ayant accepté le christianisme, Constantin, grâce à sa puissance unificatrice, parvint à unir les peuples, là où ses prédécesseurs avaient échoué par la force des armes.

Mais les religions ont perdu leur puissance unificatrice à partir du moment où l'on s'est attaché à la forme et aux pratiques extérieures, oubliant l'esprit qu'est l'amour du prochain. Et comme conséquence, les dissensions ont surgi parmi les adeptes, puis les conflits; décadence prévue infailliblement dans toutes les Écritures du passé. Ainsi, par exemple, Jésus prédit:

"Une nation s'élèvera contre une autre et un royaume contre un royaume. Plusieurs succomberont et se trahiront, se haïront les uns les autres. Et parce que l'iniquité se sera accrue, la charité du plus grand nombre se refroidira." (Mat. 24)

* Question - De telles prédictions concernant les baha'is eux-mêmes n'existent-elles pas dans vos Écritures?

* Réponse - Précisément pas. Les Écrits baha'is prédisent l'établissement de la paix mondiale en ce siècle même.

* Question - Qu'est-ce qui garantit que cette paix sera durable?

* Réponse - D'abord Dieu. Le même Dieu qui, par la révélation chrétienne, a prédit qu'il y aura des dissensions et des guerres, à cause de l'immaturité de l'humanité. Et comme vous le savez, Il ne s'est pas trompé. On a eu des dissensions et des guerres. Le même Dieu, à notre époque, par la révélation baha'ie, prédit que cette fois, la guerre sera bannie pour toujours et que l'on aura une paix mondiale. Si les révélations du passé ne se sont pas trompées dans leurs prédictions, il n'y a aucune raison de croire que la révélation d'aujourd'hui (baha'ie) se trompe.

Le deuxième garant de la paix, c'est l'humanité qui entre dans le stade de la maturité. Dans le passé, l'humanité n'était pas encore prête pour suivre avec persévérance les conseils de ses éducateurs, c'est-à-dire des prophètes. En effet vous avez beau dire à un enfant qu'il ne doit pas se bagarrer, il ne vous écoutera que temporairement, pour recommencer à se bagarrer à nouveau, et pour rien.

Mais aujourd'hui la même humanité entre dans le stade de la maturité et voit son intérêt dans la paix; elle suivra le conseil de l'éducateur d'aujourd'hui qui lui demande d'établir un gouvernement mondial disposant d'une force de police assez puissante pour arrêter toute agression.

Le troisième garant, C'est tout être humain, car l'homme d'aujourd'hui ne veut plus de guerre, quel qu'en soit le prétexte.

* Question - Pourquoi alors n'y arrive-t-on pas maintenant?

* Réponse - Parce que les hommes ne savent pas travailler ensemble, en groupe, de manière à réaliser à l'échelon social leurs aspirations. En effet, individuellement pris, aucun citoyen d'un pays n'a peur du citoyen d'un autre pays, aucun d'eux ne veut la guerre; mais, une fois ensemble, une fois soi-disant organisés, sous forme de ce qu'on appelle état, il y a la peur, il y a la guerre. C'est ce qu'on traduit en Orient par ces mots: "Quand tu es seul tu es un ange. Quand vous êtes ensemble, que le diable vous emporte!"

* Question - Et quelle solution apporte la foi baha'ie à ce problème?

* Réponse - La foi baha'ie a précisément comme but d'apprendre aux hommes à travailler en groupe, ce qui a comme résultat que ce qu'ils désirent individuellement se traduit en pratique, à l'échelon social.

* Question - Comment y parvient-on chez les baha'is?

* Réponse - C'est que tout baha'i a un double engagement. Le premier est purement spirituel, comme dans toutes les religions du passé. Le second est pour ainsi dire administratif, en ce sens que chaque baha'i participe directement ou indirectement à l'administration des affaires communautaires. Par ce second engagement il est tenu de participer régulièrement et mensuellement aux réunions sans classe, où les désirs et les sentiments des individus concernant les affaires communautaires, et les moyens de leur réalisation sont exprimés et soumis à la consultation générale entre amis.
Je dis bien entre amis, car à ces réunions on apprend à devenir amis les uns pour les autres, étant donné qu'outre la consultation, il y a encore une partie sociale où chacun à son tour invite les autres. Dans une telle ambiance, et dans de telles conditions, on apprend à travailler ensemble. Et de plus on apprend, après toute une année d'entretiens suivis et de consultations, à distinguer ceux qu'on estime le mieux placés pour administrer, diriger les affaires de la communauté. Les dirigeants élus de cette façon ne peuvent que traduire à l'échelon social les désirs et sentiments des électeurs.

* Question - J'ai lu un extrait de la lettre du fondateur de la foi baha'ie au pape Pie IX, où il dit qu'il faut que le clergé sorte des églises pour se marier et travailler, Or aujourd'hui l'évolution de l'église l'a amenée à reconsidérer le problème du célibat et du travail des prêtres. Comment il y a cent ans pouvait-il prévoir une telle situation?

* Réponse - Les messagers de Dieu sont les connaisseurs infaillibles des lois qui régissent l'évolution de l'humanité. Et à ce titre Bahá'u'lláh a fait bien d'autres prévisions.

* Question - Voulez-vous nous en citer quelques unes?

* Réponse - Bahá'u'lláh, il y a près de cent ans, a écrit à la Reine Victoria, Napoléon III, Alexandre de Russie et bien d'autres dirigeants, leur parlant de la sécurité collective, du désarmement général, de l'institution d'un gouvernement mondial avec un tribunal international et une force de police internationale capable d'arrêter toute agression. De tous ces problèmes vitaux, on ne parle qu'aujourd'hui.

A Napoléon III qui se prétendait le défenseur des opprimes, Bahá'u'lláh proposa de justifier sa sincérité en défendant les milliers de femmes et d'enfants qu'on continuait à persécuter pour la foi, Napoléon III jeta la lettre par terre en disant: "S'il est Dieu, je suis deux fois dieu."

Bahá'u'lláh lui envoya une deuxième lettre, où il lui prédit clairement sa chute; ce qui ne tarda pas à se réaliser: un an après, Napoléon III perdit la guerre de 1870 et finit ses jours en exil.

* Question - Puisqu'on a parlé du mariage, quel est le point de vue baha'i sur cette question?

* Réponse - Concernant le mariage on peut citer les points suivants:

1 . Le mariage est recommandé à tous.

2. La monogamie est une loi.

3. La fidélité conjugale a un caractère sacré.

4. Les deux parties, avant le mariage, doivent se connaître et faire librement leur choix.

5. Les parents doivent donner leur consentement.

6. Le mariage baha'i est une association non seulement matérielle mais surtout spirituelle, en ce sens que chacun doit contribuer à l'épanouissement spirituel de l'autre. Comme ce mari qui disait à sa femme: "Chérie, je t'aime non seulement pour ce que tu es, mais aussi pour ce que je suis avec toi."

7. Le but du mariage est le progrès en amour. Si malgré tous les efforts on n'y arrive pas, avec l'approbation des représentants de la communauté, le divorce peut être envisagé et éventuellement prononcé. Mais en principe le divorce reste déconseillé.

* Question - Et le point de vue baha'i sur le travail?

* Réponse - C'est un sujet aussi vaste que celui de l'amour, car le travail c'est l'amour rendu visible. Pour être bref, mentionnons les points essentiels suivants:

1. Le travail, comme l'amour, est un besoin de la nature intime de l'homme. D'où l'obligation de travailler pour tous. Pas de parasite dans la société.

2. Le travail doit être utile et consciencieux. En ce sens, il acquiert un caractère sacré et équivaut à l'adoration envers Dieu. Un ouvrier qui fait consciencieusement son travail est déjà à l'église.

3. A chacun non seulement du travail, mais autant que possible son travail, c'est-à-dire le travail pour lequel il a des dons et que, par conséquent, il aime. Un tel travail, il le fera avec joie, et son fruit réjouira celui à qui il est destiné. Or réjouir son prochain est précisément le but de la religion; par conséquent, le travail prend ainsi une valeur religieuse.

4. Le travail doit être le co-associé du capital, autrement dit, la participation des travailleurs aux bénéfices de l'entreprise est une loi.

* Question - Vous demandez au clergé de sortir des églises, de travailler et de se marier. N'êtes-vous pas anti-cléricaux?

* Réponse - Nullement, bien qu'il n'y ait pas de clergé chez Les baha'is. Le clergé jouait le rôle du maître dans le passé, quand l'instruction n'était pas généralisée. Or le rôle du maître, c'est d'amener l'élève au point où il pourra se passer de ses services; ce qui est le cas aujourd'hui quand tous savent lire, écrire et raisonner personnellement. Le clergé a donc joué son rôle, et on n'a plus besoin de lui.

* Question - Vous n'avez pas de clergé, c'est entendu et les rites, en avez-vous?

* Réponse - Les rites non plus, on n'en a pas. Les rites, en tant qu'images, étaient bons pour l'enfance humaine. Une fois devenu adulte, l'homme comprend le but et le sens de cette image; et il n'a plus besoin de l'image elle-même. Pour vous citer un exemple. Une fillette a besoin de poupée et de berceau jouet. Ces images la préparent pour le jour où elle devient maman, et alors elle n'a plus besoin de poupée ni de berceau jouet.

* Question - Vous n'avez pas de clergé ni de rites. Ne détruisez-vous pas les religions?

* Réponse - Justement, la religion, ce n'est pas l'observance des rites. La religion c'est le moyen pour unir les hommes. Or aujourd'hui ce n'est pas par le clergé ou les rites qu'on peut unir les hommes. Un siècle d'expérience l'a démontré et la presse le confirme:
"Déjà bien des chrétiens et des athées, même marxistes, ont rejoint la foi baha'ie ("Planète", note 14, 1970).

On peut donc en conclure que la foi baha'ie ranime la puissance unificatrice de la religion.

* Question - Mais avec la suppression du sacerdoce et des rites il faut s'attendre à ce que le clergé réagisse. N'a-t-il pas réagi?

* Réponse - Le clergé islamique, en Perse, a réagi très violemment en faisant verser le sang de plus de 20000 martyrs.

Quant au clergé chrétien, jusqu'ici, il est resté indifférent, ce qui n'empêche qu'il commence à parler des principes baha'is. A titre d'exemple vous pouvez lire l'encyclique de pape Jean XXIII: les principes qu'il y publie ne sont qu'une partie de tant de principes proclamés par Bahá'u'lláh plus d'un siècle avant lui.

Permettez-moi de profiter de cette interview pour rendre hommage à certains représentants du clergé canadien qui m'ont tant encouragé dans la propagation des enseignements baha'is, disant que c'est le même message d'amour que Jésus nous a apporté.

* Question - Vous dites que vous n'avez pas de rites, et la prière?

* Réponse - Un rite est une cérémonie religieuse. D'abord dans la foi baha'ie la prière n'est accompagnée d'aucune cérémonie, elle est personnelle et naturelle comme la satisfaction de tout besoin de la nature intime de l'homme.

L'homme a besoin de force, d'énergie, de puissance. Or selon les savants, la prière nous en fournit abondamment. Ainsi, par exemple, Carrel, Millikan, tous deux prix Nobel, disent que "la prière est la principale source d, puissance".

* Question - Vous avez alors des temples, qu'est-ce qu'ils ont de particulier?

* Réponse - Les temples baha'is sont d'une conception particulière, en ce sens qu'ils ne restent jamais uniquement des temples, en tant que bâtiment solitaire. Tout temple baha'i est entouré d'institutions utilitaires telles qu'hôpital, orphelinat, hospice, école etc. Car la prière doit être suivie d'action. Si par la prière on acquiert de l'énergie, c'est pour agir. Si par la prière on cherche à acquérir la force d'aimer, et que l'on ne traduit pas cet amour en actes à l'égard d'un malade, d'un vieillard, d'un orphelin, cette prière n'a pas de valeur. Cette conception de l'architecture religieuse baha'ie rappelle une fois de plus que le travail utile et consciencieux est une prière.

* Question - Face à la misère dans les pays en voie de développement, quel est le genre de travail que les baha'is accomplissent?

* Réponse - Un grand homme a dit non sans raison:

"La vraie compassion ne consiste pas à jeter un sou au mendiant. Compatir, c'est vouloir changer le système susceptible de créer les mendiants."

C'est ce que font précisément les baha'is depuis plus d'un siècle, raison pour laquelle il y a beaucoup plus de baha'is dans les pays en voie de développement que partout ailleurs; et dans les villages où il n'y a que des baha'is, la misère est abolie.

Leurs habitants "savent pêcher" et n'ont pas besoin qu'on leur "jette un poisson".

* Question - Votre attitude à l'égard des partis politiques"?

* Réponse - Pour être sincère, un musicien accepterait-il de faire partie d'un orchestre où chacun se prend pour le chef d'orchestre? Le concert donné par un tel orchestre ne serait pas lamentable? Le plus grand service qu'un musicien puisse rendre à l'auditoire, c'est de ne pas faire partie de cet orchestre. Les baha'is sont des musiciens qui ne font pas partie du triste orchestre joué par les partis politiques actuels qui luttent les uns contre les autres.

Ne pourrait-on pas dire que dans les conditions actuelles la politique la plus sage c'est de pas faire de politique du tout?

* Question - Et l'alcool?

* Réponse - La foi baha'ie est basée sur la raison. Or la raison, ce n'est pas quelque chose qui puisse se conserver dans l'alcool. De plus, les enseignements baha'is visent à garantir la santé corporelle, et ce n'est pas l'alcool qui y contribue. Bien au contraire, en tant que poison, l'alcool nuit à notre santé. Les baha'is ne prennent donc pas d'alcool.

* Question - A force d'entendre parler de tant de mouvements religieux, on se demande où est la vérité?

* Réponse - La vérité est dans toutes les religions, car au fond toutes les religions ne font qu'une seule et même religion: la religion de Dieu toujours en évolution. Or toute évolution a ses ;stades. La religion passe aussi par différents stades: stade judaïque, stade chrétien, stade islamique, stade baha'i, etc. A chaque stade elle doit répondre aux besoins de l'époque. Or le besoin le plus vital à notre époque c'est d'unir tous les peuples. A l'heure actuelle chaque religion a ses difficultés, elle ne peut même pas unir ses propres adeptes, et à plus forte raison, s'unir avec les adeptes des autres religions.

Tandis que dans la foi baha'ie qui se présente comme "l'aboutissement de toutes les anciennes croyance (Extrait du Larousse du XXe siècle), selon le témoignage de chercheurs impartiaux, "des millions d'hommes et de femmes, de toutes races, nationalités, classes, croyances, se sont unis et travaillent aux mêmes buts".

* Question - Êtes-vous nombreux au Canada?

* Réponse - Les baha'is ne cherchent pas à être nombreux où que ce soit. Ils tiennent à se disperser afin d'être partout, ne fût-ce qu'en très petit nombre. Car c'est ce petit nombre qui forme la "minorité créatrice", selon l'expression de l'éminent historien Arnold Toynbee. Et c'est cette minorité créatrice, dit-il, qui a été à l'origine de toute nouvelle civilisation.

En effet, il nous faut une civilisation où la guerre sera bannie pour toujours. Ceci implique, comme première mesure le désarmement général. Pour cela il faut préparer l'opinion publique dans tous les pays et simultanément. A supposer qu'on le fasse dans un seul pays, je veux dire, à supposer que par une concentration massive de baha'is dans un pays, l'opinion publique y soit préparée pour le désarmement, serait-ce sage de procéder à ce désarmement au moment où les autres pays s'arment jusqu'aux dents et menacent sa sécurité? Sûrement pas. Les baha'is se dispersent donc partout afin de préparer l'opinion publique, à l'échelon mondial, pour la paix.

* Question - Le Canada présente-t-il un intérêt particulier pour qu'un baha'i comme vous vienne de si loin afin d'y donner des conférences?

* Réponse - Précisément, selon les Écrits baha'is, l'avenir du Canada est grand aussi bien du point de vue de la civilisation matérielle que du point de vue de la civilisation spirituelle.

Et tout baha'i ne demande pas mieux que d'être en mesure d'apporter son humble contribution à la réalisation de cette prédiction.


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2.9. L'homme a besoin d'image

Parmi les personnes qui visitèrent `Abdu'l-Bahá à Paris, se trouvait une femme qui était venue d'Amérique, et qui lui expliqua comment la providence l'avait amenée auprès de lui.

"Un jour, lui raconta-t-elle, ma petite fille me dit:

- Maman, si le Seigneur Jésus était en ce monde que ferais-tu?

- Je prendrais le premier train pour aller le voir, lui répondis-je.

- Eh bien, maman, il est en ce monde, m'affirma-t-elle.

"J'étais très bouleversée en écoutant mon enfant, et je lui dis:

- Mais qu'est-ce que tu me racontes, ma petite, et comment sais-tu qu'il est en ce monde?

- C'est lui-même qui me l'a dit, me répondit-elle.

"Tout en étant très étonnée, je me dis que c'était peut-être Dieu qui m'annonçait cette nouvelle par la bouche de mon enfant.

"J'ai eu recours à la prière pour recevoir la lumière sur cette question.

"Le lendemain mon enfant me dit, comme si elle ne me comprenait plus:

- Maman chérie, pourquoi donc tu n'es pas allée voir le Seigneur Jésus. Il m'a dit deux fois qu'il est en ce monde.

- Mais mon pauvre petit, maman se sait pas où aller. Comment veux-tu que je le trouve'?

- Nous le verrons, maman, nous le verrons, fut sa réponse.

"Le même jour alors que je me promenais avec ma fille, elle s'arrêta soudain et s'écria:

Le voilà! Le voilà!

"Elle tremblait, les yeux fixés sur la photo d`Abdu'l-Bahá. qui se trouvait dans la vitrine d'un marchand de journaux.

"J'ai acheté le journal et, ayant trouvé l'adresse, j'ai pris le premier bateau. Et me voilà devant vous (Pour le récit détaillé, voir The Chosen Highway).

Chers amis, si j'ai raconté cette histoire comme introduction à mon exposé c'était pour dire que si un enfant, rien que parla pureté de son coeur, a pu voir en Abdu'l-Bahá l'image de Jésus, tous ceux qui étudient le mode de vie d`Abdu'l-Bahá arriveront à la même conclusion, c'est-à-dire qu'ils verront combien `Abdu'l-Bahá, par son mode de vie, reflète les attributs de Jésus.

Dans un article sur `Abdu'l-Bahá, l'ex-pasteur G. Townshend écrit en substance ceci (Voir The way of `Abdu-l-Baha par G. Townshend (Baha'i World 1930-3 1):

Pour un chrétien, il est difficile de croire que dans le monde d'aujourd'hui, on puisse appliquer les préceptes moraux du Christ. La complexité de la vie moderne, l'opinion générale si peu encourageante, et l'extrême injustice du milieu social, selon lui, en sont la cause. Mais, précise l'ex-pasteur, si l'on étudie la vie d`Abdu'l-Bahá, on voit qu'on peut toujours vivre la vie de Jésus tout en restant parfaitement actif dans la vie sociale. `Abdu'l-Bahá en est l'exemple parfait, car aujourd'hui il présente de près toute la beauté du Christ, tant obscurcie dans la vie moderne.

On pourrait croire que ces paroles d'un ex-pasteur sont adressées au monde chrétien uniquement. Mais pour nous, baha'is, quand on parle du Christ, on considère aussi tous les messagers de Dieu, car tous ont proclamé les mêmes principes moraux que le Christ. Par conséquent, il serait intéressant pour les adeptes de toutes les religions d'étudier la vie d`Abdu'l-Bahá. Et cette étude est particulièrement intéressante aussi pour les baha'is, qui considèrent `Abdu'l-Bahá comme l'exemple partait qu'ils s'engagent à suivre.

C'est en partant de ces considérations que nous allons aborder l'étude du mode de vie d`Abdu'l-Bahá.

Tous ceux qui ont rencontré `Abdu'l-Bahá disent que ce qui chez lui les impressionnait le plus, c'est un mélange harmonieux d'humilité et de grandeur, deux caractéristiques apparemment contradictoires, mais en réalité, découlant l'une de l'autre. C'est ce que nous allons voir.

Être humble à l'égard de son prochain c'est être prêt à le servir avec l'idée qu'il le mérite par ses qualités, tout en restant toujours conscient du fait que, personnellement, on n'a soi même aucun mérite.

Une servante dans une famille est toujours prête à servir tout le monde, mais cela ne veut pas dire qu'elle soit humble, car si elle les sert, ce n'est pas avec l'idée qu'ils le méritent par leurs qualités, mais avec l'idée qu'elle est payée pour servir. Peut être n'est-elle pas consciente qu'elle n'a aucun mérite.

Mais figurez-vous une servante absolument imaginaire (Exemple tiré de Les voies de la liberté de C. Ives, Bruxelles, 1971) qui, sans être payée, fait tout dans une famille.

Elle fait la cuisine, la lessive, le marché, elle conduit les enfants à l'école, elle les aide dans leurs études, elle les soigne quand ils sont malades, elle a un caractère charmant, elle sait comment réjouir monsieur et madame quand ils sont tristes. Et elle fait tout cela avec le sentiment qu'ils le méritent tous, et que, par contre, elle-même, elle n , a aucun mérite. Qui dans cette famille joue le rôle le plus important, le plus grand" Qui est, en réalité, le plus grand de tous les membres de cette famille? N'est-ce pas que c'est cette servante?

Servir avec humilité conduit donc à la vraie grandeur.

Voilà pourquoi Jésus a dit:

"Celui qui veut être le plus grand de tous, qu'il soit le serviteur de tous."

Bahá'u'lláh a représenté cet esprit de service par une image merveilleuse: celle de la terre qui nourrit, habille, abrite, et, en bref, sert l'homme tout en restant sous ses pieds.

Et Abdu'l-Bahá dans une prière émouvante, où il supplie Dieu de l'assister pour servir les autres, demande qu'il reste comparable à la poussière sous leurs pieds, terme utilisé en Orient pour symboliser l'humilité.

Cet esprit d'humilité d`Abdu'l-Bahá se dégage dans ses écrits où, d'une part, il ne voit chez lui-même que des défauts, et d'autre part, chez les autres rien que des qualités.

"ô Dieu, écrit-il dans une prière, pardonne avant tout mes péchés qui sont les plus grands de tous."

Et dans une lettre à un disciple il dit:

"Pour le moment c'est toi qui es enivré par le vin de la servitude et de l'humilité, mais`Abdul'l-Baha, quand y parviendra-t-il? Prie pour lui. Intercède pour lui."

Et il était si profondément pénétré de cet esprit de service rendu avec humilité, qu'il n'acceptait aucun autre titre que celui de serviteur, nom qu'il avait choisi pour lui-même (je veux dire qu`Abdul'l-Baha signifie "serviteur de Baha", serviteur de Dieu). Et quand on s'adressait à lui autrement, il s'indignait, tout comme Jésus s'est indigné quand on l'a appelé Bon Maître, faisant remarquer qu'il n'y a que Dieu qui est bon.

A ce propos, le Dr. Yunis Khan, son secrétaire interprète, écrit (Les Mémoires de neuf années de séjour en Terre Sainte):

"Un jour j'ai remis à `Abdu'l-Bahá une lettre d'une amie, qui s'adressait à lui en termes de prière adressée au Seigneur.

- Toi aussi, me dit-il, tu me remets de telles lettres? Toi aussi, tu ne m'as pas compris encore? Si tu ne m'as pas connu, qui pourrait alors me connaître? Ne sais-tu pas combien de telles lettres me rendent triste? Dieu m'est témoin que je ne me considère que comme le plus humble des serviteurs de Bahá'u'lláh.

"En disant ces mots il paraissait tellement triste que j'en ai ressenti une profonde douleur. Et `Abdu'l-Bahá s'en aperçut, car un instant après il ajouta:

- Ce n'est pas que je fasse un reproche aux amis. C'est par amour qu'ils tiennent un pareil langage. Quant à toi, tu sais combien tu m'es cher.

"Et une fois de plus, j'ai vu qu`Abdul'l-Baha ne pouvait pas rester un seul instant indifférent devant un coeur attristé. Il devait le réjouir, et il savait comment le réjouir."

Réjouir le coeur d'un homme souffrant moralement ou physiquement était pour `Abdu'l-Bahá le but ultime de la foi. Et l'on peut dire que lorsqu'il s'agissait d'atteindre ce but tous les commandements de la foi passaient en second plan.

L'histoire suivante, racontée par le Dr Yunis Khan, en est la preuve:

"Un jour, pendant la période du jeûne, `Abdu'l-Bahá avait le visage terriblement pâle, et j'en fus, écrit le docteur, très inquiet.

- Je ne me sens pas bien, me dit-il. Ce matin je n'ai rien pris, la veille non plus, je n'avais pas faim.

- Maître, lui dis-je, il vaudrait mieux que vous rompiez votre jeûne.

- Ce n'est pas bien, me répondit-il.

- Maître, dans l'état où vous êtes, vous convient-il de continuer d'observer le jeûne? Vous êtes si épuisé.

- Peu importe, je vais me reposer.

"C'est en vain que j'insistais pour qu'il rompe son jeûne parce que physiquement il n'était pas en état de le supporter. Il ne voulait l'accepter.

"Finalement je lui ai dit:

- Alors faites une chose.

- Quoi?

Avec les larmes dans les yeux, je lui ai dit:

- Rompez votre jeûne, ne fût-ce que pour réjouir un coeur.

- Mais bien volontiers, bien volontiers.

Et il rompit son jeûne."

`Abdu'l-Bahá a rompu son jeûne pour réjouir un coeur.

Lady Blomfield (Voir Le séjour d`Abdu'l-Bahá à Londres), de son côté, raconte un cas identique dont elle a été témoin à Londres.

"Un jour une femme vient pour demander à voir le Maître.

- Avez-vous rendez-vous?

Hélas, non.

Je regrette, répondit, avec trop de zèle, l'homme qui l'avait reçue, le Maître est occupé avec des personnes très importantes, et on ne peut pas le déranger.

"La femme ne s'estimant pas assez importante pour se permettre d'insister, s'en alla très tristement. Mais à peine arrivait-elle à la première marche de l'escalier de sortie, qu'elle fut rattrapée par le messager essoufflé, venant de la part d`Abdul'l-Baha.

- Revenez, lui dit-il, le Maître veut vous recevoir.

"Et Lady Blomfield ajoute qu'on entendait la voix d`Abdu'l-Bahá venant de la chambre voisine, disant avec autorité:

- Un coeur a été affligé. Dépêchez-vous de ramener cette femme."

Et lorsqu'il n'y avait plus moyen de réjouir un coeur brisé, il en souffrait tellement qu'il ne pouvait retenir ses larmes.

Ainsi une fois, toujours à Londres, `Abdu'l-Bahá reçut une lettre déchirante d'une personne qui, à deux reprises, avait essayé de le voir. N'y ayant pas réussi, elle pensait qu'on l'avait éconduite.

Avec l'expression d'une indescriptible tristesse,`Abdul'l-Baha quitta la pièce en disant:

- Un de mes amis a été martyrisé.

Et en partant, il pleurait (Abdu'l-Bahá à Londres - Publication de l'A.S.N. des Baha'is d'Angleterre).

Si les gens cherchaient à voir `Abdu'l-Bahá, c'est qu'auprès de lui, chacun ressentait pleinement sa dignité humaine. Et l'on sait combien ce sentiment, c'est-à-dire l'estime de soi, ranime le courage, et contribue au succès dans tout ce qu'on entreprend. L'histoire suivante, toujours racontée par Lady Blomfield, illustre bien cette caractéristique d`Abdu'l-Bahá.

"Un jour, alors que le Maître était en conversation avec plusieurs personnes, j'entendis la voix d'un homme qui, à l'entrée de la maison, demandait si j'étais chez moi.

- Oui, mais... répondit le domestique.

Je vous en prie, je vous en prie, interrompit l'homme d'une voix à l'accent désespéré.

"J'entrai alors moi-même dans le vestibule, et il me demanda si j'étais l'hôtesse d`Abdu'l-Bahá.

- Oui, vous voulez me voir?

- C'est pour cela que j'ai fait trente milles à pied.

- Entrez, reposez-vous. Vous allez vous rafraîchir et je vais vous écouter.

"Il entra. A première vue, je l'avais pris pour un vulgaire vagabond, mais lorsqu'il commença à parier je m'aperçus que, derrière son apparence misérable et les traces de ses souffrances, se cachait autre chose.

- Je n'ai pas toujours eu l'air aussi peu honorable et désespéré que vous me voyez maintenant, commença-t-il à dire. Mon père était pasteur du comté et je fréquentais l'école communale. Inutile de vous exposer toutes les souffrances et les misères qui m'ont amené à décider de mettre fin à ma vie, si inutile pour Dieu et pour les hommes. Et c'est dans cette intention que j'étais sorti de chez moi pour n'y plus revenir.

J'errais dans la rue lorsque tout à coup, je vis un visage dans la vitrine d'un marchand de journaux. Je me senti cloué sur place, car j'avais l'impression que ce visage me parlait et m'appelait. C'était la photo d`Abdu'l-Bahá.

- Puis-je jeter un coup d'oeil sur ce journal, demandai-je au marchand.

Il me le permit; je pris l'adresse et je me dis: si ce personnage existe sur la terre, je supporterai encore le poids de mon existence. J'ai donc quitté à pied notre ville natale pour trouver `Abdu'l-Bahá, et me voici chez vous. Mais dites-moi, est-ce qu'il est chez vous? Me recevra-t-il? Même un homme comme moi?

- Bien sûr qu'il vous recevra. Venez avec moi.

"Je frappai à la porte et c'est `Abdu'l-Bahá lui-même qui l'ouvrit, les bras tendus vers le mystérieux visiteur, comme à un ami cher qu'il attendait déjà.

- Comme vous avez bien fait d'être venu, lui dit-il.

Combien je suis heureux que vous soyez venu. Mais asseyez-vous donc. Là, là.

"Et le bonhomme tout en tremblant s'effondra plutôt qu'il ne s'assit sur la chaise basse au pied du mur.

Soyez donc heureux, soyez donc heureux, lui dit `Abdu'l-Bahá, d'une main tenant la main du bonhomme, et de l'autre caressant la tête baissée, les cheveux en désordre.

- Ne vous désolez pas si vous avez vu l'humiliation. Dieu est tellement bon pour Ses créatures, tellement puissant. Être pauvre, mais ce n'est rien. Ce qui compte, ce qui est important, c'est de travailler, car travailler c'est adorer Dieu.

"Et le Maître continua de lui tenir un tel langage que la douleur de notre visiteur s'apaisa au point qu'il semblait n'en plus rester aucune trace. Ce n'était plus le misérable d'il y avait un instant, mais un homme rayonnant plein de confiance en lui-même, conscient de sa dignité.

- Écrivez-moi ses paroles, nous dit-il en partant. Il m'a dit: "peu importe si on est pauvre, ce qui compte c'est de travailler, car travailler c'est adorer Dieu."

Chers amis, ce n'est qu'un cas parmi tant d'autres où `Abdu'l-Bahá inspirait aux gens la confiance en eux-mêmes, ranimant leur force de caractère.

Indiscutablement cela provenait de l'influence mystérieuse qu'exerçait `Abdu'l-Bahá sur ses visiteurs. Mais ce qu'il ne faut pas oublier c'est qu`Abdul'l-Baha, non seulement lui-même ne voyait pas les défauts de ses interlocuteurs, mais magistralement, en minimisait l'importance à leurs yeux, de telle sorte que leurs défauts se présentaient à eux comme des moribonds, eux même s'estimant alors athlètes. Avec un tel sentiment on arrive facilement à maîtriser ses défauts.

L'histoire suivante racontée par l'ex-pasteur Ives (Les Voies de la liberté, Bruxelles, 1971) illustre bien cette vertu d`Abdul'l-Baha.

Habitué au tabac, dont il ressentait les effets néfastes car il était de santé fragile, l'ex-pasteur n'arrivait pas à s'en débarrasser.

Il lui semblait que c'était plus fort que lui. Il s'adresse alors à `Abdu'l-Bahá.

"Après m'avoir regardé d'un regard plein d'amour, écrit l'ex pasteur, et cherchant à me comprendre, il me demanda combien de cigarettes je fumais par jour. Je lui en ai cité le nombre. Alors il me dit qu'il ne croyait pas que cela me fasse du mal, et qu'en Orient, on dit qu'un homme est habitué au tabac quand il fume tout le temps, au point que ses cheveux sentent le tabac, que son vêtement sent le tabac et que cela en devient vraiment désagréable, mais que ce n'est pas du tout mon cas, et qu'à mon âge, du fait que je fume depuis longtemps, que je continue à fumer ou que je cesse n'a pas grande importance pour ma santé.

"J'ai été stupéfait: pas un reproche, pas un mot sur la nocivité du tabac, pas le moindre appel à ma force de volonté.

"`Abdu'l-Bahá m'avait présenté mon habitude de fumer comme tellement insignifiante, que le conflit intérieur qui me rongeait depuis longtemps a disparu, ce conflit ayant précisément sa racine dans l'importance que j'attachais au tabac. Et je suis arrivé facilement à m'en débarrasser."

Cette vertu d`Abdu'l-Bahá de ne pas voir le mai est caractéristique de l'enfant qui, avec son coeur encore pur, voit tout d'un bon oeil.

- Maman, dit le petit, je peux jouer avec Jojo?

- Non, on ne joue pas avec les enfants qui sont mauvais. On joue avec les enfants qui sont bons.

- Est-ce que je suis bon?

- Mais bien sûr.

- Alors Jojo peut jouer avec moi?

`Abdu'l-Bahá aimait beaucoup les enfants. Avec eux il se sentait dans un milieu où il n'y avait que de bons sentiments. Invité chez des amis, il cherchait toujours s'il y avait des enfants, pour les prendre dans ses bras, les embrasser et leur donner des bonbons. Et il interdisait aux amis de frapper les enfants, même s'ils sont rebelles de caractère.

"Avec une bonne éducation, même un animal devient docile, précisait-il.

Les Arabes disent que lorsque vous dressez un cheval, il ne faut pas le frapper. Si vous le frappez, vous le rendez plus rebelle et plus méchant (ZARVHANI, Récits des voyages d`Abdu'l-Bahá en Occident).

Cet amour pour les enfants était toujours partagé par ceux-ci.

A Stuttgart, où `Abdu'l-Bahá fut alité pour quelques jours, on avait demandé à un enfant de prier pour qu`Abdul'l-Baha soit guéri.

- Très bien, répondit l'enfant, mais alors il partira.

Une américaine lui disait:

- Mon enfant prend toujours votre photo et dit: Mon amour, mon amour."

- C'est à cause de votre amour, répondit `Abdu'l-Bahá.

`Abdu'l-Bahá ne se contentait pas de réjouir les coeurs en paroles seulement. Les actes comptaient pour lui beaucoup plus encore, de sorte que, dans le programme de ses activités journalières, une grande part était réservée aux oeuvres charitables.

Il réconfortait les malades, visitait les nécessiteux pour apporter son assistance soit en argent soit en nourriture. Et il arrivait que de telles visites le retenaient tard dans la nuit.

A ce propos, le Dr. Yunis Khan écrit (Les Mémoires de neuf années de séjour en Terre Sainte):

"Une nuit, `Abdu'l-Bahá avait été retenu chez les malades jusqu'à une heure après minuit, et les amis réunis à la Maison des Pèlerins l'attendaient avec impatience. Certains commençaient même à somnoler lorsque finalement arriva le Maître. Et comme d'habitude, il demanda à un ami de commencer la réunion par une prière. C'était un vieillard somnolent qui devait le faire. Celui-ci, sans se gêner, récita la prière qu'on récite juste avant d'aller au lit:

"O mon Dieu, voici Ton serviteur qui aspire à s'endormir à l'ombre de Ta miséricorde..."

(A ce stade de mon exposé je me demande si vous n'avez pas envie de réciter cette prière.)

Visiter les malades et les personnes souffrantes présentait pour `Abdu'l-Bahá une telle importance que s'il n'arrivait pas à le faire lui-même, il en chargeait une autre personne.

L'ex-pasteur Ives écrit (Les Voies de la liberté, Bruxelles, 1971):

"Un jour, empêché par trop d'occupations urgentes, `Abdu'l-Bahá dit à Madame Gestinger d'aller à sa place chez un malade nécessiteux.

- Portez-lui à manger et donnez-lui des soins comme je le fais, lui demanda-t-il.

a Toute fière et heureuse de cette mission, Madame Gestinger se dirigea à l'adresse qu`Abdul'l-Baha lui avait remise.

"Mais peu de temps après elle revint en disant:

- Maître, vous ne réalisez pas dans quel endroit terrible vous m'avez envoyée. J'allais presque m'évanouir à cause de la terrible puanteur, de la saleté de l'endroit, et de la situation dégradante de cet homme. Je me suis donc enfuie pour ne pas être contaminée par un mal terrible.

- Veux-tu servir Dieu, sers ton prochain. Retourne chez lui, lave-le s'il est sale, donne lui à manger s'il a faim, et ne reviens pas avant que tout cela ne soit fait."

"C'est cet esprit de service rendu avec humilité qui fait la grandeur d`Abdu'l-Bahá, grandeur sur laquelle personne ne peut se permettre le moindre doute" écrit l'éminent Professeur de l'Université de Cambridge, E. Brown.

Mais ce n'est pas la grandeur que cherchait `Abdu'l-Bahá. Il voulait, par son mode de vie, montrer que la grandeur de l'homme est dans le service rendu avec humilité. Il l'a bien illustré par l'image qu'il a donnée en réponse à un enfant qui lui demandait pourquoi toutes les rivières vont vers l'océan.

- Parce que, répondit `Abdu'l-Bahá, l'océan est plus bas que les rivières.

Un tel esprit de service ne pouvait être accompagné que d'une autre vertu: la générosité.

`Abdu'l-Bahá était incroyablement généreux. Déjà tout jeune, il l'était.

Un jour son père l'envoya à l'inspection de quelques troupeaux de moutons. Inspection faite, on lui dit qu'il fallait donner quelque chose aux bergers.

Mais je n'ai rien, leur répondit le jeune garçon.

C'est une coutume, et ils attendent un cadeau de votre part.

- Eh bien, répondit-il, qu'ils disposent des troupeaux. Et il leur offrit tous les troupeaux.

Ce geste a tellement émerveillé son père, Bahá'u'lláh, que celui-ci remarqua:

- Avec lui il faut faire attention, car la prochaine fois, il leur dira:

"Disposez de moi-même, comme vous voulez."

A propos de la générosité d`Abdu'l-Bahá, l'ex-pasteur Ives rapporte cette histoire racontée par une Américaine (Les Voies de la liberté, Bruxelles, 1971):

"Je me trouvais par hasard dans l'auberge où s'était arrêté `Abdu'l-Bahá lors de sa tournée en Amérique. Un matin, de très bonne heure, je le vis marcher devant l'auberge, en train de dicter une lettre à son secrétaire. Un vieillard misérablement habillé passa devant l'auberge. `Abdu'l-Bahá s'avança vers lui et, souriant comme à un vieil ami, lui dit quelques mots pour le faire rire. Le vieillard sourit, mais d'un sourire plutôt triste.

"`Abdu'l-Bahá examina le vieillard d'un regard rapide et infiniment gentil. Puis il lui dit que son pantalon ne paraissait pas être en état de pouvoir lui servir encore longtemps, et qu'il faudrait en trouver un autre. C'était encore très tôt dans la matinée, et il n'y avait personne dans la rue. `Abdu'l-Bahá se mit à l'ombre, et il sembla qu'il cherchait quelque chose sous son manteau à la hauteur de la ceinture. Un moment après je vis son pantalon tomber par terre. Vite, il le ramassa pour le remettre au vieillard avec ces mots: "Que Dieu soit avec vous."

"Puis il continua de dicter sa lettre comme si rien ne s'était passé."

Une telle générosité impliquait deux attributs jumeaux: la sobriété et la simplicité.

`Abdu'l-Bahá était extrêmement sobre. Sa chambre à coucher lui servait également de bureau de travail. Il s'habillait simplement, ne changeait pas de vêtement tant que celui-ci restait encore convenable, et choisissait les tissus les plus ordinaires.

Il demandait aux membres de sa famille de faire comme lui, afin de servir d'exemple pour les riches, et d'encouragement pour les pauvres.

Il mangeait simplement, se nourrissant principalement de pain, de produits laitiers et de riz, disant qu'on y trouve tout ce qui est nécessaire pour l'organisme. Pour ses déplacements, il utilisait les moyens les moins chers, préférant autant que possible la marche à pied, là où c'était possible.

Un jour, le conducteur de la diligence (transport en commun de l'époque) lui fit remarquer qu'un homme de son rang devrait ,,c déplacer en voiture privée. `Abdu'l-Bahá ne dit rien jusqu'à l'arrêt de la diligence. Il y avait là un misérable mendiant, à qui il mit dans la main une pièce d'or, puis il dit au conducteur de la diligence:

"Comment puis-je penser à une voiture privée au moment où il y a tant de gens comme lui qui ont besoin d'argent."

La sobriété et la simplicité excluaient bien entendu les cérémonies et les formalités. Abdu'l-Bahá savait comment les éviter sans choquer les gens, tout en restant maître de la situation.

En Amérique quelques personnalités très riches avaient prévu une scène pittoresque pour la réception d`Abdul'l-Baha Avant le repas un jeune page en uniforme spécial devait lui présenter, pour les ablutions, une jatte ciselée avec une serviette parfumée. Cela se passait dans un jardin. Juste avant le repas, Abdu'l-Bahá s'aperçoit de leur projet.

Avant qu'il ne soit exécuté. il s'approche du bassin du jardin, se lave les mains, s'essuie avec l'essuie main du jardinier, puis avec un sourire radieux fait passer aux invités le service de cérémonie qui lui était destiné (G. Townsend, The way of the Master).

Ce qui voulait dire: si ces cérémonies vous plaisent vous êtes libres de les pratiquer, que ma présence ne vous gêne pas; bien au contraire, je vous aide à vous en réjouir.

Et chaque fois qu'il ne s'agissait pas d'une question de principe, Abdu'l-Bahá tenait tellement à laisser les gens libres que, s'il sentait que sa présence les gênait, il se retirait.

Ainsi, par exemple, emprisonné à 'Akkà, il a choisi la morgue pour lui-même comme cellule. Et il en expliquait ainsi la raison: étant donné qu'on les avait mis tous, hommes, femmes et enfants, dans une même pièce, il sentait que sa présence les gênait, car ils se voyaient contraints de se montrer calmes et polis, dans des conditions de vie révoltantes, ce qui était vraiment difficile. "Je me suis donc retiré dans la morgue pour les laisser libres."

Mais cette liberté, `Abdu'l-Bahá ne l'accordait pas lorsqu'il s'agissait de questions de principe. Ainsi, par exemple, `Abdu'l-Bahá était un jour invité à dîner chez une américaine. A l'heure du dîner arriva un noir. L'hôtesse le laissa entrer puisqu'elle le connaissait, mais ce qu'elle ne pouvait pas admettre, c'était d'aller à l'encontre de la coutume américaine et de le laisser s'asseoir à table avec les blancs. Là, Abdu'l-Bahá ne pouvait plus la laisser libre. Il pria l'hôtesse de mettre un couvert à sa table à lui, pour le noir, ce qui surprit fort les invités. Mais `Abdu'l-Bahá avait dominé la situation, et tout alla bien.

On aurait encore beaucoup à dire sur le mode de vie d`Abdu'l-Bahá, mais le temps étant limité, restons-en là.

Cependant, il y a une question qui se pose lorsqu'on étudie le mode de vie d`Abdu'l-Bahá. Et c'est par la réponse à cette question que nous allons tirer de cet exposé la conclusion qui s'impose.

Cette question, la voici:

`Abdu'l-Bahá, en tant que successeur du fondateur de la foi baha'ie, avait pour mission la propagation, l'enseignement de cette foi. Pourquoi alors ne consacrait-il pas tout son temps à l'enseignement de cette foi?

Pourquoi consacrait-il une grande partie de son temps à soigner les malades, à assister les orphelins, à subvenir aux besoins des nécessiteux, à consoler les coeurs brisés, à s'occuper des enfants?

C'est que tout cela fait partie de l'enseignement, qu'on le fasse directement et personnellement, ou indirectement, par les institutions, en mettant volontairement à leur disposition les fonds nécessaires. Et il ne faut pas oublier que l'un n'empêche pas l'autre. Je veux dire que tout en contribuant volontairement aux différents fonds on ne doit pas négliger l'enseignement en paroles.

Et comment enseigner en paroles? C'est un art qu`Abdul'l-Baha nous apprend. La formule qu'il nous demande d'appliquer se résume en deux mots: se tourner vers Dieu et aimer.

En enseignant la foi, il faut invoquer Dieu, car en définitive c'est Dieu qui doit guider. Jésus n'a-t-il pas dit:

"Nul ne vient au Seigneur si le Seigneur ne le veut." Quant à aimer son interlocuteur, la première chose à faire, c'est de le comprendre. Car qui dit comprendre dit aimer.

Et pour comprendre il faut savoir écouter.

`Abdu'l-Bahá avait un don exceptionnel dans l'art d'écouter, ce que Bahá'u'lláh, son père, admirait en disant:

"Regardez avec quelle attention il écoute son interlocuteur, de sorte que celui-ci a l'impression qu'il est en train de lui apprendre des choses qu'il ne connaissait pas."

`Abdu'l-Bahá savait écouter son interlocuteur et, par voie de conséquence, le comprendre et facilement le convaincre. On peut dire qu`Abdu'l-Bahá, avant tout, c'est par ses oreilles qu'il arrivait à gagner la sympathie de son interlocuteur. Une fois cette sympathie gagnée, comment présentait-il le message? Comme un cadeau à un roi, c'est-à-dire, en le laissant entièrement libre, d'apprécier ce cadeau ou de ne pas l'apprécier.

Rien n'illustre aussi bien la façon d'enseigner d`Abdul'l-Baha, que l'expérience personnelle vécue par l'ex-pasteur Yves (Les Voies de la liberté, Bruxelles, 1971).

"Un jour, écrit-il, lorsqu`Abdul'l-Baha interprétait les paroles de Jésus d'une manière très différente de la nôtre, je ne pus m'empêcher de protester en disant:

- Personne, après tant de siècles de controverses, n'ose affirmer avec certitude ce que Jésus voulait dire. Je ne peux pas accepter ce que vous dites.

"Son interprète me regarda avec un regard si furieux que je ne l'oublierai jamais, regard qui disait: Qui es-tu pour contrarier `Abdu'l-Bahá?

"Par contre, `Abdu'l-Bahá lui-même me regarda d'un regard pour lequel je reste éternellement reconnaissant à Dieu. C'était le regard d'un amant qui cherche à comprendre sa bien-aimée.

"Puis après un long silence pendant lequel il a sûrement prié, d'une voix douce, et avec un sourire séduisant, il me dit que je suive mon chemin et lui le sien. Il m'a fait sentir toute ma liberté d'apprécier ou de rejeter ce qu'il disait.

"Mes yeux s'emplirent de larmes et je murmurai: "pardonnez moi, je vous prie."

"Ce regard, écrit l'ex-pasteur, me rappelait le même regard qu'a jeté Jésus sur Pierre, perplexe, effrayé et ayant renié son Maître chargé de croix, regard, précise l'ex-pasteur qui a sauvé le monde, car c'est ce regard qui a permis à Pierre de se donner entièrement à la foi chrétienne destinée à sauver le monde. Et c'est ce regard que nous devons avoir constamment présent à l'esprit si nous voulons changer le monde.


Maison d'Éditions Baha'ies - D/1974/1547/5


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3. FASCICULE 3 - l'amour et l'objectivité

PRÉFACE

L'homme étant, par sa création, un être essentiellement sociable, depuis que le monde est monde, il a toujours cherché à se faire des amis, car ce sont les amis qui lui facilitent la vie et qui l'assistent dans la réalisation de ses désirs.

Il y a pourtant tellement de qualités qui jouent le même rôle que, grâce à ces qualités, on arrive à rendre sa vie de plus en plus agréable à vivre. Ces qualités sont l'amour du prochain, la gratitude, la confiance en son prochain, la justification de cette confiance, la bonne foi, et d'autres encore.

On pourrait donc dire que ces qualités sont nos amies, ou plus exactement nos meilleures amies puisqu'elles nous en fournissent la preuve dans notre vie quotidienne.

C'est la raison pour laquelle j'ai appelé " Nos amis dans la vie " ce petit recueil des courts exposés que j'ai fait sur ces qualités, durant quelques tournées de conférences.

Autant que possible, j'ai essayé d'en faciliter la lecture et c'est dans ce but que j'ai eu souvent recours aux petites anecdotes. Si le lecteur trouve ce genre d'exposé trop simple, qu'il ne me refuse pas son indulgence.

Comme les qualités en question ont été exposées non seulement du point de vue de la science, mais également du point de vue de la religion et plus particulièrement de la religion bahá'ie qui a donné plus de 20000 martyrs, il m'est apparu utile d'ajouter, à la fin de ce fascicule, l'histoire de l'un de ces martyrs ainsi qu'un témoignage parmi bien d'autres Écrits par les orientalistes occidentaux concernant les persécutions atroces qu'ont subies les premiers disciples.


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3.1. Objectivité: Quand on aime, on n'est plus un rêveur

Un soir Madame Edison avait persuadé son mari de revêtir son habit et de l'accompagner à une soirée. Ce fut un sacrifice immense pour ce savant plus préoccupé de recherches que de mondanités. Il accepta cependant, mais à peine arrivé d'une heure, il dit à sa femme: "Je n'en puis plus, il faut que je rentre". Il rentra dans son laboratoire et pour être sûr de ne jamais plus connaître pareille torture, il cloua au mur son habit noir qui s'y trouve encore.

Sa femme n'insista plus pour qu'il l'accompagne dans ces soirées. Elle le laissa tranquille, car elle l'aimait tel qu'il était avec son caractère, son tempérament et ses goûts dans la vie, peu importe si cela ne correspondait peut-être pas à l'image qu'elle s'était faite en rêve de son futur mari.

C'est ce qu'on appelle objectivité en amour, c'est-à-dire aimer une personne telle qu'elle est et non pas telle qu'on voudrait qu'elle soit. En matière d'amour, il faut être réaliste, on ne doit pas se faire une image et en chercher le modèle vivant.

Notre vie n'est pas un rêve: ce n'est qu'en rêve que l'image et la réalité ne font qu'un. Quand on aime on n'est plus un rêveur, on a le sens des réalités en toutes circonstances et à l'égard de tout le monde.

L'amour pourrait être comparé à un art et pour apprendre un art, il faut s'y entraîner. Si l'on veut s'entraîner en l'art d'aimer, il faut savoir exercer la capacité d'objectivité envers tous ceux que nous rencontrons et ne jamais réserver cette objectivité à la personne aimée. Si l'on s'entraîne dans l'art de la peinture peut-on s'attacher à un seul paysage? Non! Il en est de même en ce qui concerne l'attitude à prendre à l'égard des êtres qui sont si différents les uns des autres, et à tous les points de vue. En réalité tout être humain est fait de façon très particulière à tous égards, et c'est là-dessus que repose l'individualité. Ces différences nous les connaissons dans les empreintes digitales ou dans cette odeur naturelle assez marquée pour que le chien policier puisse en suivre la trace.

Ayant étudié la question plus profondément, les savants ont constaté que les gens réagissent différemment aux mêmes médicaments, qu'ils diffèrent les uns des autres par tout leur tube digestif, ce à quoi on peut attribuer le fait que tant de personnes aiment des aliments différents et en mangent en quantités différentes. Il en est de même en ce qui concerne nos glandes qui sécrètent des hormones agissant sur notre affectivité, nos instincts, notre activité sexuelle et notre équilibre psychologique. Il n'y a même pas deux cerveaux identiques, comme il n'y a pas deux visages identiques. Et ce qui est remarquable, c'est que ces différences existent dès la naissance (Extrait de " You are extraordinary " de Roger Williams).

La conclusion à laquelle nous arrivons est que tout être humain est UNIQUES (Extrait de " You are extraordinary " de Roger Williams).

Selon les enseignements bahá'is, nous devons absolument tenir compte de ces différences dans nos relations avec tout le monde, ainsi que dans nos méthodes d'éducation.

Les relations matrimoniales ne seront-elles pas bien plus agréables si nous tenions compte de ces différences innées? Quelques exemples: l'un gèle dans le salon où l'autre étouffe.

L'un oublie les toutes petites choses, l'autre les retient pour toujours. L'un a le sommeil monophasé comme la poule, l'autre a le sommeil polyphasé comme le chat, c'est-à-dire fait de petits sommes. Puisque nous avons parlé d'Edison, rappelons que c'était son cas et sa femme ne lui a jamais reproché d'être "paresseux" quand il s'endormait souvent dans la journée, pas plus qu'elle ne lui en voulait parce qu'en se réveillant fréquemment au cours de la nuit, il interrompait son sommeil. Le couple s'entendait bien parce que tous les deux s'en tenaient à l'objectivité dans leurs relations.

Indiscutablement, n'étant pas identique à son conjoint, il y a toujours des concessions à faire de part et d'autre pour continuer à s'aimer. Mais l'essentiel c'est de voir avant le mariage jusqu'où ces concessions peuvent aller pour que l'entente règne au sein du foyer familial.

C'est pour cela que selon les enseignements bahá'is, il est essentiel qu'on se connaisse avant le mariage, car une fois mariés on ne doit plus chercher à changer de conjoint au point qu'il devienne " copie conforme " à l'image qu'on se faisait de lui avant le mariage.

Mais entendons-nous sur le terme " changer".

On ne change pas ce qui est inné du point de vue de la constitution morale.

Ainsi, par exemple, on ne change pas celui qui par sa nature aime une vie régulière et monotone et il est inutile d'essayer de faire de lui un amateur de risques. Mais en ce qui concerne les mauvaises habitudes, les conjoints doivent s'entraider pour s'en débarrasser. Et là encore il y a des limites qui, une fois qu'elles sont dépassées, permettent le divorce dans la foi bahá'i. La fidélité conjugale est l'un de ces cas.

En parlant de l'objectivité, c'est-à-dire le fait d'accepter son partenaire (et d'une manière générale, son prochain) nous éliminons naturellement le cas de telles " habitudes " ! Ce qui importe c'est que l'individualité étant indéniable, l'objectivité reste l'une des exigences de l'amour du prochain. On doit le connaître quant à ses caractéristiques, on doit le comprendre pour arriver à prendre conscience de sa valeur individuelle et ainsi arriver à l'apprécier. C'est de cette façon que les hommes peuvent tirer le meilleur parti de leurs ressources propres et s'unir dans l'entente et l'harmonie. Il en est de même en science où l'hydrogène contribue à la combustion, deux caractéristiques opposées.

Mais ces deux éléments lorsqu'ils se rencontrent et s'unissent donnent de l'eau qui est à la source de la vie.

Unité dans la diversité, voilà le mot d'ordre bahá'i. Nous arrivons donc à cette conclusion que les hommes tout en restant différents les uns des autres au point de vue de la richesse morale et matérielle doivent se comprendre et s'unir afin de tirer de cette union le meilleur profit dans l'intérêt de tous.

C'est pour cela que les rencontres régulières, mensuelles et sans classe font partie intégrante de la foi bahá'ie. Bahá'u'lláh dit: "Invitez-vous les uns les autres en offrant ne fût ce que de l'eau".

Aux réunions mensuelles bahá'ies on voit des amis d'origine religieuse différente, de nations différentes qui, dans un esprit d'entente et d'harmonie se consultent sur les questions intéressant la vie communautaire en général. Ces rencontres fournissent le meilleur moyen pour qu'on devienne amis les uns et les autres. C'est ce modèle de rencontre que les bahá'is recommandent au monde. C'est ce modèle de rencontre qui fait qu'en se séparant et en se disant " Au revoir", on attend le plaisir de se revoir. Alors chers amis

"Au plaisir de vous revoir."


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3.2. Gratitude: Quelle magie que celle de dire "Merci"

Se promenant un jour dans son jardin, un roi aperçoit un jardinier âgé de plus de quatre-vingts ans occupé à planter des arbres. "Qu'est-ce que tu fais-là " demande le roi? " Je plante des dattiers", répond le vieux jardinier.

"Combien de temps mettront-ils pour donner des fruits?"

"Vingt ans", répond le vieillard.

"Mais tu ne vivras pas jusque-là pour en cueillir les fruits, pourquoi alors plantes-tu ces arbres?", "Mes prédécesseurs ont planté des dattiers dont j'ai mangé les fruits et moi je plante ces dattiers pour que ceux qui viennent après moi en profitent."

Cette réponse plut au roi et il lui donna une pièce d'or. Le jardinier s'agenouilla et remercia le roi.

"Pourquoi te mets-tu à genoux?".

"Parce que grâce à Votre Majesté ces arbres ont déjà porté leurs fruits."

Cette réponse a encore plu au roi et il lui donna une autre pièce d'or. De nouveau le jardinier se mit à genoux en disant cette fois: "Je m'agenouille pour exprimer ma gratitude à Votre Majesté, car d'habitude les arbres ne portent leurs fruits qu'une fois par an, grâce à Votre Majesté, ils ont porté leurs fruits deux fois."

Touché par ces paroles, le roi lui donne une troisième pièce d'or et lui demande son âge.

"Douze ans, Votre Majesté."

"Comment, douze ans?"

"Durant le règne de votre prédécesseur, on était constamment en guerre, et ce n'était pas une vie. Depuis douze ans que vous régnez tout le monde est heureux. C'est donc avec votre règne que la vie a commencé pour moi."

Flatté par cette réponse, le roi lui remit une quatrième pièce d'or et dit: "Maintenant, je dois te laisser car si je continue à t'écouter il ne me restera plus rien."

Si j'ai raconté cette histoire, c'est pour dire combien nous gagnons dans la vie par cette vertu sublime qui est la gratitude.

Nous y gagnons surtout du point de vue moral, car par la gratitude d'abord, nous réjouissons le coeur de notre bienfaiteur et puis nous l'encourageons à faire le bien à tous et, par voie de conséquence, réjouir le coeur de tous. Or, réjouir le coeur des uns et des autres est le but sublime de la religion, dont tous les commandements (prière, service, pardon etc.) ne sont que des moyens pour atteindre ce but.

Il faut donc, en toutes circonstances, manifester sa gratitude. Indiscutablement, nous sommes plus disposés à exprimer notre gratitude quand on nous rend un grand service, nous ne trouvons pas de mots pour exprimer notre reconnaissance à un médecin qui nous sauve la vie. Et c'est normal. Mais, ce qui importe, c'est de manifester sa gratitude pour les petits services et de cette manifestation de la gratitude se faire une règle de vie. Cette règle de vie, on doit commencer à l'appliquer au sein du foyer familial. Si, dans le passé on disait qu'une charité bien ordonnée commence toujours par soi-même, c'est-à-dire à la maison, comme le disent les Anglais: Charity begins at home, aujourd'hui il faut y ajouter qu'une gratitude bien exprimée commence aussi à la maison. Et l'on commence à faire cette expérience surtout avec l'enfant, car le coeur de l'enfant est tendre et pur.

C'est donc à son égard qu'il faut être très attentif afin de stimuler son esprit de bienfaisance. Rien ne contribue plus que l'ingratitude à étouffer l'esprit de bienfaisance.

Un père se promenait un jour avec sa fillette dans les champs. A un moment donné la fillette cueille une fleur sauvage et dit à son père: "C'est pour maman. "- "Mais tu n'es pas folle", lui dit son père, "c'est une fleur sauvage et elle n'a aucune valeur". La fillette se met à pleurer. "Pourquoi pleures-tu? " lui demande son père. "Parce que je n'ai rien d'autre à offrir à Maman pour lui dire combien je l'aime."

"Cet incident, avoua plus tard le père, m'a servi de leçon et j'ai compris que pour ne pas étouffer l'esprit de bienfaisance il faut commencer à exprimer sa gratitude pour ce que généralement on prend pour de " petites choses".

Si nous sommes père de famille, nous devons adopter cette attitude à l'égard de notre épouse en cherchant par tous les moyens à lui exprimer notre gratitude pour le fait qu'elle tient la maison bien proprement, qu'elle range bien notre linge, pour les repas copieux qu'elle nous prépare, pour les boutons qu'elle recoud dès qu'ils sont perdus, pour toutes ces " petites choses".

Il ne faut pas que je sois comme ce mari qui disait " Je ne veux pas que ma femme travaille, il faut qu'elle reste à la maison." Comme si, à la maison, il n'y a aucun travail à faire. Et pourtant ce genre de travail est peut-être plus ennuyeux que le nôtre, car il est monotone et, s'il n'est pas encouragé, il devient démoralisant.

En sortant de notre appartement, il faut que nous soyons attentifs à ce que fait notre concierge; qu'est-ce que je perds en lui disant un mot de reconnaissance et d'encouragement quand je la vois en train de nettoyer soigneusement l'entrée de notre immeuble. Si je prends un taxi et que je constate qu'il choisit le plus court chemin pour m'amener à destination, qu'à part le pourboire, je lui dise aussi un " merci " très cordial. C'est l'attitude qu'adoptait `Abdu'l-Bahá (Successeur de Bahá'u'lláh, fondateur de la foi bahá'i) durant ses voyages en Occident où tout en étant extrêmement généreux pour le personnel du service des hôtels, c'est surtout à leur égard qu'il était très attentif. Un domestique américain qui avait reçu de lui un pourboire remarquable, accompagné d'un geste d'appréciation disait qu'il ne dépenserait jamais l'argent reçu car c'était quelque chose de sacré pour lui.

Et c'est de cet exemple que les bahá'is s'efforcent de s'inspirer dans la vie.

Selon les enseignements bahá'is, étant donné que tout travail aussi insignifiant soit-il, est considéré comme un service, en tant que tel il implique que celui à qui il est destiné en exprime sa gratitude.

Je m'explique par un exemple.

Si j'ai une femme de ménage qui fait très consciencieusement son travail, dois-je me contenter de la payer uniquement en salaire? Non. Dois-je me contenter d'un bref " merci "? Non plus. Je dois la traiter comme un membre de notre famille, lui offrir de temps en temps un petit cadeau, bien loin d'agir comme cette maîtresse de maison: "Comment est-elle ta patronne? " demande une domestique à une autre.

"Oh! elle est dure! Le premier jour, par hasard, j'ai cassé une assiette et je le lui ai dit. Elle l'a retenue sur mon salaire!"

"Et alors, est-ce que tu en as cassé moins?"

"Pas du tout. Seulement maintenant je ne le lui dis plus."

Il faut toujours chercher la moindre occasion pour remercier et non faire des reproches.

On pourra nous faire remarquer qu'à notre époque de matérialisme, jamais personne ne cherche à nous rendre service pour rien, alors quelle gratitude devons-nous leur exprimer?

A cette question, les bahá'is répondent : "Cherchez et vous trouverez."
Car pour un bahá'i, le commandement de Jésus: "Cherchez et vous trouverez" s'applique dans beaucoup de domaines et plus particulièrement dans l'art d'exprimer sa gratitude. Et c'est tout un art où il faut s'entraîner, étant donné qu'il arrive souvent qu'on exprime sa gratitude et puis, par suite d'une distraction, on oublie totalement le service pour lequel on s'est montré reconnaissant.

Mais quand on est bien entraîné en cet art, quand exprimer sa gratitude devient une habitude, on ne l'oublie pas.

A ce propos, permettez-moi de vous raconter une histoire. Un jour, le sultan Mahmoud ayant coupé un melon l'a donné à son vizir Ayaz. Voyant toute la gratitude que celui-ci en exprimait et le plaisir qu'il éprouvait en le mangeant, le sultan lui en demande une tranche. Mais à peine l'a-t-il goûté qu'il la crache, en disant: "Mais c'est amer, comment non seulement tu ne te plains pas, mais tu trouves encore un moyen pour m'en remercier?"

"J'ai reçu de Votre Majesté, répondit le vizir, tant de choses douces que si exceptionnellement je reçois quelque chose d'amer, le moindre signe de mécontentement serait de l'ingratitude."

Le vizir a cherché et il a trouvé comment remercier le sultan. Dans ce cas c'était le souvenir des faveurs qu'il avait reçues du sultan.

La recherche des moindres occasions pour manifester notre gratitude nous rend optimiste, ce qui est l'un des signes de la foi et l'un des facteurs qui contribue puissamment à l'entente et l'harmonie, comme au maintien de la santé corporelle..

Nous y reviendrons lors d'un autre exposé, ce sujet présentant une importance capitale.

L'entraînement en l'art d'exprimer sa gratitude se fait chez les bahá'is par la prière, ce qui est au fond l'expression de la gratitude à l'égard de Dieu et, par conséquent, à l'égard de notre sort. Pour un bahá'i, se plaindre de la " malchance", accuser sa " mauvaise étoile", est un défaut qu'il doit s'efforcer de combattre. Car personne n'est né sous une mauvaise étoile, il y en a qui regardent mal le ciel.

Par la prière et la méditation sur ses paroles, un bahá'i apprend à bien regarder le ciel, à comparer ce qu'il a apporté à la société avec ce que celle-ci lui a donné, ce qu'il a fait pour les autres et ce que les autres ont fait pour lui, et il arrive à la conclusion qu'il a toujours reçu plus qu'il ne mérite et, par conséquent, il doit dire " Merci la Vie! Merci mon Dieu!"

Loin de nous pousser à une résignation passive aux circonstances malheureuses, la prière et la méditation nous apprennent à lutter contre nos faiblesses, à contribuer davantage à l'amélioration du monde. Les paroles mêmes des prières bahá'ies traduisent ces sentiments.

Encore une fois, c'est un sujet qui doit être traité à part.

Exprimer sa gratitude, que ce soit à l'égard de Dieu ou de nos semblables est l'un des devoirs de tout bahá'i. Ici, il m'est facile de remplir ce devoir étant donné l'attention bienveillante que vous m'avez accordée.


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3.3. Recherche: L'homme, ce chercheur éternel

En parlant de la gratitude, nous avons dit que le commandement de Jésus " Cherchez et vous trouverez " s'applique dans beaucoup de domaines. Le domaine qui nous intéresse pour le moment c'est le domaine religieux où l'on cherche cette Vérité qui garantit le bien-être individuel et le bien-être général. Dans cette recherche, on arrive au but si l'on agit personnellement et indépendamment. Autrement, si on imite les autres, la conséquence est l'échec et le danger.

Une petite histoire illustre bien ce que j'entends par les termes échec et danger.

Un épais brouillard rendait la circulation difficile sur une route où circulait un automobiliste trop prudent.

Celui-ci, dans l'espoir d'éviter le moindre accident s'accroche aux feux arrières d'un autre automobiliste qui le précède.

Et quand le premier tourne, il tourne, quand le premier ralentit, il ralentit. Mais voici que brusquement le guide freine pile, le second automobiliste surpris enfonce l'arrière du véhicule du premier. Il sort de sa voiture

"Dites donc" - s'écrie-t-il - "vous n'êtes pas fou. Vous ne pouvez pas faire signe quand vous vous arrêtez brusquement?", "Dans mon garage? " demande le premier tout étonné.

Cette histoire illustre bien ce qui se passe quand dans la vie on imite les autres, ne cherchant nullement à voir le chemin qu'on doit choisir personnellement.

Quand aux accidents de l'histoire, j'entends par là surtout les guerres. Si on étudie bien les raisons dont elles sont la conséquence, on constate qu'à l'origine il y a toujours des malentendus provenant de ce que l'on a pris pour " vrai", les dires des autres sans aucun examen personnel, autrement dit de ce qu'on a imité les autres.

C'est surtout le cas des guerres de religion et plus particulièrement des croisades.

Les chrétiens ont entendu dire que Muhammad a prêché la guerre sainte contre les chrétiens et ils ont tenu pour vrais ces propos.

Les musulmans, de leur côté, ayant entendu que Muhammad a prêché la guerre sainte ont placé les chrétiens dans la catégorie des Arabes païens sauvages, contre qui cette guerre était prescrite. Les uns comme les autres ont cru à ce qu'ils ont entendu dire et sans la moindre investigation, et rien que par imitation se sont levés pour défendre ce qu'ils ont imaginé comme vérité. C'est ainsi qu'ont éclaté les guerres de religion.

Et pourtant si on étudie la vie de Muhammad, on voit qu'il n'a jamais fait de guerre contre les chrétiens, au contraire il a eu pour eux beaucoup d'égards et il leur a donné une liberté absolue. A Nadjan (Les Leçons de Saint-Jean d'Acre, pp. 25-26, aux P.U.F.) se trouvait une communauté chrétienne sous sa protection et sa garde.

Muhammad a dit:
"Quiconque commettra une injustice à leur encontre sera mon ennemi et je témoignerai contre lui au Jugement dernier devant Dieu."

Concernant les chrétiens, voilà ce que nous lisons dans le Qur'án :
"Et tu trouveras que ceux qui sont les plus proches des musulmans par amour sont les chrétiens (5 /85)"

On serait bien curieux de savoir quel est le chrétien ou le musulman qui a lu ce verset les présentant l'un à l'autre comme ami. Non, l'un comme l'autre a imité ses ancêtres mal informés.

Aujourd'hui quand l'instruction est généralisée, disent les bahá'is, n'est-il pas temps qu'on lise les Écrits sacrés pour voir que les fondateurs des religions non seulement étaient des amis les uns pour les autres, mais qu'en plus ils ont présenté leurs adeptes respectifs comme amis les uns vis-à-vis des autres.

Malheureusement, la jungle des préoccupations matérielles ne nous laisse aucune liberté pour chercher et trouver la Vérité qui, étant une, est seule en mesure de nous unir. Chacun de nous imitant ses parents croit détenir seul la vérité et ferme les yeux à la vérité détenue par l'autre. Et l'on reste désuni et en désaccord sur des questions qu'ils estiment essentielles et qui ne sont que secondaires.

A ce propos, permettez-moi de vous parler d'une scène dont j'ai été témoin. Cela se passait il y a une vingtaine d'années, à l'époque où je travaillais au bureau technique du Ministère des Travaux publics à Tunis. Il y avait là trois dessinateurs dont l'un était juif, le second chrétien et le troisième musulman.

Un jour, je les entends se disputer. Le chrétien disait que Jésus en tant que Fils de Dieu n'est pas mort. Il est vrai qu'on l'a crucifié, mais il est ressuscité.

Le musulman l'interrompt:
"Allons donc, le Qur'án dit qu'on ne l'a pas tué, qu'on ne l'a pas crucifié et qu'on s'est trompé à son sujet (Voir Qur'án 4/156). Or le Qur'án est le seul livre qui est authentiquement la Parole de Dieu, les livres qui précèdent n'étant qu'un recueil des témoignages écrits très longtemps après les déclarations du Prophète. "Là-dessus c'est le juif qui ayant entendu ces controverses intervient: "Vous vous trompez tous les deux. Soyez logiques, les prêtres juifs qui avaient condamné Jésus à la crucifixion eux-mêmes affirment qu'il a été bel et bien crucifié et mort. S'il était ressuscité, on l'aurait crucifié de nouveau. Les Romains non plus ne contestent pas cette vérité. Comment l'un de vous prétend qu'il est ressuscité et l'autre affirme qu'on ne l'a pas tué du tout."

La discussion prenait un caractère peu conforme à l'ambiance d'un bureau technique. Finalement ils ont décidé de me demander ce qu'en pensent les bahá'is.

J'ai dit que selon la foi bahá'ie, par le terme Christ, il faut entendre l'esprit du Christ, manifesté par sa Parole, autrement dit le christianisme. Car c'est le christianisme que les juifs voulurent " tuer". Ils y sont parvenus apparemment pour trois jours pendant lesquels suite au reniement et à la perplexité des apôtres, il semble à tous que le christianisme était enterré. Mais, le troisième jour, les apôtres, revenus à la foi, le christianisme (la réalité du Christ) reprit vie.

Par conséquent, le Qur'án a raison en disant que, le Christ (Christianisme), n'a pas été tué, qu'on s'est trompé et le Nouveau Testament a également raison en disant que le Christ (Christianisme) est ressuscité le troisième jour.

Cette explication, tout le monde l'a admise comme vérité. Comment avais-je acquis la connaissance de cette vérité qui a mis d'accord ceux qui voulaient que la foi soit intelligible? J'ai acquis cette connaissance en me référant aux Écritures révélées pour le stade actuel de l'évolution de l'homme, je veux dire les Écritures bahá'ies. Et il en est de même en ce qui concerne la vérité sur tous les points litigieux tels que l'histoire d'Adam et Ève, le péché originel, la création en six jours, le retour du Messager et ses signes, le paradis et l'enfer, etc., tant de questions sur lesquelles les avis sont tellement divisés et qui constituent une entrave pour l'union et la concorde.

Pour en trouver la véritable explication satisfaisant tout esprit impartial et juste, il faut se référer aux Écritures d'aujourd'hui, je veux dire les Écritures bahá'ies.

A ce propos, remarquons qu'en principe il y a quatre moyens qui nous permettent d'acquérir la connaissance (Voir " Les Leçons de Saint-Jean d'Acre.")

1° Le recours à nos sens. Ce recours peut nous induire en erreur. Ainsi, par exemple, la vue prend le mirage pour un lac, le soleil comme petit astre tournant autour de la terre, etc.

2° Le deuxième critérium est la raison. Là encore, tout en étant une référence nécessaire, elle n'est pas infaillible, car c'est sur la base du raisonnement que les savants pendant plus de 1000 ans " démontraient " que c'est le soleil qui tourne autour de la terre (au moment où le Qur'án armait le contraire). Et ce n'est qu'un exemple parmi bien d'autres.

3° La troisième référence, c'est le texte des Écritures du passé, révélé pour l'enfance humaine et pris à la lettre.
Là encore ce n'est pas suffisant car chacun le comprend à sa façon en se basant sur sa raison qu'il estime comme critérium infaillible.

4° La quatrième référence, ce sont les Écritures révélées pour l'humanité d'aujourd'hui entrant dans le stade de sa maturité et qui, par conséquent, est en mesure de comprendre toute la vérité sur les points obscurs de la doctrine religieuse. J'ai déjà cité, à titre d'exemple, la question controversée de la résurrection du Christ.

Bien d'autres points demandent à être éclaircis, mais, je m'arrête là pour finir ce court exposé non pas par une conclusion, mais par une question.

N'est-il pas temps qu'on nous dise toute la vérité, seule capable de nous mettre d'accord et de nous unir? Les Messagers de Dieu ne nous l'ont ils pas promis? Jésus plus particulièrement n'a-t-il pas dit: "J'ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les porter maintenant. Quand le Consolateur sera venu, l'Esprit de Vérité, il vous conduira dans toute la vérité "? (Jean 16/12.)


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3.4. Optimisme: Les optimistes ont le monopole du succès

Un professeur avait l'habitude de commencer son cours en appliquant un rectangle blanc au tableau noir, puis, après y avoir ajouté un point noir, de demander à ses élèves, "Que voyez vous?"

"Un point noir " était toujours la réponse. "Personne n'a vu le rectangle blanc? " s'étonnait-il.

En agissant ainsi, le professeur en question voulait dire à ses élèves que, dans la vie, il faut apprendre à voir en tout le bon côté et de ne jamais voir tout en noir.

Ce n'est malheureusement pas le cas de nos jours où, par suite du mensonge, la méfiance, l'ingratitude et les maladies psychosomatiques de plus en plus nombreuses, les gens deviennent de plus en plus pessimistes.

Donnez un bon conseil à une personne pessimiste et vous êtes sûr qu'elle en verra l'aspect défavorable.

La scène se passe dans un magasin de modes. Une cliente de nature pessimiste est en train de choisir une robe. "Prenez celle-ci " conseille la vendeuse, "Elle vous rajeunit de dix ans." "Ah, non, dit la dame furieuse, si vous croyez que j'ai envie de paraître dix ans de plus chaque fois que je l'enlèverai."

Indiscutablement, quand la cliente enlèvera cette robe, elle paraîtra plus vieille.

C'est une loi dans la vie qui fait que l'on ne peut apprécier quoi que ce soit que par comparaison. On apprécie le jour par comparaison avec la nuit, le printemps, par comparaison avec l'hiver. On ne peut éviter ni l'un ni l'autre. Pourquoi alors rester nostalgique quand on est en hiver, puisqu'on est sûr qu'après l'hiver on aura le printemps. Pourquoi se décourager quand une porte se ferme, puisqu'on est sûr qu'une autre s'ouvrira. Le malheur, c'est que nous continuons à regarder avec tant de regret et de nostalgie celle qui s'est fermée que nous ne voyons pas celle qui vient de s'ouvrir. Les grands hommes sont ceux qui dans la fermeture d'une porte voient le signe de l'ouverture d'une autre et se mettent précisément à la recherche de cette dernière.

Le commandement de Jésus: "Cherchez et vous trouverez", une fois de plus, selon la foi bahá'ie doit s'appliquer dans ce domaine, autrement dit, pour un bahá'i, toute contrariété devient une bénédiction déguisée, "blessing in disguise " comme disent les Anglais. Chaque contrariété doit être comparée à l'opposition du vent au cerf-volant: plus le vent s'oppose, plus le cerf-volant monte.

A ce propos, `Abdu'l-Bahá, l'interprète des enseignements bahá'is citait cet exemple:
Napoléon finissait une lettre quand un obus éclata tout près de sa tente, et la poussière qui s'éleva couvrit sa lettre. Sans se troubler par l'éclatement de l'obus, il dit: "Merci à l'ennemi qui m'a aidé dans ma tâche. Je devais encore répandre du sable sur ma lettre pour la sécher. C'est l'ennemi qui l'a fait, me permettant ainsi de gagner du temps. "Et il a donné le signal de l'attaque. Cette bataille-là, Napoléon l'a gagnée.

Le successeur d`Abdu'l-Bahá, Shoghi Effendi, Gardien de la foi bahá'ie suivait l'exemple de son grand-père.

Venant en pèlerinage, Miss Martha Root (La plus grande enseignante bahá'ie, grâce à qui la Reine de Roumanie a adhéré à la foi bahá'ie) avait acheté un flacon de parfum précieux pour l'offrir à Shoghi Effendi. Mais au moment oh elle allait l'offrir au Gardien, qui la recevait dans la chambre d`Abdu'l-Bahá, ses mains tremblèrent, le flacon tomba et le parfum s'est répandu sur le sol. Miss Martha Root fut consternée. Quant au Gardien, il dit: "Il n'y avait pas un endroit meilleur qu'ici pour que le parfum soit répandu."

Afin d'apprendre aux bahá'is à chercher en tout le bon côté, `Abdu'l-Bahá ne laissait pas échapper la moindre occasion pour en tirer une leçon. Un jour, en parlant d'une personne, quelqu'un dit à `Abdu'l-Bahá: "Il a passé toute la nuit à jouer au jeu de hasard." "Quelle persévérance", lui fit-il remarquer, faire la même chose toute une nuit. Que ne ferait-il pas le jour s'il se donnait à la cause de Dieu."

En effet, on ne connaît pas la fin. Il vaut mieux rester toujours optimiste.

Einstein ne se montrait pas enfant prodige. Il lui fallut si longtemps pour apprendre à parler que ses parents craignirent qu'il ne soit anormal. Pour ses professeurs, il était un raté. Il se présenta sans succès à l'École Polytechnique de Zurich.

Mais à la fin, ayant reçu l'éducation appropriée, il est devenu le plus grand savant de notre siècle. Edison, à l'âge de 6 ans, a tellement désespéré son maître, que celui-ci le renvoya à la maison. Sa mère profondément optimiste dit: "Moi-même, je l'instruirai. "Elle tint parole et l'enfant est devenu le plus grand inventeur de notre siècle.

La mère d'Edison est restée telle qu'elle avait été créée, optimiste par sa nature, car l'être humain, en principe, préfère rester optimiste. Il s'imagine qu'il a assez de chance pour gagner à la Loterie nationale, et il croit n'en avoir aucune de se faire tuer dans un accident de voiture. Donnez-lui un morceau de gruyère, il ne recherchera pas à mesurer les trous, il n'y verra qu'un fromage très nutritif et de bon goût. Quand il reçoit une lettre de sa bien-aimée, il n'y voit que le message de sa bien-aimée sans chercher à trouver les fautes d'orthographe. Peu importe s'il y en a, il ne voit que le bon côté, il est optimiste par nature, et il le reste tant qu'il n'a pas été trompé.

Les Écrits bahá'is disent qu'il faut précisément profiter de cette nature optimiste dans nos relations avec tout le monde. Pour un bahá'i tout être humain étant créé par Dieu, notre Bien-Aimé, pourrait être comparé à une lettre écrite par la main de notre Bien-Aimé.

Cette lettre peut être mal écrite, porter des taches, il doit les ignorer et n'y voir que le message de son Bien-Aimé Dieu. Et c'est précisément ainsi qu'il peut manifester son amour pour Dieu, autrement dit, sa foi. Car s'il a accepté la foi bahá'ie, c'est par amour de Dieu et non par contrainte.

Etre optimiste, c'est aussi bien dans l'intérêt de l'homme lui-même que dans l'intérêt de son prochain.

L'optimisme sert l'intérêt de l'homme lui-même parce qu'étant optimiste, on est toujours joyeux et heureux, et un tel état d'esprit contribue puissamment à la santé. Ce n'est pas sans raison qu'un grand médecin a dit: "Soyez optimiste, c'est la meilleure façon de garder la santé quand on la possède, et de la reconquérir quand on l'a perdue."

Or, la joie fait partie intégrante de la foi. "La joie et la bonne nouvelle doivent se lire sur vos visages " dit Bahá'u'lláh. Et le maintien de la santé est le devoir de tout bahá'i. D'ailleurs tous les enseignements bahá'is y contribuent.

Quant au pessimisme, les médecins sont unanimes à reconnaître qu'il rend l'homme malade.

Un citadin complimente un fermier: "Quelle magnifique récolte. Cette année, vous ne pouvez pas vous plaindre." "Oh, vous savez, une récolte comme celle-là, il n'y a rien de tel pour épuiser la terre. Et puis, même cette année, un ouragan peut tout dévaster."

Cet homme, disent les médecins, tombera malade et la médecine n'y pourra rien. Car il est et il reste pessimiste. Il croit qu'il est né sous une mauvaise étoile. Ce qui n'est pas vrai, c'est lui qui regarde mal le ciel.

Indiscutablement, la malchance peut arriver à tout le monde, mais comme il est dit.

On ne peut pas empêcher les oiseaux funestes de voler au-dessus de notre tête, mais on peut les empêcher de faire leur nid dans notre tête.

Notre optimisme est également dans l'intérêt de notre prochain. Car l'optimisme est contagieux. Si nous croyons que notre prochain est honnête, il s'efforce d'être honnête.

Ma femme - disait un homme - avait deux défauts qui me gênaient. Un jour, je lui ai proposé de s'en débarrasser, en échange, je chercherais à me guérir de deux défauts de son choix.

Je n'en connais aucun, me dit-elle. Après cela, je ne pouvais plus penser à ses défauts et elle me paraissait une épouse idéale.

Par contre, si nous croyons que notre prochain est malhonnête et nous lui montrons de la méfiance, nous le rendons méfiant et malhonnête. Ce qui signifie que le pessimisme est aussi contagieux.

Une mise au point avant de finir. Si la modération est une condition essentielle en tout, il en est de même en ce qui concerne l'optimisme. C'est la modération dans l'optimisme qui fait que l'homme tout en inventant le bateau, a également inventé la ceinture de sauvetage, tout en inventant l'avion, a également inventé le parachute.

Ne soyons donc pas très naïfs en dépassant les limites de la modération dans l'optimisme comme ce M. Dupont qui décide d'aller chez ses amis les Durand, à l'improviste. "Mais on ne les a pas prévenus", dit sa femme. "Ils ne seront pas contents." "Mais pas du tout, ils seront toujours heureux de nous recevoir " proteste ce Monsieur trop optimiste et il y emmène sa femme.

En sortant, il déclare triomphalement à celle-ci: "Tu as vu combien notre visite leur a fait du bien, quelle mine renfrognée ils avaient quand nous sommes arrivés et quel visage épanoui quand nous sommes partis."

Après cette mise au point, ne pourrait-on pas dire, en conclusion de cet exposé que notre succès dans la vie dépend de notre optimisme à la seule condition qu'il ne dépasse pas les limites de la modération?


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3.5. Le mensonge motivé - quelle calamité!

Un jour le prophète Muhammad, accompagné de ses disciples, était encerclé par les forces d'une tribu ennemie qui voulait le tuer. Ayant décidé de s'enfuir, il dit à son fidèle compagnon Salman:

"Je me mettrai dans une corbeille que tu porteras sur ta tête, et tu traverseras les lignes ennemies. "Si l'on te demande où est Muhammad, tu diras qu'il est dans la corbeille sur ta tête. "C'est ce que Salman fit, de sorte que chaque fois qu'on lui demandait où est Muhammad, il disait qu'il est dans la corbeille. Ce qui était vrai, mais paraissait incroyable pour les ennemis de Muhammad.

Et c'est ainsi que Salman sauva Muhammad, lequel lui dit: "Si tu cherches le salut ne dis que la vérité."

Si le monde d'aujourd'hui va vers sa perte, si cette soi-disant civilisation doit s'effondrer, c'est que le mensonge est devenu monnaie courante, et on en trouve toujours le " motif".

Il n'y a plus de mensonge tout court, tous les mensonges sont " motivés".

Le mensonge commence au sein du foyer familial.

"Yugo, dit papa, j'ai constaté dernièrement que tu commences à mentir. Ce n'est pas bien. Promets-moi de ne plus mentir." "Bien papa", répond le petit. Et puis, voilà que l'on frappe à la porte. "Vas voir qui est là " dit le père. "Si on me demande, dis que je ne suis pas à la maison."

Le mensonge " motivé " sort du foyer familial pour pénétrer chez le voisin. Un paysan vient trouver son voisin: "Peux-tu me prêter ton âne pour aller à la foire." "Je regrette, mais mon âne est aux champs, s'il était là, je te l'aurais prêté avec plaisir. "Comme il achève sa phrase, on entend l'âne braire dans l'écurie. "Tiens, c'est bizarre! Ton âne est aux champs et on l'entend braire ici!", "Je n'aurais jamais cru, dit le voisin, d'une voix offensée, que tu aurais plus de confiance en l'âne qu'en moi."

Le mensonge " motivé " devient un mal contagieux.

Un jour un soldat demande une permission à son capitaine. "Ma femme a besoin de moi" dit-il.

"Nous déménageons après-demain." "C'est faux, lui répond l'officier, je viens de recevoir justement une lettre de votre femme qui ne me parle absolument pas du déménagement, ni d'une permission. Vous êtes un menteur." "Mon capitaine, dit alors le soldat, il y a deux menteurs dans cette pièce, puisque je ne suis pas marié."

Ce qui aggrave la situation, c'est qu'il est facile de dire un petit mensonge, mais il est difficile de n'en dire qu'un. On continue donc de mentir et le mensonge devient une habitude. Et, comme dit un proverbe espagnol connu, les habitudes sont d'abord comme les fils d'araignée, puis elles deviennent comme des câbles. Comment rompre ce câble. Peut-on le faire instantanément? Très difficile. On ne se débarrasse pas d'une habitude en la flanquant par la fenêtre, il faut lui faire descendre l'escalier marche par marche. C'est un tout autre problème. Comment trouver la solution? Pour y arriver, adoptons la méthode scientifique. En science, on résout les problèmes difficiles, on établit même des lois en partant de l'expérience. Si, par exemple, on établit cette loi qui dit que chaque fois qu'on réduit le volume d'un gaz de moitié, sa pression est doublée.

C'est par suite de l'expérience qu'on y arrive.

Et bien l'expérience enregistrée par l'histoire dit que chaque fois que le mensonge prenait la forme d'un mal social, menaçant l'existence même de la société, survenaient des hommes extraordinaires appelés prophètes qui produisaient une transformation spontanée dans les esprits, raison pour laquelle les historiens non croyants les appellent " mutants". C'est le cas de Bouddha, de Moise, de Jésus, de Muhammad, pour n'en citer que quelques-uns. Et ce qui est triste, c'est que leur siècle était tellement imprégné de mensonge que tout le monde les prenait pour des menteurs ainsi que leurs premiers disciples. Et, accusés de mensonge, ils étaient toujours terriblement persécutés et même mis à mort.

La même chose s'est produite dans le domaine de la science où chaque fois qu'il y a eu une nouvelle vérité, les révélateurs de ces vérités étaient traités de menteurs. Huxley a dit: "Toute nouvelle vérité commence par être hérétique. "Bruno Giordano fut brûlé comme hérétique parce qu'il enseignait que la terre tournait autour du soleil. Galilée allait subir le même sort s'il n'avait pas abjuré la même doctrine.

Pourquoi remonter si loin dans l'histoire. Il n'y a même pas quarante ans, une centaine de professeurs allemands se sont réunis pour démontrer que la théorie d'Einstein était un mensonge, à quoi le célèbre savant répondit:

"Si je m'était trompé, un seul professeur aurait largement suffi à me réfuter."

Laissons de côté le domaine scientifique pour revenir au domaine moral.

Si l'histoire nous parle des siècles de mensonge qui ont été témoins de l'apparition de prophètes, la même histoire dit qu'aucun siècle n'a été autant imprégné de mensonges que le XVIIIe siècle.

L'éminent historien Carlyle écrit:

"Un siècle qui n'a pas d'histoire et ne pouvait guère en avoir. Le siècle le plus riche en mensonges, qui n'avait aucune conscience de ces mensonges tant il en était imprégné."

En vérité, la mesure était comble (Voir " Frédéric le Grand", de Carlyle).

Comme, après la nuit, il y a le jour, après le XVIIIe siècle, c'est-à-dire au XIXe siècle, a pris naissance la plus grande révélation jamais enregistrée dans l'histoire, la révélation bahá'ie.

Et, comme il fallait s'y attendre, jamais la réaction du monde contre les nouvelles vérités proclamées par cette révélation n'a été aussi vive et aussi cruelle. Traité de menteur et d'hérétique, le Précurseur de cette révélation, le Báb, a eu la poitrine déchiquetée par la salve de 750 balles, comme si un peloton d'exécution ne suffisait pas. Le Fondateur de la foi bahá'ie - Bahá'u'lláh -a vécu une vie plus atroce que celui de martyr si l'on tient compte de ses condamnations à mort, de ses empoisonnements, de ses emprisonnements successifs, de ses exils de ville en ville et de sa terrible incarcération dans la prison forteresse de Saint-Jean d'Acre.

Plus de 20000 de ses disciples, originaires de différentes religions, de diverses races, de toutes classes, riches, pauvres, savants ou illettrés ont été traités de menteurs et d'hérétiques et, pour cette raison, mis à mort. On leur demandait de ne dire qu'un mensonge et leur vie serait sauve, ce mensonge étant le reniement de cette foi qui disait qu'il faut que chacun cherche personnellement et indépendamment la vérité, qu'il abandonne les préjugés, qu'il aime l'humanité tout entière, qu'il admette l'intelligibilité de la foi, qu'il accepte l'égalité des droits de la femme et de l'homme et bien d'autres vérités considérées comme mensongères à l'époque.

Ces 20000 martyrs nous servent d'exemple, exemple en ce sens que c'étaient des êtres humains comme nous. S'ils ont montré que l'homme peut dire la vérité, même si cela lui coûte la perte de sa vie, avouez, alors qu'il n'est pas difficile de dire la vérité quand cela ne revient pas si cher, ce qui est le cas de la vie quotidienne. L'homme peut donc dire la vérité à son fils, il peut dire la vérité à son voisin, à son supérieur, il peut résister à la contamination par le mensonge qu'il côtoie quotidiennement.

Voilà le sens de l'éducation bahá'ie selon laquelle " Dire la vérité est la fondation de toutes les vertus. Sans cette vertu, le progrès et le succès deviennent impossibles pour quoi que ce soit et dans tous les domaines. Quand cette qualité est acquise, toutes les autres peuvent également être acquises." (`Abdu'l-Bahá)

Quant au mensonge, voilà, à titre d'exemple, ce que nous lisons dans les Écrits bahá'is:

"Le défaut le plus ignoble qui est à l'origine de tous les autres est le mensonge. On ne peut rien imaginer de pire. Le mensonge détruit toutes les perfections humaines, il est la cause de tous les actes infâmes, ses conséquences néfastes sont innombrables." (`Abdu'l-Bahá)

En effet, quand on peut se permettre de mentir, on peut facilement tromper son prochain, trahir sa confiance, sujet dont nous aborderons l'étude lors d'une autre causerie vu son importance. Et concernant cette importance, il suffit de remarquer que sans la confiance mutuelle, la vie sociale même devient insupportable sinon impossible.

Et, concernant cette importance, il suffit de remarquer que ce n'est qu'avec la confiance mutuelle entre les hommes que la vie devient tellement agréable qu'on ne peut s'empêcher de s'écrier: "Qu'il fait bon vivre, la vie mérite d'être vécue."


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3.6. Notre chance est dans la confiance

On raconte qu'un Arabe avait un cheval d'une valeur exceptionnelle qui faisait l'objet de l'admiration de tout le monde. Un jour, le chef de la tribu exprima le désir de posséder ce cheval. L'un de ses sujets se chargea de réaliser son désir.

Il alla vers la région où habitait le propriétaire du cheval. Le voyant de loin, il s'assit sur le bord de la route et simula la maladie et la souffrance. Le cavalier arrive, il a pitié de lui. Il le prend sur son cheval afin de l'amener chez le guérisseur. Arrivé à destination, il descend pour aller frapper à la porte. L'autre en profite, prend la bride en main et s'enfuit. "Arrête-toi, lui crie le propriétaire du cheval. Je vais te dire un mot et tu pourras repartir avec le cheval " , lui promet-il. L'autre s'arrête. Alors le propriétaire du cheval lui dit: "Ce cheval est à toi. Mais promets-moi de ne dire à personne par quelle ruse tu me l'as pris; les gens n'auraient plus confiance en ceux qui souffrent réellement et personne ne s'arrêterait plus pour leur porter secours."

L'autre lui donne sa promesse et repart en possession du cheval. Arrivé chez le chef de la tribu, celui-ci lui demande comment il a eu ce cheval. N'ayant pas eu de réponse, il ordonne de le punir sévèrement. Alors l'autre lui explique ce qui c'est passé.

"Vas lui rendre immédiatement son cheval, lui ordonne le chef de la tribu. Car c'est un tel homme seulement, avec des sentiments si nobles qui mérite d'avoir un tel cheval."

Quelle conclusion, tirons-nous de cette histoire? C'est que l'homme doit être digne de confiance et autant que possible avoir confiance en son prochain. Sans cette confiance, la vie dans la société devient insupportable, sinon impossible. Car il ne faut pas oublier que l'homme est un être social, il ne peut vivre qu'en société, avec les autres.

Il y a pourtant des créatures qui ne le sont pas. Un arbre, par exemple, peut vivre seul, planté au Sahara, il pousse, mais l'homme abandonné seul ne survit pas.

La possibilité de vivre en société implique la collaboration et la possibilité de collaborer implique la confiance mutuelle.

Malheureusement, dans le monde d'aujourd'hui les gens perdent de plus en plus confiance les uns en les autres, ils deviennent de plus en plus méfiants les uns vis-à-vis des autres. Cette méfiance commence au sein du foyer familial. La femme soupçonne son mari de ne pas lui dire la vérité, de ne pas lui être fidèle. Le mari, lui non plus, n'est pas toujours sûr de la conduite irréprochable de sa femme. La scène se passe dans un transatlantique. Le mari rentre tard dans la nuit, sur la pointe des pieds dans la cabine où sa femme l'attend impatiemment.

"Où étais-tu? " s'écrie-t-elle furieuse.

"Dans un coin discret du bar, en train de jouer au bridge." "Menteur, je t'ai cherché partout et je ne t'ai pas trouvé." "Tu ne vas tout de même pas prétendre que je n'étais pas sur le bateau!"

La méfiance pénètre dans le domaine des transactions entre les hommes.

Un pâtissier va dans un bureau de placement pour engager un vendeur. "Comment le voulez vous? " demande le directeur, "femme, homme, jeune, âgé, débutant, expérimenté?", "Diabétique " , l'interrompt le pâtissier.

Sûrement, le pâtissier trouvera un diabétique, mais ce qui est triste, c'est que ce vendeur ne se soit pas fait soigner par le médecin. Peut-être n'avait-il pas confiance dans les médecins, s'imaginant que souvent ceux-ci poursuivent leur traitement inutilement pour gagner davantage. Quant aux médecins, ils se plaignent des autres; des plombiers, par exemple, estimant que leur visite est plus chère que la leur.

"Mon plombier, disait un médecin, m'a appelé au chevet de sa femme. J'y suis resté près d'une heure et j'ai chargé mon plombier de faire une petite réparation dans ma salle de bains. Cela lui a pris une demi-heure. "Et il concluait: "J'ai demandé 400 francs pour ma visite. Mon plombier m'a présenté une facture de 800 francs. Comment puis-je lui faire confiance?"

Et le cercle vicieux continue. Tous les domaines de l'activité sociale sont imprégnés par la méfiance. Tout le monde est mécontent. Voilà encore un autre problème dont il faut trouver la solution. Et comme nous l'avons dit concernant le problème du mensonge, la solution est donnée par l'expérience du passé qui dit que c'est par la foi religieuse qu'on peut combattre ce mal.

D'ailleurs le mot même " foi " n'évoque-t-il pas l'idée de la confiance Mais les religions du passé ayant perdu leur esprit, leur vitalité, on entend de plus en plus cette objection:

Pourquoi le religion et pourquoi pas la philosophie?

Les enseignements des philosophes tels que Socrate ne créent-ils pas une ambiance de confiance parmi les hommes. Lui-même n'a-t-il pas fourni le meilleur exemple?

Ne lui attribue-t-on pas cette histoire?

Condamné à mort par l'empoisonnement, Socrate ayant pris le poison, fut envahi par l'engourdissement, mais avant de perdre l'usage de la parole dit à Criton: "Je dois un coq à Esculape, voudras-tu payer ma dette?", "La dette sera payée, dit Criton, n'y a-t-il pas autre chose? " Mais Socrate ne répondit pas.

Cette histoire est vraie et les enseignements de Socrate contribuent à créer la confiance entre les hommes, mais on oublie que Socrate a acquis ces qualités après son voyage en Syrie où il a connu la foi judaïque.

Préférer la philosophie à la religion, c'est préférer la lune au soleil en disant que la lune donne la lumière la nuit quand il fait noir et que l'on a besoin de la lumière, tandis que le soleil donne la lumière le jour quand on n'a pas besoin de lumière.

Cette lumière du jour, on la prend pour un fait acquis, oubliant qu'elle est due précisément au soleil. Si donc, il y a des gens d'une moralité irréprochable et qui ne parlent pas de religion, c'est que c'est un fait acquis, grâce à la religion de leurs ancêtres. Comme la lune prend sa lumière au soleil, la philosophie a pris sa lumière à la religion. Et la religion étant en évolution constante, comme tout ce qui vit, c'est le stade actuel de son évolution qu'il faut prendre en considération, ce stade étant la foi bahá'i.

Cette mise au point faite, voyons ce que disent les Écrits bahá'is concernant la confiance.

`Abdu'l-Bahá dit:

"Efforcez-vous d'attirer la confiance de tous les peuples et communautés, même celle de vos ennemis, de façon qu'ils mettent tout leur espoir en vous; si quelqu'un tombe cent mille fois dans l'erreur, qu'il puisse encore se tournez vers vous, espérant que vous avez oublié tous ses péchés, car il ne doit être ni découragé, ni abattu, ni affligé."

Ces paroles se passent de tout commentaire.

Notons cependant qu'en montrant aux gens qu'ils peuvent toujours compter sur nous, par la même occasion, nous manifestons notre confiance en eux et en leur avenir, ce qui contribue dans une grande mesure à leur amélioration morale, étant donné que c'est l'une des caractéristiques de la nature humaine de s'efforcer de ressembler à l'image qu'on se fait d'elle. Plus on dit à un conférencier qu'il est éloquent, plus il s'efforce de le justifier. Plus vous dites à une femme que, pour vous, elle reste toujours belle, plus elle s'efforce de se montrer belle, plus elle prend soin d'elle-même.

Il ne faut cependant pas négliger les avantages matériels de la confiance de notre prochain en nous et de la confiance que nous avons en lui. Peu importe que l'on soit déçu quelquefois, dans l'ensemble on y gagne. Quelqu'un a dit, non sans raison: "Ce que j'ai perdu en faisant confiance aux autres peut se calculer, mais ce que j'ai gagné par le même moyen est inestimable."

Un exemple historique illustre bien cette idée. C'était aux environs de 1900. Un couple en voyage de noces dînait dans un petit restaurant de Paris. Or, voilà qu'au moment de régler l'addition, le jeune mari s'aperçoit qu'on lui a dérobé son portefeuille. Le garçon refuse de le croire et appelle le patron.

Celui-ci apprend que les amoureux ont même égaré leur billet de retour. Non seulement il ne leur demande rien, mais en plus il leur paie le retour à Vienne. "Vous ne regretterez pas votre beau geste, dit le jeune homme, je vous promets de vous rendre célèbres, vous et votre établissement. J'écrirai une opérette où il sera question de votre restaurant. "Le patron sourit. Tout ce qu'il demande c'est son argent. Mais Franz Lehar - car c'était lui - tint sa promesse. Quelques années plus tard, il écrivit " La veuve joyeuse " dont la scène la plus fameuse a pour cadre le café Maxim's qui va devenir par la suite le plus célèbre restaurant du monde.

Et ce n'est qu'un exemple à suivre dans la vie. En conclusion, qu'on fasse confiance aux autres ou bien qu'on se montre digne de confiance, dans les deux cas, on gagne, on gagne aussi bien moralement que matériellement.

Mais il y a une confiance qui est au-delà de toute considération matérielle et qui apporte le véritable bonheur, mais qui demande un effort considérable du point de vue spirituel et qui reste toujours très relatif. C'est la confiance en la Providence, une confiance qui fait qu'en toutes circonstances on s'en remet à Dieu, qui fait que dans les pires souffrances on rend grâces à Dieu, c'est cette confiance qui a fait que Jésus tout en avouant la " faiblesse de la chair " soumise aux atroces douleurs, s'est écrié: "Toutefois que ta volonté se fasse. "C'est cette confiance qui aujourd'hui, pour les bahá'is prend la forme d'un humble effort pour s'en rapprocher dans la mesure de leurs possibilités humaines si modestes, c'est cette confiance qui fait que tous les jours dans leurs prières, ils disent: "Me voici prêt à accomplir ta volonté et ton désir et je ne souhaite rien d'autre que ton plaisir."

C'est cette confiance qui fait qu'on ne regrette pas le passé et que l'on ne s'inquiète pas pour l'avenir, on vit dans le présent ayant constamment à l'esprit cette ancienne sagesse qui dit: "Le moment d'être heureux, c'est maintenant."

"Le lieu d'être heureux, c'est ici." "Celui qui est heureux, c'est toi."


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3.7. Les bienfaits de l'oubli

Deux amis se rencontrent: "Tu as un noeud dans ton mouchoir", remarque l'un. "C'est ma femme qui a fait ce noeud pour que je n'oublie pas de poster sa lettre." "Et tu l'as postée?", "Non, elle a oublié de me la remettre."

Ce n'est pas ce genre d'oubli qui fait l'objet de mon exposé. Ce n'est pas le genre d'oubli qui est très agréable et, en principe, on doit toujours s'efforcer de l'éviter. Il n'y a que les grands savants qui y arrivent difficilement et ceci pour la simple raison qu'ils ne chargent pas leur cerveau par le souvenir de " petites choses", ne pensant qu'uniquement à leurs problèmes. Ils ne retiennent exactement que ce qu'il faut afin de concentrer au maximum leur esprit sur la question qui les préoccupe. Les anecdotes sur cet oubli des grands savants sont nombreuses, je vais vous en raconter une.

Newton avait invité un ami chez lui pour déjeuner.

Il avait dit à la bonne de préparer deux poulets et que la table soit servie pour midi. Arrive l'invité, il voit deux poulets. Il a faim et Newton n'arrive pas. Après avoir attendu une heure, il se met à table et mange non seulement sa part, mais également la part de Newton. Et il s'en va vers deux heures. Newton se rappelle qu'il doit manger. Il quitte son travail, arrive à la maison et se met à table. Mais il ne voit que les os soigneusement nettoyés.

Il réfléchit un instant et se dit: "Que je suis distrait. J'ai oublié que j'avais déjà déjeuné!"

De tels oublis, surtout de la part des savants, ne présentent pas beaucoup d'importance. L'oubli qui est digne d'être étudié c'est l'oubli de ce qui est désagréable. C'est cet oubli qui est un bienfait. A ce point de vue, les enfants nous servent de meilleur exemple.

"Maman, j'aimerais que Charlotte vienne dîner ce soir à la maison, "dit une petite fille à sa mère. "Mais, voyons, tu m'as dit hier que Charlotte t'a insultée et que tu ne l'aimes pas." "Ah oui, mais j'ai oublié, c'était hier. "répond la petite.

La pureté du coeur de l'enfant n'est pas compatible avec le souvenir des choses désagréables.

Et c'est du point de vue de cette pureté du coeur que Jésus demande qu'on ressemble à l'enfant. "Le royaume des cieux est pour ceux qui leur ressemblent." (Matt. 19 /14.)

Dès sa naissance, l'homme possède donc cette qualité merveilleuse d'oublier les choses désagréables, pourquoi l'abandonnera-t-il en grandissant? Heureusement que, même quand il est adulte, son esprit, est plus disposé à retenir les choses agréables que les choses désagréables. Pourquoi ne pas profiter de cette disposition de notre esprit?

Rentrant d'un voyage, l'homme n'oublie-t-il pas les fatigues et les imprévus de ce voyage pour ne se souvenir que des beaux moments qu'il a passés? Remarquons que c'est dans l'intérêt même de l'homme. Car le souvenir d'une offense, par exemple, avec le désir de se venger, porte préjudice à notre santé corporelle, en plus de ses effets néfastes sur notre santé morale.

Et c'est la science qui le démontre. L'homme a donc tout intérêt à l'éviter, c'est-à-dire à oublier toute pensée désagréable. C'est là où il doit appliquer tous ses efforts et s'il lui arrive de le perdre de vue, d'oublier qu'il doit oublier tout ce qui l'ennuie, qu'il s'en souvienne.

L'éminent philosophe allemand Kant avait un domestique, un nommé Lampe qui le servit pendant des années et en qui il avait confiance. Un jour, il s'est aperçu qu'il le volait. Il l'a congédié, mais il lui était difficile de se passer de ses services. Et c'est alors qu'il inscrit dans son journal ces paroles si célèbres: "Me souvenir d'oublier Lampe."

Théoriquement, tout cela paraît bien beau, mais pratiquement comment y parvenir? Voilà le problème. La foi bahá'ie nous en donne la solution, ce que je vais essayer d'expliquer.

Dans les Écrits bahá'is nous lisons cette parole de Dieu: "Oublie tout sauf moi et entre en communion avec mon esprit." (Paroles cachées de Bahá'u'lláh - Maisons d'Éditions bahá'ies - éd. 1943).

Or, l'esprit de Dieu est tout ce qui est essentiellement BON. Jésus n'a-t-il pas dit qu'il n'y a que Dieu qui soit BON? Et l'amour est tout ce qu'il y a de MEILLEUR. Par conséquent, lorsqu'on est tourmenté par un mauvais souvenir, il faut penser à celui qu'on aime (pour les croyants, c'est Dieu à qui on pense en priant) ou à ce qu'on aime. Je m'explique par un exemple. Supposons que je suis sur la route qui me conduit à la demeure de ma bien-aimée et que soudain surgisse un homme qui m'offense.

D'abord, je ne m'arrête pas pour me venger et puis, en continuant ma route, je n'y pense même pas, car c'est le souvenir de l'imminente rencontre avec ma bien-aimée qui me préoccupe. La pensée de l'amour fait oublier tout.

Et, pour appliquer dans la vie courante cette exhortation, `Abdu'l-Bahá nous dit que lorsqu'un mauvais souvenir nous vient à l'esprit, il ne faut pas s'y arrêter pour le réprimer. Plus on s'efforce de le faire, plus on l'aggrave. Il faut tourner le miroir de notre esprit vers autre chose, vers ce qui est agréable pour en avoir l'image dans notre esprit.

C'est comme lorsque vous êtes occupés à faire votre toilette devant votre miroir (vous vous rasez ou vous vous maquillez) et votre enfant se met aussi devant le miroir et commence à faire des grimaces qui vous agacent. Plus vous lui dites de cesser, plus il vous agace. Qu'est-ce que vous faites? Vous tournez le miroir et vous ne voyez plus son image dans le miroir.

Comme je l'ai dit, les croyants " tournent le miroir de leur esprit " par le moyen de la prière, qui avant tout est une question d'expérience personnelle qui permet à chacun d'en ressentir l'effet. Et puis qui dit prière, dit méditation.

Etant donné que les paroles de la prière sont pardon, amour, détachement et jamais vengeance, haine et attachement, rien qu'en répétant sincèrement ces paroles, on se rappelle ce que l'on doit faire, peu importe si d'aucuns l'appellent autosuggestion.

Pour ceux qui s'imaginent n'être pas croyants, le moyen pratique pour " tourner le miroir de leur esprit " c'est de penser à ce qui leur est agréable, au succès qu'ils comptent remporter, à la fortune qu'ils vont gagner, à l'étude qu'ils vont entreprendre.

Tous ces bienfaits de l'oubli passent au second plan quand on pense à cet effet de l'oubli qui contribue au progrès aussi bien dans le domaine de la science que dans le domaine de la religion.

Dans le domaine de la science, c'est l'oubli qui est un facteur de progrès. Si Einstein n'avait pas oublié ce que ses contemporains estimaient comme seul valable (le principe de Newton), il n'aurait jamais découvert sa théorie de la relativité dont les applications nous ont rendu la vie facile et agréable à vivre, d'autant plus agréable quand on s'en tient à observer les lois morales.

Dans le domaine de la religion, l'oubli de ce qu'on entend dire en tant que seule vérité, est la condition essentielle du progrès. Un juif ne peut pas progresser vers la foi chrétienne s'il n'oublie pas ce qu'il entend dire et répéter: Moïse est le dernier prophète, celui qui rompt le Sabbat est un hérétique, etc.

De même aujourd'hui, l'homme ne peut pas progresser vers le stade actuel de l'évolution de la religion (foi bahá'ie) s'il n'oublie des propos tels que:

"Tous portent le péché originel par suite du péché d'Adam. C'est le baptême qui efface le péché. Tout homme non baptisé est rejeté par Dieu, etc."

Pris à la lettre tout cela devrait être oublié si nous voulons faire des progrès dans le domaine de la religion.

Puisqu'on parle de l'oubli, je vous prie d'oublier tant de choses qui manquent à mon exposé.


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3.8. La fatigue, cette ennemie de l'amour

Un médecin disait à un jeune milliardaire par héritage qui se sentait fatigué: "Je vous conseille de trouver une occupation." "Oh! Docteur - proteste-t-il indigné - comment pouvez-vous me demander une chose pareille, à moi qui suis si fatigué!"

"Je le sais bien" répondit le médecin, "alors vous serez fatigué de faire quelque chose, au lieu d'être fatigué de ne rien faire."

Cette histoire nous rappelle qu'il ne faut pas croire, comme on en a l'habitude, que c'est seulement le travail qui pourrait engendrer la fatigue. C'est vrai dans le cas d'une machine. L'homme peut être fatigué pour plusieurs causes dont l'épuisement dû à un travail excessif n'est qu'un seul cas, tandis que l'inaction en est un autre.

De nos jours, la fatigue est une chose tellement répandue que, selon les médecins, si un patient ne s'en plaint pas au cours d'une auscultation on le soupçonne de dissimulation.

Et il y a plusieurs catégories de fatigues Nous allons en étudier quelques-unes.

Notons d'abord qu'il est difficile de trouver la cause précise de la fatigue dans chaque cas, étant donné que l'énergie dont la nature a doté l'homme varie d'un individu à l'autre et d'un jour à l'autre. Le même travail fait un jour à une vitesse incroyable et le lendemain à peine a-t-on commencé qu'on se sent fatigué et paradoxalement cette fatigue ne disparaît pas avec le repos.

Malgré cette multitude de fatigues, on peut dire que les principales catégories de fatigues sont les suivantes: (Sélection du Reader's Digest - mai 1962)

1° La fatigue due à l'action, ou plus exactement à une activité immodérée;

2° La fatigue due à l'inaction;

3° La fatigue due à une maladie organique;

4° La fatigue due à des causes morales.

Dans tous les cas quand on est fatigué, on n'est guère disposé à servir son prochain, à chercher comment lui exprimer sa gratitude, à pardonner à son prochain et, en bref, à manifester tout ce que sont ces signes de l'amour du prochain.

La fatigue devient une ennemie de l'amour. Elle mérite donc d'être étudiée.

Concernant la fatigue due à l'épuisement des forces physiques par une activité excessive, les spécialistes la comparent à une intoxication et ils demandent de surveiller notre ration d'effort comme notre ration de nourriture ou de repos. Ils estiment qu'il ne faut pas dépasser 48 heures de travail par semaine de six jours.

Remarquons que ce n'est pas nouveau, avant que les savants nous en parlent, les religions du passé ont prescrit un jour de repos par semaine.

Quant à la foi bahá'ie, précisons d'abord que son principe de base est la modération dans tous les domaines, Bahá'u'lláh dit qu'aussi bien dans le domaine de la science que dans le domaine de la religion, à partir du moment où l'on dépasse les limites de la modération, les bienfaits de l'un, comme ceux de l'autre, disparaissent. Et comme exemple, il fait des prédictions pour la civilisation occidentale si vantée à son époque. Dépasser les limites de la modération, précise-t-il sera une cause de grands maux, comme elle a été une cause de tant de bien.

Dans la foi bahá'ie, la modération présente une telle importance qu'il y a même des prières par lesquelles on demandes l'assistance divine pour appliquer le principe de la modération en tout.

Ce principe de modération s'applique dans le domaine du travail et du repos.

Pour réduire autant que possible la fatigue engendrée par le travail, la foi bahá'ie recommande de donner à chacun le travail pour lequel il a le plus d'aptitude.

Ce genre de travail, il l'aimera et, par conséquent, en l'effectuant il se fatiguera moins que celui qui n'est pas fait pour ce travail. Ce n'est malheureusement pas le cas aujourd'hui où généralement les considérations financières déterminent le genre du travail qu'on choisit ou qu'on nous donne.

De plus, les lois bahá'ies (la participation aux bénéfices de l'entreprises, par exemple) sont telles qu'en établissant la justice sociale, elles réduisent les heures de travail tout en rémunérant équitablement le travail fourni. Ce qui, une fois de plus, n'est pas le cas de nos jours, où aussi bien les patrons que les ouvriers se plaignent de ce qu'ils travaillent trop et gagnent peu.

L'anecdote suivante est souvent racontée par les patrons.

Un inspecteur du ministère chargé du respect des lois sociales fait un jour irruption chez un petit indépendant employant quelques ouvriers. "On vous soupçonne de payer vos gens au-dessous des taux requis par la loi", accuse l'inspecteur. "Qui employez-vous? Combien les payez-vous?", "Il y a Durand", dit le patron, "le mécanicien qui est payé 200 francs l'heure. Il travaille 40 heures. Et puis, il y a Dupont, il aide Durand. Il gagne 150 francs par heure. Il y a aussi le balayeur qui est payé 80 francs à l'heure. Mais tout cela me paraît vraiment fort raisonnable." "Il n'y a personne d'autre qui travaille chez vous?", "Si, il y a l'idiot. Il gagne, en moyenne 40 francs à l'heure et travaille 72 heures par semaine, sinon plus." "Ah! Ah! dit l'inspecteur. Nous y voilà! Puis-je le voir, lui parler?", "Mais certainement, c'est moi-même!"

Quant au mécontentement des ouvriers, il se manifeste par des grèves qui aggravent de plus en plus la situation économique.

Quand, dans la société bahá'ie de demain, le patron et l'ouvrier deviendront, non seulement des associés (selon la loi de la participation), mais également des amis (suite aux réunions mensuelles sans classe) une telle situation ne pourra pas se créer.

Il y a bien d'autres considérations qui interviennent pour contribuer à l'application du principe de la modération dans le domaine du travail et du repos. Ces considérations devraient faire l'objet d'un exposé particulier.

Concernant le repos, ainsi que la façon même de se reposer selon les enseignements bahá'is n'est pas conforme à la façon dont on prend ses vacances aujourd'hui.

"Monsieur - disait un médecin à son patient - cette année vous ne devez pas partir en vacances, vous devez vous reposer."

1° Le repos bahá'i est plutôt un changement d'activité harmonieusement combinée avec le divertissement. Le modèle en est donné par la façon dont les bahá'ie célèbrent leurs jours fériés où ils doivent cesser toute activité lucrative. En ces jours, les bahá'is, contrairement à l'exode des week-ends si à la mode aujourd'hui, tiennent des réunions générales où les participants, chacun suivant ses talents (en musique, chant) contribuent à la création d'une ambiance de joie et d'allégresse. De plus, on ne profite pour faire une oeuvre de bienfaisance ou inaugurer une institution philanthropique dont, selon les termes mêmes d`Abdu'l-Bahá " la valeur doit rester une source de bénéfice permanent pour tous les peuples."

2° Quant à la fatigue due à l'inaction, la question ne se pose même pas dans la communauté bahá'ie, étant donné que le travail est une obligation pour tous, tous doivent faire oeuvre utile, qu'ils soient riches ou pauvres.

"Ne gaspillez pas votre temps en paresse et en indolence et occupez-vous de ce qui est avantageux pour vous et pour les autres. "dit Bahá'u'lláh.

De plus, selon les enseignements bahá'is, le travail est considéré comme un acte d'adoration de Dieu, autrement dit, le travail équivaut à la prière. Si ne pas faire de prière était inconcevable pour les croyants dans le passé, chez les bahá'is s'abstenir de travailler est aussi inconcevable que de ne pas faire de prières. Ce n'est donc pas l'inaction qui peut créer la fatigue dans la société bahá'ie.

3° Quant à la troisième catégorie de fatigue, fatigue due à la maladie, là encore ce genre de fatigue va diminuer de plus en plus, puisque la plupart des maladies vont disparaître par application des enseignements bahá'is, qui, directement ou indirectement, visent au maintien de la santé corporelle.

Et si, malgré toutes les précautions hygiéniques, on attrape une maladie, pour récupérer la santé, on a le devoir de s'adresser à un médecin habile et ne jamais se faire son propre médecin ou consulter un pharmacien, ce qui est encore le cas de nos jours, où séduit par la publicité ou conseillé par le pharmacien, à la moindre indisposition, on prend un calmant ou un tranquillisant.

Voilà ce que nous lisons dans les Écrits bahá'is:

"Ne négligez pas le traitement médical lorsqu'il s'avère nécessaire, mais abandonnez-le dès que la santé est rétablie. Traitez le mal par la diète de préférence, réduisez l'usage des médicaments et si vous trouvez qu'une herbe simple suffit n'ayez pas recours aux drogues compliquées."

La sagesse de ce commandement devient manifeste, surtout de nos jours quand les statistiques montrent que 15 % des maladies sont dues à l'excès de l'usage des médicaments. La consommation annuelle de l'aspirine, par exemple, en France est de 3 milliards, ce qui fait 60 cachets d'aspirine par Français. Selon un journal humoristique, un pharmacien disait: "L'idéal pour nous, c'est le rhume en novembre, car nous donnons à nos malades des drogues qui font mal à l'estomac. Dès janvier nous soignons les estomacs détraqués, et en février, les patients sont affaiblis et nous leur donnons des stimulants."

4° La quatrième catégorie de fatigue est due aux causes morales.

L'éminent savant Alexis Carrel écrit dans "L'homme, cet inconnu"

"L'envie, la haine, la peur, quand ces sentiments sont habituels, ils peuvent provoquer des changements organiques et de véritables maladies. Les hommes d'affaires, qui ne peuvent pas se défendre contre les soucis, meurent jeunes."

Joltran a attesté le premier qu'un choc moral est capable de produire des modifications marquées du sang... L'instabilité de la vie moderne, l'agitation incessante, le manque de sécurité créent des états de conscience qui entraînent des désordres nerveux et structuraux de l'estomac et de l'intestin. Ces maladies sont presque inconnues dans les groupes sociaux où la vie est demeurée plus simple et moins agitée, où l'inquiétude est moins constante.

En bref la science démontre que des causes essentiellement morales peuvent provoquer des maladies purement physiques et 80 %. des fatigues chroniques proviennent de ces maladies.

Or, l'éducation bahá'ie vise précisément à la suppression de ces causes morales.

L'envie, la haine et la peur dont parle Alexis Carrel sont considérées comme incompatibles avec la foi. Bahá'u'lláh n'admet même pas la moindre trace d'envie.

Quant à la vie bahá'ie, elle est caractérisée par cette simplicité que la science d'aujourd'hui nous recommande.

Concernant la peur, le miracle de la foi c'est qu'elle élimine totalement la peur. Le courage des martyrs de la foi en est la preuve. Dans les maisons des anciens chrétiens, on lisait cet écriteau:

"La peur a frappé à la porte, la foi est allée lui ouvrir, la peur a pris la fuite."

Je crois qu'il est temps que je m'arrête, sinon, vous allez ajouter une cinquième catégorie de fatigue, fatigue due un à exposé trop long.


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3.9. Badi: un martyr qui défie le roi

Les pages de l'histoire bahá'ie sont ensanglantées par le sacrifice de plus de 20000 martyrs, ce qui est l'une des caractéristique de la religion. A ce propos, son fondateur Bahá'u'lláh écrit dans sa lettre au Sháh de Perse:"... Et cette même renonciation à la vie dans le chemin du miséricordieux est un témoignage fidèle et une preuve éloquente de ses revendications. A-t-on jamais vu un homme sensé renoncer à la vie sans preuve, ni raison? Si l'on dit, "ces gens sont fous", c'est assez étrange, car il ne s'agit pas d'une ou de deux personnes, mais, au contraire, d'une multitude originaire de toutes les religions, qui a été enivrée par la source de la connaissance de Dieu et qui, dans le chemin du Bien-Aimé s'est hâtée coeurs et âmes vers le lieu du martyre."

Ici, nous allons parler de l'un de ces martyrs, celui qui était précisément chargé de remettre en main propre la lettre de Bahá'u'lláh au Sháh de Perse.

Il s'agit du jeune Badi. Mirza Bozorg surnommé plus tard Badi (Badi veut dire merveilleux) était le fils d'un riche négociant grossiste en turquoises, lui-même tombé martyr pour la foi après le sacrifice de son fils.

Badi, durant son adolescence, à cause de son attachement excessif à l'islam, non seulement ne voulait pas écouter son père, mais, dans son coeur il lui était même opposé au point que finalement il a estimé plus méritoire aux yeux de Dieu, de ne pas être à la charge d'un père qui, selon lui, avait abandonné la religion de ses ancêtres, religion qu'il croyait être la seule à détenir la vérité. Tout en remplissant scrupuleusement ses devoirs religieux et tout en restant pieux, il refusa le pain de son père et se mit à gagner sa vie d'une manière indépendante, se contentant toujours de peu.

Cette attitude du jeune homme causait beaucoup de soucis à son père, ardent disciple de la foi bahá'ie Plus le père l'invitait à cette foi, plus il se tenait distant de son père. Finalement, ce dernier eut recours à l'un de ses coreligionnaires, ex-prêtre de la foi islamique Mulla Ali Bedjestani (Grand-père de l'auteur) ainsi qu'à d'autres instructeurs de la foi bahá'ie.

Suite à ces contacts et entrevues, étant donné la pureté de son coeur, Badi fut touché par le message bahá'i dès son plus jeune âge, il y adhéra coeur et âme. Son enthousiasme pour la foi fut tellement grand qu'il décida de quitter sa ville natale afin de partir à pied vers Baghdád où, à cette époque, était exilé Bahá'u'lláh. Mais il y arriva quand Bahá'u'lláh, exilé pour la troisième fois et envoyé à Andrinople, avait déjà quitté la ville.

A Baghdád, il est témoin de la persécution terrible des bahá'is, à qui on coupe même l'eau. Alors, il devient leur porteur d'eau. Péniblement, tous les jours, ce fils du richissime négociant en turquoises, l'outre à l'épaule, apporte à ses amis assoiffés de l'eau puisée dans le fleuve (Le Tigre). Un jour, les ennemis s'en aperçoivent, l'attaquent et le blessent grièvement à coups de couteaux et de poignards, croyant diminuer ainsi son enthousiasme dans le service qu'il rend aux amis. Loin de là cependant. Il leur reste tellement attaché que, lorsqu'ils sont exilés à Masul, il les accompagne pour continuer à leur servir de porteur d'eau.

Entre-temps Bahá'u'lláh est exilé pour la quatrième fois et, cette fois, il est incarcéré dans la pire des prisons qui existent à cette époque et où l'on enfermait les condamnés à vie: la prison pestilentielle d'Akká.

Badi décide de quitter Masul pour se rendre à 'Akká, toujours à pied. Il y arrive sans connaître personnes, ni la langue du pays. Très embarrassé, ne sachant que faire, un jour il aperçoit un groupe de Persans qui faisaient leur prière sous la direction d'un homme d'apparence exceptionnelle, beau et noble. Renseignements pris, il apprend qu'il s'agit d`Abdu'l-Bahá, le fils de Bahá'u'lláh, et que le groupe qui l'accompagne sont ses coreligionnaires. Il se voit revenu dans le paradis perdu, rend grâce à Dieu, inscrit sur une feuille de papier des vers qu'il s'empresse de remettre à `Abdu'l-Bahá:

"J'accepte fermement cette foi et me prosterne devant vous Serro'lláh (Titre que Bahá'u'lláh avait donné à son fils `Abdu'l-Bahá et qui signifie "Le mystère de Dieu"). Il n'y a qu'une vérité, c'est Bahá. Lui seul est Dieu, c'est lui mon Alláh."

Ces vers ont touché profondément `Abdu'l-Bahá. Il lui promet de l'amener chez son père.

Notons qu'à cette époque, la lettre que Bahá'u'lláh avait écrite déjà à Andrinople en l'honneur du Sháh de Perse (Nacere'd-Din Shah) n'était toujours pas envoyée à son destinataire. Beaucoup de disciples se présentaient comme volontaires pour la porter au Sháh et la lui remettre en main propre. Mais Bahá'u'lláh leur répondait qu'une telle mission exige une personne absolument détachée et exceptionnellement dévouée et prête à se sacrifier.

Avant que Badi ne soit conduit auprès de Bahá'u'lláh à sa prison, il avait prédit aux amis " Le porteur de la lettre au Sháh est venu."

Accompagné d`Abdu'l-Bahá, Badi se présente à Bahá'u'lláh. Il se prosterne devant lui et l'implore de lui accorder l'honneur d'un service à rendre à la foi.

Bahá'u'lláh, faisant allusion à la lettre au Sháh dit: "A Andrinople afin de dire au sultan le dernier mot, preuve de la véracité de la cause de Dieu, nous avons révélé une Tablette (Terme remplaçant le mot " lettre " afin de symboliser son caractère durable, par opposition au caractère éphémère d'une lettre ordinaire écrite sur du papier. (Dans les temps anciens, sorte de feuille d'ivoire ou de bois, puis de parchemin servant à prendre des notes et que l'on portait sur soi. Enduites de cire, on se servait d'un poinçon pour écrire).

Personne jusqu'ici n'a osé la lui porter, car le porteur de cette Tablette doit la remettre en main propre au Sháh et supporter beaucoup de souffrances et de tortures."

Ceci dit, Bahá'u'lláh ajoute quelques mots sur la nature de ces souffrances et tortures. Badi supplie Bahá'u'lláh de lui accorder cet honneur. Une fois de plus Bahá'u'lláh expose et cette fois plus en détail les terribles épreuves que doit supporter celui qui acceptera cette mission; Badi ne cesse d'implorer Bahá'u'lláh. Alors celui-ci lui expose ce qu'il a à faire en précisant qu'une fois en route, il ne doit parler à personne et ne faire la moindre allusion à sa mission. Et si jamais, dans l'accomplissement de cette mission, si dangereuse, il ressent la moindre faiblesse qu'il s'arrête, qu'il ne fasse pas un pas en avant, laissant à un autre, que Dieu suscitera, le soin de l'accomplir.

C'est à partir de ce moment qu'il reçoit le surnom de Badi. Il se met immédiatement en route. Passons sous silence les souffrances qu'il a endurées avec joie et gratitude durant son voyage où il ne cessait de prier Dieu.

Il arrive à Tihrán où il ne parle à aucun bahá'i.

Quelques jours après son arrivée, il va aux bains pour procéder à l'ablution, afin d'être prêt au sacrifice.

Il s'habille d'une seule robe blanche pour montrer qu'il ne porte pas d'arme et se dirige vers la campagne située au nord-est de la capitale, où le Sháh avait l'habitude de camper en été et passait son temps à la chasse.

Pendant trois jours, sans manger ni boire, il reste sur une petite colline non loin du camp du Sháh. Le quatrième jour, dans l'après-midi, la suite royale arrive et le Sháh, en regardant les alentours avec des jumelles l'aperçoit, croyant qu'il a une pétition. Il le fait venir, puis ordonne qu'on lui demande ce qu'il veut. Badi dit qu'il vient d'Akká, qu'il apporte une lettre qu'il doit personnellement remettre en main propre au Sháh. Celui-ci ordonne qu'on l'amène. A peine en présence du Sháh, après avoir appliqué un dernier baiser à la lettre, il s'écrie:

"O roi ! Je viens de Saba (Ville où selon la tradition résidait la bien-aimée de Salomon et qui symbolise le pays du Bien-Aimé), porteur d'un grand message."

Le ton avec lequel ces paroles ont été prononcées a effrayé le Sháh. Soupçonnant un complot, il ordonne que par des promesses alléchantes, ou par des menaces, on le fasse parler, qu'il trahisse ses complices.

En réponse, Badi leur parle de son expérience personnelle, il leur explique comment il a embrassé la foi, ce qui déçoit complètement les bourreaux.

Alors, le Sháh ordonne qu'on le torture. On apporte le brasero rempli de charbons ardents et l'on se met à porter au rouge les barres de fer, croyant, par ces préparatifs, le faire trembler de peur. Mais Badi réagissait en souriant, sans dire mot. Alors on a commencé à appliquer ces barres portées au rouge sur son dos. L'odeur de la chair brûlée se dégage. Badi reste impassible et ne sent rien, pas la moindre douleur. Il a les yeux fixés sur le sol où il s'amuse avec des herbes. Enragés, les bourreaux appliquent les fers incandescents sur sa poitrine tout en y faisant des zigzags au point que cette fois la vapeur s'en dégage. Badi reste absolument calme, sans manifester la moindre réaction à tant de supplices. Pas un mot ne sort de sa bouche. On en parle au Sháh lequel n'y croyant pas ordonne qu'on prenne une photo de lui et qu'on le mette à mort. Cette photo existe aujourd'hui. On y voit Badi plein de dignité assis entre deux bourreaux et devant lui le brasero et les barres du supplice.

La photo prise, il fut mis fin à ses jours. Il n'avait, à cette époque, que 22 ans! Le cas de Badi n'est pas le cas d'un martyr solitaire pas plus que le cas de son père décapité plus tard seul sur la place publique de Mash-had. Mais la plupart des premiers disciples furent massacrés en famille ou en groupes dans des circonstances incroyablement horribles.

Afin d'en avoir une idée, permettez-moi de citer le témoignage d'un orientaliste européen.

"On vit, on vit alors, on vit ce jour-là, dans les rues et les bazars de Tihrán un spectacle que la population semble devoir n'oublier jamais. Quand la conversation, encore aujourd'hui, se met sur cette matière, on peut juger de l'admiration horrifiée que la foule éprouva et que les années n'ont pas diminuée. On vit s'avancer, entre les bourreaux, des enfants et des femmes, les chairs ouvertes sur tout le corps, avec des mèches flambantes fichées dans ces blessures. On traînait les victimes par des cordes et on les faisait marcher à coups de fouet. Enfants et femmes s'avançaient en chantant un verset qui dit: "En vérité, nous venons de Dieu et nous retournons à Lui. "Leur voix s'élevaient éclatantes au-dessus du silence profond de la foule, car la population de Tihrán n'est ni méchante, ni croyante en l'Islam.

Quand un des suppliciés tombait et qu'on le faisait relever à coups de fouet ou de baïonnettes pour peu que la perte de sang qui ruisselait sur tous ses membres, lui laissât encore un peu de force, il se mettait à danser et criait avec un surcroît d'enthousiasme

"En vérité, nous sommes à Dieu et nous retournons à Lui! "Quelques-uns des enfants expirèrent pendant le trajet. Les bourreaux jetèrent leurs corps sous les pieds de leurs pères et de leurs sueurs, qui marchèrent fièrement dessus et ne leur donnèrent pas un seul regard.

Quand on arriva au lieu d'exécution près de la Porte Neuve, on proposa encore aux victimes la vie contre leur abjuration et ce qui semblait difficile, on trouva même à leur appliquer des moyens d'intimidation plus grands encore. Un bourreau imagina de dire à un père que s'il ne cédait pas, il couperait la gorge à ses enfants sur sa poitrine. C'étaient deux petits garçons dont l'aîné avait 14 ans, et qui, rouges de leur propre sang, les chairs calcinées, écoutaient froidement le dialogue, le père répondit, en se couchant par terre, qu'il était prêt, et l'aîné des enfants, réclamant avec emportement son droit d'aînesse, demanda d'être égorgé le premier. Il n'est pas impossible que le bourreau lui ait refusé cette dernière satisfaction... (Comte de Gobineau, "Les Religions et les Philosophies dans l'Asie centrale " pp. 248 à 250).


Maison d'Éditions Baha'ies - D/1976/1547/1


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4. FASCICULE 4 - L'amour et l'amitié

Hadrat'i Amatu'l-Baha me serait - il permis de vous présenter ce modeste ouvrage comme un symbole de reconnaissance?

PRÉFACE

Ce quatrième fascicule de la série "Le Courage d'Aimer", est une fois de plus, un recueil de quelques conférences que l'auteur a données dans des pays d'expression française.

Comme les trois premiers, il traite des mêmes problèmes et de la solution offerte par la Foi Baha'ie.

Le lecteur qui n'a pas lu les trois premiers fascicules et à qui la Foi Baha'ie paraîtrait comme une lumière pour l'humanité en désarroi, pourrait se demander comment il se fait que, ni la radio, ni la télévision n'en parlent. A quoi les Baha'is répondent que "La Lumière ne fait pas de bruit" titre que j'ai choisi pour ce modeste ouvrage.

Les différents chapitres (en réalité les différentes conférences) étant absolument indépendants les uns des autres, il se peut que le même sujet se répète sous différentes formes, soit dans le présent fascicule, soit dans ceux qui l'ont précédé. Pour cette répétition, je sollicite encore l'indulgence du lecteur.


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4.1. Le monde de demain sera-t-il meilleur?

Un orchestre devait donner un grand concert clans une ville. La veille du concert l'un des trombonistes se dit:

"Au fond, si je n'y vais pas et si je me fais remplacer par mon concierge tout ira aussi bien que si j'y jouais ma partition; puisqu'on est trois, un tromboniste de moins ou de plus, ça ne changera pas grand chose".

Notre musicien prête donc son uniforme et son trombone à son concierge lui demandant d'occuper sa place le lendemain à côté des deux autres trombonistes; il lui explique qu'il doit attendre que l'orchestre commence à jouer, puis lorsqu'arrivera le tour du trio des trombonistes, qu'il se lève comme les deux autres, qu'il embouche son trombone, mais qu'il n'y souffle pas.

Le lendemain, le brave concierge occupe la place réservée au tromboniste absent, et il attend impatiemment le moment où il doit tenir son rôle. L'orchestre commence à jouer, l'auditoire est captivé, et bientôt arrive le tour du trio des trombonistes. Tous les trois se lèvent, embouchent leur trombone, mais rien ne sort. Pourquoi? Parce que tous les trois étaient des concierges.

Si j'ai raconté cette histoire, c'était pour signaler que nous vivons dans un monde où chacun se demande pourquoi ça ne va pas, sans jamais examiner si lui-même a joué son rôle, accusant toujours les autres et "restant les bras croisés en attendant que les autres commencent" comme le dit Einstein.

Et pourtant, plus l'humanité évolue, plus le rôle de l'individu devient manifeste et déterminant. C'est cela qui explique la situation paradoxale du monde d'aujourd'hui. En effet, d'un côté, nous voyons que les préjugés du passé, préjugés de nation, de religion, de race, de classe, commencent à disparaître; le monde s'achemine vers une collaboration de plus en plus étroite, et l'aide aux pays en voie de développement s'accroît d'année en année.
On s'efforce, autant que possible, de résoudre les problèmes à l'échelon mondial, et, dans l'impossibilité, au moins à l'échelon continental: l'Europe unie tend à s'élargir de plus en plus. Si nous avons aujourd'hui l'eurovision et l'eurochèque, nous pouvons espérer que nous aurons la mondovision, le mondochèque etc... Pour la formation des jeunes "les jeux sans frontières" sont de plus en plus encouragés. Les femmes obtiennent de plus en plus de droits et bien d'autres signes encourageants indiquent que l'humanité s'achemine vers sa maturité.

Mais d'autre part, et paradoxalement, la situation, dans son ensemble, s'aggrave de jour en jour. La criminalité augmente dans des proportions effrayantes.

Ainsi il parait qu'à New-York la Police manque d'effectifs et un journal humoristique américain écrit: "Nous avons eu jusqu'à présent l'habitude d'appeler la police au secours, mais il est temps maintenant que nous allions au secours de la police".

Le relâchement moral inquiète de plus en plus les penseurs de notre siècle. Le même journal écrivait: "Autrefois la liberté sexuelle était réprouvée, puis on l'a tolérée, avec le temps on l'a autorisée, aujourd'hui on l'encourage. Au train où vont les choses, elle sera peut-être un jour obligatoire".

Sur le plan économique, il suffit de considérer les chiffres représentant l'inflation et le chômage pour arriver à cette conclusion, qu'il n'y a pas un seul domaine qui échappe à la crise sans précédent que traverse aujourd'hui notre planète.

En résumé, d'un côté il y a cette crise générale qui s'aggrave de jour en jour, et de l'autre, l'acheminement indéniable de l'humanité vers sa maturité. Situation paradoxale... Comment l'expliquer? Et bien, le paradoxe n'est qu'apparent. En effet, la cause de cette crise est que, d'un côté, l'humanité s'achemine vers sa maturité et que, de l'autre, l'individu continue de croire que son rôle reste le même que celui qui lui était attribué durant l'enfance humaine. Il oublie, que plus une machine est perfectionnée, plus la défaillance de l'un des éléments qui la composent paralyse son fonctionnement.

Si dans une caravane un chamelier ne fait pas son devoir, la caravane continuera sa route et arrivera à destination. Mais si, dans un vaisseau spatial, l'un des membres de l'équipage ne remplit pas son rôle, et, ce qui est plus grave, si c'est le cas pour la majorité des membres de l'équipage, la catastrophe peut-elle être évitée? Or précisément l'humanité d'aujourd'hui devient de plus en plus comparable à l'équipage d'un vaisseau spatial où chaque membre a un rôle à jouer. Et c'est parce que la majorité des membres de cet "équipage" ne remplit pas son devoir que la situation devient de plus en plus critique.

Selon les enseignements baha'is, au stade actuel de l'évolution de l'humanité, l'individu doit, plus que jamais, prendre conscience de ce que, non seulement son destin est entre ses mains, mais qu'il a en plus un rôle à jouer pour orienter le destin de l'humanité. Cette prise de conscience implique la confiance de l'homme en lui-même. Et c'est précisément ce qui manque à l'homme d'aujourd'hui. Le manque de confiance, non seulement paralyse les capacités morales de l'homme, mais également ses capacités physiques.

Un savant anglais a fait cette expérience sur trois soldats. Il s'agissait de serrer avec la main droite la poignée d'un appareil indicateur de force physique. Il a constaté que la puissance moyenne de leur étreinte était de 45 kgs; mais une fois qu'il a mis ces soldats en état d'hypnose, les persuadant de leur faiblesse, la puissance d'étreinte s'est réduite à 15 kgs.

C'est donc le manque de confiance qui a amputé, de ses deux tiers, leur force physique.

Mais ce n'est pas la force physique qui nous intéresse pour le moment. C'est la force morale, cette force qui nous manque avant toute autre chose, et dont l'absence est la cause de notre désespoir.

Une revue chrétienne écrit:

"Le désespoir s'insinue en nous et accable les meilleurs d'entre nous. Toutes nos espérances s'écroulent. Nous sommes engagés dans une voie de destruction, et le péril approche. Il faudrait une force extraordinaire pour nous sortir de cet état de marasme où nous stagnons à présent".

Cette force extraordinaire, selon une expérience longue de 6000 années a toujours été la foi religieuse. Les pages de l'histoire abondent en témoignages illustrant cette vérité; à titre d'exemple, permettez-moi d'en citer un, qui est relativement récent.

Au début de notre siècle vivait à Londres un jeune et élégant Indien. Toujours impeccablement habillé, grand amateur de danse, il jouissait d'un grand succès dans tous les milieux aristocratiques. Et puis, un jour, il s'interrogea sur les valeurs de l'existence, valeurs qu'il ne trouvait pas dans les plaisirs des sens car, se disait-il, les animaux sont sur ce point bien plus heureux que les hommes, étant donné que leurs besoins, comme le logement, le vêtement, la nourriture, sont satisfaits sans grand peine et en tout cas bien plus facilement que les besoins des hommes.

Et ce jeune homme arriva à cette conclusion que la vraie valeur de l'existence est dans le service à rendre à son prochain, à sa famille, à son pays et à l'humanité toute entière; que cette valeur réside dans la défense des droits des opprimés, dans le courage, et en bref, dans toutes ces vertus que l'homme arrive à acquérir grâce à la foi religieuse. La vocation religieuse s'éveilla donc en lui. Confiant en sa force morale, il prit l'engagement de prendre entre ses mains son propre destin et se jura d'apporter sa contribution à l'amélioration du sort de son pays, qui à l'époque se trouvait sous la domination anglaise.

Ce jeune homme à la mode, ce gentleman qui subit une transformation si spontanée c'était Gandhi, le héros de l'indépendance de l'Inde.

Indiscutablement, tout le monde ne peut être Gandhi. Mais n'oublions pas que tout est relatif et que la possibilité de faire l'expérience de cette mutation s'offre à tous sans exiger des capacités exceptionnelles. Ces capacités exceptionnelles sont précisément fonction de la profondeur de cette mutation. L'apôtre Pierre avait une mémoire si faible qu'il partageait le produit de sa pêche en sept parts afin de pouvoir se rappeler, lorsqu'il arrivait à la septième, que c'était le jour du Sabbat. Cet homme grâce à sa foi changea le monde de son époque.

Puisque nous parlons de la foi chrétienne nous sommes en droit de nous demander si cette foi ne suffirait pas pour changer le monde d'aujourd'hui.

Question que se posent également les hindouistes, dont la doctrine de l'amour universel est identique à celle du Christ. A ces questions les baha'is répondent en disant qu'au fond il s'agit toujours de la même foi, mais qui se renouvelle, tout en évoluant, pour satisfaire aux besoins d'une humanité en constante évolution; et chaque fois que cette foi religieuse entre dans un stade nouveau, autrement dit, chaque fois que prend naissance une nouvelle religion, le phénomène s'accompagne d'un certain nombre de signes qui sont ses caractéristiques distinctives. Parmi ces signes nous en citons quelques-uns:

1° - Le fondateur est un Homme qui, bien qu'étant peu instruit, révèle anticipativement des principes et des lois qui régissent l'évolution de l'humanité.

2° - Sa cause triomphe sans recours aux moyens matériels (force militaire, puissance de l'argent, promesse d'avantages matériels etc. ...)

3°- Les gens de toute catégorie (riches et pauvres) renoncent à leur vie plutôt que de rejeter sa cause, devenant ainsi des martyrs pour leur foi.

4°- La nouvelle cause arrive magistralement à unir les peuples. Alors que tous les autres moyens destinés à unir échouent.

Ce ne sont là que quelques signes parmi bien d'autres qui caractérisent chaque stade nouveau de l'évolution religieuse, autrement dit, qui caractérisent une nouvelle religion.

Or la naissance de la foi baha'ie - stade actuel de l'évolution religieuse - est caractérisée par tous ces signes, et c'est la raison pour laquelle les savants matérialistes l'identifient aux "phénomènes chrétien, islamique etc..."

En effet:

1°- Le fondateur de la foi baha'ie, bien que n'ayant pas fréquenté d'école, a révélé, il y a plus de 100 ans, des principes et des lois qui, à l'époque, étaient considérés comme une utopie ou un défi mais qui, aujourd'hui, sont l'esprit même de notre époque.

2°- Bien que ne demandant à ses adeptes que le sacrifice de leurs biens et de leur vie, interdisant le moindre recours à la violence, ne disposant d'aucune ressource financière, et persécuté à outrance par les autorités ecclésiastiques et civiles, elle a triomphé au point qu'actuellement ses institutions sont solidement établies dans presque tous les pays, territoires indépendants et îles.

3°- Le nombre de ses martyrs d'origines religieuses différentes s'élève à plus de 20000.

4°- Elle a uni en son sein des gens de toute race, classe, religion, opinion et nation, réalité attestée par la presse impartiale du monde entier.

Ceci dit, voyons ce que proposent les Écrits baha'is pour changer le monde. Naturellement ils contiennent des lois et des principes complètement nouveaux et qui sont destinés à créer un monde nouveau. Mais ce n'est pas l'exposé de ces lois et principes qui fait l'objet de ma conférence. Laissons cela pour une autre fois et mentionnons ce point capital, sur lequel insistent les Écrits baha'is: c'est qu'il n'y a qu'une seule chose qui peut changer le monde, c'est l'EXEMPLE.

Mais en disant exemple nous n'entendons pas seulement l'exemple sur le plan individuel, mais également sur le plan collectif; et c'est cela qui est nouveau dans la foi baha'ie. En effet l'exemple individuel, nous l'avons eu dans le passé et nous l'avons aujourd'hui, aussi bien parmi les croyants, que parmi ceux qui se disent incroyants. Et malgré cela la situation ne change pas, ce qui prouve que cela ne suffit pas. L'humanité a besoin de l'exemple, du modèle d'une communauté mondiale composée de gens d'origines religieuse, nationale, raciale différentes, mais étroitement unis: un idéal pour l'avenir. Qui dit idéal dit organisation. Car un idéal sans organisation reste un voeu, de même qu'une organisation sans idéal devient une tyrannie.

L'organisation qui a réalisé cet idéal et qui présente au monde un modèle de communauté mondiale unie, c'est l'organisation baha'ie dont je vais maintenant dire un mot.

Selon les enseignements baha'is la foi ne consiste pas seulement à déclarer sa croyance en Dieu et en Son Messager, mais il faut également s'engager à s'intégrer dans la vie communautaire par une participation active aux réunions mensuelles. Grâce à ces réunions, affranchies de tout esprit de classe, on arrive après une année de collaboration, de consultation et d'expériences à discerner ceux qui sont les meilleurs serviteurs de la communauté. Ceux-ci, grâce à des élections par vote secret, pourront ainsi être désignés comme administrateurs de cette communauté. De cette façon les sentiments d'entente et d'unité, que chérit tout membre de la communauté, se trouvent traduits à l'échelon social par la main de ces "serviteurs" devenus "administrateurs" locaux. L'institution groupant ces administrateurs s'appelle Assemblée Spirituelle Locale.

Si nous passons maintenant sur le plan national, nous voyons que ce sont les délégués de chaque communauté qui élisent, parmi les membres de la communauté nationale, les meilleurs "serviteurs" en tant "qu'administrateurs". Une fois de plus, par ce mécanisme, les sentiments d'entente et d'unité qui animent chaque communauté locale se trouvent traduits à l'échelon national et cette fois on obtient un modèle de communauté nationale unie. L'institution groupant ces "administrateurs" nationaux s'appelle Assemblée Spirituelle Nationale. Actuellement ces institutions sont solidement établies et sont reconnues officiellement dans 125 pays.

C'est le même processus qui continue sur le plan mondial; en effet, les membres de ces Assemblées Spirituelles Nationales élisent parmi les résidents baha'is de tous les pays les meilleurs "serviteurs" en tant "qu'administrateurs", et ceux-ci à leur tour traduisent à l'échelon mondial les sentiments d'entente et d'unité animant les différentes communautés nationales. On se trouve ainsi en présence d'une communauté mondiale composée de gens d'origines religieuse et nationale différentes solidement organisée et étroitement unie. L'institution groupant ces administrateurs mondiaux existe actuellement et fonctionne sous le nom de Maison Universelle de justice. On pourrait comparer cette institution à un gouvernement embryonnaire coordonnant les activités de milliers de communautés baha'ies à travers le monde.

C'est ce modèle de communauté harmonieusement unie. fonctionnant à l'échelon local, national et mondial que les baha'is présentent au monde, en tant qu'exemple, sur le plan collectif. Ce qui n'empêche pas que, sur le plan individuel, chaque baha'i s'efforce humblement de fournir l'exemple d'un citoyen du monde au service de l'humanité.

Mais j'entends déjà une première objection:

"Qui dit que cette organisation baha'ie continuera à fonctionner harmonieusement quand l'étendue de ses activités sera bien plus grande que celle qu'elle a aujourd'hui. Un exemple va nous donner la réponse.

Quand on a inventé le train, il était difficile de croire que cette énorme masse puisse avancer sur les rails. Mais on a fait l'expérience à petite échelle, et ayant réussi on en a déduit que, le principe directeur restant le même, l'expérience devait réussir à plus grande échelle, et c'est ce qui s'est justifié dans la pratique.

Il en est de même en ce qui concerne l'expérience baha'ie dont le succès dans l'avenir est garanti sur la base de l'expérience actuelle.

Une deuxième objection qu'on nous fait souvent c'est qu'il faudra beaucoup de temps pour que l'humanité adopte et applique le plan baha'i et que ce processus sera très lent.

A cette objection les baha'is répondent clairement qu'on ne peut pas changer le monde par un coup de baguette magique, que seul Dieu avec Son Plan est en mesure de changer le monde, que tout ce qui vient de Dieu exige beaucoup de temps pour produire son fruit, et que ce processus est toujours lent. juste un exemple. Si nous vivons c'est grâce au soleil, toute notre énergie vient du soleil. Ce sont les rayons du soleil qui une fois assimilés par notre organisme se transforment en énergie. Mais le processus de cette assimilation est très lent . on n'assimile pas les rayons du soleil directement. Un rayon du soleil venant de si loin se pose sur une feuille de canne à sucre. Mystérieusement la plante transforme ce rayon du soleil en sucre. En consommant la canne à sucre on absorbe donc un peu de soleil.

Ce soleil assimilé par les muscles devient énergie. Tout cela ne se fait pas instantanément comme c'est le cas pour un morceau de sucre dont l'ingestion ne produit qu'un effet éphémère: non, car il faut d'abord attendre au moins un an pour que la plante arrive au stade de la maturation où elle pourra enfin transformer le rayon de soleil en sucre. Cela, c'est l'oeuvre de Dieu.

Il en est de même en ce qui concerne la transformation du monde. Là encore c'est le Plan de Dieu qui intervient et le processus est lent. Il faut avoir beaucoup de patience. La patience vient à bout de tout.

Puisqu'on parle de patience, permettez-moi de finir mon exposé par une anecdote qui montre comment la patience garantit le triomphe.

Cette anecdote, on la racontait pendant la dernière guerre.

Réunis au bord d'un étang Churchill, Hitler et Mussolini décident de régler leur différend en faisant un pari afin de savoir qui va gagner la guerre. Le premier qui attrapera l'un des poissons de l'étang, sans employer les moyens utilisés pour la pêche, aura gagné la guerre - propose Churchill. Hitler sort un pistolet et tire plusieurs balles sans atteindre aucun poisson, Mussolini se débarrasse de son uniforme et se jette dans l'étang. Il essaie d'attraper un poisson, mais celui-ci lui glisse dans les mains. Epuisé il revient sur la berge. Churchill prend un verre, le plonge dans l'étang, jette l'eau qu'il contient par dessus son épaule, Puis il recommence son expérience et la continue avec persévérance.

"Que faites-vous?" - lui demandent Hitler et Mussolini "Patience" - dit Churchill. "Je viderai tout l'étang et j'attraperai tous les poissons. Çà sera long mais nous gagnerons la guerre".


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4.2. Votre meilleur ami?

Un riche banquier invite ses amis à dîner. Parmi ces amis un médecin et un avocat. Pendant tout le repas le banquier qui a placé le médecin à sa droite, ne cesse de l'interroger sur la façon de soigner ses divers malaises. A la fin du dîner le médecin se penche vers l'avocat et lui dit:

- A votre avis dois-je faire parvenir à notre ami le montant de mes honoraires?

- je vous conseille de le faire sans hésiter - répond l'avocat.

Et le lendemain le médecin reçoit chez lui la note de l'avocat.

Bien que ce ne soit qu'une anecdote, il faut reconnaître que de tels "amis" existent de nos jours, mais ce n'est pas de l'un de ces "amis" que je vais parler ce soir. je vais parler d'un ami qui est véritablement un ami et le meilleur de tous; il existe pour chaque être humain, à la condition de le chercher.

"Cherchez et vous trouverez" disent les Écritures.

Et une fois découvert, cet ami nous viendra en aide en toutes circonstances pourvu qu'on le lui demande.

"Demandez et l'on vous donnera" lisons-nous encore dans les Écritures.

Du point de vue de la recherche on peut distinguer trois catégories de gens.

1°- Ceux qui cherchent et qui trouvent.

2°- Ceux qui ne cherchent pas et qui attendent que cet ami tombe du ciel.

3° - Ceux qui accusent le ciel, croyant qu'ils sont nés sous une mauvaise étoile.

Concernant ces deux dernières catégories il faut dire que les amis ne nous tombent jamais du ciel, et qu'il faut les découvrir et que surtout personne n est né sous une mauvaise étoile; il y a seulement des gens qui regardent mal le ciel.

Quant à la première catégorie, on se demande ce qu'ils ont de plus que les autres pour arriver ainsi à découvrir facilement ce "meilleur ami", et, par conséquent, à être si, heureux dans la vie. La réponse est qu'ils ont la FOI. Et au fond, le mystère de la FOI c'est la recherche de ce véritable, de ce meilleur ami.

La première leçon qu'on tire de la FOI c'est que grâce à elle on arrive à distinguer l'ami de l'ennemi; cet ennemi rusé se déguise souvent en ami. C'est cet ennemi que les Écritures présentent sous la forme imagée du "serpent" du "démon" et du "Satan". Cet ennemi cherche à tromper tout le monde en commençant par ceux qui ont précisément la mission de nous apprendre à le combattre, j'entends les fondateurs de religions.

Ainsi l'Évangile dit que "Satan" a voulu tenter jésus en lui promettant tout ce qui existe dans le monde; mais que jésus a résisté, mieux encore il l'a chassé partout, le faisant "entrer dans les troupeaux des pourceaux" et le "noyant dans la mer".

Que signifient ces "démons" ces "cochons" ces "noyades"?

Il s'agit d'un langage de paraboles, comme le reconnaît jésus lui-même (jean 16/25), langage imagé qui convenait à l'enfance humaine, mais destiné à être expliqué aujourd'hui quand l'humanité entre dans le stade de la maturité.

En effet l'homme d'aujourd'hui n'est plus l'enfant d'il y a 2000 ans, son esprit est beaucoup plus ouvert, et il lui faut un langage ouvert, langage que jésus s'est engagé à lui tenir au jour Promis.

Cette promesse, Dieu l'a tenue, puisque dans les Écrits baha'is nous trouvons l'explication des paraboles des Écritures du passé. Ainsi, par exemple, le terme "démon" ou "Satan" symbolise la nature matérielle, la nature animale de l'homme; nature qui, étant donné son instinct de conservation, une fois offensée n'est pas capable de pardonner, réagit en se mettant en colère, en se vengeant, reste insensible aux souffrances d'autrui, ne sent que ses propres besoins etc.

Cette colère, cette vengeance, cette indifférence aux souffrances d'autrui, cet égocentrisme auraient semblé naturels si l'homme n'avait pas la capacité de PENSER, capacité dont l'animal est privé, mais que l'homme possède.

En effet pour l'animal c'est tout ce qu'il y a de plus naturel de ne pas sentir les souffrances de son semblable. Un chien ne s'arrête pas à la vue d'un autre chien blessé, et on ne peut rien lui reprocher, car il est privé de la capacité de sentir la douleur de son semblable.

Un animal attaqué réagit en se vengeant. Et c'est naturel, car il n'a pas la faculté de penser qu'il pourrait exister une organisation sociale chargée d'intervenir pour le défendre.

Un animal mal traité se met en colère, et cette colère ne lui coupe pas l'appétit, n'est pas néfaste pour sa santé.

Mais ce n'est pas le cas de l'homme. L'homme a la capacité de sentir les souffrances de son semblable, sentiment appelé compassion. L'homme attaqué ne se venge pas, la pensée qu'il existe une police qui interviendra pour le défendre, le retient de toute action violente. L'homme offensé a la capacité de retenir sa colère, car il sait combien celle-ci est néfaste pour sa santé, au point que, poussée à l'extrême, elle peut être mortelle. L'éminent physiologue John Hunter assistant un jour à un congrès mondial entendit développer une théorie qui lui déplaisait, il se mit alors dans une telle colère que les artères de son coeur se contractèrent si fort qu'il en tomba raide mort.

Tout cela prouve que l'homme n'est pas fait pour se venger, ni se mettre en colère; et précisément la mission des fondateurs des religions est de nous apprendre à combattre la manifestation de ces états diaboliques, de ces caractères "cochons" et de nous aider à noyer ces "cochons"; autrement dit leur mission est de nous apprendre à nous débarrasser de ces vices. C'est ce que les savants matérialistes appellent "s'humaniser" c'est-à-dire devenir HOMME dans le vrai sens du mot. Pour y arriver, tous les moyens sont bons. juste un exemple.
Quand deux parties adverses s'adressaient à Pascal pour qu'il rende justice, il se retirait dans sa chambre pour mettre une ceinture cloutée sous sa chemise. Et durant le jugement si jamais une idée de préférence lui venait à l'esprit il se donnait des coups de coude afin que la douleur provoquée par les clous lui rappelle qu'il devait rester juste, et mériter la confiance que les deux parties avaient mise en lui.

Mais cet état de choses qui fait que l'homme, tout en étant essentiellement bon, peut devenir mauvais, qui fait que possédant des vertus telles que la douceur, le pardon, la justice, il peut également avoir des vices tels que la colère, la vengeance, l'injustice, cet état de choses pourrait créer une confusion dans notre esprit.

Les Écrits baha'is dissipent cette confusion en expliquant que l'homme possède deux natures, une nature qui l'assimile à l'animal (nature matérielle, nature animale) et une nature purement humaine (nature spirituelle).

Par conséquent on peut dire que "s'humaniser" veut dire "se spiritualiser".

Aujourd'hui plus que jamais l'homme doit se rappeler qu'il est HOMME, qu'il a une nature spirituelle qui le distingue de l'animal, et que par conséquent, il ne doit pas s'inspirer des lois qui régissent le monde animal. Pourquoi parler de la loi de la lutte, propre au monde animal, au lieu de la loi de la collaboration ou, mieux encore, de la loi du service. Pourquoi descendre plus bas que l'animal, en ce sens qu'aucun animal ne dévore son semblable, alors qu'avec les armes modernes l'homme tue ses semblables par dizaines, par centaines et par milliers.

C'est triste, infiniment triste, et cette situation ne peut pas durer. Il faut que çà change. Tout le monde parle du changement. Mais rien ne change. Pourquoi? C'est que l'homme s'imagine qu'il n'y peut rien, il croit qu'il est incapable de jouer un rôle pour changer le destin du monde. L'homme a perdu confiance en lui-même. Il faut lui rendre cette confiance, cette foi en lui-même, et en ses semblables. Mais par quel moyen?

Par la foi religieuse, selon l'expérience du passé. Car ce n'est pas la première fois que les hommes sont désespérés. Dans le passé, d'âge en âge, l'humanité a traversé de telles crises de confiance. Et chaque fois c'est la foi religieuse qui l'a sauvée.

Il y a quatre mille ans un poète égyptien commençait son poème en ces termes: - Hélas ! à qui puis-je m'adresser aujourd'hui? Les hommes pacifiques maintenant ont péri. La soi-disant civilisation égyptienne décevait donc de plus en plus ses contemporains. Et finalement elle s'est effondrée pour céder la place à la civilisation fondée sur la foi judaïque qui a rendu foi et confiance en l'homme de son époque.

Bien d'autres exemples existent mais je les passe sous silence pour ne parler que du présent, où d'un côté nous sommes en présence d'une civilisation qui s'effondre, et de l'autre d'une foi religieuse au stade de son évolution, je veux parler de la foi baha'ie qui est en constante progression.

Quelle est l'attitude que la foi baha'ie prescrit à ses adeptes afin qu'ils reprennent confiance en eux-mêmes et d'une manière générale en tout être humain?

Les Écrits baha'is insistent sur l'immensité des possibilités offertes à l'homme pour changer ce monde. Et ceci au point qu'ils comparent l'homme au soleil. Ce qui signifie que si c'est le soleil qui donne la vie au monde de l'existence, il en est de même en ce qui concerne l'homme qui, en principe, est capable d'insuffler la vie à l'humanité toute entière.

Tout baha'i a le devoir d'inspirer à son prochain la confiance en ses capacités. Et dans ce but il traite son prochain comme s'il était ce qu'il devrait être, ce qui contribue à ce que son prochain devienne ce qu'il est capable d'être.

Une telle attitude est sanctionnée par des expériences scientifiques. Dans plusieurs écoles élémentaires on a fait l'expérience suivante. A la rentrée scolaire on a présenté aux nouveaux enseignants les cinq meilleurs élèves de l'année antérieure. Et l'on a constaté que ces cinq "as", à quelques exceptions près, justifièrent les capacités que les nouveaux enseignants avaient soupçonné en eux. Or ces cinq "as" n'étaient pas en réalité les cinq premiers du classement de l'année précédente, mais avaient simplement été pris au hasard.
Ce qui n'empêche que dans l'esprit de leurs nouveaux maîtres ils étaient les meilleurs. On s'occupait d'eux plus que des autres, on mettait plus de confiance en eux. Et faisant ainsi l'objet d'un encouragement permanent, ces élèves, à leur tour, reprenaient de plus en plus confiance en leurs capacités et s'appliquaient à justifier ce qu'on attendait d'eux. C'est dans la nature de tout être humain de s'efforcer de ressembler à la bonne image qu'on se fait de lui. Il est prescrit à tout baha'i de voir en son prochain la meilleure image qu'on puisse se faire: l'image de Dieu. Et c'est la première chose qu'il doit SAVOIR.

Mais SAVOIR ne suffit pas il faut VOULOIR pour AGIR. Comme en toutes choses le succès implique trois conditions:

1° SAVOIR

2° VOULOIR

3° AGIR

Concernant l'étape "VOULOIR" il faut dire que vouloir c'est décider, ce qui n'est pas facile. Quelqu'un a dit non sans raison:

"Les décisions sont comme les anguilles: on les prend aisément. Le diable est de les tenir".

Et il arrive souvent qu'une décision apparemment inopportune peut ouvrir la voie vers le succès, mais on ne peut jamais fonder une réussite sur l'irrésolution. Une fois la décision prise pour accomplir une tâche il ne faut pas la remettre au lendemain, car de cette façon on la rend plus difficile. Il faut donc AGIR. Et c'est l'étape la plus difficile à franchir. Car C'est là qu'on subit des épreuves. Et plus la décision est grave, plus haut on vise, plus difficile est l'épreuve. Comme à l'école, les épreuves universitaires sont bien plus difficiles que les épreuves de l'école élémentaire.
Et la vie de celui qui décide de jouer un rôle dans le changement du destin du monde est comparable à la vie universitaire où l'on doit se tenir prêt à subir des épreuves de plus en plus difficiles. On ne doit pas s'attendre à ce que la vie nous pose des problèmes faciles. Comme cet élève, qui, n'étant pas préparé pour ses épreuves échouait lamentablement à l'interrogation et se plaignait au professeur.

- Mais vous me posez des questions très difficiles.

- Ah, vous voulez une question facile. Eh bien en voilà une: comment allez vous? lui dit son professeur.

Il faut donc, dans la vie, être prêt pour les épreuves. Et être prêt pour les épreuves, cela ne veut pas dire rester apathique devant les épreuves.

L'apathie devant les épreuves ne signifie nullement la réussite. Bien au contraire, c'est le recul, car l'apathie paralyse la volonté, cette volonté qu'on a acquise durant la deuxième étape. Les grands hommes, loin de rester apathiques devant les épreuves, en profitaient pour progresser. La femme de Graham Bel était sourde. Et il l'adorait. Loin de rester apathique devant cette épreuve qui l'empêchait de parler avec sa bien aimée, il décida de trouver un moyen de communiquer avec elle. Il eut recours à des signes faits avec les mains et les doigts.
Il perfectionna cette méthode par des pressions conventionnelles des doigts, pressions plus ou moins longues et interrompues à intervalles réguliers. Non seulement il se faisait comprendre par elle, mais il fut amené à penser aux vibrations produites par la voix et à la reproduction de ces vibrations, ce qui l'amena finalement à la découverte du téléphone.

Edison, à son tour, était soumis à une autre épreuve. Il souffrait lui-même d'une infirmité: il entendait très mal. On pouvait l'opérer mais il ne voulait pas se dégager de cette épreuve, disant qu'il en profitait pour ne pas entendre les banalités et mieux concentrer son esprit sur ses découvertes. Et il en a fait plus de deux mille.

J'ai cité deux exemples du domaine de la science. Permettez-moi d'en citer un du domaine de la religion. C'est celui d`Abdu'l-Bahá, Interprète des enseignements baha'is.

Depuis l'âge de 8 ans et pendant presque soixante ans, Il fut constamment soumis aux épreuves les plus terribles qu'on puisse imaginer: exil, emprisonnement, insultes, trahison des frères etc. Et non seulement Il triomphait toujours de ces épreuves, mais Il avait le sentiment inébranlable d'être heureux, bonheur qu'Il manifestait devant tous et dans toutes les circonstances. Il en donnait l'explication en comparant les épreuves à la taille de l'arbre fruitier, précisant que le jardinier ne taille pas les arbres qui ne portent pas de fruit. Si donc - ajoutait Il, Dieu soumet l'homme aux épreuves c'est qu'Il sait que l'homme est capable de porter des fruits.
Précisant davantage Sa pensée Il disait que si l'homme destiné à subir une épreuve échoue "la même épreuve revient sous une forme plus dure jusqu'à ce qu'il soit démontré que la faiblesse précédente est devenue force" ("Star of the West" Vol. VI). C'est comme pour le cerf volant, s'il ne monte pas assez, c'est que le vent n'est pas assez fort. Et plus fort souffle le vent plus haut monte le cerf-volant.

Puisqu'on parle des épreuves inévitables dans la vie, permettez-moi de remarquer qu'il y a une épreuve qu'on n'est pas disposé à subir, c'est lorsqu'un conférencier parle trop. il est donc temps que je finisse mon exposé par une conclusion. Cette conclusion se résume en ceci:

L'homme a deux natures: sa nature matérielle, animale, et sa nature spirituelle. C'est cette nature spirituelle qui est le facteur de sa réussite dans la vie, car c'est elle qui lui permet de SAVOIR, VOULOIR, AGIR. Ces trois composantes de la FOI, cette FOI grâce à laquelle on arrive à surmonter toutes les difficultés, à "déplacer les montagnes", comme le disent les Écritures.

C'est dans cette nature spirituelle qu'il faut voir l'HOMME dans le vrai sens de ce mot, c'est dans cette nature spirituelle qu'il faut voir son meilleur ami. D'où la réponse à notre point d'interrogation du début. Votre meilleur ami c'est VOUS. Et c'est avec la foi en ce meilleur ami que vous pouvez changer le monde d'aujourd'hui.


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4.3. Une nouvelle vie n'est pas utopie

Il n'y a pas longtemps, pendant les grèves générales en France, deux speakers de la télévision échangeaient ces propos:

- Pour les Français - demandait l'un -"quelle est la faculté la plus importante"?

- Difficile à dire - répondait l'autre - la Faculté de Médecine, la Faculté des Sciences?

- Non, mon ami, c'est la faculté d'ADAPTATION. Regarde comment le Français s'est adapté à tout. Pas de courrier depuis plus d'un mois, pas de journal, pas de mandat à la fin du mois... Ce n'était pas ainsi au bon vieux temps. Aujourd'hui le Français s'adapte à toutes les circonstances.

A vrai dire il ne s'agit pas des Français seulement, cela s'applique à tout être humain quel que soit son pays d'origine. Et d'une manière générale la faculté d'adaptation existe chez tout être vivant.

Pasteur a fait l'expérience suivante. Dans une boîte hermétiquement fermée il plaça un oiseau et l'y laissa pendant plusieurs heures. L'animal perdit sa vivacité, mais survécut. Par contre un autre oiseau, introduit dans la même boîte mourut immédiatement.

Et l'on se demande si chez l'homme la faculté d'adaptation n'est pas plus grande. En effet on constate que le hurlement d'une sirène suffit pour tuer un rat enfermé dans une cage, tandis que l'homme s'habitue facilement au vacarme des grandes villes, telles que New-York, Tokyo, Paris etc.

L'homme s'habitue non seulement à la pollution acoustique, mais également à la pollution de l'air. Au quatorzième siècle un homme fut condamné à la potence parce qu'il avait été accusé de polluer l'air en faisant brûler du charbon de bois sur l'emplacement actuel de la ville de Mexico. Or aujourd'hui l'atmosphère de Mexico contient plus de gaz carbonique que celle de New-York.

L'homme s'est adapté à la pollution alimentaire en se nourrissant de tous ces aliments empoisonnés par des conservants, colorants et solvants qu'un animal ne prendrait pas.

On raconte qu'un fabricant d'aliments pour chiens tint un jour une conférence de presse pour présenter sa nouvelle pâtée. Afin de démontrer la qualité extraordinaire de son produit, il fit amener un splendide berger allemand qui était censé devoir se jeter dessus. Hélas ! le chien s'y refusa. Et bien, devinez, ce qui est arrivé. C'est le fabricant lui-même qui le mangea.

Mais tout cela passe au second plan quand on pense à l'adaptation de l'homme à la pollution morale, telle que l'alcoolisme et la criminalité.

Selon les statistiques françaises il y a actuellement en France presque cent morts par jour, suite aux effets directs et indirects de l'alcoolisme. S'il y a une seule condamnation à mort tout le monde en parle, mais ce chiffre de cent condamnations à mort par jour laisse le publie indifférent.

En Amérique le nombre d'attaques à main armée est doublée tous les dix ans, et ceci principalement dans les grandes agglomérations telles que New-York. Comment les habitants de cette ville réagissent-ils? Ils recommandent à leurs femmes de ne pas sortir après le coucher du soleil. Triste adaptation !

Mais pour la faculté d'adaptation comme pour toute faculté il y a des limites, Et les témoins de cette limite ce seront les futures générations.

En effet au taux actuel de l'accroissement de la pollution atmosphérique, selon les savants, d'ici deux siècles l'atmosphère terrestre deviendra irrespirable et tous seront asphyxiés.

De même si le nombre d'attaques à main armée croît au taux actuel, en moins d'un siècle chaque américain sera attaqué.

Et dire que de tous ces maux ce sont les pays hautement "civilisés" qui souffrent le plus. Alors faut-il condamner la civilisation matérielle qui indiscutablement rend la vie matérielle facile et agréable à vivre? Non ce qu'il faut conclure c'est que, à elle seule, la civilisation matérielle ne peut assurer le bonheur de l'homme.

Cette conclusion à laquelle nous arrivons aujourd'hui seulement, nous la trouvons sous forme de prédiction dans les Écrits baha'is révélés il y a presque cent ans, quand la science faisait l'objet de l'adoration de tout le monde. Voilà textuellement ce que nous lisons dans ces Écrits:

"La civilisation matérielle ne peut pas assurer le bonheur de l'humanité, car dans la civilisation matérielle le bien et le mal avancent ensemble".

S'il y a un siècle cela demandait à être prouvé, aujourd'hui c'est une vérité indéniable, car elle est sanctionnée par l'expérience. Et précisément c'est ainsi que les savants définissent le terme vérité:

"La vérité est ce qui est universellement expérimenté".

Plus d'un siècle d'expérience nous montre aujourd'hui que dans la civilisation matérielle le bien et le mal avancent ensemble.

Il faut donc que cette civilisation matérielle due à la science, avance conjointement avec une autre puissance qui lui vienne en aide pour éliminer le mal et ne laisser que le bien.

Cette puissance c'est la religion. Voilà pourquoi Einstein dit que la science nous apprend ce qui EST et la religion nous dit ce qui DOIT ÊTRE (Einstein "Conceptions scientifiques, morales et sociales").

En étudiant les pages de l'histoire on voit que c'est précisément le rôle qu'a joué, la religion à travers les âges, chaque fois que la civilisation matérielle dépourvue de l'assistance de la religion avait créé une situation inextricable. Ce fut le cas pour la civilisation babylonienne, égyptienne, romaine pour ne citer que juste quelques exemples parmi bien d'autres.

Si c'est ainsi, pourquoi alors n'y pense-t-on pas aujourd'hui alors que le monde entier traverse une crise sans précédent? Pour plusieurs raisons. D'abord c'est que, de la religion, il ne reste aujourd'hui qu'un ensemble de rites et de pratiques extérieures, qui non seulement ne peuvent venir en aide à la science pour éliminer ses maux, mais souvent même sont contraires à l'esprit scientifique. Les anciennes religions ont perdu leur esprit. Et puis il y a la question de l'origine de la religion, origine qui est divine. Qu'est-ce que Dieu? se demande-t-on. On voudrait savoir. Et on oublie qu'en dépit du progrès scientifique actuel on ignore encore l'essence de quoi que ce soit ("je n'ai jamais dit que je sais ce que c'est que la matière (Ce que je crois). jean Rostand).

A plus forte raison comment pourrait-on connaître l'essence divine? Et comme on ne peut atteindre cette connaissance, on abandonne l'idée de Dieu et de religion.

Remarquons qu'il serait en principe illogique d'essayer de nous faire une idée de l'essence de Dieu, car toute image qu'on se fait dans son cerveau concernant Dieu Créateur cette image devient notre création à nous.

Comment la création peut-elle devenir le Créateur?

Il faut donc abandonner l'idée de pénétrer l'essence de Dieu et ne pas essayer d'avoir la réponse à la question. "Qu'est-ce que Dieu", mais observer les faits, afin d'arriver à une conclusion juste concernant le rôle de la religion. En procédant ainsi il faut prendre en considération la religion à l'époque où elle gardait encore sa pureté primitive et son esprit. On voit alors comme le dit Einstein (Einstein "Conceptions scientifiques morales et sociales") "à quel point elle, et elle seule, est arrivée à libérer l'homme des chaînes des désirs égoïstes, et à lui inculquer des pensées, des sentiments, clés aspirations supra personnelles".

La méthode que nous avons exposée est la méthode à laquelle ont recours les savants face aux problèmes compliqués de la science même.

L'éminent savant Leprince Ringuet membre de l'Académie de Physique dit ("La science et le bonheur des hommes" Leprince Ringuet.): "J'ai enseigné pendant trente ans la mécanique ondulatoire (quantique) aux élèves de l'École Polytechnique, mais j'avoue, sans honte, que je ne l'ai jamais parfaitement comprise, je m'y suis habitué progressivement, et je pense que la plupart des enseignants sont comme moi".

Et il conclut:

"L'homme de science doit avoir un esprit d'accueil et doit observer et regarder avec intérêt ce qui est NOUVEAU".

Si c'est cela la méthode scientifique, pourquoi ne pas l'appliquer dans le domaine de la religion? Pourquoi ne pas avoir un esprit d'accueil, pourquoi ne pas se demander s'il y a dans le domaine de la religion quelque chose de NOUVEAU? Pourquoi ne pas observer les faits?

Et bien, oui, disent les baha'is, il y a du nouveau dans le domaine de la religion. C'est que la religion, comme la science, évolue, et dans son évolution elle est entrée aujourd'hui dans un stade nouveau correspondant à la maturité de l'humanité. C'est le nouveau stade de l'évolution de la religion, autrement dit c'est cette nouvelle religion qui est connue sous le nom de FOI BAHA'IE dont les adeptes sont partout et dont les institutions fonctionnent dans presque tous les pays, îles et territoires indépendants. Elle est d'ailleurs représentée auprès de l'ONU comme une institution non gouvernementale consultative.

La religion comme la science est une source qui révèle ses mystères au fur et à mesure que l'humanité évolue. Cette révélation se fait, comme en science, par un homme génial.

En science on l'appelle savant, en religion on l'appelle communément prophète. Le mécanisme précis de cette révélation nous échappe. En science cette révélation est souvent la conséquence de visions ou "intuitions" (selon Einstein) ou "lumière" qu'on reçoit (selon Newton). juste quelques exemples:

Bohr, étudiant à la Faculté des Sciences de Copenhague voit en rêve le système solaire avec ses satellites qui tournent à une vitesse vertigineuse. Puis tout se réduit à une échelle infinitésimale. En se réveillant il se demande si là plus petite particule de la matière ne serait pas un système solaire en miniature. L'atome a donc été découvert "dans le lit" du savant et non pas à son bureau, aussi paradoxal que cela puisse paraître.

De même Kekulé trouve la formule du benzol en rêve.

Dans le domaine de la religion, c'est surtout dans la Bible que nous trouvons d'abondantes visions envoyées par Dieu (à Abraham, Jacob, Esaïe, Ezéchiel, Zacharie etc.)

Parmi ces visions les plus remarquables sont celles de Daniel (qui prévoit avec une précision mathématique aussi bien la révélation chrétienne que la révélation baha'ie) (Voir "Les Leçons de St jean d'Acre" d`Abdul-Baha) et celle de St Jean qui prédit les révélations islamique et baha'ie).

De son côté Bahá'u'lláh, le Fondateur de la foi baha'ie dans Son "Épître au Sultan" écrit "ô roi, en vérité, j'étais comme n'importe quel homme endormi sur ma couche. '

Les brises du Très Glorieux passèrent sur moi et m'enseignèrent le savoir de ce qui a été... je n'ai pas lu les livres des hommes et je ne suis pas entré dans les écoles..."

Et d'une manière générale ce que les prophètes nous ont révélé n'est pas le résultat des études, mais le fruit de ce qu'on appelle inspiration. Et tout ce qu'ils ont révélé a toujours été et reste en parfaite harmonie avec la science.

Le dernier en date parmi ces Messagers de Dieu étant Bahá'u'lláh, voyons comment ce qu'Il a écrit il y a plus de cent ans est en accord avec ce que dit la science aujourd'hui.

a) CRÉATION

Selon les Écrits baha'is:

Il est impossible qu'il y ait un effet sans cause, un mouvement sans force motrice. Par conséquent il est impossible qu'il y ait une création sans Créateur, ni Créateur sans création. Le Créateur et la création sont co-éternels, et toute idée exprimant un commencement pour la création est exclue.

Selon la science:

Cause et effet sont indissolublement liés l'un à l'autre. Chaque effet a une cause et chaque cause a un effet. Partant de ce principe la science passe sous silence la question du commencement de l'existence de l'univers.

b) ESSENCE DU CRÉATEUR

Selon les Écrits baha'is:

Il est impossible de connaître l'essence de Dieu.

Selon la science:

Il est impossible de connaître l'essence de quoi que ce soit.

"Nous ne connaissons pas la millionième partie de quoi que ce soit. Nous ne connaissons pas ce qu'est la chaleur, l'électricité etc..." Edison.

"je n'ai jamais dit que je sais ce que c'est que la matière". jean Rostand ("Ce que je crois").

c) ÉVOLUTION

Selon les Écrits baha'is:

Le globe terrestre dans son aspect actuel n'a pas été créé d'un seul coup, mais degré par degré. Il a traversé des phases différentes jusqu'à ce qu'il arrive dans cet état de perfection. L'histoire de la création selon la Genèse qui dit que le monde a été créé il y a 6000 ans n'est que symbolique.

Selon la Science:

La terre, pour citer toujours le même exemple, a été formée graduellement, il y a presque deux billions d'années partant des substances déjà existantes sous forme de gaz, dont le refroidissement a fait apparaître les mondes minéral, végétal...

d) FILIATION DE L'HOMME

Selon les Écrits baha'is:

Au commencement l'homme n'avait pas cette grâce et cette élégance, ce n'est que par échelons qu'il a revêtu cette forme, cette beauté. Ce qui a duré très longtemps mais depuis son début l'espèce était distincte.

Selon la science:

L'homme a traversé dans son évolution différents stades de développement jusqu'à prendre la forme physique actuelle.

e) L'HOMME ET LA NATURE

Selon les Écrits baha'is:

L'homme ne peut pas être une partie de la Nature, car la partie ne peut dépasser en rien le tout, la partie ne peut pas avoir une qualité dont le tout est privé. Or l'homme possède l'imagination, l'intelligence, ce que la Nature ne possède pas. Par conséquent l'homme ne peut pas être une partie de la Nature.

Selon la science:

La partie ne peut dépasser en rien le tout et ne peut posséder une qualité dont le tout est privé. Par exemple un verre d'eau de mer ne peut pas posséder des qualités que la mer elle même ne possède pas.

f) ATTRIBUTS DE L'HOMME

Selon les Écrits baha'is:

L'homme est l'image de Dieu selon ses attributs, attributs tels que l'amour la justice la compassion.

Selon la science:

L'infiniment petit est l'image de l'infiniment grand. Comme l'atome est l'image du système solaire. Une goutte d'eau est sphérique comme le soleil est sphérique.

g) UNITÉ

Selon les Écrits baha'is:

La vie de l'humanité dépend de l'Unité. Et la puissance qui réalise cette unité est la puissance unificatrice de la religion.

Selon la Science:

La vie de l'univers dépend de l'unité. Et cette unité est réalisée par l'affinité atomique. Autrement dit l'attraction entre les particules de l'atome est à la base de l'existence.

h) RÉVÉLATION PROGRESSIVE

Selon les Écrits baha'is:

La vérité se révèle progressivement au fur et à mesure que l'humanité évolue. Aucune révélation ne peut être finale.

Selon la science:

La vérité scientifique se révèle au fur et à mesure que l'humanité évolue. Aucune révélation scientifique ne peut être considérée comme finale.

i) L'INTERDÉPENDANCE ENTRE LA RELIGION ET LA SCIENCE

Selon les Écrits baha'is:

"L'humanité ne peut voler avec une seule aile. Si elle essaie de voler avec l'aile de la religion seulement, elle atterrira dans le bourbier de la superstition, et si elle essaie de voler avec l'aile de la science seulement, elle finira dans la fondrière désolée du matérialisme" ("La Sagesse d`Abdu'l-Bahá")

Selon la science:

"La science sans la religion est boiteuse et la religion sans la science est aveugle".

(Einstein "Les conceptions scientifiques sociales et morales")

J'ai cité, à titre d'exemple, quelques notions fondamentales afin de montrer comment la foi baha'ie s'accorde avec la science. Mais comme le dit Einstein le but de la religion c'est de dire ce qui DOIT ÊTRE, et la foi baha'ie intervient précisément là où la science "boîte" pour utiliser les termes mêmes de l'éminent savant: la foi baha'ie apporte la solution aux problèmes tels que le conflit du Travail et du Capital, la délinquance, la criminalité, la désunion conjugale, la pollution, l'alcoolisme etc.

Le jour où l'on appliquera ces solutions, c'est à dire le jour, où la religion et la science collaboreront intimement, ce jour là la science nous garantira le bien être matériel et la religion nous assurera le bien être moral et ce sera le commencement d'une nouvelle vie qui ne sera plus une utopie.


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4.4. Le paradis c'est la compagnie des amis

Il y a une histoire africaine que je voudrais vous raconter comme introduction à mon exposé.

Un prêtre animiste allait rendre le dernier souffle. Un prêtre catholique vient à son chevet et lui dit:

- Veux-tu que je te baptise, tant qu'il n'est pas trop tard. Tes pêchés seront alors pardonnés et tu iras au paradis.

- Et dans ce paradis - demande l'animiste - verrai-je mes ancêtres et mes amis qui ont déjà quitté ce monde.

- Ah, non, ils n'ont pas été baptisés et ils ne sont donc pas au paradis pour que tu puisses les y retrouver.

- Écoute , reprend alors l'animiste, un paradis où je ne suis pas avec mes amis je n'en veux pas. Laissez-moi aller en enfer pour y être avec mes amis.

Cette histoire est instructive en ce sens, qu'elle nous dit, que là où l'on est avec les vrais amis, c'est notre paradis, qu'il s'agisse de ce monde ou de l'Au-delà.

L'homme n'est pas fait pour rester seul. La solitude c'est la pire des souffrances. Si l'on cherche la joie du paradis il faut donc déjà dans cette vie commencer à se faire des amis. Et c'est tout un art que la religion nous apprend par ses exhortations ou ses prescriptions.

L'objet de mon exposé de ce soir est de vous dire en quelques mots ce qu'en déclarent les enseignements baha'is:

1°- Selon les enseignements baha'is pour se faire des amis il est essentiel qu'on devienne soi-même ami pour les autres. Ce n'est pas uniquement à cause des qualités de notre prochain que nous devons faire de lui un ami, mais plutôt à cause de notre puissance d'affection. Il faut donc que nous cultivions en nous la capacité d'aimer les autres et, par voie de conséquence, gagner leur amitié. "On moissonne ce qu'on cultive". Quand on cultive le blé on moissonne le blé. Quand on cultive l'amitié on moissonne l'amitié. Voilà pourquoi les textes baha'is dans un langage imagé disent: "Dans le jardin de ton coeur ne plante que la fleur de l'amitié".

En principe quand on sème les graines de l'amitié et de l'amour on récolte l'amitié et l'amour. Il y a naturellement aussi les "mauvaises herbes" qui poussent, mais en général c'est principalement l'amitié et l'amour qu'on récolte. Même de son ennemi, on peut se faire un ami, en rendant le bien pour le mal et non pas en se vengeant sous prétexte de lui "donner une leçon". Et c'est lorsqu'on a des amis qu'on jouit vraiment de la vie. Autrement à quoi bon ajouter des années à la vie. Ce qu'il faut c'est ajouter de la vie aux années.

Devenir un ami pour les autres c'est un engagement qu'on prend dans la foi baha'ie. Et la fidélité à cet engagement se manifeste par la participation active aux réunions mensuelles sans classe où l'on s'invite mutuellement, et où, en fraternisant, on se consulte sur les questions d'intérêt général.

2° - On devient ami pour les autres et on se fait de plus en plus d'amis en évitant de chercher les défauts de son prochain, et, par contre, en considérant comme sa mission le devoir de chercher ses qualités.

Abdu'l-Bahá, l'Interprète des enseignements baha'is dit:

"Le défaut le plus répugnant c'est de chercher les défauts des gens. Autant que possible il faut fermer les yeux aux défauts des autres pour ne voir que les qualités.

Et il cite l'exemple de jésus qui un jour avec ses disciples passait devant le cadavre d'un animal. L'un des disciples dit "Quelle puanteur". L'autre ajouta: "Quel aspect horrible". Et chacun à son tour parla de ce qui lui répugnait le plus dans le cadavre en décomposition. Quant à jésus, Il remarque: "Mais regardez donc ses belles dents blanches".

C'est ainsi que les Messagers de Dieu, tels que jésus arrivent à aimer tout le monde. Ils découvrirent les qualités et se sentent attirés par ces qualités et, par voie de conséquence, par les personnes elles-mêmes qui possèdent ces qualités. Autrement, se voir contraint d'être attiré par une personne chez qui tout paraît répugnant c'est faire une compromission avec sa conscience, c'est de l'hypocrisie. Et selon les enseignements baha'is il vaut mieux se montrer franchement infidèle aux yeux de Dieu plutôt que d'être hypocrite.

3° - On devient ami et on se fait des amis lorsque ayant découvert des qualités chez une personne on ne le passe pas sous silence, mais on en parle. De cette façon non seulement on l'attire et on fait de lui un ami, mais en plus on contribue à ce qu'il devienne meilleur. Car psychologiquement l'homme s'efforce toujours de ressembler de plus en plus à la bonne image qu'on se fait de lui. Plus vous dites à un conférencier qu'il est éloquent, plus il travaille pour mieux préparer ses conférences. Par contre si ayant découvert des défauts chez une personne on en parle, on aggrave le mal, car en critiquant, non seulement on suscite en lui la rancune, mais on le met sur la défensive et on le pousse à justifier ce qui West pas justifiable. Et c'est cela qui est grave.

Par exemple si l'on est en présence de quelqu'un qui a beaucoup de qualités, mais qui a la faiblesse de mentir de temps en temps, si on oublie toutes ses qualités sans en souffler mot et que, par contre, on ne cesse de lui reprocher son mensonge on le pousse à motiver son mensonge. Et lorsqu'on prend l'habitude de motiver ses mensonges, on devient de plus en plus menteur. Il y a souvent des cas où les mérites des gens sont tellement manifestes qu'il ne faut plus s'efforcer pour les découvrir. Alors il faut profiter de la moindre occasion pour rendre justice à ses mérites.

En servant un sculpteur de grand talent, un maître d'hôtel renversa, dans son émotion, un verre de vin sur son vêtement. Et tout en réparant les dégâts avec une serviette il lui dit: "Çà ne me serait pas arrivé en servant un moins grand homme". A quoi le sculpteur répondit à son admirateur: "Voilà bien le plus grand compliment que l'on m'ait jamais fait".

Les japonais disent: "Un mot gentil peut réchauffer trois mois d'hiver".

4° - Un quatrième moyen pour se faire des amis c'est l'art d'écouter.

L'homme par sa nature aime enseigner ou renseigner son prochain. je m'explique par un exemple. Vous vous promenez dans la rue. Quelqu'un qui a l'air embarrassé arrête sa voiture et vous demande un renseignement, une adresse que vous connaissez et que vous lui communiquez volontiers. Il vous écoute attentivement et il vous remercie. Le fait que vous l'avez renseigné et qu'il vous a bien écouté vous fait autant de plaisir - si ce n'est pas plus- que son "merci".

Si c'est ainsi il faut écouter son prochain avec une telle attention, qu'il ait l'impression de vous dire des choses que vous ne savez pas. De cette façon vous lui faites plaisir, vous attirez sa sympathie, et c'est le premier pas vers la passerelle de l'amitié.

A ce propos Bahá'u'lláh (Fondateur de la Foi Baha'ie) en parlant d`Abdu'l-Bahá (Le successeur de Bahá'u'lláh) disait: "Regardez avec quelle attention il écoute son interlocuteur, de sorte que celui-ci se dit: "Il est en train de profiter de mes connaissances".

Il faut écouter attentivement notre interlocuteur même s'il dit des "banalités", car il arrive souvent qu'à travers ces "banalités" on découvre ce qui l'intéresse le plus. Et une fois cette découverte faite on oriente la conversation vers le sujet en question pour rendre service à son interlocuteur. je m'explique par un exemple.

Supposez que lors d'une soirée, une dame qui est à côté de vous, sous prétexte de ne pas laisser languir la conversation, commence à vous parler des difficultés de son fils à l'école. Puis sans le moindre enchaînement elle vous dit qu'il parait que demain il ne fera pas beau (propos banal typique), qu'on aura du brouillard toute la journée, ce qui est souvent le cas à Londres.

Puisque vous avez écouté attentivement ses banalités, par son allusion à Londres vous devinez qu'elle y a un certain intérêt. Alors, vous, vous intervenez en disant que vous connaissez bien Londres. Et il arrive qu'elle a l'intention d'y aller, raison pour laquelle elle a parlé de Londres. Elle vous demande tous les renseignements dont elle avait besoin et qui sont toujours si précieux. Vous les lui fournissez. Elle vous en exprime sa reconnaissance. Les liens d'amitié se créent entre vous et elle.
Et dire que tout a commencé par des banalités, mais l'essentiel c'est que vous avez bien écouté ces banalités et d'une manière générale écouter avec sincérité et intérêt son interlocuteur, c'est une certaine façon de manifester son humilité, vertu dont on ne peut pas nier le rôle prépondérant dans l'art de se faire des amis. En effet en écoutant bien attentivement son interlocuteur, ne lui donne t-on pas l'impression qu'il en sait plus que nous, qu'on apprend des choses de lui et que par conséquent, il mérite tout notre respect, autrement dit, on se montre humble à son égard, ce qui ne peut pas manquer d'attirer sa sympathie et son amitié.

Dans l'art d'écouter, ce qu'il faut absolument éviter c'est que la conversation ne prenne la forme d'une compétition où en s'arrêtant soi-disant pour écouter, on donne l'impression de reprendre souffle afin de devancer son interlocuteur. Quand on sait écouter on donne à la conversation l'aspect d'une association plutôt que d'une compétition.

Qui dit association dit collaboration et amitié. Voilà pourquoi on dit que celui qui sait écouter est vite aimé.

Avant de finir avec l'art d'écouter, voyons pourquoi il est si difficile d'arriver à savoir écouter. C'est que la pensée de l'homme est plus rapide que sa parole. L'homme pense 4 fois plus rapidement qu'il ne parle. Ce qui veut dire que si, par exemple notre interlocuteur dit 100 mots, nous avons la capacité de penser sur 400 mots. C'est ce que le mauvais auditeur fait, il prend de la distance avec son interlocuteur et n'entend plus.

On peut comparer le mauvais auditeur au cavalier et son interlocuteur au piéton. Tous les deux n'avancent pas à la même vitesse. Le premier va plus vite, prend de plus en plus de distance par rapport au second, et ne l'entend plus. Pour éviter une telle situation le "cavalier" doit diminuer la course du "cheval" afin d'avancer à la même vitesse que le piéton.

Que cette image se grave dans notre esprit; c'est-à-dire que chaque fois que nous constaterons que nous n'écoutons plus, tirons la bride afin d'empêcher le "cheval" de devancer le piéton, permettant ainsi à notre pensée d'avancer à la même vitesse que la parole de l'interlocuteur.

L'art d'écouter et la capacité d'être discret sont indissolublement liés, ce que nos ancêtres ont résumé par ces mots:

"Si les hommes sont nés avec deux yeux, deux oreilles et une seule langue, c'est qu'ils doivent regarder et écouter deux fois plus qu'ils ne doivent parler.

5° - Un autre moyen pour attirer la sympathie de notre prochain et de faire de lui un ami, c'est d'éviter de le contredire et de se disputer avec lui. Car à partir du moment où dans tout débat on commence à se disputer, ce n'est plus la vérité qu'on défend, mais sa personnalité. D'abord défendre sa personnalité est le contraire de l'humilité, cette vertu si essentielle pour attirer la sympathie de son prochain. Et puis on n'y gagne jamais. Si on perd - on perd. Si on gagne -on perd aussi, car on a perdu la sympathie de notre prochain.

Souvent même les disputes créent une ambiance d'animosité, ce qui est si bien illustré par cette histoire.

- Papa, - demande un petit garçon au dîner - comment est-ce que les guerres éclatent?

Et bien, mon cher - commence le père - mettons que la France se dispute avec l'Angleterre...

- La France ne s'est jamais disputée avec l'Angleterre - interrompt la mère.

- je n'ai jamais dit que la France se disputait avec l'Angleterre - répond le père agacé. J'ai dit "mettons".

- C'est ridicule - dit la mère de mauvaise humeur - Tu vas lui fourrer dans la tête un tas d'idées fausses.

- Evidemment s'il n'écoute que toi, il ne risque pas d'avoir une seule idée dans la tête.

Et l'atmosphère atteignait le point où la vaisselle risque de voler en éclats. Et juste à ce moment on entend la petite voix de l'enfant:

- Merci, papa, merci maman. J'ai compris comment les guerres éclatent.

Ghandi avait apposé cette inscription sur le mur de sa chambre "Quand vous avez raison vous pouvez vous permettre de garder tout votre calme, et quand vous avez tort vous ne pouvez pas vous permettre de le perdre".

Bahá'u'lláh dit:

"Le plus négligent des hommes est celui qui cherche à discuter vainement et à s'ériger en supérieur vis-à-vis de son prochain".

Il nous est recommandé de ne jamais contredire notre interlocuteur et par contre lui dire qu'il a raison, mais si l'on voit la question sous une autre lumière serait-ce faux ou vrai. Une telle attitude est conforme à la raison et à la science. Car si un daltonien persiste à prendre pour noir ce qui est rouge, on ne peut pas lui dire qu'il a tort, car ses yeux sont tels qu'il voit le rouge en noir. Et avec de tels yeux il a raison de prendre le rouge pour le noir.

Une expérience scientifique explique mieux la logique de l'attitude qui nous est recommandée dans nos rapports avec les autres.

Un ingénieur spécialiste en éclairage invite ses amis à dîner. Mais préalablement il arrange l'éclairage artificiel de manière à ce que le lait se présente sous la couleur rouge, le beefsteack sous la couleur grise, et la salade en noir.

Si aucun des invités n'a touché ces mets, peut-on leur dire qu'ils avaient tort?

Non, sous cette lumière ils prenaient le lait pour le sang, et le beefsteack et la salade paraissaient pourris. Mais lorsque l'ingénieur a présenté les mêmes mets sous la lumière naturelle tous changèrent d'idée, se mirent à table et remercièrent leur hôte.

Et bien, chers amis, j'espère avoir présenté ces quelques "mets", je veux dire ces quelques sujets sous une lumière naturelle et que, par conséquent, nous n'allons pas discuter, nous allons rester de bons amis, ce qui nous donnera une image du paradis.


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4.5. Les droits de l'homme à l'ère de l'atome

Quelqu'un a dit non sans raison:

"De nos jours, quand on ne peut pas changer les choses on change les noms".

Un jour voyant tout un groupe d'hommes bien équipés en train d'arracher impitoyablement les arbres d'un pare publie, je leur ai demandé quel est le service qui s'occupe de l'arrachage des arbres, et sans se gêner, ils m'ont répondu:

"Le service des plantations".

Qu'ils arrachent les arbres pour faire des parkings - je me suis dit - c'est leur affaire, mais au moins ils pourraient appeler le service qui en a la mission le service d'arrachage et non pas de plantations. Ne pouvant pas changer les choses on a changé le nom.

Il en est de même en ce qui concerne nos devoirs et nos droits. Comme il est difficile de remplir nos devoirs, on aime parler de nos droits. J'entends déjà l'objection:

- Et votre exposé ne porte-il pas le titre "Les droits de l'homme"?

je n'avais pas le choix, car aujourd'hui nous célébrons la Journée des droits de l'homme, et c'est à cette occasion qu'on m'a demandé de prendre la parole à cette réunion.

Peu importe le titre de mon exposé, vous me permettrez de parler simultanément des devoirs et des droits de l'homme, car ces deux questions sont indissolublement liées l'une à l'autre.

Vous savez sûrement qu'en décembre 1948 l'O.N.U. a approuvé ce qu'on appelle la Déclaration universelle des droits de l'homme, rédigée en une trentaine d'articles. Ce n'est pas nouveau pour vous. Mais ce qui est nouveau, du moins pour la plupart d'entre vous, c'est qu'il y a plus de 100 ans un Prisonnier condamné à perpétuité dans la prison-forteresse de St-Jean d'Acre a écrit aux dirigeants du monde des Lettres, où parmi bien d'autres sujets, Il parle des droits et de devoirs de l'homme, ce que les futurs historiens considéreront comme la charte des droits et des devoirs de l'homme pour l'Ère Nouvelle. C'est cela qui est nouveau et c'est là-dessus que je vais dire quelques mots.

D'abord pour être précis, permettez-moi de mentionner le nom du Prisonnier en question. C'est Bahá'u'lláh, le Fondateur de la Foi baha'ie dont le but est d'accorder à l'homme ses droits, tout en définissant ses devoirs.

Ces droits et ces devoirs de l'homme découlent de plusieurs considérations dont nous allons citer quelques-unes.

1) - L'homme est une créature sociale, par opposition à celles qui ne le sont pas. Un arbre, par exemple n'a pas besoin de vivre ensemble avec les autres arbres; planté dans le désert, il y pousse tout en restant seul.

Ce qui n'est pas le cas de l'homme qui a besoin de vivre en société avec ses semblables. Il y a ce qu'on appelle interdépendance. Cette interdépendance implique des devoirs et des droits pour l'homme. Et comme cette interdépendance se manifeste aujourd'hui beaucoup plus que dans le passé, les devoirs et les droits qui en découlent sont beaucoup plus nombreux que dans le passé.

2) - L'homme dans son évolution entre aujourd'hui dans le stade de sa maturité, ce qui une fois de plus entraîne pour l'homme plus de devoirs et droits que dans le passé quand il traversait le stade de l'enfance.

3) - Les droits et les devoirs de l'homme ne sont pas des valeurs créées par les circonstances et par les hommes mais ce sont les dons de Dieu, et les dons de Dieu ne sont pas limités. En conséquence les devoirs et les droits de l'homme sont bien plus nombreux qu'on ne le pense.

4) - Tous ces droits et devoirs ont pour but la réalisation de l'Unité dans la diversité.

Etudions dans l'ordre chacune de ces quatre considérations.

1) - D'abord le fait que l'homme est un être social implique pour chacun le droit à la possibilité du travail harmonieux avec les autres et le devoir de travailler harmonieusement avec les autres.

Quand ce droit est accordé à chaque membre de la communauté et ce devoir rempli par chacun d'eux, groupés ensemble tous les membres de cette communauté peuvent travailler harmonieusement. L'image d'un tel travail harmonieux est offert par l'organisme humain où chaque membre a la possibilité de jouer son rôle, et le remplit effectivement. Il en résulte que l'organisme se porte bien. Et si un jour l'organisme est malade c'est que, soit cette possibilité de jouer son rôle avec les autres n'est pas offerte à un membre, soit que le devoir de jouer son rôle n'est pas rempli par ce membre.

C'est le cas du monde d'aujourd'hui: il est malade parce que la possibilité de travailler harmonieusement avec les autres n'est pas offerte à l'homme et que l'homme ne sait pas travailler avec ses semblables. Il faut donc une organisation qui offre cette possibilité et où l'on apprend à travailler en groupe.

C'est précisément le cas de l'organisation baha'ie où cette possibilité de travailler harmonieusement avec les autres est offerte à tous les membres de la communauté. Ce travail harmonieux ne vise pas un but technique, ce qui est le rôle de la science et non pas de la religion. Le travail en question vise le bien-être de tous et à tous les points de vue.

Cette possibilité de s'entraîner à travailler harmonieusement avec les autres est offerte avant tout aux réunions mensuelles sans classe qui font partie intégrante de la Foi baha'ie.

Etant donné que les membres de chaque communauté baha'ie s'invitent mutuellement et se rencontrent régulièrement, ils deviennent de plus en plus amis les uns envers les autres, ce qui est la première condition pour arriver à travailler harmonieusement ensemble.

La deuxième condition après l'harmonie et l'amitié sincère entre les membres, condition non moins essentielle, c'est le recours à Dieu par la prière. C'est la raison pour laquelle ces réunions sans classe commencent par des prières. Après les prières on procède à la consultation. Et là, chacun, quel que soit son degré d'instruction ou son rang social, a le droit et le devoir d'exprimer son point de vue, ses idées, les considérant comme un "cadeau" à la communauté. Un cadeau une fois offert n'appartient plus à celui qui l'a offert. par conséquent, que son point de vue soit accepté ou rejeté, il ne doit plus dire mon point de vue. Non, c'est le point de vue de la communauté. Autrement dit, tout en manifestant sa personnalité, il doit s'effacer devant la communauté, comportement qui contribue si puissamment à l'acquisition de la capacité de travailler harmonieusement avec les autres.

Un "cadeau" on ne l'offre pas plusieurs fois. Ce qui veut dire qu'on ne doit pas revenir sur sa proposition, s'obstiner dans son point de vue. Savoir se consulter est tout un art dont les règles sont exposées dans les Écrits baha'is. A titre d'exemple, permettez-moi de citer ce court extrait.

"Ils doivent exprimer leurs vues avec la plus grande dévotion, la plus grande courtoisie, la plus grande dignité, le plus grand soin, et la plus grande modération. Ils doivent pour tous les cas qui se présentent, tendre à la vérité, et ne pas insister sur leur propre opinion, parce que l'obstination et la persistance dans un point de vue personnel conduirait finalement à la discorde et aux querelles et la vérité resterait cachée. Les membres doivent exprimer leurs propres pensées en toute liberté; il n'est permis en aucun cas de minimiser l'avis d'autrui..." Abdu'l-Bahá.

C'est en procédant de cette façon qu'on s'entraîne en l'art de se consulter, et, par voie de conséquence, à parvenir à travailler harmonieusement sur les problèmes d'intérêt général, ce qui est le droit et le devoir de chaque membre de la communauté.

2) - Concernant les droits et les devoirs de l'homme nous avons dit que la deuxième considération à retenir c'est que l'homme dans son évolution entre aujourd'hui dans le stade de sa maturité.

L'une des implications de ce stade de maturité c'est que l'homme pense indépendamment et cherche personnellement la vérité. Comme le destin du monde dépend de l'union de tous et qu'il n'y a qu'une et seule vérité qui peut unir tout le monde, si chacun la cherche personnellement et indépendamment il arrive à la découvrir, et une fois cette vérité découverte l'union de tous deviendra une réalité.

C'est comme l'ascension vers le sommet d'une montagne. Comme il n'y a qu'un sommet, si chacun continue de monter finalement tous se rejoindront au sommet. Une autre conséquence de la maturité de l'humanité c'est le droit à un travail conforme à sa capacité et utile pour la société et le devoir de faire ce travail consciencieusement. Ce qui fait précisément partie intégrante de la Foi baha'ie, au point qu'elle ne parle pas seulement du droit au travail, mais du devoir de travailler. Car pour un baha'i le travail est obligatoire. De plus, fait dans un esprit de service, le travail équivaut à un acte d'adoration.

Dans un cas comme dans l'autre, c'est un remède contre le mal dont souffre la société d'aujourd'hui. Ne sont-ils pas nombreux ceux qui préfèrent profiter de l'allocation du chômage, et rester inactifs au lieu d'accepter le travail qui leur serait proposé? Ce qui a amené une revue à faire cette remarque:

"Tout le monde voudrait manger à la table du gouvernement, mais rares sont ceux qui acceptent de laver la vaisselle".

Quant à ceux qui font consciencieusement et honnêtement leur travail leur nombre diminue de jour en jour. Seulement on s'efforce de sauver les apparences. Ce qui est si bien illustré par cette histoire.

Un entrepreneur voulait offrir à un fonctionnaire "honnête" une voiture de sport.

- Monsieur, mon honneur ne me permet pas d'accepter un tel cadeau - dit ce dernier.

- je comprends très bien votre point de vue. Mais voici ce que je vous propose. le vous vends cette voiture pour 100 dollars - reprit l'entrepreneur.

- Dans ces conditions j'en achèterai deux - s'empresse de répondre le haut fonctionnaire.

3) - Et nous arrivons à la troisième considération dont découlent les droits et les devoirs de l'homme. C'est que ces droits et ces devoirs ne sont pas les dons de la société ou les valeurs morales créées par les circonstances, mais que ce sont les dons de Dieu.

Ainsi, par exemple, le droit à la vie, à la nourriture, à la santé, au logement, à la libre circulation etc. sont les dons de Dieu à l'homme, aussi bien qu'à l'animal. Ne pourrait-on pas dire qu'en réalité les animaux jouissent de ces droits plus que les hommes. Un oiseau, par exemple, ne se nourrit-il pas sans peine dans n'importe quel champ, ne circule-t-il pas là où il veut, sans passeport, ni visa, ne fait-il pas son nid là où il veut, sans avoir besoin de titres, ni de l'assistance d'un entrepreneur ou d'un architecte? Dans le meilleur des cas l'homme ne jouit pas à ce point de tels droits.

Parlons donc plutôt d'un droit qui distingue l'homme de l'animal.

Ce droit c'est le sentiment de la dignité personnelle inhérente à tout être humain. Son importance est vitale aussi bien pour l'individu que pour la société. C'est surtout sur ce droit que la Foi baha'ie insiste, étant donné que ce droit est le fondement même de la JUSTICE, vertu qui, pour un baha'i est le principe directeur de toute activité individuelle ou sociale.

C'est l'acquisition de ce droit qui donne un sens à la vie. En effet selon les Écrits baha'is Il l'homme est une mine riche en gemmes d'une valeur inestimable Il. La recherche de ces gemmes et la prise de conscience de leur valeur, c'est cela qui donne un sens à la vie.

Ce droit, ce besoin du respect de la dignité humaine est inhérent à la nature humaine et sa manifestation, comme pour toute faculté inhérente, implique que certaines conditions soient remplies.

Illustrons cette idée par une image.

La manifestation du pouvoir de croissance inhérent à toute plante implique l'intervention des effets bienfaisants de la terre, des agents atmosphériques (chaleur, humidité) de la pluie, du Soleil, cet ensemble s'appelant environnement.

Il en est de même en ce qui concerne l'épanouissement de la personnalité humaine qui dépend de plusieurs facteurs.

Parmi ces facteurs citons plus particulièrement les suivants:

1. la famille
2. le milieu social
3. la culture
4. la foi religieuse

Ainsi:

1. la famille. Pour l'homme c'est comme la terre pour la plante. C'est non seulement un abri pour l'homme, mais c'est également la première école où il reçoit sa formation. Or le meilleur maître pour la formation de l'enfant c'est l'EXEMPLE donné par ses parents. Dans une famille où les parents ne se respectent pas, ne s'aiment pas, comment voulez-vous qu'un enfant apprenne à respecter, à aimer. Dans une telle famille les parents perdent absolument leur autorité, situation triste qu'on constate de plus en plus de nos jours.

jackie après avoir soupé quitte la famille. Son père lui demande:

- A quelle heure vas-tu rentrer?

- A l'heure où je veux.

- Bon, mais pas plus tard.

Dans une famille, où le père, pour un rien, traite son fils de nigaud, comment voulez-vous que l'enfant apprenne à avoir confiance en ses capacités, ce qui lui sera nécessaire pour son succès dans l'avenir.

Concernant toutes ces considérations nous avons des références explicites dans les Écrits baha'is qui attachent la plus grande importance au foyer familial, en tant que petit monde où l'enfant reçoit sa formation.

2. Après la famille, vient le milieu social, en tant que facteur contribuant à la prise de conscience de la dignité personnelle inhérente.

Or le milieu social actuel ne favorise nullement cet épanouissement de la personnalité, étant donné que l'argent, au lieu de rester serviteur, est devenu maître et, par voie de conséquence l'homme est considéré comme une marchandise appréciée seulement en raison des bénéfices qu'on peut en tirer.

Pour illustrer cette triste situation un journal humoristique racontait cette anecdote: Un commerçant va à la police et déclare qu'un escroc a encaissé, en son nom, toutes les factures impayées.

- Bon, - dit le chef de la police - on va le rechercher et l'arrêter.

Ah, non, je ne veux pas qu'on l'arrête - je vous demande de le trouver pour que je l'embauche.

Le mal est tellement profond que ce n'est pas par un coup de baguette magique qu'on peut l'éliminer afin d'inculquer à l'individu le sentiment de la dignité humaine. Cela exige tout un processus d'entraînement où le rôle du milieu social est prépondérant. Non seulement la lecture des Écrits sacrés baha'is qui comparent l'individu à la "Lumière" au "Soleil", à la "Forteresse, mais pratiquement la participation active aux réunions mensuelles sans classe, à la gestion des affaires sociales avec des droits égaux et sans distinction de classe, de degré d'instruction ou de rang social, tout, absolument tout, aussi bien dans la vie individuelle que sociale, inculque à l'homme le sentiment de sa dignité personnelle inhérente.

De même que la plante pour manifester son pouvoir de croissance a besoin de la chaleur du soleil, l'homme pour son épanouissement, par suite de la prise de conscience de sa dignité personnelle, a besoin de la chaleur, de l'ambiance sociale telle qu'elle est décrite dans les Écrits baha'is.

3. - le troisième facteur qui forme l'environnement nécessaire pour l'épanouissement de l'homme est la culture, c'est-à-dire les arts et la science. Quelques puissantes et immenses que soient les capacités latentes de l'homme, c'est par la science et les arts qu'il peut les développer. L'homme a donc le droit à l'instruction et il a le devoir de s'instruire. Ce droit et ce devoir portent un caractère sacré dans la Foi baha'ie.

L'importance de ce droit et de ce devoir est telle qu'elle pourrait amener la communauté à mettre la main sur la propriété privée (c'est d'ailleurs l'unique cas permis) et c'est lorsque les parents privent leur enfant de l'instruction. Alors les institutions dirigeantes ont le droit de prélever sur les biens des parents ce qui est nécessaire pour instruire leur enfant. Autrement sous aucun prétexte personne n'a le droit de toucher les biens de qui que ce soit honnêtement gagnés.

Le rôle de la culture pour l'homme est comparable au rôle de la pluie pour la plante. Une plante non arrosée sèche, c'est-à-dire ne manifeste pas son pouvoir latent de croissance.

L'homme qui ne reçoit pas d'instruction n'arrive pas à manifester toutes ses capacités latentes.

4. - Et nous arrivons au quatrième facteur qui est nécessaire pour l'épanouissement de la personnalité, c'est la religion.

Qui dit religion dit éducation car les plus grands Éducateurs étaient les Fondateurs des religions. Éducation ne veut pas dire instruction, car l'instruction nous est donnée par la science, et l'éducation - par la religion.

Si la science est comparable à la pluie arrosant cette plante qu'est l'esprit humain, la religion est comparable au soleil, source de toute énergie, source de la vie pour l'homme.

Ce soleil, comme cela a été prédit par les Écritures du passé, se trouve aujourd'hui obscurci par les nuages de la décadence morale, cette décadence, à laquelle, selon Einstein le monde s'est habitué lentement. Malheureusement, cette habitude qui a commencé par être comme des fils d'araignée est devenue aujourd'hui comme un câble. N'est-il pas temps de rompre ce câble. Et pour le rompre connaît-on une autre force que celle de la foi religieuse, puisque d'un côté il y a le témoignage de 6000 années d'expérience et de l'autre la constatation de l'impuissance de la science.

Voilà la question que chacun a le droit et le devoir de se poser en ce jour des Droits de l'Homme.


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4.6. L'aube d'une nouvelle civilisation

Un touriste américain arrive à Paris, prend un taxi et demande au chauffeur de lui montrer les chefs-d'oeuvre de la capitale. Arrivé à Notre Dame, le chauffeur lui dit:

- Il n'y a pas d'église plus majestueuse que celle-là. Et l'on a mis 200 ans pour la finir.

- 200 ans - fait l'Américain. Chez nous la science est tellement avancée qu'on la fait en un an.

Le chauffeur vexé ne dit rien et continue sa route. Ils arrivent devant le Panthéon.

- C'est là - dit-il - que nos grands hommes sont enterrés. C'est moins important que Notre Dame, mais c'est tout de même magistral, et on a mis 25 ans pour le construire.

- 25 ans - s'étonne l'Américain - Chez nous, à l'état actuel de notre science on le fait en moins de 6 mois.

Une fois de plus le chauffeur se sentit vexé, mais ne dit rien. Ils s'approchent de l'Arc de Triomphe. Il accélère.

- Attends - dit l'Américain - C'est bien beau - qu'est ce que c'est?

- je ne sais pas - répond le chauffeur flegmatiquement. Hier il n'y était pas encore. Il faut demander aux gars du quartier.

Cette anecdote nous revient à l'esprit chaque fois que les défenseurs farouches de la science cherchent à nous impressionner, prétendant qu'avec la puissance dont dispose la science on arrivera à bâtir une nouvelle civilisation, à la place de celle que nous avons aujourd'hui et dont les signes d'effondrement sont manifestes.

Fiers d'un siècle d'expérience, ils oublient les milliers d'années d'expérience du passé enregistrées par l'histoire. Ils oublient qu'il y a 4000 ans les Babyloniens fiers de leur science cherchaient à atteindre le ciel par leur Tour de Babel; mais "ils parlèrent différentes langues" c'est-à-dire qu'ils ne parvinrent pas à se comprendre et à s'entendre, et ils échouèrent. Leur civilisation s'effondra pour céder la place à une nouvelle civilisation fondée par Abraham.

Ils oublient qu'il y a 3500 ans, non moins fiers étaient les Egyptiens avec leur civilisation matériellement très avancée mais moralement en décadence. Mais leur civilisation s'effondra pour céder la place à une nouvelle civilisation fondée par Moise.

Ils oublient qu'il y a 2000 ans, non moins prétentieux étaient les Romains avec leurs arts et leur science, mais moralement en décadence. Leur civilisation s'effondra pour céder la place à celle qui a été fondée par jésus; et je m'arrête là pour ne pas allonger la liste des multiples civilisations étudiées par les grands historiens tels que Arnold Toynbee, civilisations qui toutes se sont effondrées pour l'unique raison qu'elles étaient basées sur un seul pilier, celui de la science, négligeant l'autre pilier, celui de la religion.

Et elles furent toutes remplacées par de nouvelles civilisations basées sur deux piliers, la science et la religion.

Alors faut-il aujourd'hui avoir recours à la religion d'Abraham avec ses lois sociales dépassées, ou à celle de Moïse avec sa loi du talion incompatible avec les exigences de notre époque, ou à celle de jésus qui était si efficace pour son temps et qui n'arrive pratiquement pas à résoudre les problèmes si complexes de notre siècle?

Voilà les questions que se posent les penseurs de notre siècle lorsqu'ils étudient l'histoire des civilisations fondées par les Fondateurs des religions au fur et à mesure que l'humanité avance dans son évolution.

L'éminent savant français Leconte de Nous écrit dans "L'homme et sa destinée":

"Les Romains civilisés d'il y a 2000 ans seraient bien étonnés si on leur avait dit que le destin de leur civilisation se trouvait dans la main d'un jeune juif originaire de l'une de leurs colonies lointaines, crucifié à côté de deux brigands..." Et il continue en disant:

"L'homme, qui dans un ou deux mille ans sera tenu pour le plus grand de notre époque existe peut-être aujourd'hui ou vivait-il hier. Nous n'avons aucun moyen de le découvrir soit parce que nous sommes trop intelligents, soit parce que nous ne le sommes pas assez.

Les baha'is déclarent solennellement que cet Homme, ce Fondateur d'une nouvelle civilisation c'est BAHÁ'U'LLÁH, Auteur de la Révélation baha'ie, tout en précisant qu'au point de vue spirituel c'est toujours la même religion qui a été fondée par Abraham, Moïse, jésus, Muhammad... Seulement, étant donné que depuis, l'humanité a évolué pour entrer aujourd'hui dans le stade d'adulte, il a bien fallu que la religion, évolue aussi. Ce stade de l'évolution de la religion, ou cette nouvelle religion c'est la Foi baha'ie dont les enseignements satisfont aux exigences de l'âge adulte de l'humanité. C'est ce que nous allons voir en tenant compte des caractéristiques de l'âge adulte de l'homme.

1 - la première caractéristique de l'âge adulte c'est qu'à cet âge on préfère s'imposer une discipline de bon gré (et on est assez grand pour le faire plutôt que d'obéir sous menace de sanctions; donc autodiscipline plutôt que discipline imposée.

Sur le plan religieux c'est précisément le cas de la foi. Si dans le passé les Écritures parlaient des tourments de l'enfer en cas de désobéissance et d'inobservance des lois, aujourd'hui les Écrits baha'is demandent l'observance des lois par AMOUR, et non pas par peur de l'enfer.

"Observez Mes lois par amour pour Moi".

Voilà ce que Dieu nous demande aujourd'hui.

Voilà ce que nous lisons dans les Écrits baha'is. (Bahá'u'lláh "Les Paroles Cachées").

A titre d'exemple je cite le cas de la colère et du pardon. jésus dit qu'il faut maîtriser sa colère et pardonner, sinon le feu de l'enfer nous attend.

Le prophète Muhammad nous promet les délices du paradis si nous maîtrisons notre colère et pardonnons.

"Le paradis est destiné à ceux qui maîtrisent leur colère et à ceux qui pardonnent aux hommes (leurs offenses) Qur'an 3 "/128.

Bahá'u'lláh dit que si l'on ne maîtrise pas sa colère "le foie brûle" ce qui veut dire que c'est surtout le foie qui souffre des effets néfastes de la colère (Et la médecine d'aujourd'hui le confirme).

Remarquons qu'il ne faut pas prendre à la lettre cette histoire de l'enfer dont parlent jésus et Muhammad. En se mettant en colère, en s'obstinant à ne pas pardonner une offense, et, par conséquent, en "brûlant" son foie et en subissant les souffrances physiques qui en résultent ne se crée-t-on pas déjà un enfer?

En tout cas, ce qui est certain, c'est que l'homme adulte d'aujourd'hui est plus disposé à s'imposer la discipline du pardon sur la base d'une argumentation plutôt que de l'observer par peur d'aller en enfer en cas d'inobservance.

La Foi baha'ie devient donc une sorte d'autodiscipline basée sur l'amour plutôt qu'une discipline s'appuyant sur la menace de l'enfer.

2 - La deuxième caractéristique de l'âge adulte c'est qu'on veut chercher personnellement et indépendamment la discipline qui garantit son bien-être et celui de la communauté. On ne veut plus que ce soit papa qui nous l'impose, ce qui était le cas dans le passé où l'on était encore enfant.

Sur le plan religieux la recherche personnelle et indépendante de la vérité devient donc un principe de base, ce qui est précisément le cas de la Foi baha'ie.

Si sur le plan scientifique on est uni, c'est qu'on applique ce principe de la recherche personnelle, laquelle aboutit à la découverte de la vérité qui reste toujours une et une seule et, par conséquent, met tout le monde d'accord.

Il en sera de même sur le plan religieux si l'on applique le principe de la recherche personnelle, laquelle aboutit à la découverte de la vérité spirituelle qui reste toujours une et une seule et par conséquent, met tout le monde d'accord.

3 - Une troisième caractéristique de l'âge adulte c'est de n'accepter que ce qui satisfait la raison. Sur le plan religieux l'intelligibilité de la foi doit devenir un principe de base de la religion, ce qui est précisément le cas de la Foi baha'ie.

Les Écrits baha'is non seulement prescrivent des lois qui sont en parfait accord avec la raison et la science, mais, en plus, par des interprétations logiques ils rendent intelligibles ce qui dans le passé était admis comme dogme et que la raison ne pouvait pas accepter.

A titre d'exemple je prends la question de la résurrection du Christ. Dans le passé on nous disait que c'était une résurrection corporelle, ce que l'esprit scientifique n'admet pas. Or les Écrits baha'is disent que par le terme résurrection du Christ il faut entendre la résurrection du christianisme, c'est-à-dire la résurrection de la foi chrétienne qui pendant trois jours restait "enterrée" par les apôtres, étant donné leurs troubles, leurs doutes et même le reniement (ce qui fut le cas de St-Pierre). Cette interprétation n'est pas arbitraire, elle est conforme au Nouveau Testament.

En effet dans sa première épître St-Pierre dit que le Christ a été mis à mort quant à la chair mais rendu vivant quant à l'esprit I Pierre 3/18. Or le mot esprit, jésus le définit en tant que Sa parole.

"Et les paroles que je vous ai dites sont esprit et vie" jean 6/63.

Et c'est précisément la parole du Christ qui a été oubliée (enterrée) pendant trois jours, après quoi les apôtres se ressaisirent et se raffermirent dans la foi: le christianisme a ressuscité.

Quant au fait de ne pas prendre le terme Christ selon la chair, C'est St-Paul qui le dit clairement après la crucifixion.

"Si nous avons connu Christ selon la chair, maintenant nous ne le connaissons Plus de cette façon" (II Cor. 5/16).

4 - Une quatrième caractéristique de l'âge adulte c'est qu'on ne veut plus faire des prières sans en comprendre le sens. Si c'était le cas dans le passé quant on récitait les prières dans une langue qu'on ne comprenait pas (l'arabe pour les musulmans, le latin pour les chrétiens) c'est que l'on traversait la période d'enfance, le stade de formation où l'on ne peut pas être exigeant. je m'explique par un exemple. A un enfant on demande de dire suivant le cas "bonjour" "au revoir" ou "s'il vous plaît".
Il obéit sans comprendre la signification exacte de ces mots. Mais devenu grand, il veut comprendre et il comprend que "bonjour" veut dire "je vous souhaite une bonne journée", "au revoir" veut dire "j'aurai le plaisir de vous voir" et que "s'il vous plaît" signifie "si cela vous plaît" "si cela ne vous dérange pas". La formation de l'enfant impliquait d'apprendre à dire ces formules de politesse sans en saisir la signification, mais une fois cette formation reçue et une fois qu'on est adulte on comprend le sens et de tout son coeur on les récite.

C'est le cas de l'homme adulte d'aujourd'hui, face à la prière. Et c'est la raison pour laquelle les Écrits baha'is disent explicitement que la prière est indissolublement liée à la méditation et à l'action. C'est un tricycle dont on ne peut pas enlever une roue.

Ainsi, par exemple, quand nous prions en disant:

"Que Ton règne arrive sur la terre comme au ciel" nous comprenons que le règne de Dieu sur terre veut dire que Dieu soit le roi sur terre, autrement dit qu'on L'écoute quand Il dit "Aimez-vous les uns les autres". Nous continuons notre méditation afin de comprendre ce que signifie "aimer". Nous voyons que la meilleure image de l'amour c'est l'amour maternel qui se manifeste par le fait que le comportement de la mère est tel qu'on a l'impression qu'elle et son enfant ne font qu'UN. C'est donc le sentiment d'unité qui manifeste l'amour. En conclusion, pour aimer, nous devons nous entraîner à l'esprit d'unité. C'est le stade d'action, qui encore une fois fait partie intégrante de la Foi baha'ie, étant donné que l'un des engagements de tout baha'i est l'entraînement à l'esprit d'unité aux réunions mensuelles sans classe.

En résumé la prière doit être accompagnée de méditation et suivie d'action.

Autrement un perroquet peut aussi réciter les paroles de la prière. Est-il croyant?

Qui peut-on tromper rien qu'en parlant de l'amour du prochain, sans le montrer dans la pratique par son comportement et par ses actes.

Voyant dans la main d'un enfant un nid avec des petits oiseaux une femme lui dit:

- Pourquoi as-tu fait cela? Et leur maman de retour vers son nid, combien va t-elle souffrir, n'y trouvant ni le nid, ni les petits.

Et l'enfant après avoir regardé la femme des pieds à la tête, dit - Madame, peut-être leur maman est l'oiseau dont vous portez les plumes sur votre chapeau.

5 - Une cinquième caractéristique de l'âge adulte c'est qu'on ne voit plus la nécessité des rites. Ce qui ne veut pas dire que lorsqu'on était petit on n'en avait pas besoin. Non, les rites sont comme les jouets qui sont nécessaires pour l'enfant. Une poupée est nécessaire pour une fillette afin de la former pour l'avenir quand elle sera maman. Mais une fois qu'elle est adulte et mariée, si vous lui offrez la même poupée, elle va rire. C'est ce que font les jeunes de nos jours quand on leur parle des rites.

6 - Une sixième caractéristique de l'âge adulte c'est qu'on ne veut plus qu'on continue de vous parler en paraboles, on demande un langage ouvert. En effet, quand on est petit, il est normal qu'on nous tienne un langage imagé, en paraboles. On n'est peut-être pas en mesure de comprendre, le langage ouvert. je m'explique par un exemple.

Ne pouvant pas expliquer à un enfant le processus de la naissance on lui tient un langage imagé, en faisant intervenir "les anges" "les cigognes" "les choux" etc.

jojo a 4 ans, il vient d'avoir une petite soeur.

- Hier - lui dit sa mère - un ange a apporté une toute petite soeur pour toi. Veux-tu voir ta petite soeur?

- Oui maman, fais la voir.

Dix ans après, il y a une deuxième naissance, et maman continue de tenir le même langage.

- Hier, - dit-elle à Jojo - un ange a apporté une autre petite soeur pour toi. Veux-tu voir ta petite soeur?

- Non, maman, c'est l'ange que je veux voir.

Et bien, chers amis, l'homme d'aujourd'hui c'est "l'ange" qu'il veut voir. Il lui faut le langage ouvert et non pas les paraboles.

Sur le plan religieux c'est ce que jésus a promis en disant:

"je vous ai dit ces choses en paraboles, le temps viendra où je vous parlerai ouvertement" jean 16/25.

Il y a bien d'autres caractéristiques à l'âge adulte, mais je ne voudrais pas continuer leur longue liste car toutes ces caractéristiques, comme celles que j'ai mentionnées, une fois appliquées à l'état actuel de l'humanité nous amènent aux conclusions analogues à ce que je vais vous résumer sous forme de points d'interrogation.

Ne sommes-nous pas aujourd'hui assez grands pour être en mesure de nous imposer une discipline, au lieu qu'on nous l'impose sous la menace du châtiment?

- Ne sommes nous pas assez grands pour choisir notre chemin nous-mêmes, personnellement et indépendamment?

- Ne sommes-nous pas assez grands pour n'accepter que ce qui est intelligible?

- Ne sommes-nous pas assez grands pour associer nos prières à la méditation et surtout à l'action qui est l'esprit même, le but même de la prière?

- Ne sommes-nous pas assez grands pour ne pas avoir besoin de rites?

- Ne sommes-nous pas assez grands pour qu'on nous tienne un langage ouvert?


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4.7. "La vérité c'est la recherche" (Gandhi)

On raconte qu'Abraham, très hospitalier de nature, attendait en vain pendant toute une semaine que quelqu'un vienne chez lui. Et cette attente le faisait souffrir. Finalement un jour vint un centenaire. On prépare un repas copieux, et toute la famille se met à table. Mais avant de commencer à manger tous récitent leur prière sauf le centenaire. Abraham lui en demande la raison.

- je suis païen - répond le vieillard.

Là-dessus Abraham le met à la porte. Alors il entend une voix venant du ciel:

- Abraham, j'ai nourri cet homme pendant cent ans et tu n'as pas voulu lui donner du pain une seule fois? Et en plus tu l'as mis à la porte.

Que cette histoire soit vraie ou non, elle est en tout cas très instructive, et la raison pour laquelle je l'ai racontée c'était pour dire que l'homme quelle que soit son opinion, religion, nation ou race a non seulement le droit à la vie mais également le droit au respect de sa dignité.

Ces droits (et plus particulièrement le droit au respect de la dignité humaine) ont été négligés dans le passé et malheureusement continuent de l'être encore de nos jours.

Les raisons en sont multiples, mais je crois que la raison principale c'est la difficulté de la recherche et de la méditation personnelle dans le passé et la négligence de cette même méditation et de cette recherche personnelle dans le présent.

En effet, dans le passé il était difficile pour tout le monde de procéder à la recherche indépendante de la vérité et à la méditation personnelle. L'instruction n'était pas généralisée, et pour connaître la vérité, les gens s'adressaient à ceux qui étaient instruits, je veux dire aux chefs religieux, qui constituaient une toute petite minorité. Or pour ces derniers, tous ceux qui étaient en dehors de la religion dont ils se considéraient comme les chefs, n'étaient que des "païens" que des "damnés" "rejetés" par Dieu et par conséquent, par la société.
D'où tant d'injustice au point de vue de l'octroi du droit à la vie et au respect de la dignité humaine, et ce qui était triste c'est que non seulement le peuple imitait les chefs religieux mais que ces derniers aussi s'imitaient les uns les autres, et, en définitive, la vérité restait cachée, situation qui nous rappelle cette histoire:

Dans un petit patelin de province un type demandait tous les matins vers Il heures l'heure exacte au standard téléphonique. Un jour l'employé lui posa cette question:

- Pourquoi diable demandez-vous l'heure tous les jours?

- Ban, voilà, c'est que moi je fais marcher la sirène de l'usine à midi c'est pour cela qu'il me faut l'heure exacte.

- Çà alors - fait l'autre, Et dire que c'est nous qui réglons l'horloge tous les jours d'après votre sirène.

Dans le passé l'imitation était donc à la mode aussi bien dans le peuple que parmi les chefs religieux. Mais la situation doit changer aujourd'hui car l'homme n'est plus un illettré, ni un enfant, comme ce fut son cas dans le passé. Il est instruit et il est adulte. Il doit donc lire, méditer et chercher personnellement et indépendamment.

Si seulement la jungle des préoccupations matérielles le lui permettait; mais non, dans la soi-disant recherche de la vérité, il choisit ce qui lui semble facile et ne demande pas d'efforts de sa part, comme cet enfant qui cherchait quelque chose par terre sous la lumière d'une fenêtre éclairée:

- Qu'est ce que tu cherches? lui demande un passant.

- le rentrais chez moi - répond le gamin - et j'ai perdu ma monnaie.

- Mais pourquoi tu la cherches ici?

- C'est qu'ici devant notre maison il fait plus clair.

Généralement il en est de même en ce qui concerne l'homme d'aujourd'hui, qui ne va pas plus loin que la "maison de ses parents" croyant y trouver la vérité. N'entendons-nous pas souvent dire: "je suis chrétien de naissance", "je suis musulman de naissance" "J'ai hérité des idées socialistes de mon père" etc.

Ce ne doit pas être ainsi, selon les baha'is qui disent que le premier principe qui doit régir notre vie individuelle et sociale c'est la recherche indépendante et la méditation personnelle afin de voir où est la vérité. Il y a beaucoup de choses qui sont tenues pour vérité mais qui non seulement ne le sont pas en réalité, mais encore divisent de plus en plus l'humanité.

L'objet de mon exposé de ce soir c'est de voir dans quelle mesure ces soi-disant "vérités" sont conformes à la raison, à la science et à la religion.

L'une des choses qui, selon les chefs religieux est tenue pour vérité, c'est la division de l'humanité en deux familles: la famille de ceux que Dieu aime et la famille de ceux que Dieu rejette.

Examinons un peu si c'est vrai.

Il est admis par tous les croyants que Dieu est notre Père céleste. Un père divise-t-il sa famille en deux: ceux qu 'il aime et ceux qu'il rejette? Un père rejette-il ne fut-ce qu'un de ses enfants qui ne le croit pas ou qui lui désobéit? Non, il s'occupe peut-être davantage de son éducation. Et ce qui est certain c'est qu'il aime tous ses enfants. Si c'est ainsi, il en est de même en ce qui concerne Dieu, notre Père céleste. Il n'y a donc pas deux familles, l'une qui est aimée par Dieu et l'autre qui est rejetée.

Il n'y a qu'une seule famille, la famille humaine.

Voilà ce que dit la raison. Voilà ce que dit la Foi baha'ie dont précisément l'un des principes sacrés est l'accord de la foi avec la raison.

Ici surgit une question: Et ceux qui se disent incroyants, doivent-ils être considérés comme des "rejetés"? D'abord l'athéisme existe-t-il vraiment? Ne serait-il pas souvent le théisme insatisfait? Peut-on admettre un effet sans cause, une création sans créateur? Une petite histoire nous en donne la réponse.

Un homme qui se disait athée s'adresse à un savant pour lui demander les preuves de l'existence de Dieu. Le savant en question lui dit de repasser dans un mois. Et il se met à faire la maquette du système solaire. La maquette finie, il l'invite dans son atelier.

- Une véritable création artistique, quelle merveille ! s'écrie le soi-disant athée.

- Qui l'a fait?

- Personne - répond le savant - C'est l'oeuvre du hasard.

- Comment l'oeuvre du hasard? Pour une merveille comme celle-là, il a bien fallu que quelqu'un la fasse.

- Selon vous, pour une petite création artistique qu'est cette maquette du système solaire il a bien fallu un créateur, mais pour le vrai système solaire vous n'admettez pas l'existence d'un Créateur? Ce n'est pas sérieux.

Voilà pourquoi l'éminent savant Einstein s'écrie:

"Un contemporain a dit, non sans raison, qu'à notre époque généralement vouée au matérialisme, les savants sérieux sont les seuls hommes qui soient profondément religieux".

A une autre occasion le même savant dit:

"La présence d'une puissance supérieure, illimitée, douée de raison, qui se révèle dans les moindres détails, que nos esprits faibles et fragiles sont capables de percevoir forme mon idée de Dieu".

Nous voyons ainsi que ni la raison, ni la science ne permettent à l'homme de nier l'existence de cette "Puissance" qui régit le monde de cette "Cause Ultime" qui est à l'origine de tout, termes qui ne désignent autre chose que Dieu.

S'il y a donc des gens qui se disent incroyants, ce n'est pas en un tel Dieu qu'ils ne croient pas, c'est lorsqu'ils entendent dire que dans l'hostie il faut voir "essentiellement et réellement" la chair du Christ et que le Christ est Dieu incarné, ce qui, par déduction, présente l'hostie comme l'incarnation de Dieu. Quel illogisme ! La création de l'homme devient créateur.

On peut donc dire que généralement l'athéisme est le théisme insatisfait.

Ajoutons à cela le fait qu'il y a bien des gens qui se disent "incroyants" mais qui par leur esprit de service à l'humanité pourraient être cités comme exemples pour ceux qui de nom, seulement sont croyants.

Pour nous résumer jusqu'ici disons que, si dans le passé la division de l'humanité en deux familles (les élus et les rejetés) était considérée comme une "vérité", aujourd'hui pour les baha'is ce n'est plus une "vérité". La vérité c'est l'unité du genre humain le principe fondamental de la Foi baha'ie.

Une autre considération tenue pour "vérité" par les chefs religieux c'est que non seulement ils divisent l'humanité en deux familles, mais ils appliquent la même division aux adeptes d'une même religion ou des différentes religions, plaçant ainsi les uns dans le camp des "damnés", et les autres dans le camp des "sauvés".

Une fois de plus c'est une recherche impartiale qui nous amène à démentir de telles affirmations tenues pour "vérité". Nous n'avons qu'à nous référer aux textes mêmes des Écrits de la religion ou des religions en question.

Rappelons-nous à ce propos la parabole du bon Samaritain. Un jour un docteur de la loi judaïque demande à jésus:

- Il est dit qu'il faut aimer son prochain. Qui est mon prochain?

Et jésus lui répond par cette parabole:

"Sur le chemin qui menait de Jérusalem à Jéricho gisait un homme, dépouillé, blessé par des brigands. Un prêtre passe, mais il ne s'arrête pas pour lui porter secours.

Un Lévite (c'est-à-dire un Israélite de descendance la plus pure) passe, lui non plus ne s'arrête pas. Arrive un Samaritain qui aperçoit ce malheureux, s'arrête, lui bande les plaies, l'installe sur sa monture, le conduit à l'auberge, et remet à l'hôtelier une petite somme en lui disant: "Prenez soin de lut ce que vous dépenserez en surplus je vous le rembourserai quand je reviendrai".

Lequel de ces trois a été le prochain du malheureux? demande jésus.

En nous rappelant qu'à l'époque de jésus les Samaritains étaient considérés par les juifs comme des damnés, ne voyons nous pas que, par cette parabole, jésus voulait dire aux juifs qu'ils se trompaient, qu'il ne faut pas créer deux camps, celui des enfants de Dieu (les juifs) et celui des damnés par Dieu (les Samaritains).

Quant au Prophète Muhammad, lui aussi tient le même langage que jésus, langage selon lequel Dieu juge Ses Serviteurs selon leurs actes, ne rejetant jamais qui que ce soit sous prétexte qu'il n'a pas accepté Sa dernière volonté.

A titre d'exemple rappelons nous ce verset du Qur'an: "En vérité quant à ceux qui croient et ceux qui sont juifs, Chrétiens ou Sabéens et quiconque croit en Dieu et au jour dernier et qui fait le bien, à ceux-là est réservée leur récompense auprès de leur Seigneur; il n'y aura point de crainte pour eux et ils ne seront point affligés" 11/59.

Et pour ne pas laisser aux musulmans le moindre prétexte qui puisse leur permettre de considérer les Chrétiens comme les gens rejetés par Dieu, il les présente comme les prochains de ses disciples.

"Et tu trouveras certainement que ceux qui sont les plus proches des musulmans, par amour, sont ceux qui disent "Nous sommes chrétiens" (V 85) lisons nous dans le Qur'an.

Le Prophète Muhammad va même plus loin en disant que les adeptes des religions du passé étaient des musulmans.

"Il vous a appelés musulmans précédemment et maintenant" (22/77) lisons nous encore dans le Qur'an. Ce qui déjà nous laisse entendre qu'il faut considérer les différentes religions comme une seule et même religion dont le nom est l'islam" (le mot traduit en français signifiant la soumission à la volonté de Dieu").

Voilà une deuxième conclusion à laquelle nous amènent la recherche indépendante et la méditation personnelle, cette conclusion étant "l'unité religieuse", autre principe de la Foi baha'ie.

Il y a encore une troisième considération qui continue à être tenue pour "vérité" c'est la soi-disant finalité de la révélation, en ce sens que les chefs religieux présentent leur religion comme la dernière.

Là encore si nous continuons notre recherche nous voyons que de telles affirmations ne correspondent nullement à la vérité.

Voici juste quelques exemples tirés de l'Évangile et du Qur'an.

"J'ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les porter. Quand le consolateur sera venu, l'Esprit de vérité, il vous conduira dans toute la vérité" jean 16/12.

jésus va même jusqu'à prier pour l'avènement de ce Consolateur:

"Et moi, je prierai le Père, et il vous enverra un autre Consolateur" jean 14/16.

Le Prophète Muhammad va plus loin en parlant clairement des révélations successives.

Ainsi, lisons-nous dans le Qur'an:

"O fils d'Adam ! En vérité, viendront vers vous des Messagers du milieu de vous. Ils vous réciteront Mes versets. Quiconque pratique la vertu et la piété sera à l'abri de toute crainte et ne sera point attristé 7/33.

Une fois de plus c'est la recherche indépendante et personnelle qui nous amène à découvrir cette vérité qui est la progressivité de la révélation.

C'est donc toujours la recherche qui nous fait découvrir ces vérités dont je n'ai mentionné que trois (l'unité du genre humain, l'unité religieuse, la progressivité de la révélation). Il y en a bien d'autres qui constituent le fondement même de la révélation d'aujourd'hui je veux dire révélation baha'ie. Et c'est toujours par la recherche qu'on arrive à découvrir ces vérités.

Voilà pourquoi je ne peux terminer mon exposé qu'en disant combien Gandhi avait raison lorsqu'il a dit:

"la vérité c'est la recherche".


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4.8. La jeunesse - pionnier du monde a venir

L'éminent humoriste britannique Bernard Shaw dit:

"La jeunesse est une chose merveilleuse, quel crime de la laisser gaspiller par les enfants".

Si Bernard Shaw parle du gaspillage de la jeunesse par les enfants c'est qu'il a peut-être pensé à ces jeunes gens qui se comportent comme des enfants. Autrement c'est l'âge où l'on peut faire des exploits remarquables, exploits dont on n'est plus capable lorsque l'on n'est plus jeune; il en est qui en fournissent de merveilleux exemples.

Comment reconnaît-on un comportement d'enfant? Les signes sont nombreux. Nous en citons quelques-uns.

1 - On a un comportement d'enfant quand on imite les autres, sans montrer le moindre signe de sa personnalité. Et l'on imite les autres quand on est incapable de PENSER, ou que l'on ne veut pas PENSER personnellement et indépendamment. Un tel comportement est dû soit à l'éducation qu'on reçoit à la maison, soit à l'endoctrinement qu'on subit surtout en dehors de la maison.

je me rappelle la période d'avant la dernière guerre durant le régime hitlérien en Allemagne, où l'endoctrinement des jeunes nazis était tel que ces derniers ne sentaient pas le moindre besoin de penser personnellement, déclarant sans la moindre gêne qu'ils avaient leur Führer qui pensait à leur place et ne se trompait jamais.

Il y a une anecdote qui illustre bien ce triste état de choses.

Dans une rue de Berlin un nazi rencontre un autre nazi et lui demande:

- Qu'est-ce que tu penses du rétablissement du service militaire obligatoire?

- je suis d'accord avec la politique du parti - répond l'autre.

- Et les dépenses pour les préparatifs militaires?

- je suis d'accord avec la politique du parti.

- Et la persécution des juifs?

- je suis d'accord avec la politique du parti.

- Mais enfin tu n'as pas une opinion personnelle?

- Si, mais je ne suis pas d'accord avec elle.

N'est-ce pas triste qu'un tel état de choses, un tel endoctrinement puisse encore exister de nos jours?

2 - On a un comportement d'enfant lorsque dans la vie, au moindre échec on est découragé, démoralisé, et qu'un rien devient la fin du monde.

3 - On a un comportement d'enfant quand dans la vie on ne voit que le fait de manger, boire, dormir, s'amuser et, d'une manière générale jouir des plaisirs matériels sans se fixer un idéal précis, un but noble et élevé.

Mais Bernard Shaw parle de la jeunesse en tant qu'une chose merveilleuse, chose vraiment merveilleuse, d'ailleurs car c'est durant cette période de la vie qu'on a toutes les possibilités et les facilités de choisir son chemin, et de triompher des épreuves qu'on est destiné à rencontrer sur ce chemin.

Et c'est surtout pendant cette période de la vie qu'on a l'aptitude nécessaire pour adopter un ensemble de principes dont l'application donne un sens à la vie, permettant ainsi de voir où se trouve la vraie valeur de l'existence.

Les faiblesses de l'âge d'enfance et plus particulièrement celles que j'ai citées, c'est à partir de l'adolescence qu'on peut arriver à les maîtriser. Et ceci tant qu'on est encore jeune, sinon, lorsqu'on avance en âge la tâche devient infiniment plus difficile. Indiscutablement plus on avance en âge mieux on connaît ses faiblesses, aussi bien que les remèdes à y apporter, mais on n'a plus les possibilités de les appliquer. C'est la raison pour laquelle on dit: Si jeunesse savait, si vieillesse pouvait.

Il faut donc que la jeunesse sache, car ce qu'elle arrive à savoir, elle peut le faire. Et le monde à refaire, c'est une tâche que surtout les jeunes peuvent accomplir. Car ce n'est pas du jour au lendemain qu'on peut changer ce monde, il faut du TEMPS; il faut non seulement commencer, mais surtout continuer avec le ferme espoir qu'on verra un bien meilleur monde que celui de nos jours.
Qui peut réunir ces trois qualités (commencer, continuer, espérer) ensemble, si ce n'est les jeunes. Pour les personnes âgées "les carottes sont cuites", il n'y a rien à faire et elles ne peuvent rien faire car leurs jours sont comptés. Mais les jeunes ont l'avenir devant eux et étant plus sensibles à l'injustice qui règne dans tous les domaines, ils peuvent réagir avec force et détermination. Mais réagissent-ils tous? Et quelle attitude prennent-ils face à la situation tragique actuelle?

Leur attitude change d'une catégorie à l'autre. Il y en a qui tout en étant mécontents font semblant d'être contents, et, par conséquent ne manifestent aucune réaction, s'accommodant avec ce monde et se contentant de leur situation.

D'autres manifestent leur réaction d'une manière pour ainsi dire négative, en se retirant de ce monde. Ce ne sont pas forcément des hippies, mais d'une manière générale ceux qui se créent un monde à eux-mêmes en s'isolant dans un coin de leur pays et ne prennent aucune part à la vie active de la communauté.

Il y en a même qui vont plus loin en s'expatriant dans des pays en voie de développement afin de fuir cette "civilisation" avec tous les maux qu'elle a engendrés.

Il y a un troisième groupe qui réagit violemment croyant changer le monde par la FORCE, oubliant que la faiblesse de la force c'est qu'elle ne croit qu'à la force. Ils veulent tout détruire sans penser qu'une fois la destruction achevée il faudra bien avoir un autre monde pour s'y réfugier. Quel est ce monde, quelles sont ces caractéristiques, sa structure? A-t-il fourni les preuves de sa justice rien que par un modèle déjà existant? Tant de questions qui restent sans réponse.

Ce qui nous rappelle cette annonce lue dans un journal de province.

"Le nouvel hôtel de ville sera bâti avec les matériaux de l'ancien. En attendant les réunions vont se tenir dans l'ancien".

Enfin il y a un quatrième groupe qui dit que cet "hôtel de ville", avec toutes ses lézardes, est en train de s'effondrer de lui-même, que l'accélération de sa destruction ne demande pas tant d'énergie, et qu'il y a beaucoup de volontaires pour le faire. Ce qui manque ce sont les volontaires pour faire une nouvelle "maison" pour en poser les bases dès maintenant afin qu'elle soit achevée, pour nous y donner abri, une fois terminée la destruction de l'ancienne. Et puis ce n'est pas avec les matériaux de l'ancienne "maison" qu'on peut en faire une nouvelle.

Une nouvelle civilisation demande une nouvelle race d'hommes avec une nouvelle façon de penser.

Les hommes de cette catégorie ne font pas de révolution, ne participent pas aux révoltes, mais travaillent sous les régimes actuels, loyaux aux gouvernements; ils continuent leur tâche de fondation d'une nouvelle civilisation.

Concernant ces hommes et plus particulièrement ces jeunes (et j'entends surtout les baha'is car ils ne peuvent s'enrôler que dans la quatrième catégorie) peut-on dire qu'ils gaspillent leur jeunesse?

Pour répondre à cette question nous allons voir s'ils ont un comportement d'enfant, autrement dit s'ils présentent les caractéristiques de l'âge d'enfance et plus particulièrement les trois caractéristiques que j'ai citées au début de mon exposé à savoir:

1° - Manifestent-ils leur indépendance dans le choix de la façon de penser et de se comporter?

2° - Se laissent-ils décourager par les épreuves de la vie?

3° - Ont-ils un but dans la vie et quel est ce but?

La réponse à ces questions nous est donnée si nous nous rappelons que pour un baha'i le principe de base qui régit toutes ses activités individuelles et sociales c'est la JUSTICE.

Il est baha'i uniquement par amour pour les Paroles de Bahá'u'lláh. Et Bahá'u'lláh dit que ce qu'Il aime le plus c'est la JUSTICE. Par conséquent ce qu'un jeune baha'i aime et désire le plus c'est la JUSTICE.

D'ailleurs c'est ce que demandent tous les jeunes avant toute autre chose. Ils ne demandent ni charité, ni pitié, ils demandent la justice.

Et ce qui contribue puissamment à l'instauration de la justice par la main des jeunes c'est la soif de l'indépendance qui se manifeste précisément dès l'adolescence. En effet si individuellement chacun ne prend pas l'habitude de manifester le sentiment de l'indépendance de sa personnalité, se contentant d'imiter les autres et se soumettant à leur volonté, souvent quelques fortes personnalités parviennent facilement à imposer à la communauté leurs caprices, et l'injustice commence à régner. L'établissement de la justice implique donc la manifestation de l'indépendance de la personnalité, et celui qui cherche à établir la justice doit veiller à son indépendance dans le choix de la façon de penser et de se comporter.

Un jeune, surtout quand il est baha'i (car alors ce à quoi il tient le plus c'est la justice) ne se comporte donc pas comme un enfant en imitant facilement les autres; bien au contraire, il garde son indépendance dans le choix de sa façon de penser et de se comporter: il "ne gaspille pas sa jeunesse".

Un deuxième signe qui montre qu'un jeune n'est plus un enfant par son comportement c'est la persévérance dans les épreuves.

Les Écrits baha'is disent clairement que le chemin de la vie est jalonné d'échecs successifs et inévitables. Il ne faut pas s'en décourager, il faut avoir le courage de persévérer. Pour un baha'i le courage n'est pas seulement la manifestation d'un instinct combatif, mais c'est surtout une inébranlable endurance devant les échecs. Sur le chemin de la vie il ne faut pas avoir peur de tomber. Il faut avoir peur de ne pas se relever.

Confucius dit: "La gloire ce n'est pas de ne pas tomber, mais de tomber et de se relever".

Sur le chemin qui mène au succès les obstacles et les chutes sont inévitables, s'il n'y en a pas, c'est qu'il ne mène nulle part. Il faut donc affronter les difficultés en les considérant comme des épreuves dont on tire les leçons qui s'imposent. C'est cela l'expérience, ce maître terrible qui nous fait passer l'examen pour nous apprendre la leçon ensuite.

Et nous arrivons au troisième signe qui montre qu'un jeune n'est plus un enfant par sa façon de penser ou par son comportement. C'est lorsqu'il se fixe un but élevé dans la vie.

Un jour on a demandé à Shoghi Effendi (Le Gardien et la Foi Baha'ie)

"Quel est le but de la vie pour un baha'i?".

"Pour un baha'i- avait-il répondu- la raison d'être de la vie est de promouvoir l'unité de l'humanité; cette raison d'être est toute entière liée à la vie de tous les autres hommes ; nous ne cherchons pas un salut personnel, mais le salut de tous les êtres humains ; notre tâche n'est pas de nous occuper de nous-mêmes et de nous dire: "occupons-nous maintenant à sauver notre âme et à nous réserver une place confortable dans l'autre monde". Non, nous devons agir pour établir le paradis sur Terre. (extrait de "Baha'i Youth Bulletin Oct. 1958.").

Indiscutablement la réalisation d'un but si élevé demande beaucoup de temps, beaucoup de patience, ce qui n'est pas toujours conforme au tempérament des jeunes, qui veulent faire très vite ce qu'ils se fixent comme but, qui sont toujours pressés dans la réalisation de leur idéal, raison pour laquelle, il y a tant qui préfèrent recourir à la force.

En ce qui concerne les jeunes baha'is on les met en garde en leur disant que cette fois, il ne s'agit pas d'un programme établi par un homme, programme qu'on peut réaliser à la hâte. Non, il s'agit d'un programme d'origine divine, et tout ce qui vient de Dieu ne se réalise pas instantanément, suit son processus normal pour être réalisé en SON TEMPS. Forcer, précipiter les choses ne sert à rien, si ce n'est qu'on risque de porter préjudice.

A ce propos une expérience scientifique me revient à l'esprit, et c'est par le récit de cette expérience très instructive que je termine mon exposé.

Un naturaliste amateur plein de bonnes intentions élevait des papillons. Or un jour, voyant avec quelle peine ces petits insectes s'efforçaient de sortir de leur cocon, il fendit de l'ongle l'une de ces petites créatures. Quelle ne fut pas sa déception quand il constata que le papillon ne put jamais se servir de ses ailes.

Et bien que ces vaillants jeunes gens, plein de bonnes intentions, qui préfèrent la force, sachent que, bien avant eux, d'autres ont eu recours à la force, croyant par là accélérer le processus de l'établissement de la justice à l'échelon mondial.

Ont-ils réussi? L'humanité parvient-elle à se servir de ses ailes pour s'envoler vers la paix et la concorde?

Vous en connaissez la réponse.

Au lieu de recourir à la force, ou nous retirer de ce monde, conformons-nous au plan divin, révélé pour aujourd'hui, laissons le processus normal suivre son cours et en son temps nous verrons en ce monde ce paradis qui nous a été promis.


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4.9. Un événement sans précédent dans l'histoire

Ce soir 9 juillet, nous commémorons le martyr du Bab, Précurseur de la foi baha'ie.

A cette occasion nous allons dire quelques mots sur ses enseignements, et plus en détail, sur les circonstances de son martyr.

Ayant la mission de préparer la voie pour la Foi baha'ie, le Bab a dû changer préalablement la façon de penser de ses contemporains en expliquant certaines croyances sous une nouvelle lumière qui n'était pas du tout conforme aux idées à l'époque. C'est ce que nous allons voir en bref.

1 - Selon le Bab la résurrection des morts n est pas corporelle, mais spirituelle, en ce sens qu'avec la naissance de chaque religion, ceux qui y croient commencent une nouvelle vie, par rapport à laquelle leur ancienne vie n'était que la mort.

Remarquons que la Bible et le Qur'an abondent en passages confirmant cette interprétation de la résurrection.

A titre d'exemple nous allons en citer deux tirés de la Bible:

"Vous êtes aussi ressuscités en lui, avec lui, par la foi. Col. 11/12

"Vous étiez morts... nous tous aussi... il nous a ressuscités ensemble. Epheneus 11/1-6

2 - Selon le Bab le jour du jugement est le jour de la naissance d'une nouvelle religion, où les gens seront jugés selon qu'ils l'acceptent ou la rejettent.

Pour cette interprétation nous avons également d'abondantes confirmations dans les Écritures du passé.

A titre d'exemple rappelons nous l'entretien de jésus avec Nicodème, là où il dit:

"Celui qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu'il n'a pas cru au Fils unique de Dieu" jean 3/18.

Donc le jour de jésus était déjà un jour de jugement.

3 - Selon le Bab, le paradis n'est pas un lieu, mais c'est un état d'esprit, état de joie et de bonheur auquel on arrive par la foi ou la révélation divine, laquelle est progressive, et prépare l'homme au progrès dans la vie future.

Concernant les enseignements moraux du Bab citons quelques-unes de ses paroles, afin d'en avoir au moins une idée:

"Les jours où l'adoration passive était jugée suffisante sont révolus. L'heure est venue où seuls les motifs les plus désintéressés appuyés par des actes sans taches peuvent s'élever jusqu'au Trône du Très Haut et trouver grâce auprès de Lui (Le Bab "Epitre aux Lettres du Vivant")".

Quant à la caractéristique de cette adoration active il dit:

"Adorez Dieu de telle sorte que si la récompense en devait être le bûcher, rien ne serait changé dans votre adoration. Si vous adorez Dieu par peur, cet amour serait indigne du seuil de la Sainteté de Dieu. De même en est-il lorsque vos yeux se fixent sur le paradis et que vous adorez dans le seul espoir d'y accéder, car alors vous mettez la création en compétition avec Dieu ("Babis of Persia" Prof. Brown).

Le docteur Esselmont dans son ouvrage sur la Foi baha'ie ("Bahá'u'lláh et l'Ere Nouvelle" Dr. Esselmont.) s'écrie:

"Quelle chose étrange. Cette âme pure et belle, ce maître inspiré par la divine vérité, cet amant dévoué de Dieu, et de son prochain a été haï et mis à mort par ses contemporains qui se prétendaient religieux".

Quant aux circonstances de son martyr, permettez-moi de vous lire un extrait de l'histoire ("Dieu passe près de nous" Shoghi Effendi).

"Deux événements très importants se produisirent juste avant et peu de temps après le traitement humiliant subi par le Bab, événements qui jettent une vive lumière sur les circonstances mystérieuses entourant la première phase de son martyr. Le farrash bashi (Serviteur en chef du gouvernement) avait brusquement interrompu la dernière conversation confidentielle que le Bab poursuivait dans une salle de la caserne avec son secrétaire, Siyyid Husayn et écartant ce dernier, il le tançait vertement, quand le Prisonnier s'adressa à lui en ces termes:

"Tant que je ne lui aurai pas dit ce que je désire, aucune puissance terrestre ne pourra me réduire au silence. Le monde entier serait-il armé contre moi, qu'il serait encore impuissant à m'empêcher d'aller au bout de mes intentions".

Au chrétien Sam Khan-Colonel du régiment arménien chargé de procéder à l'exécution - qui, saisi de crainte à l'idée de provoquer la colère de Dieu par son acte, suppliait qu'on le déchargea de cette tâche, le Bab donna cette assurance:

"Suivez les instructions reçues, et si vos intentions sont pures, le Tout Puissant pourra certainement vous délivrer de votre angoisse".

Sam Khan se prépara donc à accomplir son devoir.

Une pointe fut enfoncée dans l'une des poutres qui, sur la cour, séparait deux salles de la caserne. On y fixa deux cordes auxquelles on suspendit, séparément, le Bab et l'un de ses disciples, le jeune et fervent Mirza Muhammad Ali-i Zunuzi, surnommé Anis qui auparavant s'était jeté aux pieds de son Maître, l'implorant de n'être séparé de lui en aucune circonstance. Le peloton d'exécution s'aligna sur trois rangs comprenant chacun deux cent cinquante hommes. Chaque rang, tour à tour, ouvrit le feu jusqu'à ce que tout le détachement ait déchargé ses armes. La fumée qui s'échappa des sept cent cinquante fusils était si épaisse que le ciel en fut obscurci. Dès qu'elle se fut dissipée, la multitude d'environ dix mille âmes, massées sur le toit de la caserne ainsi qu'aux faîtes des maisons voisines, fut le témoin abasourdi d'une scène à laquelle ses yeux pouvaient à peine croire.

Le Bab avait disparu de sa vue. Seul demeurait son compagnon vivant et indemne, se tenant près du mur contre lequel tous deux avaient été suspendus. Les cordes qui les avaient attachés étaient seules coupées. "Le Siyyid-i-Bab a disparu" s'écrièrent les spectateurs effarés. Des recherches affolées s'ensuivirent immédiatement. On trouve le Bab sain et sauf, très calme, dans la pièce même qu'il occupait peu d'instants auparavant, en train de terminer sa conversation interrompue.

"J'ai fini mon entretien avec Siyyid Husayn". Telles furent les paroles avec lesquelles le Prisonnier si providentiellement préservé accueillit l'apparition du farràsh-bàshi.

"Maintenant vous pouvez accomplir votre mission".

Se souvenant de l'affirmation audacieuse faite précédemment par son Prisonnier, et ébranlé par une révélation aussi stupéfiante le farràsh bàshi quitta immédiatement la place et donna sa démission.

Sam Khan, se remémorant également avec un sentiment de crainte et d'émerveillement, les paroles rassurantes que le Bab lui avait adressées, ordonna à ses hommes de quitter instantanément la caserne et jura, en sortant de la cour, de ne jamais recommencer cet acte, fusse au prix de sa vie.

Aqà Jan'-i Khamsih, colonel du corps de garde, s'offrit pour le remplacer. Contre le même mur et de la même façon on suspendit de nouveau le Bab et son compagnon tandis qu'un autre régiment se mettait en ligne pour ouvrir le feu sur eux. Cette fois, par contre, leurs poitrines furent criblées de balles et leurs corps entièrement déchiquetés; seuls leurs visages ne furent que légèrement abîmés.

"ô génération entêtée" - disait le Bab, adressant ses dernières paroles à la foule qui le regardait pendant que le régiment se préparait à tirer "si vous aviez cru en moi, chacun de vous aurait suivi l'exemple de ce jeune homme dont le rang est supérieur à celui de la plupart d'entre vous, et se serait sacrifié volontairement sur mon chemin.

Le jour viendra où vous me reconnaîtrez; ce jour là j'aurai cessé d'être avec vous".

Cet événement que l'éminent orientaliste français A. N. M. Nicolas appelle "unique dans les annales de l'histoire de l'humanité" a eu lieu le 9 juillet 1850 alors que le Bab était dans sa trente et unième année.

Le même historien - orientaliste écrit (A. N.M. Nicolas "Siyyid Ali Muhammad, dit le Bab):

"Les chrétiens sont en effet convaincus que si jésus Christ avait voulu descendre vivant de la croix, il l'eût fait sans difficulté: il est mort volontairement, parce qu'il devait mourir et pour accomplir les prophéties. Il en est de même pour le Bab, disent les Babis, qui voulut donner aussi une sanction évidente à ses paroles. Lui aussi mourut volontairement, parce que sa mort devait sauver l'humanité".

Qui dira jamais les paroles que le Bab put prononcer au milieu du tumulte sans nom qui accueillit son départ? Saura-t-on quels souvenirs agitèrent sa belle âme? Qui nous dira jamais le secret de cette mort?.. Le spectacle des turpitudes, des hontes, des vices, du mensonge de ce clergé révoltait son âme pure et sincère, il sentait le besoin d'une réforme profonde à introduire dans les moeurs publiques et dût, plus d'une fois hésiter devant la perspective de la révolution qu'il fallait déchaîner pour délivrer les corps et les intelligences du joug d'abrutissement et de violence qui pesait sur toute la Perse pour le plus grand profit d'une élite... de jouisseurs, et pour la plus grande honte de la vraie religion du Prophète. Sa perplexité dût être grande, ses angoisses terribles, et il lui fallut le triple airain dont parle Horace pour se précipiter, tête baissée, dans l'océan des superstitions et des haines qui devait fatalement l'engloutir.

C'est un des plus magnifiques exemples de courage qu'il ait été donné à l'humanité de contempler et c'est aussi une admirable preuve d'amour que notre héros offrait à ses concitoyens. Il s'est sacrifié pour l'humanité, pour elle il a donné son corps et son âme, pour elle, il a subi les privations, les affronts, les injures, la torture et le martyr. Il a scellé de son sang le pacte de la fraternité universelle, et comme jésus il a payé de sa vie l'annonce du règne de la concorde, de l'équité et de l'amour du prochain.
Plus que tout autre il savait quels dangers formidables il accumulait sur sa tête, il avait pu juger par lui-même de l'exaspération à laquelle le fanatisme savamment excité peut atteindre; mais toutes les réflexions qu'il put faire à ce sujet ne furent point assez puissantes pour le détourner de la voie dans laquelle il avait désormais résolu d'entrer, la peur n'eut aucune prise sur son âme tranquille, sans daigner jeter un regard en arrière, calme, en pleine possession de lui-même, il entra dans la fournaise".


Maison d'Éditions Baha'ies - D/1977/1547/4


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5. FASCICULE 5 - l'amour et la raison

PRÉFACE

La science comme la religion présentent toutes deux l'amour du prochain comme un besoin intime de la nature humaine.

Or cet amour du prochain dépend de la capacité affective de chaque individu plutôt que des qualités de son prochain. Et c'est la raison pour laquelle on compare l'amour au parfum d'une fleur. En effet, la fleur émet son parfum quel que soit le comportement de celui qui la tient. Et comme le coeur est symboliquement le siège de l'amour on le compare au jardin où la fleur de l'amour doit être plantée.

En étudiant l'histoire, on constate que cette fleur ne garde pas son parfum éternellement et que d'âge en âge chaque fois que la fleur perd son parfum la Main de la Providence plante une nouvelle fleur de l'amour dans le jardin du coeur, ce qui est précisément le cas de la Révélation Baha'ie dont tous les principes visent directement ou indirectement à instiller l'amour dans le coeur de l'homme.

Comme ce modeste ouvrage est un recueil des conférences que l'auteur a données afin d'exposer les principes baha'is, j'ai pensé de l'intituler "LA FLEUR DE L'AMOUR ET LE JARDIN DU COEUR".

Étant donné que ces conférences n'ont pas été adressées au même auditoire, vu la nécessité du moment parfois je fus amené à me référer à un principe qui avait été mentionné lors d'une autre conférence, ce qui est une répétition dont je l'espère, le lecteur indulgent m'excusera.


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5.1. La science devant la foi

Quand on étudie la biographie des grands savants, on est frappé d'étonnement devant leur extrême simplicité. Ils mangeaient simplement, ils s'habillaient simplement, se contentant toujours du strict minimum. On est impressionné surtout par ce qui pouvait troubler leur âme, ce qui constituait l'objet de leur émotion.

je prends comme exemple le plus grand savant de notre époque: Einstein. Vous avez sûrement remarqué par ses photographies qu'il ne portait jamais de chapeau. Et lorsqu'un ami le vit un jour arriver chez lui, les cheveux ruisselant de pluie, il lui demanda pour quelle raison il se promenait nu-tête sous l'averse, Einstein répondit: "C'est que j'ai remarqué que mes cheveux sèchent plus vite que mon chapeau." Il ne changeait pas de vêtements tant que ceux-ci ne tombaient pas en ruine.
Et dire que ce n'était pas par avarice! Laissé libre de fixer le montant de son traitement à l'Université de Princeton, il avait consterné le directeur en demandant une somme ridiculement faible. Lorsqu'il reçut le prix Nobel, il en partagea intégralement le montant avec sa femme et une oeuvre de bienfaisance. Et ce jour là il parut sur le podium vêtu d'un smoking si usé que l'une des éminences crut devoir le prendre à l'écart pour lui suggérer d'aller se changer. Inutile de dire qu'Einstein ne jugea pas nécessaire de suivre ce conseil, et il avança vers le Roi de Suède tranquillement avec ses épaules qui tombaient et un pantalon qui faisait d'énormes poches aux genoux, insensible au ridicule comme à la gloire.

Ce n'était pas la première fois qu'on voyait Einstein si différent des autres, si indifférent à tout ce qui préoccupait les autres et tout ce qui peut constituer l'objet de leur émotion.

Et l'on se demande: "Mais qu'est-ce qui pouvait constituer l'objet de l'émotion de cet éminent savant?".

A cette question c'est lui-même qui répond en ces termes: "La plus belle et la plus profonde émotion que nous pouvons ressentir est la sensation mystique. Celui à qui cette sensation est étrangère est comme un mort."

Quant à l'expression "sensation mystique" c'est toujours lui-même qui l'explique en parlant de son "humble adoration de l'Esprit Supérieur illimité qui se révèle lui-même dans les moindres détails que nos esprits faibles et fragiles sont capables de percevoir" (Life, 2.5.1953).

Bien entendu par le terme "Esprit Supérieur" il entendait Dieu, puisque c'est encore lui-même qui dit: "La présence d'une Puissance Supérieure douée de raison... révélée dans l'univers incompréhensible, voilà mon idée de Dieu" (Life, 2.5.1953).

Et c'est ce Dieu qui le guidait, l'inspirait dans ses travaux scientifiques, comme il l'avoue à son collaborateur: "Les idées viennent de Dieu" lui dit-il (Sélection).

Pour Max Plank, savant non moins génial qu'Einstein, "le but suprême de la vie, c'est la recherche de Dieu et de Son ordre universel".

Concernant cette même divinité, Marconi, l'inventeur de la télégraphie sans fil dit:

"C'est avec l'aide de Dieu qui met à la disposition de l'humanité tant de forces mystérieuses, que j'ai construit cet appareil permettant aux croyants du monde d'entendre Sa voix, la voix du Père céleste."

Et je pourrais citer bien d'autres paroles de savants, paroles par lesquelles ils expriment leur foi en Dieu. Pour les uns, Dieu est le Plus Grand Physicien, pour les autres le Plus Grand Médecin, pour les ingénieurs il est le Plus Grand Ingénieur. Et à ce propos, permettez-moi de citer l'inscription d'Edison sur le Livre d'Or de la Tour Eiffel. L'éminent ingénieur américain, après avoir rendu hommage à l'oeuvre du génial constructeur français (Eiffel), signe ainsi: "De la part de quelqu'un qui a le plus grand respect et l'admiration la plus grande pour tous les ingénieurs y compris le Plus Grand Ingénieur, le bon Dieu."

Un langage identique est tenu par bien d'autres savants. "Chaque nouvelle connaissance" dit le professeur Morrison, ex-président de l'Académie des Sciences de New York" nous apporte une preuve nouvelle que notre univers est bien l'oeuvre d'une Intelligence créatrice."

Et en étudiant les écrits et la biographie des savants les plus grands de tous les temps on voit qu'ils étaient pénétrés d'un sentiment religieux infiniment profond, ce qui est d'ailleurs pour Max Plank, la preuve la plus irréfutable que la science et la foi sont en parfait accord.

Cela s'explique, selon le professeur Andoyer de la Faculté des Sciences de Paris par le fait que "l'esprit scientifique entraîne l'esprit religieux".

Comment l'esprit scientifique entraîne-t-il l'esprit religieux? C'est la question à laquelle je vais essayer de répondre en me basant (aussi paradoxal que cela puisse paraître) non pas sur les écrits des savants, mais sur une lettre écrite par un homme qui n'a pas fréquenté d'école.

J'entends la célèbre lettre d`Abdu'l-Bahá (Interprète des enseignements baha'is et le successeur du Fondateur de la Foi Baha'ie) au professeur Auguste Forel, lettre dont l'étude a fait de ce savant libre penseur un homme profondément croyant et un disciple fervent de la Foi baha'ie.

Dans ce qui suit je ne vais mentionner que quelques-uns des arguments cités par `Abdu'l-Bahá pour démontrer l'existence de Dieu.

Précisons bien que la lettre en question ne parle que de l'existence de Dieu et non pas de Son essence.

Car `Abdu'l-Bahá dit clairement que l'essence de Dieu est inaccessible à l'intelligence de l'homme. Toute idée qu'on se fait de l'essence de Dieu (Créateur) devient une création de notre cerveau et la création ne peut pas être le créateur. On se placerait alors dans le cas de cet enfant qui était en train de dessiner:

- "Que fais-tu?" lui demande sa mère.

- "je fais le portrait de Dieu" répond l'enfant.

- "Mais on ne peut pas voir Dieu."

- "Et bien quand j'aurai fini son portrait, on le verra."

Quant aux arguments cités dans la lettre dont nous parlons, en voilà quelques-uns:

Premier argument:

L'existence est la conséquence de la COMPOSITION d'éléments simples. Posons-nous la question:

"Qu'est-ce qui est à l'origine de cette COMPOSITION? Trois cas peuvent se présenter:

1. La composition est due au hasard;

2. La composition se fait d'elle-même, en tant que propriété inhérente des composants;

3. Il y a une VOLONTÉ qui régit cette composition.

Etudions chaque cas:

1er cas: Impossible à envisager. Car, dire que la composition se fait au hasard, c'est dire qu'il y a un effet ne demandant pas l'existence d'une cause: hypothèse impossible à admettre par la science.

2e cas: Supposons que cette propriété appelée COMPOSITION soit une propriété inhérente des éléments. Comme, par exemple l'attraction est une propriété inhérente de l'aimant, ou l'émanation de la chaleur est une propriété inhérente du feu. Mais l'attraction accompagne toujours l'aimant: il y a aimant, il y a attraction, le contraire c'est-à-dire la répulsion est impossible. De même la chaleur accompagne toujours le feu; il y a le feu, il y a l'émanation de la chaleur, le contraire c'est-à-dire l'émanation du froid est impossible.

Si donc nous supposons que la composition est une propriété inhérente des éléments, elle doit toujours accompagner les éléments et le contraire est alors impossible, c'est-à-dire que la décomposition serait alors impossible.

Or précisément nous voyons que la décomposition non seulement n'est pas impossible, mais que toute composition est tôt ou tard suivie de décomposition. Il reste donc la 3e hypothèse à admettre, c'est-à-dire qu'il y a une VOLONTÉ qui régit cette composition, cause de l'existence.

Cette volonté qui régit le monde de l'existence, cette volonté dont on ne connaît pas l'essence, ni le mécanisme précis d'intervention est appelé VOLONTE DIVINE.

Deuxième argument:

En étudiant le monde de l'existence nous voyons que tout effet a une cause.

Si les plantes poussent, c'est à cause des pluies, les pluies tombent à cause des nuages, les nuages se forment à cause de l'évaporation des eaux de mer, l'évaporation des eaux de mer se fait à cause de la chaleur du soleil etc. jusqu'à ce qu'on arrive à une cause que nous sommes forcés d'admettre comme ULTIME.

Or cette cause ultime si nous supposons qu'elle est matérielle, devient automatiquement effet; et comme tout effet a une cause, elle cesse d'être ultime, ce qui est contraire à notre hypothèse sur la nature matérielle de cette cause. Cette cause ultime est donc immatérielle. Cette Cause ultime immatérielle invisible qui échappe à nos sens nous conduit à l'idée de Dieu.

Troisième argument:

Chaque fois qu'on est en présence d'un organisme composé de différentes parties agissant de façon bien ordonnée pour garantir le fonctionnement harmonieux de cet organisme on est forcé d'admettre l'existence d'un agent coordinateur.

À titre d'exemple, citons l'organisme humain dont chaque membre fait ce qu'il doit faire dans une mesure bien déterminée et en conformité avec le fonctionnement des autres membres afin que l'ensemble assure notre vie. Ainsi la bouche secrète la salive autant qu'il en faut pour transformer l'amidon des aliments en sucre assimilable par l'organisme.

Si la bouche en sécrétait moins, on souffrirait de troubles digestifs. Mais la bouche secrète exactement autant qu'il en faut pour le fonctionnement de notre organisme. Il en va de même en ce qui concerne le suc gastrique et bien d'autres sucs du tube digestif qui sont sécrétés dans une mesure strictement déterminée et bien coordonnée avec les autres. En bref, on se voit en présence d'une coordination parfaite dans le fonctionnement des parties de notre organisme. Il doit donc y avoir un agent coordinateur qu'on appelle l'âme humaine. Où se trouve cette âme? Quelle est son essence? Quel est le mécanisme précis de son intervention? On n'en sait rien, mais on est forcé de croire en son existence.

Il en est de même en ce qui concerne cet organisme grandiose qu'on appelle univers, où chaque partie fait ce qu'elle doit faire dans une mesure bien déterminée et bien coordonnée avec le fonctionnement des autres parties. Ainsi, par exemple, la terre tourne autour de son axe avec une vitesse bien déterminée. Il en résulte le jour et la nuit. Si la terre tournait dix fois plus lentement, les jours deviendraient dix fois plus longs et la chaleur du soleil brûlerait notre végétation. Et la vie deviendrait impossible. Mais la terre tourne à une vitesse convenant à la vie.

Il en est de même du soleil qui maintient notre existence par ses radiations. S'il se trouvait à une distance supérieure ou inférieure à sa réelle distance, et bien, suivant le cas, il nous enverrait moins ou plus de radiations, et, par conséquent, nous gèlerions ou nous serions grillés. Mais le soleil nous envoie ses radiations autant qu'il nous en faut pour maintenir notre existence.

Ainsi la terre et le soleil, pour ne citer que deux exemples parmi une infinité d'autres, accomplissent scrupuleusement leur tâche et, d'une manière parfaitement coordonnée pour que la vie devienne possible. Il doit donc y avoir un Agent Coordinateur.

Cet Agent Coordinateur est Dieu. Son existence est donc indéniable peu importe si Son essence nous échappe.

Dans Sa Lettre au Professeur Forel, `Abdu'l-Bahá expose bien d'autres arguments pour démontrer scientifiquement l'existence de Dieu. je me suis contenté d'en énumérer juste trois afin d'avoir le temps de répondre à cette question qu'on se pose toujours à savoir:

Dieu est-Il intervenu une fois pour créer le monde de l'existence avec ses lois régissant l'évolution ou bien continue-t-Il d'intervenir dans ce processus qu'on appelle ÉVOLUTION?

Selon les enseignements baha'is il y a deux sortes d'ÉVOLUTION. Une évolution lente qui suit son cours normal. C'est le cas de l'ÉVOLUTION PHYSIQUE que ce soit du monde animal ou du monde humain.

Ainsi l'homme, par exemple, il y a des millions d'années n'avait pas la forme harmonieuse et la grâce qu'il possède maintenant. Et ce n'est qu'au cours des millions d'années et suivant une loi préétablie que l'homme est arrivé à la condition d'aujourd'hui.

Mais il y a un autre genre d'évolution qui est particulier à l'espèce humaine. Cette évolution est spontanée et d'ordre moral. C'est ce que les savants matérialistes appellent MUTATION.

A titre d'exemple, je prends le cas du phénomène qui a pris naissance en Arabie il y a 14 siècles.

Les Arabes de cette époque étaient tout ce qu'il y a de plus sauvages, tellement sauvages que parmi eux il y avait des tribus qui enterraient vivants les nouveau-nés, si c'étaient des filles.

Et après l'apparition du Messager de Dieu (Muhammad) ce même peuple subit une telle transformation spontanée, une telle mutation qu'il devint le fondateur d'une merveilleuse civilisation, laquelle en son temps a exercé son influence sur la civilisation occidentale (ceci par ses découvertes dans le domaine scientifique).

Disons-le tout de suite: cette intervention de Dieu dans le processus de l'évolution ne se fait pas uniquement parmi les peuples arriérés. Dieu intervient chaque fois qu'il y a une dégradation morale, une crise dont le monde ne peut pas sortir par ses propres moyens.

Ainsi, par exemple, il y a deux mille ans, les Romains scientifiquement étaient très avancés, mais moralement tout ce qu'il y a de plus corrompus. La soi-disant civilisation romaine était condamnée à s'effondrer. Il a fallu qu'une autre civilisation la remplace. Et cette nouvelle civilisation ne pouvait pas être fondée par la main de l'homme. C'est alors que Dieu est intervenu par sa Révélation dans la personnalité de Jésus-Christ, qui a fondé une civilisation sans précédent, civilisation à la fois spirituelle et matérielle.

Et nous arrivons à notre siècle où nous sommes témoins d'une crise qui est cette fois à l'échelle mondiale (et non pas à une échelle limitée comme dans le passé).

L'éminent penseur Golfus écrit: "La crise actuelle est profonde et des plus dangereuses. Si une vérité nouvelle ne luit pas pour nous indiquer le chemin à suivre, si aucun changement radical n'intervient sous peu, l'homme est irrémédiablement perdu."

Faut-il croire que Dieu nous a oublié? Faut-il croire que Dieu nous a "mis entre parenthèses?" Qu'est-ce que j'entends par l'expression "mis entre parenthèses"? Il y a une petite histoire qui en est à l'origine.

A Maryland, un jour on a décidé de modifier la formule du serment des fonctionnaires de façon à donner satisfaction à la fois aux croyants et aux non-croyants.

La nouvelle formule était ainsi conçue: "je jure (devant Dieu) de respecter la Constitution..." Il était entendu que ce qui était entre parenthèses pouvait être supprimé lors du serment, qu'on n'en souffle pas mot, qu'on l'oublie totalement.

Le lendemain, plusieurs membres de l'assemblée reçurent le télégramme suivant: "Envisage de mettre Maryland entre parenthèses." Signé Dieu.

Nous chers amis, Dieu ne nous a pas "mis entre parenthèses". Dieu ne nous a pas oubliés. Si l'humanité dans sa majorité ne croit pas en Dieu, Dieu croit en l'humanité.

Et une fois de plus, Il est intervenu dans le processus de l'évolution de l'humanité sous le nom de la Révélation baha'ie, Révélation dont tous les principes sont unanimement reconnus comme la base d'une nouvelle civilisation, une civilisation mondiale, peu importe, vu la gravité de la crise actuelle, si son application pratique peut sembler une utopie aux yeux des sceptiques.

N'en fut-il pas de même à la naissance de la Révélation judaïque qui a mis 5 siècles pour fonder pratiquement la civilisation judaïque?

N'en fut-il pas de même à la naissance de la Révélation chrétienne qui a mis 3 siècles pour fonder pratiquement une nouvelle civilisation, la civilisation chrétienne?

Quant à la Foi baha'ie, à peine après un siècle, elle est déjà représentée à l'O.N.U. comme une institution non-gouvernementale consultative, et le nom de Bahá'u'lláh (Fondateur de la Foi baha'ie) figure au calendrier de l'O.N.U. à côté des Fondateurs des grandes religions telles que Bouddha, Moïse, jésus et Muhammad.

Une bonne année ne s'annonce-t-elle pas par son printemps?


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5.2. L'athéisme est-il scientifique?

On demanda un jour à Einstein: "Qu'est-ce que c'est que votre théorie de relativité?"

En réponse, il a raconté cette histoire: "Un jour" dit-il "je me promenais en compagnie d'un aveugle. je lui ai demandé s'il voulait prendre un verre de lait.

- "Qu'est ce que le lait?" me demanda-t-il.

- "C'est un liquide blanc" répondis-je.

- "Le liquide, oui, je connais, mais blanc?"

- "C'est la couleur des plumes du cygne."

- "Plume, oui, je sais, mais cygne?"

- "C'est un oiseau avec un cou plié."

- "Cou, je vois très bien, mais plié?"

je lui prends le bras, termine Einstein, je le raidis: "Ça c'est droit". je le plie au coude: "Et comme ça c'est plié."

Le visage de l'aveugle s'illumina et il me dit: "Maintenant je sais ce que c'est le lait."

Si j'ai raconté cette histoire, c'était pour dire que nous risquerions fort de nous placer dans le cas de l'aveugle d'Einstein, si nous essayons de dire ce qu'est Dieu quant à Son Essence. Et ceci en l'état actuel de la science où l'on ne connaît pas l'essence de quoi que ce soit. Par conséquent, fini le temps où l'on disait: "Puisque je ne sais pas ce qu'est Dieu, je ne crois pas." Cela reviendrait à dire: "Puisque je ne sais pas ce qu'est l'électricité je n'y crois pas."

En l'état actuel de l'évolution de la science une telle argumentation n'est plus valable. D'autre part, l'idée d un Dieu incarné (principale source de conflit entre la science et la religion) n'est plus admise en l'état actuel de l'évolution de la religion.

C'est cette évolution simultanée de la science et de la religion qui fait que ceux qu'on n'a pas l'habitude de placer parmi les croyants se penchent de plus en plus vers l'idée religieuse compatible avec l'esprit scientifique.

Jean Jaurès dit: "Tout ce que nous voulons dire aujourd'hui c'est que l'idée religieuse un moment effacée peut rentrer dans les esprits et dans les consciences parce que les conclusions actuelles de la science les prédisposent à la recevoir" (Extrait de Le Matin des Magiciens par Louis Pauwels).

Le sujet mérite donc d'être étudié plus profondément pour voir si, à notre époque, l'athéisme ou le matérialisme est scientifique.

Posons-nous d'abord la question: Depuis quand et pourquoi le matérialisme a-t-il pris tant d'ampleur et gagné tant de sympathisants?

Ne nous étonnons pas si nous constatons que c'est précisément depuis le moment où la science a commencé à faire des progrès sans précédent. En effet, quand on étudie l'histoire de la civilisation humaine on constate que c'est à partir de la seconde moitié du 19ème siècle que les hommes ont commencé à réaliser dans tous les domaines de la science, des progrès Jamais vus jusque là dans le cours des âges.

Dans le domaine médical, nous voyons apparaître, par exemple, l'anesthésie qui a tant facilité les opérations chirurgicales, déracinant ainsi tant de maux incurables jusque là; la vaccination qui a sauvé tant de vies humaines; la radiologie et ses innombrables applications dans l'art de diagnostiquer et de guérir.

Dans le domaine technique, nous voyons apparaître le chemin de fer, le bateau à vapeur, le téléphone, le télégraphe, l'éclairage électrique et tant d'autres inventions qui rendent la vie si facile et agréable à vivre. Il était donc naturel que l'homme ne reste pas indifférent devant tant de merveilles produites par la science. Et l'on se posait la question: "À qui ou à quoi doit-on cette science toute puissante?" Au cerveau, donc à la matière ("matière grise" pour être plus précis). C'est du moins la réponse qu'on se donnait dans le passé, La science devient donc la création de la matière et sa toute puissance s'efface devant celle de la matière. D'où le penchant, la sympathie pour le matérialisme.

Voilà la première cause de l'extension du matérialisme. Mais il y a une deuxième cause non moins importante. C'est la décadence de la religion. Car au moment où l'on était ébloui par le progrès de la science, la religion ou, du moins ce qu'on appelait "religion", avait perdu sa pureté primitive et de ses effets bienfaisants il ne restait aucune trace. La seule chose qu'on gardait en souvenir c'était un ensemble de rites et de cérémonies sans le moindre effet sur la vie spirituelle. Et c'est avec des rites et cérémonies tels que le baptême, la confession et l'eucharistie qu'on voulait rendre les gens heureux.

Ceci pour le présent. Quant à l'avenir, toutes les religions consolaient et continuent à consoler leurs adeptes par des promesses sur la venue du jour Promis, où la paix "régnera sur terre comme au ciel", le jour qui ne viendra qu'après "la résurrection des morts", "la chute des étoiles", "l'obscurcissement du soleil" et tant de signes qui, pris à la lettre, ne pourraient être acceptés par aucun homme instruit.

Voilà ce qu'offrait la religion à ses adeptes, au moment où la science améliorait si visiblement la vie de l'homme.

Ajoutons-y encore l'antagonisme réciproque des centaines de sectes religieuses qui depuis tant de générations ont troublé la paix du monde et continuent de la troubler encore aujourd'hui. Devant une telle situation, il ne faut donc pas s'étonner que l'homme ait abandonné la religion au profit de la science, soi-disant produit de la matière (grise) et que, par conséquent il se soit penché vers le matérialisme.

Mais tout cela était valable pour le passé. Car aujourd'hui tout est changé. Si la science est entrée aujourd'hui dans un stade, où, selon Einstein, elle boîte, et que la religion, elle aussi est entrée dans un stade où selon le même savant, sans la science elle deviendrait aveugle, il n'est plus sérieux, toujours selon le même savant, de rejeter l'idée de Dieu.

Ceci dit, voyons comment la science d'aujourd'hui réfute les arguments des soi-disant athées. je dis bien "soi-disant" car en réalité, l'athéisme n'existe pas, c'est le théisme insatisfait.

Étant donné que la validité apparente des arguments des athées dépend de leur degré d'instruction, commençons par les arguments de ceux qui n'ont reçu qu'une instruction élémentaire.

1. Ces gens-là disent: "Nous admettons l'existence de ce que nos sens admettent et rien d'autre."

A quoi les savants et les Écrits baha'is répondent que l'homme ne peut pas se fier entièrement à ses sens, que le degré de précision de ses sens est relatif, que ses sens peuvent facilement l'induire en erreur.

Quelques exemples: Allons à la gare et mettons-nous dans la direction de la voie ferrée; nous avons l'impression que les rails ne sont pas parallèles, et qu'ils se rapprochent l'un de l'autre au fur et à mesure qu'ils s'éloignent de nous, pour converger à un point très éloigné, ce qui n'est pas vrai.

Visitons un désert chaud. Regardons un objet éloigné, un arbre, par exemple. Nous en voyons une image renversée, comme si l'arbre se reflétait dans une nappe d'eau, ce qui est absolument faux. Combien de gens ont péri dans le désert pour s'être fiés à leurs yeux.

Nous ne pouvons donc pas nous fier absolument à nos sens.

2. Parmi les athées, ceux qui sont plus instruits nous déclarent: "Nous ne nous fions pas absolument à nos sens, nous faisons intervenir notre raisonnement." "Parfait" répond la science d'aujourd'hui (aussi bien que la Foi baha'ie) "mais à condition de ne pas nous contenter d'un raisonnement limité, car le raisonnement lui aussi est relatif. Le raisonnement ne nous donne pas toujours une image absolue de l'univers."

Citons seulement quelques exemples. En raisonnant, on nous démontre que le mouvement en ligne droite existe. Pour le savant, ce n'est pas vrai. Il raisonne autrement. Il tient compte du mouvement de la terre autour de son axe, ensuite autour du soleil, et enfin, il considère le mouvement de tout le système solaire vers la constellation d'Hercule etc. et il nous démontre toujours par un raisonnement (bien plus scientifique que le nôtre) que le mouvement que nous avons appelé "en ligne droite" ressemble plutôt à une sorte de tire-bouchon.

A l'école on nous apprend, toujours par un raisonnement, que la lame d'acier est compacte. Pour un savant d'il y a cinquante ans qui utilisait les rayons X ce corps n'était pas compact, il était poreux. Et pour le savant d'aujourd'hui, ce n'est ni compact, ni poreux, mais cette lame est composée de particules en mouvement ultra-rapide, sans contact entre elles, et, par conséquent c'est un corps qui se rapproche plutôt de l'état gazeux.

Nous arrivons donc à cette conclusion que ce n'est pas sur la base des notions acquises à l'école que nous pouvons raisonner pour nier l'existence de Dieu, et qu'au point de vue scientifique, au-delà de notre raisonnement si élémentaire, il existe un raisonnement bien plus profond, bien plus savant.

3. Une troisième catégorie d'athées vous déclare:

"Nous croyons en ce qui est réel. Et comme la divinité n'est pas quelque chose de réel, nous n'y croyons pas."

A cette déclaration, le savant d'aujourd'hui nous répond: "Ce qui est "réel" n'est qu'une question relative. De même que le degré de précision de nos sens est relatif et que notre raisonnement est relatif, ce qui semble réel ne l'est que relativement."

Pour un homme illettré le point mathématique, c'est-à-dire quelque chose qui n'a ni dimension, ni poids, ni image, n'a rien de réel. Pour un savant pourtant c'est tout ce qu'il y a de plus réel: car du point mathématique le savant définit la circonférence et le cercle. Partant du cercle le savant définit le cylindre et son volume. Et par le volume du cylindre le savant définit la puissance d'un moteur. Et ce moteur n'est pas quelque chose d'irréel. C'est une chose réelle. Le savant arrive donc à exprimer une réalité. Or il est parti de l'idée de l'existence du point, lequel ne pouvait donc pas être quelque chose d'irréel, car l'irréel ne peut pas aboutir au réel. L'existence du point mathématique est donc une réalité pour le savant.

Un autre exemple: l'électron dont les savants ne peuvent même pas dire si c'est une particule ou une onde, ne présente pour nous rien de réel. Mais pour un savant atomiste c'est tout ce qu'il y a de plus réel.

L'éminent savant américain Warren Waver, vice-président de l'Institut Rockefeller écrit: "Les savants sont précisément les gens qui croient en ce qu'on ne peut ni voir, ni définir essentiellement. Il n'y a pas un savant qui ait jamais vu un électron. Électron est simplement le nom donné à un ensemble de phénomènes cohérents qui se produisent en certaines circonstances. Et pourtant pour un savant il n'y a rien qui soit plus réel qu'un électron.
Les chaises, les tables, les pierres ne sont pas très réelles pour lui s'il pense profondément. Examinée à l'aide des outils précis du physicien atomiste une table est un ensemble tourbillonnant de charges électriques, elles-mêmes vagues et évasives. Examinée ainsi la table perd l'illusion de solidité qu'elle produit" (Sélection, 1969). Et revenant à la question de la divinité, l'éminent savant conclut: "Le savant est justement l'homme qui ne dira jamais qu'un concept abstrait de Dieu aboutit à un Dieu "irréel". Pour lui le "réel" est ce qui est universellement expérimenté.

Nous arrivons donc à cette conclusion que s'il y a une chose qu'on ne peut pas voir, dont on ne peut définir l'essence, cela ne veut pas dire que cette chose n'est pas une réalité et par conséquent "n'existe pas".

S'il y a une chose qui se manifeste par ses signes, sa présence, bien qu'invisible physiquement, et tout en restant insaisissable quant à son essence, cette chose est une réalité existante,

Or Dieu est précisément cette "Puissance Supérieure douée de raison" (Einstein), cette "Intelligence mystérieuse qui a créé l'univers" (Warren) dont on voit la présence "dans les moindres détails que nos esprits faibles et fragiles sont capables de percevoir" (Einstein).

La science, dans son évolution, est donc entrée dans un stade où ses représentants voient Dieu en tout et partout, au point que l'un d'eux dit: "Les gens cherchent à voir Dieu et ils n'y arrivent pas, mais moi je cherche à ne pas voir Dieu et je n'y arrive pas."

Un autre déclare: "Plus la science progresse, plus complètement connaissons-nous l'univers et en particulier l'homme et les merveilles de leur structure plus nous sommes tentés d'y reconnaître une Main toute-puissante et infiniment intelligente, et, par conséquent Dieu, l'objet suprême de la religion" (Prof. P. Bazy de l'Académie de Paris).

La science d'aujourd'hui non seulement ne permet plus qu'on se serve d'elle pour combattre l'idée de Dieu, mais bien au contraire, elle nous amène à l'idée de Dieu et de religion.

Si donc la science nous amène à l'idée de Dieu et de religion, leur collaboration, je veux dire la collaboration de la science et de la religion si souhaitable, je dirai même si vitale de nos jours, implique que la religion elle aussi manifeste sa compatibilité avec la science, avec ses méthodes et avec ses principes de base.

Or la science admet comme principe de base la révélation progressive: les vérités scientifiques ne se révèlent qu'au fur et à mesure que l'humanité avance.

Il faut que la religion aussi admette comme principe la révélation progressive de la Vérité spirituelle. Ce qu'est précisément le cas de la Foi baha'ie dont l'un des principes est la Révélation Progressive. Selon ce principe les différentes religions sont en réalité les différents stades d'une même religion, la religion de Dieu, toujours en évolution, la Foi baha'ie étant le stade actuel de son évolution.

Un autre principe de la science c'est la recherche. La religion aussi doit admettre comme un de ses principes la recherche personnelle et indépendante de la Vérité, ce qui est encore un autre principe de la Foi baha'ie.

Un troisième principe de la science est le recours à la raison et à l'intelligence. Il faut qu'il en soit de même avec la religion. Et c'est encore l'un des principes de la Foi baha'ie qui n'admet que ce qui est intelligible.

Et j'en reste là, car si en matière de religion on admet et on applique rien que ces trois principes:

1) révélation progressive;

2) recherche personnelle; et

3) l'intelligibilité de la Foi.

Non seulement on arrivera à satisfaire l'exigence de la science qui dit "s'unir ou périr" mais on reviendra à l'esprit-même de la religion, cet esprit qui réside dans l'union des peuples.

Car l'origine même du mot "religion" ne vient-elle pas du mot LIGARE qui signifie LIER ("re" n'étant qu'un préfixe)?

Mais les religions révélées, il y a plus de 1000 ans, dans leur état actuel réunissent-elles les peuples? Ne voyons-nous pas qu'au sein même de chacune de ces religions, il y a une foule de sectes antagonistes qui ne font que diviser les peuples?

L'esprit de la religion est donc abandonné ' oublié. Il faut donc ranimer cet esprit, il faut rendre à la religion sa pureté primitive, ce qui est précisément le but de la Foi baha'ie.

Qu'il n'y ait pas de malentendu sur le terme "ranimer": qu'on ne s'imagine pas que les Baha'is prétendent que les religions du passé sont mortes. Loin de là. je m'explique par un exemple:

L'évolution religieuse est comparable à l'évolution physique. L'enfant grandit, devient adolescent, puis adulte. Ainsi l'enfant s'efface dans l'adolescent, et l'adolescent dans l'adulte, mais ni l'enfant, ni l'adolescent ne meurent.

Il en est de même en ce qui concerne l'évolution religieuse de l'humanité. Pour citer un exemple, disons que le stade judaïque s'efface dans le stade chrétien et le stade chrétien évolue en stade baha'i, mais ni le judaïsme, ni le christianisme ne meurent. Pas plus que l'hindouisme, le bouddhisme ou l'islam.

Mais pourquoi alors un nom nouveau: BAHA'I. Parce qu'il a été prédit, et plus particulièrement par la Bible qui, parlant de la révélation du jour Promis, dit: "Et l'on t'appellera d'un nom nouveau" (Esaie 62: 2).


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5.3. Les femmes et l'âge nouveau

Un humoriste disait: "Quand c'est un roi qui règne, sa femme est une reine. Mais quand c'est une reine qui gouverne, son mari est un prince. Parlez-moi après cela de l'égalité des sexes."

Indiscutablement par cette boutade, l'humoriste voulait dire combien superficiellement les gens voient la question de l'égalité des sexes.

En effet, ce n'est pas en accordant des titres qu'on donne plus de droits à qui que ce soit. Ce n'est pas en éditant des lois qui accordent des droits théoriques égaux pour tous et plus particulièrement aux femmes, qu'on peut dire que le problème est résolu.

La question qui nous intéresse pour le moment c'est la question des droits des femmes. De nos jours on en parle beaucoup. On prétend même qu'en Occident les femmes jouissent des mêmes droits que les hommes. Ce qui n'est pas vrai. Car s'il y avait une collaboration réelle des femmes avec les hommes dans tous les domaines, bien des difficultés seraient dissipées et bien des problèmes résolus.

Pour justifier cette thèse nous allons étudier la question du point de vue historique, scientifique et religieux.

Remontons dans l'histoire, de quelques milliers d'années et supposons que nous sommes au premier siècle après l'apparition de Moïse. Ce Prophète était chargé de la mission de libérer son peuple de l'esclavage, et de le conduire en Terre Sainte.

Il arrive à faire sortir son peuple de l'Egypte, mais il ne parvient pas à pénétrer en Terre Sainte. Pendant quarante ans, les enfants d'Israël subissent toutes sortes de souffrances sans jamais atteindre la Terre Sainte. Qui pourrait leur conquérir la Terre Promise si Moïse lui-même n'y parvient pas, se demandaient-ils? Or la Providence avait voulu que ce soit une femme. En effet, c'est Deborah, juge à cette époque en Israël, qui accomplit cette tâche historique. Elle convoqua Barak, lui donna 10000 hommes afin d'aller combattre le roi de Canaan. D'après la Bible, celui-ci aurait dit: "Si tu viens avec moi, j'irai, mais si tu ne viens pas, je n'irai pas." Et elle est partie au combat, combat qu'elle gagna et conquit la Terre Sainte.

Et ce n'est qu'un exemple montrant jusqu'où peut aller le courage de la femme, courage dont on dit à tort qu'il est moindre que celui de l'homme. Il y a bien d'autres exemples historiques, et nous allons encore en citer quelques uns.

Remontons dans l'histoire jusqu'à cette époque où les descendants des mêmes vaillants combattants d'Israël avaient perdu leur foi, et où leur pays n'était plus qu'une colonie romaine. jésus reçoit la mission divine de les sauver, ainsi que bien d'autres peuples. Mais ces mêmes juifs Le font crucifier, ne Lui laissant qu'une douzaine d'hommes capables de continuer Sa tâche. Et par malheur ces hommes, après avoir perdu leur Maître, sont troublés et perplexes.
Une fois de plus c'est une femme, Marie-Madeleine, qui parvient à ranimer leur foi et les assure de la victoire finale. Et elle ne s'arrête pas là. je veux dire, que non seulement elle vient en aide à ses amis, mais également elle sauve ses ennemis de la vengeance romaine. En effet, après la crucifixion de jésus, César, convaincu de l'innocence de la Victime et des intrigues des juifs, décide de les massacrer, C'est alors que Marie Madeleine va à Rome, se présente à l'Empereur, lui explique que jésus est venu précisément pour nous apprendre à pardonner et que c'était la meilleure occasion pour appliquer Sa loi, de pardonner leur crime aux juifs. Très touché par l'intervention de cette femme, l'Empereur décide de ne pas poursuivre les juifs.

Continuons la lecture de l'histoire. Nous arrivons aux temps du Prophète Mubammad. La lutte contre les Arabes barbares impliquait d'énormes moyens financiers. Les adeptes devaient sacrifier leurs biens. C'est encore une femme qui donna le premier exemple, en consacrant tous ses biens, toutes ses richesses dans ce but, tout en supportant bien des souffrances. C'était Khadija.

Un autre exemple de courage est donné par Jeanne d'Arc, dont la fermeté et l'audace ont sauvé son pays. On est au début du 15e siècle. La France souffre sous la domination anglaise. Il y a pourtant un roi, mais il lui manque le courage pour réagir. Jeanne d'Arc, avec une petite troupe arrête l'attaque des Anglais et parvient à lever le siège d'Orléans, prélude de la victoire des Français et de leur salut.

Terminons cette étude historique par un dernier exemple. Nous sommes au 19e siècle, siècle durant lequel beaucoup de choses ont changé, mais où la femme reste dominée par l'homme. Et ceci surtout dans les pays très arriérés, tels que l'Iran, où au 19e siècle, la femme était considérée comme un bien appartenant à l'homme; ce bien devant rester caché aux yeux des autres hommes, la femme devait obligatoirement porter un voile en société et y garder strictement le silence. C'est dans un tel pays, je veux dire l'Iran, que parut Tahirih qui, la première, rejeta le voile, aussi bien que tous les préjugés et superstitions de l'époque, déclarant ainsi une lutte sans merci au clergé islamique.

Cela lui a coûté le prix de sa vie. Arrêtée, lapidée dans les rues, exilée de ville en ville, elle tomba finalement martyre. Mais avant d'être tuée elle s'écria: "Vous pouvez me tuer, mais vous ne pouvez pas arrêter l'émancipation de la femme."

Ces exemples et bien d'autres illustrent les qualités morales de la femme, qualités qui ne sont nullement inférieures à celles de l'homme. Quant aux capacités intellectuelles de la femme, c'est une question d'instruction.

En Grèce, par exemple, où la femme pouvait recevoir l'instruction, il y avait soixante cinq femmes philosophes. Et si d'une manière générale l'Histoire ne fournit pas beaucoup d'exemples de femmes intellectuellement aussi avancées que les hommes, c'est que dans le passé la femme n'avait pas le droit d'accès à l'école. Mais aujourd'hui quand la femme reçoit la même instruction que l'homme, elle révèle autant de capacité et d'intelligence que l'homme. Rappelons-nous, à titre d'exemple, que parmi les trois savants russes qui occupent le premier rang dans la construction des vaisseaux spatiaux, deux sont des femmes.

Après avoir mentionné les faits historiques prouvant les capacités de la femme, voyons ce que révèle les études scientifiques faites dans ce domaine.

Au début, les savants croyaient à la supériorité de l'homme en se basant sur le fait que le poids du cerveau de l'homme dépasse celui de la femme. Mais depuis, la science a progressé, et l'on a constaté que la supériorité du poids du cerveau n'est nullement une preuve de la supériorité de l'intelligence de l'homme. D'abord parce qu'en échange on a trouvé que lorsqu'on prend le rapport du poids du cerveau à celui du corps on voit que ce rapport est supérieur chez la femme.

Donc compte tenu de son corps, la femme a plus de cerveau que l'homme. Ensuite on a constaté que bien des gens dont la tête est petite et dont le cerveau doit peser -peu, font preuve de la plus haute intelligence et que d'autres qui ont une grosse tête et dont le cerveau doit peser lourd ne sont que des sots. Par conséquent, le poids du cerveau (comme on le croyait dans le passé) n'est nullement l'indice de l'intelligence. S'il y en a qui continuent d'y croire, ils nous rappellent cette anecdote:

- "Maman, pourquoi la tête de papa n'a pas de cheveux?" demande l'enfant à sa mère.

- "Mais parce qu'il pense beaucoup, parce qu'il est intelligent" répond la mère.

- "Et toi, maman, pourquoi en as-tu tellement?"

Des études très profondes appuyées par les statistiques, ont démontré qu'à âge égal, garçons et filles ont un potentiel égal d'intelligence, peu importe si les filles excellent en certaines matières (couture, soin des malades ...) alors que les garçons les surpassent en d'autres (mécanique, chirurgie ...).

On nous parle souvent de la force physique de l'homme. Mais en échange la résistance physique de la femme dépasse celle de l'homme. La preuve en est le fait que l'indice de mortalité chez la femme est moins élevé que celui de l'homme. Pour remédier à cet état de choses, la nature fait naître 106 garçons pour 100 filles.

On a fait une enquête pour voir ce que lisent les jeunes et l'on a trouvé que ce sont surtout les garçons qui lisent les aventures guerrières de Kansas Kid, tandis que les filles s'intéressent plutôt aux histoires amusantes de Tintin. A un match de football il y a plus d'hommes que de femmes. Par contre, à un concours de chant il y a plus de femmes que d'hommes.

Si l'on met une annonce dans un journal pour demander une personne désireuse de s'occuper d'un malade, on voit que la plupart des candidats sont des femmes.

Tout cela montre que les sentiments de tendresse, de compassion, d'attachement à une vie paisible sans aventure, sont plus développés chez les femmes que chez les hommes.

La femme sait DEVINER avant de RAISONNER et de montrer ce qu'il y a à faire. C'est ce qu'on appelle INTUITION. L'homme par contre, a plutôt tendance à RAISONNER pour découvrir ce qu'il y a à faire, processus indiscutablement plus long que la voie intuitive. C'est peut-être pour cela que les épouses doivent comprendre leur mari plus facilement que les maris leur épouse. Quelqu'un a dit, non sans raison: "La femme est capable de voir clair en son mari sans le regarder, l'homme est capable d'examiner sa femme à la loupe sans la voir."

Ce n'est pas que les hommes soient plus transparents que les femmes. Non c'est du au pressentiment et à l'intuition des femmes.

Indiscutablement, il y a des hommes dont l'intuition est très développée. C'est généralement le cas des savants. Henri Poincaré dit: "Devinez avant de démontrer! Ai-je besoin de rappeler que c'est ainsi que se font toutes les découvertes importantes. C'est par la logique qu'on démontre, c'est par l'intuition qu'on invente."

Tout en admettant qu'en principe l'homme est plus agressif que la femme et que la femme a plus d'intuition que l'homme, il faut reconnaître qu'il y a des femmes qui, par leur force physique et leur tempérament agressif dépassent l'homme moyen, comme il y a des hommes dont l'intuition est supérieure à celle de la femme moyenne.

Ces considérations ont amené les savants à dire que chaque être porte en lui des caractéristiques propres à l'un ou à l'autre sexe.

Et ils ont poussé leurs études jusqu'à déterminer ce qu'ils appellent indice de masculinité ou de féminité. Pour cela, ils soumettent les sujets à des tests. L'un de ces tests est celui de l'association des idées et des mots. On propose un mot au sujet qui doit immédiatement formuler l'image que ce mot lui suggère. Par exemple à la question POUDRE un homme répondra "à canon" et une femme "à lessiver". Maintenant s'il y a une femme qui répond "à canon" c'est qu'elle a pour ainsi dire plus de "masculinité"; et s'il y a un homme qui répond "à lessiver" c'est qu'il a l'habitude de faire la lessive, travail accompli généralement par la femme.

En bref, les études des hommes de science les ont amené à négliger l'apparence physique et prendre en considération les caractéristiques de tout être humain en tant que critérium de sa valeur. Et ils estiment qu'un ménage est heureux si le mari a assez de féminité pour assister son épouse dans les travaux du ménage et si la femme a assez de masculinité pour diriger son intérieur avec fermeté et discipline. Autrement dit, la science d'aujourd'hui recommande la collaboration de l'homme et de la femme avec des droits égaux. Quel progrès réalisé depuis une centaine d'années par la science, cette même science qui dans le passé cherchait à démontrer l'infériorité et la nécessité de la soumission de la femme!

Ceci pour la science. Voyons maintenant où nous en sommes avec la religion.

Commençons par l'Ancien Testament. Voilà ce que nous y lisons: "l'Éternel. Dieu forma une femme de la côte qu'il avait prise de l'homme et l'amena vers l'homme. Et l'homme dit: "Voici, cette fois, celle qui est os de mes os et chair de ma chair" (Genèse 2: 22-23).

Cette explication donnée sur la manière dont la femme a été créée ne doit sûrement pas être prise à la lettre, elle doit avoir une interprétation spirituelle. N'empêche que durant longtemps on considérait la femme comme "chair de la chair" de l'homme en s'imaginant que la femme n'est que chair et qu'elle n'a pas d'esprit.

Mais là où il n'y a pas d'interprétation à chercher c'est lorsque l'Ancien Testament est formel en disant à la femme "l'homme dominera sur toi" (Genèse 3: 17).

Le Nouveau Testament, tout en mettant l'accent sur l'existence de l'esprit aussi bien chez l'homme que chez la femme continue de reconnaître la domination de l'homme et la nécessité de la soumission de la femme à l'homme.

"Femmes, soyez soumises à vos maris comme au Seigneur, car le mari est le chef de la femme, comme le Christ est le chef de l'Église" (Ephésius 5: 22).

Ou encore: "Que les femmes se taisent dans les assemblées, car il ne leur est pas permis d'y parler. Si elles veulent s'instruire sur quelque chose qu'elles interrogent leurs maris à la maison, car il est malséant à une femme de parler dans une assemblée" (1 Cor. 14: 34-35).

Le Qur'an tout en accordant plus de droits à la femme admet toujours son infériorité par rapport à l'homme. "Les hommes sont supérieurs aux femmes" (IV: 38) y lisons-nous.

Pourquoi cette négligence des droits de la femme, pourrait-on se demander? Moise, jésus et Muhammad n'avaient-Ils pas le même amour paternel profond pour les femmes que pour les hommes? Si la réponse est affirmative, pourquoi alors imposer aux femmes la soumission et le silence?

C'est que précisément c'est cet amour paternel sincère qui Les a amenés à demander aux femmes de se soumettre à leurs supérieurs et de se taire dans les réunions.

En effet, la femme à leur époque était comme une enfant. C'est par amour pour l'enfant qu'on lui dit qu'il faut qu'elle se soumette à ses supérieurs et qu'il faut garder le silence dans les réunions.

Mais tous, Moïse, jésus, Muhammad savaient que cet enfant ne resterait pas éternellement enfant, qu'il grandirait et qu'alors il faudrait lui accorder les droits dont jouissent les adultes. Non seulement Ils le savaient, mais Ils l'ont même prédit avec beaucoup de précision.

Leur promesse n'est-elle pas accomplie aujourd'hui? Ne sommes-nous pas au jour Promis? Si la science a évolué au point qu'elle considère la femme comme l'égale de l'homme, la religion, elle aussi ne devrait-elle pas évoluer pour entrer dans un stade nouveau où elle accorde des droits égaux à la femme, égaux à ceux dont jouissent les hommes?

A toutes ces questions, les Baha'is répondent affirmativement en présentant leur Foi, avec ses principes et ses lois comme le stade actuel de l'évolution de la religion, stade nouveau, dont précisément l'un des principes est l'égalité des sexes, stade nouveau dont le but ultime est l'établissement de la Paix Universelle. Et cette Paix, selon les Écrits baha'is, ne peut être établie définitivement tant qu'il n'y a pas une collaboration des femmes et des hommes dans toutes les branches de l'activité humaine.

À noter que les Baha'is ne se contentent pas de la simple déclaration verbale de l'égalité des sexes. Cette déclaration purement verbale, elle se fait partout ailleurs où l'on reconnaît l'égalité des droits, mais là les dirigeants, que ce soit à l'échelon local ou national, restent toujours les hommes. Tandis que chez les baha'is les institutions qui dirigent les affaires de la communauté, que ce soit à l'échelon local ou national, se composent aussi bien de femmes que d'hommes.

Et l'on constate que pratiquement les femmes y sont plus actives que les hommes, tout en jouissant des mêmes droits que les hommes.

Pourquoi parler des droits, remarquons qu'il ne faut pas passer sous silence la question des devoirs, car, selon les enseignements baha'is les droits et les devoirs sont indissolublement liés.

Ceci dit, voyons quel est le devoir, qui tout en étant commun aux hommes et aux femmes, peut être rempli avec plus de compétence par les femmes que par les hommes.

C'est avant tout la responsabilité de ce petit monde qu'est le foyer. je dis bien "ce petit monde" car on y trouve presque tout ce que nous trouvons dans le monde extérieur, mais à une moindre échelle.

Nous y avons une école. En effet, c'est surtout à la maison que l'enfant reçoit son éducation. Et c'est la mère qui en premier lieu en porte la responsabilité.

Nous y avons une bibliothèque. En effet, un choix judicieux de livres ne fait-il pas du foyer une petite bibliothèque? Et c'est surtout la mère qui doit en prendre soin pour la bonne formation de son enfant.

Nous y avons un musée. En effet, quelques tableaux et albums ne font-ils pas du foyer un petit musée? Et c'est la mère qui doit s'en occuper, encourageant l'enfant aux beaux paysages de la nature ou aux portraits des grands hommes au lieu des tableaux pornographiques de plus en plus à la mode.

Nous y trouvons un petit restaurant. Et qui autre que la mère doit préparer les repas avec des aliments sains, au lieu de garnir la table avec des boîtes de conserves polluées par les solvants et colorants, ce qui est malheureusement le cas dans beaucoup de foyers?

Nous y trouvons un conservatoire. En effet, un ensemble de disques et cassettes ne fait-il pas du foyer un petit conservatoire?

Là encore, qui autre que la mère est plus compétente pour intéresser dès l'âge tendre son enfant à la musique de Beethoven et de Mozart, par exemple, au lieu des cassettes "Dans tes bras"?

Nous y trouvons un petit temple. En effet, quand on y prie c'est déjà un petit temple, car ce ne sont tout de même pas les pierres qui font d'une maison un temple. Qui d'autre que la mère a plus de patience et d'amour pour apprendre les enfants à prier?

Nous y trouvons un petit hôpital. En effet, avec un malade à la maison on a déjà un petit hôpital chez soi. Et qui est le mieux placé pour veiller à la santé des enfants? N'est-ce pas que c'est toujours la mère?

Nous y trouvons un petit cinéma. À vrai dire, beaucoup de petits cinémas, car avec les nombreux films à la télévision on a l'embarras du choix entre ces petits cinémas permanents. Et c'est la mère plus que le père qui est à la maison. N'est ce pas elle qui a plus de possibilité et de liberté pour choisir les films qui sont mieux indiqués pour la formation morale et intellectuelle de son enfant?

Bref, le foyer familial est un petit monde. Et le jour où ce foyer familial, dont la première éducatrice est la femme, sera considéré réellement et unanimement comme la cellule première de ce monde où nous vivons, le monde s'engagera dans l'une de ces étapes qui doivent nous amener à la PAIX.

Voilà pourquoi la Foi baha'ie subordonne la réalisation de la Paix Universelle à l'octroi de l'égalité à la femme, afin qu'elle puisse assumer ses responsabilités, non seulement au foyer, mais dans toutes les branches d'activité de l'humanité.


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5.4. Parents responsables

Un petit garçon dit à son père:

- "Papa, viens jouer avec moi."

- "je ne peux pas": répond le père.

- "Pourquoi?"

- "Pour gagner de l'argent."

- "Pourquoi faire?"

- "Pour que tu puisses manger."

- "Je n'ai pas faim, viens jouer avec moi."

Cet enfant est encore heureux de voir son père, car il y a des cas où il ne voit presque pas son père.

- "Maman" dit le petit "qui est ce monsieur qui tous les soirs entre dans ta chambre, pour en sortir le lendemain de bonne heure?"

- "C'est ton père": répond maman.

Ces deux petites histoires montrent combien en Occident nous manquons de temps pour nous occuper de nos enfants. Et pourtant nous leur achetons des jouets, des livres, des bicyclettes... croyant que c'est de tout cela qu'ils ont besoin, et oubliant que c'est surtout de NOUS qu'ils ont besoin. Nous, qui avons le temps pour aller au cinéma, au théâtre, au match de football, à la mer, mais qui n'avons pas le temps pour nous occuper de nos enfants à la maison.

Nous croyons que c'est là le devoir de l'État avec ses écoles, ses programmes scolaires et ses méthodes modernes. Quant à l'État, il dépense une grande partie de son budget pour l'instruction, il met au service des enfants une multitude de spécialistes enseignants, psychologues, pédiatres, conseillers d'orientation, etc.)

Et nous sommes heureux que l'État fasse d'eux des hommes capables de se faire un NOM et une FORTUNE, des individus PRODUCTIFS.

Souvent même, afin d'atteindre ce but, nous sommes très pressés, nous les poussons à brûler les étapes, nous substituons une croissance forcée à la croissance naturelle, nous voulons voir nos enfants devenir de bonne heure de petits adultes accomplis, comblant nos aspirations personnelles et se sentant heureux.

Et quelle est la conséquence de tous nos efforts et ceux de l'État? Nous voyons qu'ils ne sont pas heureux, qu'ils se révoltent, que le nombre de suicides augmente chaque année chez les adolescents.

En Amérique, on enregistre 200000 tentatives de suicide par an, dont 20000 avec succès. Ce qui fait plus de 500 tentatives de suicide par jour dont 50 avec succès. C'est effrayant. C'est incroyable, mais c'est vrai.

Chez les moins de 16 ans on voit se multiplier les affections dues à la nervosité, l'anxiété, comme les ulcères, l'asthme et la migraine.

Et la majorité, sous prétexte d'éviter ses inquiétudes et anxiétés, a de plus en plus recours à l'alcool et stupéfiants, phénomène qui prend des proportions alarmantes et inquiète vivement aussi bien les parents que les autorités.

Quelle est la cause de cette triste situation? C'est que non seulement nous n'avons pas le temps de nous occuper de l'éducation de nos enfants, mais que nous n'avons pas le temps de nous occuper de nous-mêmes afin d'avoir une idée claire de ce qu'est réellement l'éducation.

Selon les enseignements baha'is, il y a trois sortes d'éducation, l'éducation matérielle, l'éducation humaine et l'éducation spirituelle.

L'éducation matérielle a pour but d'assurer les meilleures conditions pour le développement du corps en facilitant les moyens de vivre et en contribuant à l'acquisition du confort et de la tranquillité. Nous nous privons de beaucoup de choses, si nécessaires, pour assurer le bien-être de notre enfant, nous lui donnons la meilleure chambre, bien aérée, bien ensoleillée, nous acceptons de vivre loin du lieu de notre travail et de perdre des heures dans les transports afin que notre enfant profite des espaces verts de la banlieue. Nous lui procurons à profusion le matériel de sport et de jeux en plein air. Tout cela pour garantir son bien-être matériel. Ce que l'animal fait avec son petit, avec peut-être cette différence que l'animal joue avec son petit et nous n'en avons pas le temps. Pour être bref, disons que l'éducation matérielle est commune à l'homme et à l'animal.

Vient ensuite l'éducation humaine, c'est ce qu'on appelle instruction, grâce à laquelle on progresse en sciences et en arts.

De cette éducation, ce sont les écoles qui s'en chargent. Quant à nous ce que nous devons faire c'est de voir quelles sont les aptitudes et les capacités de notre enfant afin de l'orienter d'une manière juste. Nous ne devons jamais chercher à satisfaire nos désirs personnels. Si l'enfant n'aime pas la médecine, nous ne devons pas le contraindre à étudier la médecine. Si nous insistons, il étudiera la médecine, mais ne se voyant pas aussi brillant que ses collègues doués en cette branche, il perdra confiance en lui-même, cette confiance qui est l'élément majeur du succès dans la vie. Il ne réussira donc pas dans la vie et il échouera dans tout ce qu'il entreprend.

Si dans les meilleurs des cas, nous consentons à ce qu'il étudie la branche pour laquelle il a des aptitudes, là encore nous devons éviter les contraintes excessives nées uniquement de notre ambition exagérée. je veux dire que si, dans le but de voir la réussite de notre enfant rejaillir sur nous-mêmes, nous le poussons à accomplir des exploits qui ne lui laissent pas un instant de repos ou de véritable réflexion, nous entravons l'épanouissement de sa personnalité, nous faisons de lui un homme qui pense comme une machine, ce qui est dangereux. Que les machines pensent comme des hommes, il n'y a pas de danger, mais que les hommes pensent comme des machines, c'est tout ce qu'il y a de plus dangereux pour la société.

En bref, étant donné que selon la Foi baha'ie le travail et l'amour vont de pair, ou plus exactement le travail est l'amour rendu visible, chacun doit faire le travail pour lequel il est fait, et que par conséquent il aime et dans des conditions telles que cet amour reste intact.

Il faut donc distinguer les aptitudes de l'enfant pour l'aider, à réussir, sans jamais le forcer à se surpasser. Sinon on risque d'éveiller chez lui de l'hostilité, de la méfiance et un sentiment de frustration, et, en définitive de faire de lui un révolté.

Pour le reste comme nous l'avons dit, c'est l'école qui se charge de son éducation scientifique autrement dit, de son instruction.

La troisième éducation est l'éducation spirituelle. Son but est l'acquisition des qualités spirituelles tels que l'amour du prochain, le service, l'honnêteté, la politesse, la droiture, etc.

Et c'est là que selon Einstein, la science boîte car, précise-t-il, c'est là le domaine de la religion.

Voyons ce que dit la religion au stade actuel de son évolution, je veux dire la Foi baha'ie.

Selon les enseignements baha'is, l'éducation spirituelle non seulement c'est à l'école qu'elle commence, non seulement au sein de la famille, mais dans le sein de la mère. Ce qui implique pour toute la période de gestation un environnement harmonieux imprégné d'amour, de justice, de droiture et, en bref, de toutes les vertus humaines. Aussi, est-il recommandé aux mères de lire durant cette période des ouvrages traitant des questions morales et naturellement des Écrits sacrés. Un tel comportement nécessite une éducation préalable qu'elles auraient dû recevoir de la part des grand-mères.

Voilà pourquoi Victor Hugo disait: "Si vous voulez avoir un homme civilisé commencez par sa grand-mère". Cette parole fut à l'époque considérée comme une plaisanterie, mais aujourd'hui c'est une vérité spirituelle sanctionnée par la science.

En effet, il a été récemment prouvé par des constatations scientifiques (faites surtout par des spécialistes allemands) que l'enfant conçu dans un mauvais environnement moral et placé immédiatement après sa naissance dans un bon environnement est très désavantagé par rapport à l'enfant conçu dans un bon environnement.

Ce bon environnement doit être maintenu après la naissance avec cette différence que la mère lira à haute voix les ouvrages qui lui sont recommandés et surtout les Écrits sacrés. Une fois de plus cela pourrait être pris comme une plaisanterie par les sceptiques, sous prétexte que le nouveau-né ne comprend rien de ce qu'on lui dit. Mais les constatations scientifiques et les statistiques ont mis en évidence l'influence ultérieure de cette lecture régulière sur le comportement de l'enfant. Il ne faut pas croire que la religion ne s'occupe que de l'éducation spirituelle en passant sous silence l'éducation physique et humaine.

Cela ne serait pas juste, étant donné qu'il existe une certaine interdépendance entre le corps et l'esprit. Ce qui fait que dans les Écrits baha'is nous trouvons des références concernant l'éducation physique et humaine.

Ainsi, par exemple, il est recommandé aux parents d'habituer les enfants dès leur naissance aux conditions difficiles, de les protéger aussi peu que possible contre le froid et la douleur, de manière à ce qu'une fois devenus adultes ils puissent jouir d'une parfaite santé physique, laquelle ne restera pas sans influence sur la santé morale. Les enfants doivent être allaités par leur mère, sauf en cas d'incapacité pour cause de maladie.

Les châtiments corporels et les injures sont déconseillés, étant donné qu'ils provoquent des réactions néfastes chez l'enfant, dont la conduite ne fait qu'empirer.

Il y a un proverbe arabe qui dit: "Prends un bâton dans la main, mais tiens le langage doux et tu iras loin." Ce qui veut dire qu'il faut faire comprendre aux enfants que l'affection dans l'éducation n'exclut pas l'autorité. Et cette autorité doit s'exercer dans le sens positif, ce qui veut dire que l'enfant doit sentir et voir qu'il y a une autorité qui le surveille pour encourager toute bonne action et appliquer une punition (verbale mais pas physique) en cas de mauvais comportement.

Ce n'est malheureusement pas le cas de nos jours, quand la punition s'exerce d'une façon qui est illustrée (bien que d'une façon exagérée) par une revue américaine qui écrit: "Vers 18 h 15 la mère excédée par une journée entière de bêtises, s'écrie: "Maintenant, ça suffit! Va dans ta chambre." L'enfant s'en va. Il y a un poste de T.V. et un réfrigérateur bien garni. On lui apporte son dîner.

Ensuite les parents sortent en le laissant à la garde d'une charmante jeune fille de 18 ans. Et on appelle ça une punition?"

L'instruction de l'enfant commence à l'âge de 5 ans et toujours dans un esprit d'amour et d'encouragement.

Quant à la responsabilité morale chez les baha'is, elle commence à l'âge de 15 ans, âge à partir duquel on doit faire son choix sur l'opinion ou la religion à adopter. Le principe directeur de ce choix reste la recherche personnelle et indépendante de la vérité, donc pas de contrainte dans la foi mais la liberté.

Une mise au point est cependant nécessaire. Sous prétexte de laisser l'enfant libre de choisir son chemin on ne doit pas s'abstenir de lui indiquer le chemin que le raisonnement et l'expérience ont montré comme étant juste.

Si par raisonnement et par expérience je suis arrivé à cette conclusion que je vivrai mieux en attirant la confiance des autres et en leur faisant confiance plutôt qu'en les trompant, je ne dois pas laisser mon enfant tromper les autres pour que par "son expérience" toujours amère il regrette son comportement et se rallie à ma conviction.

Si je sais que la drogue est un danger aussi bien pour l'individu que pour la société, je ne dois pas laisser mon enfant se droguer pour qu'il fasse "son expérience". je dois lui dire ce qu'il doit faire:

Si je sais que, par mon travail, je dois servir mon prochain et non pas le voler, il est de mon devoir d'éduquer mon enfant dans cet esprit et non pas le laisser libre de faire "son expérience", laquelle tôt ou tard lui reviendra cher.

Si je sais que l'homme doit se libérer des préjugés de race, de classe, de nation, d'opinion, de religion, je ne dois pas laisser mon enfant libre de s'empoisonner par tous ces préjugés dont souffre l'humanité.

Par contre, je dois l'éduquer dans un esprit qui le tient à l'abri de tout préjugé.

Mais tout cela fait partie de ma foi. Si c'est bon pourquoi ne pas éduquer mon enfant dans cet esprit? Arrivé à l'âge de 15 ans il sera libre de faire son choix indépendamment et personnellement.

La question qui se pose maintenant est celle-ci: "pratiquement, comment cette éducation doit-elle se faire?"

Inspirons-nous d'un exemple tiré de la nature. Lorsqu'une mère conçoit, la nature crée dans son sein l'ambiance nécessaire pour la croissance physique de l'enfant. Bien qu'ils soient impatients de voir le visage de leur cher petit, les parents ne forcent jamais la naissance. Bien au contraire, ils attendent patiemment le moment de la naissance tout en veillant à assurer les conditions nécessaires pour que le processus naturel suive son cours. Et le moment de la naissance viendra au jour prévu par la Providence.

Il faut appliquer cette même règle concernant la formation spirituelle de l'enfant: nous devons créer l'ambiance nécessaire au sein du foyer.

Quelles sont les conditions à réaliser pour créer cette ambiance?

La première condition nécessaire pour assurer le développement spirituel de l'enfant c'est de donner L'EXEMPLE.

Si les parents ne peuvent pas donner le bon exemple, qu'ils s'abstiennent au moins de donner le mauvais exemple. Car si le bon exemple est difficile à suivre, par contre, le mauvais exemple est bien plus facile à suivre et l'enfant le suivra très facilement.

Rentrant de la pêche, papa tend son panier à sa femme en disant:

- "Regarde tout ce que j'ai pris. N'est-ce pas que c'est formidable!"

- "Menteur" s'écrie son épouse "le petit t'a vu entrer chez le poissonnier. N'est-ce pas jojo?"

- "Oui maman,, j'ai vu papa passer chez le poissonnier avant de rentrer à la maison" affirme le petit.

- "C'est vrai" répond papa sans se démonter: "J'avais tellement de poissons que je suis allé lui en vendre."

Mais le malheur c'est que le petit avait bien vu que le panier était vide quand papa était entré chez le poissonnier. Papa adore mentir et on peut donc suivre son exemple. Il sera facile à l'enfant de dire un mensonge, mais difficile de n'en dire qu'un; l'enfant prendra l'habitude de mentir.

Et s'il arrive que c'est l'enfant qui donne un bon exemple, il faut nous en inspirer.

- "Maman, je peux aller jouer avec Jacques?" demande le petit.

- "Non" répond maman "ses parents l'ont mal élevé. Il est mauvais comme tout. On joue avec les enfants qui sont bons."

- "Est-ce que vous m'avez bien élevé? Est-ce que je suis bon?

- "Mais bien sur."

- "Alors Jacques peut-il venir jouer avec moi?"

Le coeur de l'enfant est pur, il n'a pas l'habitude de voir les autres d'un mauvais oeil. Devant l'enfant quand on commence à dire du mal des autres, au début on n'en voit pas l'effet néfaste. Mais aveu le temps on s'en aperçoit. C'est comme si, dans un récipient contenant de l'eau pure, vous ajoutez une goutte d'encre noire. Au début la couleur de l'eau ne change pas. Mais à force de continuer d'en ajouter on rend cette eau pure absolument noire. Il en est de même en ce qui concerne la médisance. L'effet de la médisance ne se manifeste pas immédiatement, mais à force de continuer de médire on empoisonne l'existence de l'enfant pour l'avenir.

Car l'enfant verra tout le monde d'un mauvais oeil, n'ayant confiance en personne, souffrant personnellement et faisant souffrir les autres.

La meilleure façon d'éduquer un enfant c'est donc de donner un bon exemple.

La deuxième condition indissolublement liée à la première afin de créer l'ambiance harmonieuse pour le développement spirituel de l'enfant c'est L'AMOUR.

L'enfant doit sentir qu'on l'aime, que tout ce qu'on lui demande c'est par amour pour lui, et tout ce qu'on lui interdit c'est également par amour.

Mais l'amour n'exclut pas la discipline. Les enfants tâtent toujours le terrain afin de savoir ce qu'ils peuvent se permettre. Et ils espèrent secrètement que vous ne les laisserez pas dépasser certaines limites. Autrement ils estimeront que vous n'avez "rien dans le ventre" et vous rendront responsables de tout ce qui peut leur arriver de désagréable.

La preuve que l'enfant n'est pas contre la discipline est que même s'il quitte le foyer familial et s'engage dans une bande, il s'y soumet à une discipline. N'oublions pas que les mots "discipline" et "disciple" ont la même origine "dissipulum" qui signifie "élève". Les enfants ne sont-ils pas les disciples de leurs parents quand ceux-ci font bon ménage et se soutiennent mutuellement? L'amour dont l'enfant a besoin ne se sent et ne s'apprend que si les parents eux-mêmes s'aiment.

Une troisième condition nécessaire afin de créer l'ambiance harmonieuse pour le développement spirituel de l'enfant c'est le fait de découvrir en lui les bonnes qualités et de les encourager. Car les enfants aiment ressembler à la bonne image que ses parents se font d'eux. Une telle attitude de la part des parents implique qu'à tout prix on évite les comparaisons.

Tout enfant a besoin qu'on l'apprécie tel qu'il est. La révolte d'un enfant n'est souvent qu'une réaction violente suscitée par le "pourquoi ne ressembles-tu pas à tel ou tel?" Il sent alors qu'on l'aime non pas pour lui-même mais pour son intelligence ou ses capacités exceptionnelles.

Ce n'est pas par des critiques qu'on incite l'enfant à se transformer selon notre voeu, mais par l'encouragement.

Compte tenu de ces considérations et de ce que nous, parents, n'avons pas fait ce que nous devions faire, les spécialistes en matière d'éducation nous tiennent responsables devant la crise que traverse la jeunesse aujourd'hui.

Un péché reconnu est à demi pardonné. Que les jeunes nous pardonnent pour le passé. Mais afin de ne pas recommencer ces erreurs, que les futurs parents prennent conscience dès maintenant de leurs responsabilités.


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5.5. Santé et guérison par la science et la religion

Un jour, Avicenne le célèbre médecin du lie siècle fut appelé au chevet d'un prince atteint d'une maladie qu'aucun médecin de l'époque n'avait pu diagnostiquer, ni guérir. Connaissant 17 variantes du battement du pouls, il tâta avant tout le pouls du malade. Et il en déduisit que la maladie venait d'un amour violent insatisfait. Etant sûr de son diagnostic il demanda au portier de l'Émir d'énumérer devant le prince les différents appartements du palais. Le pouls du prince s'accéléra à la mention de l'un de ces appartements. "Quelles sont les femmes qui y habitent?" demanda Avicenne au portier. Et lorsque celui-ci mentionna le nom de l'une des esclaves de l'Émir, la pulsation du prince s'accéléra. Et le mystère de la maladie fut découvert: le prince était amoureux de la belle esclave, qu'il ne pouvait pas épouser. Avicenne dit alors à l'Emir que s'il voulait que son fils guérisse, il devait permettre son mariage avec cette esclave. L'Émir consentit à contrecoeur et le prince fut guéri.

Cette histoire nous dit qu'il ne faut pas croire qu'à l'origine des maladies humaines se trouvent toujours les microbes ou les poisons ou autres agents extérieurs. La science, qui a le mérite d'avoir découvert les microbes et les moyens de les combattre, cette même science confirme la conclusion que nous avons tirée de notre histoire.

En effet, l'éminent savant Dr. Seyle dit: "Bien des maladies courantes résultent de nos réactions défectueuses en présence des difficultés de la vie, plutôt que de l'action des microbes, des poisons et d'autres agents externes".

D'une manière générale les savants attribuent les maladies aux quatre causes suivantes:

1. Les microbes;

2. La sous-alimentation et la suralimentation;

3. Les stupéfiants, poisons et polluants (air, eau, aliments);

4. Réactions défectueuses de l'homme en présence des difficultés de la vie.

C'est sûrement en partant de ces considérations que l'Organisation Mondiale de la Santé définit la santé comme un état de bien-être physique, Psychique et social.

Selon les statistiques les microbes ne jouent qu'un rôle insignifiant par rapport aux 3 autres causes. Autrement dit, le responsable principal des maladies est l'homme lui-même.

La science permet à l'homme de lutter contre les microbes, mais elle ne lui apprend pas comment il doit lutter contre lui-même, je veux dire contre sa nature animale avec ses attributs tels que la colère, la haine, la rancune, la vengeance, l'injustice, les désirs immodérés de la chair et bien d'autres vices qui directement ou indirectement entraînent la plupart des maladies.

Et c'est là qu'intervient la FOI RELIGIEUSE dont l'un des buts principaux, selon Einstein, est "de libérer l'humanité autant que possible de l'esclavage des appétits, des désirs et de la peur ("Conceptions scientifiques, morales et sociales" d'Einstein).

Cette affirmation est confirmée non seulement par l'expérience du passé, mais également par la situation actuelle, étant donné que les maladies dues à la suralimentation, à la pollution, aux tensions nerveuses se propagent surtout dans les pays où la religion est passée au second plan afin de céder la place à la science qui exerce toute sa puissance.

C'est donc la religion qui doit résoudre ce problème afin de mettre l'homme à l'abri des maladies que nous avons citées, j'entends les maladies non dues aux microbes.

Comme ces maladies dans le passé n'avaient pas constitué un problème menaçant pour la société aussi bien que pour l'individu, la religion ne s'en occupait que peu. Mais aujourd'hui étant donné la gravité du problème, la religion, au stade actuel de son évolution, je veux dire la Foi baha'ie s'en occupe.

Ceci dit, voyons quelle solution apportent les Écrits baha'is pour combattre d'une manière générale les quatre causes principales des maladies.

D'abord il y a une question qui se pose:

La religion c'est la médecine de l'âme, pourquoi s'occupe-t-elle de la médecine du corps?

A cette question, Dr. Esslemont répond en ces termes: "Selon les enseignements baha'is, le corps lui-même assume un rôle temporaire pour le développement de l'âme ' et lorsque sa fonction est terminée, il est abandonné; de même que la coquille de l'oeuf, utile pendant le développement du poussin est brisée et rejetée, une fois sa fonction accomplie. `Abdu'l-Bahá dit que le corps physique ne peut devenir immortel, car c'est un corps composé, formé d'atomes et de molécules, comme tous les composés, il doit un jour se décomposer.

Le corps doit être le serviteur de l'âme, jamais son maître; mais il faut que ce serviteur soit de bonne volonté, soumis et capable, et il doit être traité avec les égards dus à un aide dévoué.

S'il n'est pas convenablement traité, il en résulte des maladies et des troubles, et le maître en subit les conséquences désastreuses autant que le serviteur" (De Esslemont "Bahá'u'lláh et l'Ère Nouvelle").

Or le traitement le plus élémentaire que le corps exige c'est qu'il soit maintenu très proprement.

Bahá'u'lláh dit: "Soyez l'exemple de la propreté parmi les hommes. En toutes circonstances ayez des manières raffinées. Qu'aucune trace de négligence n'apparaisse sur vos vêtements".

Et pour souligner que la propreté fait partie intégrante de la piété, Il précise que toute prière dite en tenue malpropre n'est pas exaucée. On en comprend la logique si on se rappelle que prier c'est se présenter devant Dieu pour Lui parler. Est-il convenable de se présenter au Roi, en tenue négligée?

`Abdu'l-Bahá, Interprète des enseignements baha'is dit que la propreté extérieure bien qu'elle soit une chose physique a une grande influence sur la spiritualité. Or l'acquisition de la spiritualité est le but même de la religion.

Sur le plan physique l'observance des règles de la propreté n'est-elle pas le moyen le plus élémentaire pour lutter contre les microbes, autrement dit pour combattre l'une des causes de la maladie.

L'éminent savant Louis Pasteur, celui même qui a découvert l'existence des microbes était très catégorique sur l'observance des règles de la propreté. Ce qui n'empêche que parfois, par distraction, il la négligeait. Ainsi, il était un soir invité à un banquet. Au dessert, on servait des cerises. "Madame": dit Pasteur en se tournant vers sa voisine de table "tous ces beaux fruits sont peuplés de milliers de microbes invisibles et il faudra les laver avant de les manger".

Puis il demanda au maître d'hôtel d'apporter un verre d'eau et y trempa chaque cerise avant de la manger. Sa voisine de table fit de même. Mais au moment de se lever de table, Pasteur assoiffé par des cours qu'il avait fait, saisit le verre dans lequel il avait noyé les microbes et le vida d'un trait.

Une deuxième cause des maladies est la suralimentation dans les pays riches et la sous-alimentation dans les pays pauvres.

Disons d'abord que la règle la plus élémentaire pour combattre la suralimentation c'est de ne manger que lorsqu'on a faim et que lorsqu'on n'a pas d'appétit on ne se mette pas à table sous prétexte que "l'appétit vient en mangeant". De plus, il faut absolument s'en tenir à la modération dans l'alimentation.

Dans une lettre à un médecin, Bahá'u'lláh souligne avec force cette règle sans passer sous silence la mastication, cette chose apparemment si peu importante. A l'université de Yale on a pendant un mois soumis deux groupes de personnes, les uns au régime ordinaire, les autres au régime alimentaire réduit de moitié, mais mastiqué à fond. Ces derniers étaient devenus plus vifs et plus vigoureux que leurs compagnons.

Concernant la suralimentation, un journal américain écrivait: "La moitié de ce que nous mangeons suffit pour nous nourrir, l'autre moitié c'est pour nourrir les médecins".

Nos ancêtres, à leur tour, ne disaient-ils pas que c'est dans l'estomac que les maladies trouvent leur abri.

Quant à la solution du problème de la sous-alimentation, la Foi baha'ie propose un ensemble de règlements et de principes dont l'application réglera la question à l'échelon mondial.

Et c'est grâce à l'application de ces mêmes règlements et principes que ce problème de sous-alimentation est résolu au sein des communautés baha'ies à travers le monde.

Comment les baha'is procèdent-ils, nous en parlerons lors d'une autre conférence.

La troisième cause des maladies, comme nous l'avons dit, ce sont les stupéfiants, poisons et polluants.

Permettez-moi de citer dans cette catégorie avant tout l'alcool.

Les baha'is ne prennent pas d'alcool aussi bien dans leur propre intérêt que dans l'intérêt général.

En effet, les recherches scientifiques ont démontré que beaucoup de maladies (du foie, du coeur, du cerveau etc.) sont dues à l'usage de l'alcool, qui, en moyenne, diminue la durée de vie de l'individu de 10 à 12 ans.

Sur le plan social quelqu'un a dit non sans raison que l'alcool des uns fait le malheur des autres.

La revue Times (22 avril 1974) écrit qu'un tiers des accidents mortels de la route en Amérique est dû à l'alcool et qu'également un tiers des détenus américains sont en prison à cause de l'alcool. La même revue précise que l'alcool fait perdre à l'économie américaine 15 billions de dollars par an.

A ce propos, rappelons-nous qu'en Amérique il y a 500 tentatives de suicide par jour et que là encore l'alcool, dont les effets néfastes sur les nerfs et le cerveau sont indéniables, a sa part de responsabilité.

La situation est non moins triste en Europe, et surtout en France, ce pays qui gagne 4 milliards de francs grâce à la taxe sur l'alcool et dépense le double de cette somme pour remédier aux dégâts causés par l'alcool. Quant aux pertes humaines dues à l'alcool, selon les statistiques françaises il y a 100 morts par jour attribuables aux effets directs et indirects (accidents de route, maladies mentales ...) à l'usage de l'alcool.

Qu'est-ce qui peut changer cet état de choses si triste et si tragique? Des conférences? Des émissions à la radio ou à la télévision? Ou l'augmentation de la taxe sur l'alcool? Tous ces moyens peuvent ne pas rester sans effet, mais il n'y a qu'une chose et une seule qui est le moyen le plus efficace, c'est l'EXEMPLE! Et les Baha'is sont les premiers à donner l'exemple de l'abstinence de l'alcool.

On entend parfois les gens dire qu'un petit verre ne fait tout de même pas de mal, car il fait de vous un homme nouveau. Mais l'ennui avec l'alcool c'est qu'il est vrai qu'un petit verre fait de vous un homme nouveau, mais que cet homme nouveau a envie lui aussi, d'un petit verre qui fait de lui un homme nouveau... Ce qui fait qu'en définitive on perd la tête. Une anecdote illustre bien l'effet de ces "petits verres".

Un homme va chez le dentiste pour se faire arracher une dent. A peine installé dans le fauteuil redoutable, il commence à trembler.

- "Donnez lui un petit verre" dit le dentiste à l'infirmière.

- "Ca va?"

- "J'ai toujours peur."

- "Donnez lui un autre verre. Ca va maintenant?"

- "Toujours pas. J'aimerais bien un troisième verre."

- "Dormez lui un troisième verre. Alors, mon ami?"

- "Maintenant je voudrais voir qui oserait m'arracher une dent. Moi je lui casserai les dents!"

D'autres prétendent que l'alcool noie leur chagrin.

Là encore ils verront que c'est une erreur, car avec le temps ils s'aperçoivent que l'alcool au lieu de noyer leur chagrin, l'a arrosé.

En ce qui concerne le problème des polluants de l'environnement et des aliments (ces derniers avec une multitude de colorants, solvants et conservants) ce n'est pas une question à résoudre à l'échelon local ou national. Peut-on par exemple empêcher la pollution des eaux d'une rivière à l'échelon d'un seul pays au moment où cette rivière traverse beaucoup de pays? Non, c'est donc un problème à résoudre à l'échelon mondial. Ce qui implique, comme premier pas, une prise de conscience universelle par l'éducation et l'entraînement. Et c'est ce que font précisément les baha'is en attendant que le monde change, et c'est là que se trouve la solution ultime.

Quelle belle illustration est donnée par le Professeur Levy qui parle d'un homme accroupi dans une boîte trop petite que représente son environnement, auquel il est mal adapté. Le malade s'adresse au chirurgien qui propose de le tailler à la mesure de sa boîte, le médecin lui donne des calmants et le psychiatre dit qu'il faut s'arranger pour que le malade accepte son environnement, car la boîte représente la meilleure boîte disponible à l'heure actuelle. La dernière solution, ajoute le Professeur Levy lui-même, c'est de CHANGER LA BOITE.

Ce changement ne peut se faire, selon les baha'is que par un Nouvel Ordre Mondial d'origine divine car tous ces ordres, produits du cerveau humain, ont lamentablement échoué.

Et nous arrivons à la quatrième cause des maladies humaines, cette cause qui est due aux réactions défectueuses de l'homme en présence des épreuves inévitables de la vie.

La première réaction défectueuse de l'homme en présence des difficultés de la vie c'est l'anxiété et le souci.

Le Dr. Cronin établit ainsi la liste des soucis de l'homme (Sélection, juillet 1954):

Catastrophes qui n'arrivent jamais: 40%

Choses passées auxquelles tous les soucis du monde ne changent rien: 30%

Inquiétudes de santé dénuées de fondement: 12%

Divers soucis mineurs: 10%

Soucis réels justifiés: 8%

Nous voyons ainsi que l'écrasante majorité de nos soucis ne sont pas justifiés. Et ce qui est triste c'est que, par contre, la majorité des maladies sont dues à ces soucis non-justifiés, autrement dit, à l'inquiétude, à l'anxiété et la peur de ce qui va arriver. L'être humain qui s'inquiète de ce qui n'arrivera jamais est comparable à l'animal qui a peur de ce qui ne lui arrivera jamais: il meurt lentement. En effet, on a fait il expérience suivante: on a placé une souris et un chat dans des cages contiguës. Et l'on a constaté qu'après un certains temps la souris est morte. Cette anxiété est justifiée pour l'animal: la souris ne peut pas penser qu'il est impossible que le chat puisse sortir de la cage. Mais l'homme sait penser, il ne doit pas s'inquiéter de ce qui ne lui arrivera jamais.

Or l'homme d'aujourd'hui s'inquiète pour un rien, se laisse facilement dominer par l'angoisse, ce qui prépare le terrain pour bien des maladies et même le cancer. Le Professeur Forgue de Montpellier ajoute à la liste noire des causes du cancer: "le désarroi moral de notre époque, la mauvaise hygiène nerveuse de nos contemporains, les angoisses de l'heure présente".

Soumis aux épreuves il ne doit pas se dire: "je suis fini, aucune force ne peut me venir en aide".

S'il se le dit, c'est qu'il manque de foi, c'est qu'il ne croit pas qu'il y a un Dieu qui est toujours là pour l'aider à la condition qu'il s'adresse à Lui.

L'inquiétude et l'anxiété ne sont que les signes du manque de foi C'est pour cela que les Écrits baha'is proscrivent les soucis injustifiés tout en inspirant à l'homme la confiance en lui-même étant donné qu'il a un Père toujours prêt à l'assister.

Voilà pourquoi la prière, la méditation et l'action sont les moyens les plus puissants contre l'anxiété (sujet que nous traiterons lors d'une autre conférence).

Une autre forme de réaction défectueuse de l'homme en présence des difficultés ou épreuves de la vie, c'est la colère.

Qu'est ce que la colère? Le dictionnaire dit que c'est l'irritation de l'âme offensée. Mais il est naturel que toute âme offensée soit irritée, et si cette irritation est de courte durée l'organisme est armé pour contrecarrer les effets de cette irritation. Mais si cette irritation dure, alors l'organisme reste impuissant et les effets néfastes de l'irritation se manifestent. C'est cela la colère. L'homme offensé ne doit donc pas permettre que son irritation continue, il doit dominer sa colère. Il y parvient encore une fois par la foi, car c'est une question d'éducation qu'on reçoit. Et si on remonte à l'origine on voit que la source de l'éducation c'est la foi religieuse. Seulement dans le passé, à l'âge de l'enfance humaine, d'après les Écritures quand l'homme se mettait en colère, c'est le diable qui entrait en lui et l'homme devait le chasser. Mais aujourd'hui la Foi baha'ie dit que la colère c'est un attribut de la nature animale de l'homme, nature qu'il doit et peut dominer.

Une autre forme de la réaction défectueuse de l'homme en présence des épreuves ou difficultés de la vie c'est la haine.

Les effets de la haine sur la santé sont tellement néfastes que les savants comparent la haine à l'autodestruction.

Du point de vue spirituel, la haine, bien plus que l'anxiété, est le signe du manque de foi, Car le premier signe de la foi c'est l'amour. Et la haine est l'absence d'amour. Donc l'absence de signe de foi. A partir du moment où l'on s'engage dans la Foi, on s'engage à ne pas garder la moindre trace de haine dans son coeur, et, par conséquent, à éliminer toute cause de maladies dues à la haine.

La Foi nous apprend encore bien des choses qui contribuent au maintien de notre santé. Mais cela ne veut pas dire qu'on néglige les mérites de la science. Là-dessus les Écrits baha'is sont explicites. Ainsi un des commandements baha'is est le recours au médecin en cas de maladie et au traitement par des médicaments prescrits par lui. Bien entendu l'habilité du médecin doit être prise en considération, comme le précise d'ailleurs les Écrits baha'is.

Dans l'antiquité chaque peuple avait sa façon pour mettre à l'éprouve l'habilité du médecin. Les Chinois, par exemple, faisaient un contrat avec leur médecin. Suivant ce contrat mensuellement ils leur payaient une certaine somme et le jour où ils tombaient malades, ils ne lui payaient plus rien jusqu'à ce qu'ils soient guéris par lui, Les Egyptiens agissaient d'une autre façon; ils ne payaient leur médecin que durant les premiers jours de la maladie, si durant cette période, le médecin n'arrivait pas à guérir le mal, c'est lui qui devait commencer à payer le malade jusqu'à ce qu'il soit guéri.

Heureusement que de nos jours nous n'avons pas besoin de telles pratiques, étant donné l'immense progrès réalisé par la médecine et toute une vie que nos médecins consacrent à l'art de guérir.

Seulement là où le médecin ne peut plus manifester son habilité c'est lorsque le malade réagit mal aux épreuves de la vie, mal qui ne peut être guéri que par la Foi.

Par conséquent, nous sommes en droit de tirer cette conclusion que pour notre santé et notre guérison nous avons besoin de la science et de la religion.


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5.6. La clef du matin et le verrou du soir (prière)

"La clef du matin et le verrou du soir". C'est en ces termes que s'exprimait Ghandi en parlant de la prière, cette prière pour laquelle il se levait avant l'aube tous les jours. Ne voulait-il pas dire par là que la prière nous donne le matin la solution de nos problèmes et que le soir, quand la journée est finie, la même prière nous apporte la tranquillité d'esprit et la paix de l'âme?

Combien ce grand homme avait raison et ce qu'en disent la science et la religion, voilà en substance l'objet de mon exposé de ce soir.

Un grand médecin psychiatre anglais a fait l'expérience suivante: sur trois soldats dont chacun devait serrer la poignée d'un appareil enregistreur de la force physique, la puissance de l'étreinte du soldat moyen était de 45 kg. Mais lorsque les soldats se laissèrent persuader par le grand spécialiste qu'ils étaient bien plus forts que le soldat moyen, ils constatèrent que leur force avait doublé.

Cette expérience montre combien nos capacités sont influencées par notre état d'esprit, combien puissante est la force de la conviction, de la Foi.

Maintenant supposons que nous connaissions un grand médecin en qui nous croyons, en qui nous avons foi, et que nous sommes convaincus qu'il a le pouvoir extraordinaire de nous rendre plus forts surtout moralement.

Ce Grand Médecin pour nous, croyants, est Dieu et notre recours à Lui est la prière.

Dire que notre foi en l'efficacité de la prière ne peut influencer notre force morale c'est dire que la conviction mentale des soldats ne peut avoir aucune influence sur leur force physique, ce que l'expérience ne confirme pas.

Il en est de même en ce qui concerne les guérisons par des moyens agissant sur l'esprit des patients, guérisons pratiquées aussi bien dans le passé que de nos jours, et que personne ne peut contester.

Le Docteur Esslemont écrit:

"Quand les potentialités réservées au traitement mental et spirituel seront mieux comprises, l'art de guérir se trouvera transformé et ennobli et l'efficacité en sera considérablement accrue. Lorsque ce savoir et ce pouvoir nouveaux de guérisseur se combineront avec l'espoir et la foi du patient, des résultats merveilleux seront acquis."

Qu'il s'agisse du traitement mental pratiqué par les psychiatres ou de la guérison spirituelle, dans un cas comme dans l'autre, c'est une question d'expérience personnelle à tenter afin de croire en leur efficacité.

Et il en est de même en ce qui concerne l'effet de la foi et de la prière. C'est encore une question d'expérience absolument personnelle. Et l'objet de mon exposé n'est nullement de vous en convaincre, car je n'y arriverai jamais comme je n'arriverai jamais à dormir à votre place ou penser à votre place.

Comment puis-je vous convaincre de votre stabilité sur une bicyclette en mouvement? Le jour où ayant écarté la peur et le doute, vous montez sur une bicyclette, vous vous mettez en marche avec la ferme résolution de persévérer malgré les chutes inévitables du début, alors et alors seulement vous serez convaincu de votre stabilité.

Et j'insiste bien, c'est à vous-même de vous convaincre des effets de la foi et de la prière.

Le but de mon exposé c'est de dire ce qu'en pensaient les savants dans le passé, ce qu'ils en pensent aujourd'hui et de voir ce qu'en dit la religion au stade actuel de son évolution, je veux dire la Foi baha'ie.

Galilée, l'illustre mathématicien, physicien et astronome du 17e siècle ne croyait pas à la prière; or il se trouve qu'il perdit la santé et qu'une grande partie de ses expériences ayant échoué, il fut tout près de la ruine. C'est alors que pour s'évader de chez lui, il se dirigea vers une église. Arrivé là il se dit "je pourrais bien tenter l'expérience. Mais que vais-je demander par ma prière: la santé? l'argent?". Et soudain il s'écria; "Oh, Seigneur, je vous supplie, éclairez mon esprit pour que je puisse faire quelque grande découverte de nature à faire progresser les connaissances humaines". Et il reprit courage pour recommencer ses travaux qui aboutirent à la découverte du télescope.

Avicenne, l'éminent savant et médecin du lie siècle, dit que chaque fois qu'il avait un problème difficile à résoudre, ou bien qu'il se trouvait dans une impasse, il avait recours à la prière et il réussissait.

Au moment où la guerre civile faisait rage et où le sort de l'Union était en jeu, Abraham Lincoln, ce héros de l'abolition de l'esclavage, disait: "je parle à Dieu tous les jours et en le faisant j'acquiers la tranquillité d'esprit et j'entends une suggestion sur la voie à suivre... je ne serais qu'un vaniteux imbécile si j'espérais pouvoir prendre un engagement dans la vie sans cette sagesse qui vient de Dieu et non des hommes".

Benjamin Franklin, savant et homme d'État américain, au moment où la menace pesait sur l'Assemblée Constituante fit appel à la prière en ces termes mémorables:

"J'ai vécu longtemps, et plus je vis, plus je vois des preuves convaincantes que Dieu dirige les affaires des hommes. je crois fermement que sans Son assistance dans l'érection de cet édifice politique nous ne réussirons pas plus que les constructeurs de la Tour de Babel".

Quant à l'opinion des savants de notre siècle, citons à titre d'exemple, l'avis d'un médecin-biologiste, d'un chimiste et d'un physicien, tous connus mondialement.

Le Prix Nobel, Alexis Carrel, savant français de réputation mondiale a étudié pendant la Guerre de 14-18 le processus de cicatrisation des blessures des soldats. Et il a constaté que ce processus se faisait bien plus rapidement chez le soldat croyant qui priait et bien lentement chez le soldat qui se disait incroyant et ne priait pas.

Partant de ses nombreuses expériences, il arrivait à cette conclusion que "l'action de la prière sur l'esprit et le corps se démontre au même titre que celle des glandes".

Et l'éminent savant dans son ouvrage sur la prière s'écrie: "La prière est notre principale source de puissance. Mais elle est lamentablement inexplorée".

Parlant du caractère moral de l'individu, le même savant écrit: "Il a été démontré qu'à égalité de développement intellectuel, le caractère et la valeur morale sont plus élevés chez les individus qui prient que chez ceux qui ne prient pas".

L'un des plus grands cerveaux de notre siècle, professeur Millikan (deux fois Prix Nobel) dit: "La force de la prière est aussi réelle que la force de la gravité; et c'est la plus puissante forme d'énergie que l'on connaisse, mais l'homme dans son ignorance y attache peu d'importance".

A propos de la puissance de la prière le célèbre physicien Steinmetz écrit: "Le jour où l'homme pourra inventer un instrument pour mesurer la puissance de la prière, il pourra mesurer la puissance la plus grande de l'univers".

La puissance de la prière est donc indéniable peu importe si nous ne connaissons rien sur le mécanisme précis de son influence.

L'auteur de plus de deux mille inventions, le savant génial Edison écrit: "Nous ne connaissons pas la millionième partie d'un pour-cent de quoi que ce soit. Nous ignorons ce que c'est que l'eau, ce que c'est que l'électricité, ce que c'est que la chaleur. Nous ne pouvons faire sur tout cela que des quantités d'hypothèses, et rien de plus. Et malgré tout cela, notre ignorance de ces choses ne nous prive pas de leur usage".

Il en est de même en ce qui concerne la prière. Nous ne connaissons pas la millionième partie d'un pour-cent de cette source de force mystérieuse. Mais ce que nous en connaissons suffit pour nous permettre de nous en servir.

Mais comment nous en servir?

La réponse à cette question nous est donnée par la religion - C'est précisément à ce sujet que les enseignements baha'is disent que par le terme PRIÈRE il ne faut pas entendre la récitation automatique de quelques paroles adressées à Dieu. Non, pour les Baha'is, la PRIERE est indissolublement liée à la MÉDITATION et à FACTION. C'est comme un tricycle, enlevez une roue et ce n'est plus un tricycle. Les Écrits baha'is attachent une telle importance à la méditation qu'ils disent: "Une heure de méditation vaut soixante-dix années de dévotion".

Quant à l'action c'est le but même de la prière. On prie pour agir. Et pour souligner l'importance de l'action, les Écrits baha'is disent qu'une bonne action accomplie dans un esprit de service est déjà une prière.

En priant, en s'adressant à Dieu, on n'oublie jamais ce qu'on doit faire soi-même. Ainsi, par exemple, quand on récite une prière de guérison on a, selon la Foi baha'ie, le devoir de s'adresser à un médecin habile et de suivre ses prescriptions.

A ce propos, permettez-moi de vous raconter une petite histoire:

Deux paysannes se rencontrent à la sortie de la messe.

- "Que se passe-t-il ma bonne dame?" questionne la première.

- "Ne m'en parlez pas, ma pauvre amie; voilà six mois que je prie le bon Dieu d'envoyer un bébé à ma fille aînée qui n'a pas d'enfant, bien qu'elle soit mariée depuis deux ans. Toujours est-il qu'il a envoyé un bébé, mais à ma fille cadette qui n'est pas mariée".

Dans les conditions où se trouvait cette pauvre maman, une mère baha'ie au lieu de prier pour que sa fille mariée devienne enceinte préfère prier pour mieux agir, mieux combattre le relâchement moral qui fait que les filles deviennent des mères célibataires, Car le but de la prière reste toujours l'action.

Quant aux étapes à franchir pour arriver à ce but, à ce stade final de l'action selon Shoghi Effendi (Le successeur d`Abdu'l-Bahá) elles sont au nombre de cinq:

PREMIÈRE PHASE: Prier et méditer sur le problème ou le besoin en question. - Après avoir récité les paroles de la prière révélée il faut apprendre à rester en silence en état de méditation. Et c'est très important, car en général, une fois qu'on a récité les paroles de la prière on croit que la prière est finie. La récitation des paroles de la prière doit être accompagnée de la méditation, étant donné que c'est par la méditation que nous recevons l'inspiration. D'ailleurs c'est naturel qu'on nous demande d'attendre un peu après la récitation de la prière. En effet, la prière n'est-elle pas une conversation avec Dieu? Mais conversation veut dire parler et écouter. Par conséquent, une fois que nous avons parlé à Dieu, laissons-Le nous parler, et nous inspirer l'idée à suivre. Et une fois que cette idée bien définie nous vient à l'esprit dans un état de profonde communion avec Dieu, nous devons faire le second pas qui est celui de la prise de décision.

DEUXIEME PHASE: Prendre une décision. - L'idée qui nous est venue subitement à l'esprit, apparaît comme une solution possible de notre problème. Mais alors la raison intervient, et dit: "Ce n'est pas possible. je n'ai jamais agi de cette façon". On est tenté d'hésiter. Et c'est ce qu'il faut précisément éviter. Il faut décider d'essayer de réaliser l'idée en question, aussi impossible qu'elle puisse paraître à première vue. Vient ensuite

LA TROISIÈME PHASE: Maintien de la décision Prise. - Et c'est non moins important. Il y en a beaucoup qui arrivés à cette phase échouent, et la décision qu'ils ont prise reste un vague souvenir, une sorte de rêve. Ils se sentent incapables de la maintenir. Ce n'est pas sans raison qu'un écrivain a dit: "La décision est comme une aiguille, vous la prenez, elle cherche à glisser, à s'en aller". Il faut donc maintenir à tout prix la décision prise et passer immédiatement à

LA QUATRIÈME PHASE: Avoir la confiance que l'idée qui nous est venue est bien la réponse à notre demande. - C'est donc la phase de la confiance. Il faut avoir la confiance que si d'autres ont réussi après s'être fiés à la prière, il n'y a aucune raison pour que nous ne réussissions pas.

A ce propos, permettez-moi de vous raconter une histoire.

Comme il n'avait pas plu depuis longtemps, les habitants d'un pays se mirent à prier. Mais aucune prière ne fut exaucée et la sécheresse continua. Alors on demanda à une fillette de faire une prière. C'est ce qu'elle fit et il a plu abondamment. On s'est demandé quelle avait été l'attitude de la fillette pour que sa prière soit si vite exaucée. Et l'on s'est aperçu qu'elle était sortie avec un parapluie.

LA CINQUIÈME PHASE: Agir comme si l'idée qui nous est venue s'est déjà - réalisée et que notre problème est résolu. - C'est surtout cette phase de la prière qui exige une foi intense, une foi d'une intensité telle qu'elle nous présente notre problème comme résolu. Plus forte est notre foi, plus puissante est l'assistance de Dieu dans cette phase d'action.

Puisque nous parlons de la phase d'action à laquelle doit aboutir toute prière précisons bien qu'il ne s'agit pas d'une action en contradiction avec la loi naturelle. Car nombreux sont justement les gens qui ne croient pas à l'efficacité de la prière parce que, selon eux, si elle était exaucée cela impliquerait des dérogations arbitraires aux lois de la nature. En réponse à cette question le Docteur Esslemont écrit: "Par analogie on peut élucider ce problème. Si un aimant est présenté au-dessus d'un tas de limaille de fer, celle-ci se soulève et s'accroche à l'aimant, mais cela ne constitue en rien une dérogation à la loi de la pesanteur. Le pouvoir d'attraction continue d'agir sur la limaille tout comme auparavant. Ce qui s'est produit, c'est qu'une force supérieure est entrée en action, force dont le pouvoir est aussi régulier et contrôlable que celui de la pesanteur.

Les Baha'is pensent que la prière déclenche des forces d'un ordre supérieur quoique peu connues encore; mais il semble qu'il n'y ait aucune raison de croire ces forces plus arbitraires dans leur action que ne le sont les énergies physiques. Ce qui les différencie, c'est qu'elles n'ont pas encore fait l'objet d'une étude et d'une expérimentation approfondies: leur action ne nous parait mystérieuse et inexplicable qu'en raison de notre ignorance."

Et l'auteur continue en disant: "Un autre problème qui se pose pour certains est le fait que la prière semble une force trop insignifiante pour produire les grands résultats qui lui sont attribués. Par analogie, nous pouvons aussi éclaircir cette difficulté: une force minime appliquée à la vanne d'un réservoir, peut libérer et régulariser une quantité énorme de puissance hydraulique; une force infime appliquée au gouvernail d'un immense paquebot peut en diriger la course. Selon le point de vue baha'i, le pouvoir qui exauce les prières est l'inépuisable puissance de Dieu. Le rôle du suppliant se borne à mettre en oeuvre la petite force nécessaire pour en libérer le flot ou orienter le cours de la grâce divine toujours prête à combler ceux qui ont appris à y faire appel".

Oui, il faut apprendre à faire appel à Dieu, afin d'exploiter cette source de force inépuisable. C'est ce que s'efforcent de faire les baha'is puisque toutes leurs réunions consultatives commencent par une prière grâce à laquelle ils espèrent être guidés et assistés par Dieu. Et profitant de la moindre occasion humblement, ils suggèrent à d'autres d'en faire autant, Ainsi, par exemple, au quatrième étage du bâtiment des Nations Unies, il y a une chambre destinée à la prière. Qui en a donné l'idée? C'est une chinoise et cette chinoise était une Baha'ie.

Quand verra-t-on cette chambre pleine de monde? Dieu seul le sait. Pour le moment elle reste vide.


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5.7. L'histoire se répète

Un Arabe voyageait à dos de chameau. Soudain l'animal se mit à ruer. L'Arabe fut jeté à terre et blessé. Furieux il jura de se débarrasser de son chameau en le vendant pour un sou. Il en informe sa femme.

- "Mais tu n'as pas perdu la tête?" lui dit celle-ci. "C'est notre seul bien qui permet de gagner notre pain quotidien".

- "C'est un serment que j'ai fait pour me venger du chameau. je serais un homme malhonnête si je rompais mon serment. Rien à faire, je le vendrai pour un sou".

Quelques jours après, soulagé de ses douleurs l'Arabe dit à sa femme:

- "Au fond tu as raison et moi aussi j'ai raison si je tiens à honorer mon engagement. Mais j'ai trouvé un moyen pour m'en tirer. je vais attacher un chat au cou du chameau et je ne les vendrai qu'ensemble, jamais séparément. Seulement le chameau pour un sou, mais le chat pour 10000 dinars."

C'est ce qu'il fit et naturellement personne n'a acheté le chameau. Et l'Arabe a eu sa "conscience tranquille" puisque, estimait-il, de cette façon il a honoré son engagement.

Cette histoire est instructive en ce sens qu'il y a des gens qui s'engagent à faire quelque chose, mais lorsqu'il s'agit d'honorer leur engagement, ils ont recours à la ruse et à l'hypocrisie.

Or l'engagement le plus courant qu'on prend dans la vie c'est lorsqu'on choisit un travail par lequel on veut gagner sa vie. Si au lieu de mettre tout son coeur dans la bonne exécution de ce travail on fait tout son possible pour sauver seulement les apparences, ce n'est plus du travail qu'on fait, mais c'est de la ruse et de l'hypocrisie.

C'est le cas de ce laitier dont le lait met l'eau à la bouche. C'est le cas de ce fermier qui ajoute de la margarine à son beurre. C'est le cas de ce plombier qui met plus de temps qu'il n'en faut pour faire un petit travail afin de présenter une facture injustifiable. C'est le cas de cet avocat à qui sa pauvre cliente dit:

- "Maître, mon dossier est très simple."

- "Remettez-le moi, je vais le compliquer": répond-il.

C'est le cas de ce haut fonctionnaire à qui un entrepreneur voulait offrir une voiture:

- "Monsieur, mon sens de l'honneur ne me permet pas d'accepter un tel cadeau", lui dit-il.

- "je comprends très bien votre point de vue. Mais voici ce que je vous propose. je vous vends cette voiture pour 1000 F."

- "Dans ce cas, j'en achèterai deux."

Le mal n'est pas grand tant qu'il se présente sous forme de cas isolés mais lorsqu'il devient épidémie c'est la décadence de la société, c'est ce qu'on appelle la crise de la civilisation.

Et ce qui est bien plus grave, bien plus dangereux, c'est lorsque ceux qui ont un tel comportement ont recours à toutes sortes de démonstrations ou d'ostentations pour montrer qu'ils ont la foi, qu'ils s'en tiennent aux vertus qu'ils n'ont pas. C'est lorsque la société se trouve dans de telles conditions qu'apparaît le plus mystérieux et le plus merveilleux d'entre les hommes. Le Prophète selon les spiritualistes, le Mutant selon les matérialistes.

Les pages de l'histoire nous en citent plusieurs exemples.

Nous allons en rappeler un. C'est le cas de Jésus-Christ face au monde corrompu de son époque, un monde souffrant de ce mal qu'on appelle hypocrisie. On en a une idée par la description que nous donne l'Évangile. Ainsi, pour montrer qu'on était pieux il ne fallait pas travailler le jour du sabbat. Et comme guérir un malade était considéré comme un travail, on laissait souffrir le malade sans lui venir en aide, sans quoi on aurait été baptisé d'infidèle.

Puisqu'il fallait prier pour montrer qu'on était pieux, on priait même dans les coins des rues afin d'être vu par les hommes.

Puisqu'il fallait jeûner pour montrer qu'on était pieux, on le faisait en prenant un air triste et en se défigurant le visage, afin d'étaler davantage sa piété.

Et lorsqu'on faisait l'aumône on sonnait de la trompette afin d'être glorifié par les hommes.

C'est dans de telles circonstances, dans une telle société qu'apparaît Jésus-Christ et qu'Il dit:

"N'est-il pas permis de faire du bien les jours de sabbat? Guérir un malade n'est-ce pas faire du bien? Lequel d'entre vous s'il n'a qu'une brebis et qu'elle tombe dans un fossé, le jour du sabbat, ne la saisira pas pour l'en retirer? Combien un homme ne vaut-il pas mieux qu'une brebis?"

A ceux qui faisaient l'aumône rien que pour montrer qu'ils étaient pieux, Il dit: "Ne fais pas comme les hypocrites. Quand tu fais l'aumône que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta main droite, afin que ton aumône soit secrète".

A ceux qui faisaient des prières dans les rues pour être vus Il dit: "Quand tu pries, entre dans ta chambre, ferme ta porte et prie ton Père".

A ceux qui se défiguraient pour montrer qu'ils jeûnaient, Il dit: "Quand tu jeûnes, parfume ta tête et lave ton visage afin de ne pas montrer aux hommes que tu jeûnes, mais à ton Père en secret".

La question qui se pose est celle-ci: Est-ce ainsi que se comportaient toujours les juifs.? L'hypocrisie était elle toujours monnaie courante chez les juifs? Loin de là! La pureté de leur morale était telle que les philosophes comme Socrate s'en inspiraient pour éduquer les autres. Ils avaient à leur disposition l'enseignement de Moise, qui comme l'eau qui est la source de la vie physique, leur donnait la vie spirituelle. Mais cette EAU n'avait plus d'effet sur eux. Il fallait donner à cette eau un nouvel effet, un effet qui fait de l'homme un homme nouveau, comme le fait le vin. Et ceci lie pourrait se faire qu'en épousant la doctrine chrétienne. C'est ce que l'Évangile rapporte sous forme imagée en disant qu'à l'occasion du mariage, Jésus a transformé l'eau en vin.

Ceci dit, comparons le passé avec le présent. Si par suite de la décadence morale, la civilisation judaïque s'effondra et que les juifs devinrent des prisonniers tantôt des Chaldéens, tantôt des Romains, aujourd'hui notre civilisation n'est-elle pas en train de s'effondrer, ne sommes-nous pas des prisonniers d'un autre genre, ne sommes-nous pas des esclaves de notre propre univers technique évoluant à une allure vertigineuse et mettant chaque jour à notre disposition une multitude d'appareils ingénieux? Pour les acquérir, ou pour montrer que nous sommes aussi capables que les autres de les acquérir, n'avons-nous pas recours à toutes les astuces, hypocrisie, ruse, tromperie et mensonge... tous les moyens sont bons, puisque l'opinion publique admet la formule "la fin justifie les moyens".

La fin étant exclusivement le bien-être matériel dont la garantie fait de l'homme un acheteur, un consommateur et un gaspilleur, rouage indispensable, d'ailleurs, dans un gigantesque processus de production. Une telle structure sociale tient l'homme continuellement occupé, ne lui laissant pas un instant libre pour repenser le sens profond de la vie. Et s'il a un moment de liberté ou bien s'il est disposé à faire quelque chose de plus que la production et la consommation, il manifeste contre la pollution atmosphérique. Et personne n'ose élever la voix contre la pollution morale. Nos savants concentrent leurs efforts sur la conquête de l'espace au lieu de penser à la paix sur la terre.

Nos dirigeants se réunissent pour discuter du désarmement et le résultat est qu'un journal écrit: "On a l'impression que la prochaine guerre sera déclarée suite à ces conférences sur le désarmement".

On opère les coeurs pour ajouter des années à la vie au lieu de penser d'ajouter de la vie aux années. On oublie que ce n'est pas par des opérations chirurgicales qu'on peut changer les coeurs des hommes, pour y installer la franchise, la sincérité, l'affection et le sentiment de fraternité, Ce n'est pas en laboratoire qu'on peut créer des hommes nouveaux. Il faut une fois de plus qu'une main Invisible donne à l'EAU dont nous disposons, un effet nouveau, la transformer en VIN, lequel fera de nous des hommes nouveaux.

Cette transformation de l'eau en vin a eu lieu Il y a plus de cent ans par la Révélation baha'ie, dont le VIN a enivré les premiers adeptes à un tel point que plus de 20000 d'entre eux, originaires de toutes religions, opinions, races et classes ont payé de leur vie pour la renaissance de la Foi. Exactement comme les premiers Chrétiens.

C'est donc la même EAU à qui Dieu, une fois de plus, a donné un effet nouveau afin de nous baptiser.

Et cette fois, ce baptême n'est plus un symbole, mais un vrai baptême, tel que l'entendaient jésus et ses Apôtres.

En effet, ne lisons-nous pas dans le Nouveau Testament "Le baptême n'est pas la purification du corps mais l'engagement d'une bonne conscience envers Dieu" (I Pierre Ill: 20-21).

Le baptême est donc un engagement qu'on prend envers Dieu. Quel engagement? L'engagement d'AIMER.

En effet, le baptême d'EAU signifie le baptême d'AMOUR. C'est ce que nous allons voir.

Selon la religion, comme selon la science, l'eau est le symbole de la vie, sans eau il n'y -a pas de vie. Donc l'eau = ce qui donne vie.

Or, toujours selon la même science et la même religion, sans amour il n'y a pas de vie.

Nous sommes passés de la mort à la vie parce que nous AIMONS les frères (I jean 111: 14) De même en science c'est l'attraction (l'amour) entre les particules qui est à l'origine de la vie. Donc

l'amour = ce qui donne la vie.

Si donc l'eau est ce qui donne la vie et l'amour aussi est ce qui donne la vie, parler du baptême d'eau c'est parler du baptême d'amour.

Aujourd'hui, quand nous comprenons le vrai sens du baptême nous pouvons dire qu'on reconnaît le Chrétien d'aujourd'hui non plus par le baptême d'eau mais par le baptême d'amour. C'est ce que précisément entendait jésus lorsqu'Il disait: "A ce signe, ils connaîtront tous que vous êtes mes disciples si vous avez de l'amour les uns pour les autres". (jean XIII: 35).

Mais pratiquement, comment cet amour doit-il être manifesté? Selon les Baha'is, avant tout par le TRAVAIL.

Car en parlant de l'amour du prochain, nous ne devons pas oublier que notre prochain n'est plus seulement notre voisin pas plus que notre concitoyen, mais tout habitant de la planète quelle que soit son opinion, sa religion, sa race ou sa classe. Et comment puis-je manifester mon amour à l'égard de tant de gens qui sont si loin et que je ne connais même pas? Comment pratiquement puis-je le faire si ce n'est que par le produit de mon travail qui leur est destiné.

Le travail est donc l'amour rendu visible. Ne pourrait-on pas en conclure que l'un des signes de la Foi pour le monde d'aujourd'hui est le travail accompli dans un esprit de service?

Ne pourrait-on pas en conclure que c'est dans le baptême par le travail qu'il faut voir le salut pour tous plutôt que dans le baptême d'eau?

La réponse des baha'is étant affirmative, ne devrait-on pas considérer les baha'is comme les Chrétiens d'aujourd'hui?


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5.8. Qui nous dira la vérité?

On raconte qu'arrivé à Babylone, Alexandre Le Grand, convoqua les chefs religieux de son époque.

- "Dites-moi, leur demanda-t-il, comment appelez-vous l'Être Suprême?"

- "Brahama, dit le prêtre indien, ce qui signifie le grand."

- "Hormoz, dit le prêtre zoroastrien, ce qui signifie la Lumière."

- "Jehovah, répond le prêtre juif, ce qui signifie, Il était, Il est, Il doit venir."

- "Maintenant vous n'avez qu'un roi et vous n aurez qu'un seul Seigneur et vous l'appellerez Zeus."

Les prêtres furent consternés. Alors un vieux sage intervint et dit:

- "Comment appelez-vous le soleil?"

Et chacun dit le nom sous lequel on désignait le soleil

"Et si dorénavant vous l'appelez du même nom Hélios, le soleil ne continue-t-il pas de vous donner sa lumière?"

Alexandre fut confus de cette remarque et dit:

- "Que chacun appelle son Seigneur comme il l'entend."

Cette histoire est instructive en ce sens que s'il y a une différence entre les NOMS, ce n'est pas une raison pour qu'il y ait un différend entre NOUS, nous qui sommes les créateurs des noms et les noms restant nos créations. Est-il concevable que le créateur se laisse tromper par sa création?

Non, nous avons un même soleil qui nous donne sa lumière et sa chaleur. Et nous avons et aimons un seul Dieu, notre Père à tous, qui nous dispense Ses bienfaits. Restons donc réunis, comme les membres d'une seule famille.

Un seul Dieu, une seule famille.

Voilà toute la vérité, qu'une fois de plus doit se rappeler l'humanité.

je dis bien "se rappeler" car cette Vérité, on la connaît depuis l'antiquité, mais on l'oublie, raison pour laquelle Dieu nous la rappelle d'âge en âge, par Ses Messagers connus sous le nom de différents Livres. Or tous ces Livres ne sont, en réalité, qu'un seul et même Livre avec différents chapitres. C'est ce que nous allons voir.

Prenons, par exemple, ces deux livres qui sont connus sous les noms Ancien Testament et Nouveau Testament (vous voyez c'est toujours "Testament", testament qui est renouvelé) Nos ancêtres ont uni ces deux livres ensemble pour leur donner un seul nom la Bible, qui, traduit en français, veut dire Le Livre. Et ceci en dépit du fait qu'au point de vue des lois concernant l'aspect matériel de la vie, ces deux livres se contredisent. Ainsi, par exemple, pour l'un, l'inobservance du sabbat est un cas de condamnation à mort pour l'autre le sabbat est aboli. Pour l'un, l'incirconcision est un autre cas de condamnation à mort, pour l'autre "la circoncision étant de coeur" est purement et simplement abolie. Mais comme du point de vue spirituel (exhortation au pardon, à l'amour, à la charité ...) ils sont identiques (et c'est cela qui est essentiel en religion) nos ancêtres les ont considérés comme deux chapitres d'un même livre et les ont unis ensemble sous forme d'un seul livre, la Bible, qui comme je l'ai dit, signifie Le Livre.

Notons que chez les Musulmans leur livre, le Qur'an est également appelé EL KITAB ce qui veut dire Le Livre. Ceci nous amène à nous demander s'il ne serait pas juste de considérer le Qur'an comme le troisième chapitre du LIVRE DE DIEU. Et pourquoi ne pas prendre en considération le livre des Bouddhistes, par exemple?

Afin de répondre à ces questions, nous allons comparer le christianisme avec le bouddhisme et l'islam.

Ce qui caractérise le christianisme avant tout c'est la loi du pardon qui remplace la loi du talion.

Bouddha aussi a prêché le pardon. Et si jésus parle de l'enfer si on ne pardonne pas, Bouddha nous invite plutôt à. raisonner. Voilà, par exemple, ce que nous lisons dans les Écrits bouddhistes:

Ayant appris que Bouddha prêche de rendre le mal par le bien, un homme vient auprès de lui et se met à l'insulter. Bouddha reste placide devant toutes ces injures qui lui sont adressées. Mais lorsque l'offenseur cesse de l'injurier, Il lui dit:

- "Mon fils, lorsqu'un homme décline l'offre qui lui est faite, à qui appartient cette offre?"

- "A celui qui l'a faite": répond l'homme.

- "Tu m'as adressé ces insultes et je ne les accepte pas. C'est donc à toi-même qu'elles reviennent. Reprends-les." Lui dit Bouddha.

Quant à l'Islam on a tort de croire qu'il prêche la vengeance. Sur le plan personnel, le Prophète Muhammad prêche le pardon comme Ses prédécesseurs. Non seulement Lui-même Il pardonnait ceux qui l'offensaient, mais Il exigeait que Ses adeptes en fassent autant. L'histoire suivante illustre bien jusqu'à quel point Muhammad insistait sur la nécessité de pardonner.

L'oncle de Muhammad était un guerrier arrogant et orgueilleux. Un jour, rentrant de la chasse il apprend que son neveu, Muhammad, a été maltraité en son absence. Bien que n'étant pas d'accord avec la doctrine de son neveu, il décide de se venger. Impatient, il demande à Muhammad les noms de ceux qui L'ont insulté. Calmement Muhammad lui dit qu'il ne les aura pas à moins qu'il ne prononce la formule "Je témoigne qu'il n'y a pas d'autre dieu que Dieu et que Muhammad est Son Messager". Précipitamment son oncle Hamzih répète cette formule (formule, par la prononciation de laquelle on devient musulman).

Et alors Muhammad lui dit que celui qui prononce ces paroles (autrement dit celui-ci est un musulman) ne se venge pas.

A une autre occasion, Il disait: "Veux-tu goûter en ce monde de tout ce qu'il y a de plus doux aux yeux de Dieu? Rends la colère par la douceur".

Non seulement Muhammad insiste sur le devoir de pardonner et le plaisir de pardonner en ce monde, mais Il promet le paradis de l'au-delà à ceux qui pardonnent: "Le paradis est destiné à ceux qui maîtrisent leur colère et à ceux qui pardonnent aux hommes (leurs offenses)" Qur'an 3/128.

Et Il recommande le pardon comme moyen pour se faire des amis et des protecteurs: "Rends le bien pour le mal et tu verras ton adversaire se changer en protecteur et ami" dit encore le Prophète Muhammad.

Mais là où Il n'admet plus le pardon c'est lorsqu'il s'agit de combattre la tyrannie. je m'explique.

Pour les Arabes, contemporains de Muhammad, le moyen d'exister le plus courant était le pillage et le vol. Peut-on pardonner aux voleurs et aux brigands leurs crimes? Ni Jésus ni Bouddha ne l'auraient jamais admis.

A l'issue des massacres continuels entre eux-mêmes, ceux qui sortaient vainqueurs emmenaient les femmes et les enfants comme esclaves destinés à la vente.

Peut-on pardonner aux barbares sanguinaires leur sauvagerie? Jésus ou Bouddha l'auraient-ils fait?

Il y avait parmi les Arabes des tribus qui enterraient vivants les nouveau-nés si c'étaient des filles.

Quel crime plus abominable que de tuer les enfants, Quelle serait l'attitude de jésus face à de tels crimes contre les enfants, Lui, qui citait les enfants comme exemple pour les grands. Ce jésus qui n'a pas pu supporter la vue des tables de marchandises installées dans le temple et qui a chassé les marchands à coups de fouet.

Mais ce n'est pas seulement le pardon que prêchent le bouddhisme et l'islam comme le fait le christianisme. Il en est de même en ce qui concerne toutes les vertus. A titre d'exemple, nous allons en citer quelques-unes.

Si jésus dit: "Heureux sont ceux qui sont doux, car ils hériteront la terre" Bouddha dit de son côté: "Bienheureux ceux qui disent ce qu'ils savent avec douceur, et qui gagnent leur vie sans blesser aucun être vivant".

Si jésus dit: "Heureux les pacifiques, car ils seront appelés fils de Dieu" Bouddha dit: "Bienheureux ceux dont la conduite est pacifique".

Jésus dit: "Heureux les miséricordieux car ils obtiendront la miséricorde", Bouddha dit: "Bienheureux ceux qui ont compassion d'autrui".

Toutes ces vertus sont exaltées dans de nombreux versets du Qur'an qui insiste surtout sur la PATIENCE, vertu pour laquelle la récompense est illimitée: "Quant aux patients, leur récompense est illimitée" (Qur'an 39: 13).

Autrement dit, pour toute vertu il y a une récompense limitée sauf pour la patience dont la récompense n'a pas de limite.

Pour résumer, disons qu'au point de vue spirituel il y a identité entre le bouddhisme, le christianisme et l'islam.

Prenons le cas de ces deux dernières religions. Nous voyons que malgré l'identité entre leurs enseignements spirituels, il y a eu des guerres entre leurs adeptes. Pour quelle raison? Pour la même raison qu'il y a eu des guerres et qu'il y a encore des guerres entre les chrétiens eux-mêmes (et c'étaient les guerres les plus meurtrières de l'histoire). C'est que les uns comme les autres ont abandonné l'esprit de leur foi, cet esprit qui consiste en entente et en harmonie.

Ainsi le Prophète Muhammad dit: "Quiconque commet une injustice à l'égard des Chrétiens sera mon ennemi".

Dans Son livre, le Qur'an, Il présente le peuple chrétien comme le peuple le plus proche des musulmans, et ceci par son esprit d'amour: "Et tu trouveras certainement que ceux qui sont les plus proches de ceux qui croient (les Musulmans) sont ceux qui disent "En vérité, nous sommes chrétiens" (5: 85).

Le Prophète Muhammad fait accepter le Christ par les Arabes, ce que les missionnaires chrétiens n'ont pas pu faire pendant 6 siècles.

Dans Son livre, le Qur'an, Il attribue au Christ plus de miracles que ne le font les Evangélistes en affirmant, par exemple, que jésus déjà dans le berceau savait parler.

Il consacre à l'exposé de la vie du Christ une grande partie du Qur'an.

Mais tout cela passe en second plan en comparaison d'un fait historique capital: c'est que le Prophète Muhammad a présenté la doctrine chrétienne dans un esprit que seule la génération actuelle est en mesure d'apprécier, esprit à la fois conforme à l'Évangile et à la science.

Ainsi par exemple, Muhammad réfute la conception de Dieu personnel, pour Lui, jésus est l'image de Dieu invisible. Ce qui est conforme au Nouveau Testament.

"jésus est l'image de Dieu invisible" (Colos 1 /15).

Et c'est également conforme à la science, car selon les savants (et plus particulièrement Einstein) "C'est dans le concept de Dieu personnel qu'il faut voir la principale source de conflit entre la science et la religion".

De même, pour Muhammad l'expression "Fils de Dieu" doit être comprise dans le sens spirituel. Car précise-t-il: "Dieu n'a pas engendré. Il n'a pas été engendré". C'est encore conforme à la Bible. Car si on prend l'expression "Fils de Dieu" dans le sens littéral ce n'est plus jésus qui est le premier Fils de Dieu. "Ainsi parle l'Éternel" précise la Bible "Israël est mon fils, mon Premier né" (Exode 4 /22).

Jésus Lui-même n'a-t-Il pas dit que tous les pacifiques sont fils de Dieu?

Selon Muhammad, à partir du moment où l'on accepte le Messager de Dieu on a Dieu comme Père, on devient fils de Dieu, car précise-t-Il "C'est Dieu qui guide l'homme qu'Il veut".

N'avons nous pas la même précision dans l'Epître aux Romains: "Tous ceux qui sont guidés par l'Esprit Saint sont fils de Dieu" (Romains 8 /14).

Et ce qui est non moins important et même vital pour l'humanité c'est le principe de la Révélation progressive, principe conforme aussi bien à la science qu'à la Bible.

En effet, Muhammad dit: "En vérité viendront vers vous des Envoyés de Dieu du milieu de vous" (Qur'an 7 /32).

La science ne confirme-t-elle pas la révélation progressive de toute vérité (qu'elle soit scientifique ou spirituelle)?

Quant à la Bible, Saint Pierre ne rappelle-t-il pas aux juifs la promesse de Dieu, disant qu'après Moïse, Il suscitera un autre Prophète?

Moïse a dit: "le Seigneur voire Dieu vous suscitera d'entre vos frères un prophète comme moi" (Actes 3.22).

Jésus, Lui-même n'a-t-Il pas prié pour l'avènement d'un autre Consolateur après Lui: "Et moi je prierai le Père et Il vous enverra un autre Consolateur" (jean 14/16),

Dans un cas comme dans l'autre malgré la clarté des textes parlant de la succession des Messagers de Dieu, le clergé judaïque s'obstina dans son rejet de jésus en disant que Moïse est le dernier, de même que le clergé chrétien continue de dire que jésus est le dernier.

Et par une ironie du destin, le clergé islamique, tout en reprochant aux juifs et aux Chrétiens leur attitude, continue d'agir exactement comme eux en reniant la Révélation baha'ie promise par Moïse, jésus et Muhammad.

Après cette parenthèse que j'ai pris la liberté d'ouvrir, revenons à notre sujet, à savoir la comparaison des religions. Et cette fois du point de vue de la civilisation qu'elles ont fondée.

Il est admis unanimement que jésus (aussi bien que Bouddha et Muhammad, chacun à son tour) a fondé une nouvelle civilisation.

Afin d'être aussi bref que possible, je laisse l'exposé de la civilisation fondée par Bouddha pour une autre fois.

Quant à la civilisation chrétienne, vous la connaissez merveilleusement bien.

Mais ce qu'on ne connaît pas assez en Occident, c'est le rôle de l'Islam dans l'histoire des civilisations.

Et c'est là-dessus que je vais dire juste quelques mots. Pour ce faire ne serait-ce pas mieux de nous référer aux ouvrages des auteurs occidentaux.

David Hofman écrit dans "la Renaissance de la Civilisation": "les Arabes devinrent les maîtres du monde en médecine, en mathématique et en astronomie, ils exécutèrent d'importantes opérations chirurgicales, se servant de l'alcool comme anesthésique, tandis que les Chrétiens, plongés encore dans les ténèbres de l'ignorance, payaient les incantations des prêtres, qui devaient guérir leurs malades. Les Arabes inventèrent le système numérique moderne sans lequel les calculs modernes seraient impossibles (que le lecteur essaie de calculer ses impôts avec les chiffres romains!)
Les Arabes créèrent une forme d'architecture qui se classe parmi les plus belles du monde; ils étendirent leur culture à l'ouest jusqu'en Espagne et à l'est jusqu'aux Indes.
Baghdad devint le centre du monde, grâce non seulement à ses richesses, mais aussi à ses arts et à sa culture. Ils réunirent, dans une étroite fraternité des peuples aussi dissemblables que les Arabes, les Turcs, les Hindous, les Egyptiens, les Maures et les Persans. Ils préservèrent la culture et la philosophie grecques que l'Église primitive avait voulu détruire.
Ce fut aussi les Arabes qui se firent les gardiens de la science classique pendant le Moyen Age; ils ajoutèrent beaucoup à sa richesse avant de la rendre au monde occidental par l'intermédiaire des universités arabes (telle celle de Cordoue), des croisades et des marchands et donnèrent aux Chrétiens ce nouvel élan que nous appelons la Renaissance et qui marqua le début de notre civilisation".

L'auteur de l'ouvrage intitulé "The Arabs" (Princeton 1943) écrit entre autre que les savants de Cordoue (Centre Culturel Islamique) avaient 17 bibliothèques dont l'une contenait plus de 40000 livres.

Et l'on sait que la première université européenne fut établie en Sicile islamique au 9e siècle.

Nombreux sont les ouvrages sur la civilisation islamique, pour plus de renseignements vous pouvez vous y référer.

L'étude de l'histoire des civilisations nous amène donc à reconnaître qu'à l'origine de toute nouvelle civilisation, se trouve la naissance d'une nouvelle religion ou plus exactement un stade nouveau dans l'évolution de la religion, car comme nous l'avons dit il n'y a qu'une religion, la religion de Dieu et un Livre, le Livre de Dieu.

Or en présence des signes de l'effondrement de la civilisation actuelle, tout le monde parle de la nécessité d'une nouvelle civilisation. Si c'est ainsi, pourquoi ne pas profiter de l'expérience du passé et chercher les bases de cette nouvelle civilisation dans le stade actuel de l'évolution de la religion, j'entends la Foi baha'ie qui, une fois de plus, invite les hommes à revenir à la pureté primitive de la religion, à l'esprit de la religion, cet esprit qui s'exprime en deux mots un seul Dieu, une seule famille, la famille humaine.

N'est ce pas en cela que réside cette Vérité que chacun accepte sans hésiter?


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5.9. Martyre pour l'émancipation de la femme

Les Chinois emploient des signes pour désigner les mots. Ainsi le signe qui représente le mot "bon" s'obtient par la combinaison des signes correspondant aux mots "femme" et "enfant":

femme + enfant = bon

De même le mot "pain" s'obtient par la juxtaposition des mots "femme" et "toit":

femme + toit = pain

On peut trouver beaucoup d'interprétations pour cette combinaison des signes et quelles que soient ces interprétations, je crois que toutes expriment la même idée, à savoir qu'en tout ce qui est BON une part de mérite revient à la femme, et en tout ce qui, comme le pain, est nécessaire pour la vie, non moins essentiel est le rôle de la femme, à la seule condition, bien entendu, que la femme soit éduquée et que par suite de cette éducation, elle prenne conscience de son rôle dans tout ce qui est bon et dans tout ce qui est nécessaire.

Or, de tous les temps, ce qui était considéré comme tout ce qu'il y a de meilleur et de plus nécessaire c'était la PAIX, cette paix qui reste toujours à réaliser.

Mais quelle est la relation entre la FEMME et la PAIX pourrait-on nous demander?

C'est que précisément, selon les enseignements baha'is, l'une des conditions pour l'établissement de la paix est l'octroi de l'égalité des droits de la femme, afin de lui permettre une participation active dans toutes les branches de l'activité humaine, ce qui lui a été refusé dans le passé, où la femme était privée de la liberté dont jouissaient les hommes.

Heureusement, depuis un peu plus d'un siècle la page de l'histoire a tourné et l'émancipation de la femme a commencé.

Ce soir, je ne vais pas faire un exposé sur l'émancipation de la femme, mais je vais vous lire une page de l'histoire qui parle de la vie de la pionnière-martyre pour cette émancipation, j'entends TAHIRIH, cette femme concernant laquelle l'éminent orientaliste Professeur Brown dit: "L'apparition d'une femme comme elle, dans n'importe quel pays, et à n'importe quelle époque est une rareté et une source d'étonnement pour le monde. Mais son apparition en Iran est un miracle".

Tahirih est née en 1817, dans une famille hautement respectée, dont les membres occupaient une haute position dans la hiérarchie ecclésiastique en Iran. Depuis son enfance, elle fut considérée par ses concitoyens comme un prodige, à la fois par l'intelligence et la beauté.

Elle reçut son instruction à la maison par un professeur que son père avait choisi afin de lui apprendre l'iranien, l'arabe et la théologie. Au cours de ses études, elle manifesta une telle intelligence et une telle capacité que son père regrettait vivement qu'elle ne fut pas un garçon sur lequel il aurait pu compter afin de le remplacer après sa mort. Mais, en tant que femme, cela ne pouvait pas se faire selon les lois islamiques et surtout à son époque.

Un jour en visite chez l'un de ses cousins, Tahirih trouva dans la bibliothèque de son parent les ouvrages du chef de l'école Shaykhie, qui contrairement à l'opinion admise à l'époque, interprétait les questions de la Résurrection des morts, le Retour, l'Ascension dans le sens spirituel, ce qui l'intéressa vivement.

Elle demanda à emprunter cet ouvrage afin de l'étudier chez elle. Comme aux yeux de son père, de telles interprétations étaient hérétiques, le cousin de Tahirih fut terriblement embarrassé par sa demande. Finalement, elle insista tellement que le cousin s'inclina et c'est ainsi qu'après avoir étudié les écrits de l'école Shaykhie, Tahirih devint l'une des ferventes disciples, de cette école. Ensuite, elle essaya de convaincre son père que la Résurrection des morts ne pouvait pas se faire physiquement, ou le Retour du Messie matériellement, et qu'il faut comprendre ces questions dans le sens purement spirituel.

Mais son père ne voulait rien entendre, malgré les arguments irréfutables de sa fille, arguments basés sur les Écrits sacrés de l'Islam. Chacun resta sur ses positions et Tahirih, voyant qu'il n'y avait rien à faire avec son père, cessa d'entrer en discussion avec lui. Mais en échange, elle entra en correspondance avec le successeur du fondateur de l'école Shaykhie. Celui-ci ayant reçu un jour l'un de ses commentaires sur un problème délicat de la théologie islamique fut émerveillé par la profondeur des pensées qui y étaient exprimées.

Elle était, à cette époque, mariée à un autre de ses cousins, et avait déjà trois enfants dont aucun ne partagea ses idées, pas plus d'ailleurs que son mari, homme très fanatique. Ses discussions envenimèrent l'ambiance familiale et finalement lasse de la situation insupportable créée au sein de la famille Tahirih retourna dans la maison de son père où elle pouvait recevoir ceux qui partageaient ses idées et approfondir ses connaissances.

Peu de temps après, comme son cousin et son frère voulaient partir en pèlerinage à Karbilà (lieu saint de l'Islam shiàh) elle les accompagna surtout dans l'espoir de rencontrer le successeur du fondateur du Shaykhisme.

Mais celui-ci mourut avant qu'elle n'arrive à destination. Elle s'est jointe alors aux disciples du défunt, qui suivant ses instructions devaient se disperser dans la recherche du Promis, après une période de prières et de méditation.

Cependant, étant donné sa grande érudition, Tahirih pendant cette période, instruisait les disciples du Maître disparu. Et pour le faire en tant que femme, elle devait rester derrière un rideau, afin de ne pas être vue de ses élèves.

Une nuit, elle eut un songe. Un Siyyid (descendant du Prophète Muhammad) lui apparut en rêve et récita des paroles que Tahirih apprit par coeur. Entre-temps, le Bab (Prédécesseur de la Foi baha'ie) déclara sa Mission à Shiraz. La nouvelle, ainsi que son premier livre arrivent à Karbila. Ayant retrouvé dans ce livre les paroles qu'elle avait entendues en rêve, Tahirih comprend le sens de ce que lui avait été révélé en songe et reconnaît la mission du Bab.

Comme son beau-frère allait partir à Shiraz pour se présenter au Bab, Tahirih en profita pour lui demander de remettre, en mains propres, au Bab, une lettre scellée, où elle déclara sa foi.

Le Bab reçoit cette lettre et Il nomma Tahirih comme l'un de ses dix-huit apôtres.

Tahirih se donna alors coeur et âme à la propagation du Nouveau Message, qui parmi bien des principes, proclamait l'émancipation de la femme.

Concernant ses activités à Karbila, Shoghi Effendi (Successeur d`Abdu'l-Bahá) écrit dans son ouvrage "Dieu passe près de nous":

"C'est elle qui, à Karbilà, principale citadelle de l'Islam shiàh, avait été amenée à adresser de longues épîtres à chacun des 'ulamas résidant dans cette ville; ces 'ulamas reléguaient les femmes à un rang à peine supérieur à celui des animaux et leur déniaient même la possession d'une âme. Dans ses épîtres, elle défendait habilement son grand idéal et mettait à jour les desseins malveillants de ces 'ulamas".

Alarmés, les 'ulamas de Karbila portèrent plainte auprès des autorités civiles, lesquelles, par erreur, arrêtèrent une des amies de notre héroïne, en attendant des instructions de Bagdad. Immédiatement, Tahirih en personne se présenta aux autorités pour leur signaler leur erreur et faire libérer son amie. Elle réussit dans sa démarche, mais en échange elle fut condamnée à la résidence surveillée de façon à ce que personne ne puisse la fréquenter.

Comme la réponse de Bagdad ne venait toujours pas, elle partit elle-même à Bagdad où avec non moins d'enthousiasme elle se mit à propager la foi qu'elle avait embrassée.

Par son éloquence prodigieuse et par la force étonnante de ses arguments, elle confondait les représentants délégués par les notables shiàh, sunnis, chrétiens et juifs de Bagdad qui s'étaient efforcés de la dissuader de diffuser le nouveau Message.

De ce fait, on ne la laissa plus libre et le gouvernement fut obligé de la renvoyer en résidence surveillée à la maison du Gouverneur de Bagdad (le Grand Muhtf). Là aussi, elle ne resta pas inactive et parvint à susciter l'intérêt du Gouverneur.

Finalement, sur un ordre d'Istanboul, elle dut, accompagnée de quelques amis, quitter Bagdad pour rentrer en Iran.

En route, ils s'arrêteront à Kirmànshah.

Une nuit, suite aux intrigues du clergé, la maison où elle habitait fut attaquée, on la dépouilla de tous ses biens et on l'obligea ensuite à quitter la ville à dos d'âne. Et à peine sortie des limites de la ville, on la fit descendre de sa monture, l'abandonnant démunie de tout.

Elle porta plainte au Gouverneur, lequel lui fit restituer ses biens, mais elle dut quitter la ville pour rentrer dans sa ville natale Ghazvin, où elle s'installa chez son père.

En réponse à son mari qui lui demandait de retourner chez lui, elle lui fit savoir que, s'il était réellement sincère et juste, il ne l'aurait pas laissée seule à Karbila. qu'il l'aurait accompagnée et protégée durant son voyage de retour et qu'étant donné qu'il ne voulait rien savoir du nouveau Message, qu'elle désirait lui expliquer et que depuis trois ans, ils étaient pratiquement séparés, il valait mieux que cette séparation soit définitive.

Furieux, son mari, ainsi que son beau-père la déclarèrent hérétique et se mirent par tous les moyens à la persécuter.

Ce qui aggrava la situation, c'est qu'entre-temps son beau-père fut assassiné, événement qui servit de prétexte pour accuser Tahirih de participation au meurtre. Elle fut donc arrêtée. Peu de temps après, le meurtrier s'était rendu, mais Tahirih restait toujours en prison. Et ce n'est que suite à l'intervention de Bahá'u'lláh, que miraculeusement elle fut libérée et amenée à Téhéran, où elle reçut de Sa part la mission d'aller enseigner la Foi dans la province de Khuràsàn.

Mais le rôle le plus important joué par elle vers cette époque fut sa participation à la Conférence de Badasht où il fallait faire connaître aux croyants que la Révélation Babie était une Révélation indépendante avec de nouvelles lois, dont l'une insistait précisément sur l'émancipation de la femme.

C'est à cette réunion que Tahirih parut sans voile, fait normal pour les Occidentaux, mais à l'époque et dans un pays comme l'Iran, acte constituant un pur sacrilège. Les participants à la conférence furent consternés, certains s'enfuirent et renièrent leur foi, l'un d'entre eux s'ouvrit même la gorge. Mais Tahirih restait calme et avec dignité citait cette parole du Qur'an: "je suis la Parole qui ferait prendre la fuite aux chefs et aux nobles de la terre", voulant dire ainsi combien grande est l'épreuve du jour Promis avec ses nouvelles lois.

Après cette conférence, les croyants prirent conscience de l'importance du nouveau Message et avec un nouvel esprit se mirent à propager la Foi, chacun dans une région de l'Iran.

Quant à Tahirih elle retourna à Téhéran, où peu de temps après eut lieu un attentat à la vie du Shah. La communauté Babie fut injustement accusée et impitoyablement persécutée: l'arrestation de Tahirih fut donc imminente et elle fut emprisonnée dans la maison du chef de la police de Téhéran. Elle était enfermée dans une chambre très haute où l'on ne pouvait accéder que par une échelle.

Mais même dans sa cellule elle ne restait pas silencieuse. A la moindre occasion, elle adressait la parole à ceux qui se trouvaient sous sa fenêtre. Un jour, on célébrait le mariage du fils du chef de la police. Bien entendu, c'étaient les dames des personnalités de la capitale qui y étaient conviées. Il y avait beaucoup de moyens de distraction, mais les invités préférèrent aller écouter Tahirih qui en parlant du Message du Bab ne put s'empêcher d'insister sur l'émancipation de la femme comme l'un des enseignements du Bab.

L'éloquence et le courage de Tahirih devinrent proverbiaux au point qu'un jour le shah lui envoya un message disant que si elle reniait sa foi, il lui donnerait une place de choix à la cour.

Tahirih en réponse, composa un poème, disant:

Toute la royauté, toute la richesse pour toi,
Toute la pauvreté et toutes les privations pour moi,
Si la première est bonne que ce soit pour toi,
Et si l'autre est mauvaise, laisse-la pour moi.

Le Shah ne put cacher son émerveillement devant le courage et le détachement de Tahirih. Mais étant donné son échec dans sa tentative de la convaincre de renier sa foi, il la condamna à mort.

Tahirih non seulement savait que son exécution était imminente mais elle en prédit même la date et se prépara pour le jour de son martyr.

En effet, le matin de ce jour-là, elle avait pris un bain, se parfumant ensuite à l'eau de rose, elle s'habilla en blanc comme une mariée. Puis ayant fait ses adieux à toutes les personnes qui étaient chargées de sa surveillance, leur demanda de lui pardonner la peine qu'elle leur avait donnée, enfin, elle envoya chercher l'épouse du chef de la police, l'informa du secret de son martyr imminent et lui confia ses derniers voeux.

S'enfermant ensuite dans sa chambre, elle se mit à prier jusqu'à l'arrivée des soldats envoyés en pleine nuit pour la conduire dans un jardin en dehors de la ville et la tuer. L'homme qui était chargé de l'exécution refusa d'exécuter sa mission. Finalement, un esclave noir, en état d'ivresse, accepta de l'étrangler. Et elle fut étranglée avec le même mouchoir de soie qu'elle avait conservé dans ce but et qu'elle avait remis au fils du chef de la police, chargé de l'accompagner jusqu'au lieu de son martyr.

On jeta son corps dans un puits qu'on remplit ensuite de terre et de pierres, ainsi qu'elle l'avait elle même souhaité.

Ainsi se termina à l'âge de trente ans, la vie de Tahirih dont les dernières paroles furent: "Vous pouvez me tuer quand vous voulez, mais vous ne pouvez pas empêcher l'émancipation de la femme".


Maison d'Éditions Baha'ies - D/1974/1547/5xxxxxxxx


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6. FASCICULE 6 - La lumière ne fait pas de bruit

A Monsieur Furutan mon premier maître à l'école baha'ie

PRÉFACE

Il y a 2500 ans le penseur grec Isocrate écrivait:

"Puissent nos dirigeants s'unir pour mettre fin à toutes nos misères. Hélas, ils sont tout juste capables de reculer le malheur et non de le prévenir. Nous avons grand besoin d'un Plan durable qui mette fin, pour toujours à l'hostilité latente qui règne dans le monde et qui nous unira tous par les liens solides d'une loyale amitié."

Or ce Plan c'est la règle d'or que nous lisons dans toutes les Écritures:

Hindouisme: Traitez les affaires des autres comme vous traitez les vôtres.

Judaïsme: Ne faites pas à votre voisin ce que vous ne voulez pas qu'il vous fasse.

Zoroastrisme: L'on agira envers vous comme vous agirez envers les autres.

Bouddhisme: L'on devrait rechercher pour les autres le bonheur que l'on recherche pour soi-même.

Christianisme: Toutes les choses que vous désirez que l'on vous fasse faites les aux autres.

Islam: Que nul d'entre vous ne laisse un frère être traité d'une manière dont lui-même n'aimerait pas être traité.

Foi baha'ie: Ne cherche pas ce qui te profitera à toi-même, mais recherche ce qui profitera à tes semblables. Et choisis pour les autres ce que tu choisirais pour toi-même.

N'est-ce pas que c'est la même Voix qui se fait entendre d'âge en âge? Si c'est ainsi ne pourrait-on pas dire qu'au point de vue spirituel c'est toujours la même Personne qui revient pour se faire entendre de nouveau?

Ne pourrait-on pas dire que "La Voix est un second visage", titre que l'auteur a choisi pour ce recueil de quelques conférences basées sur les enseignements de la même Voix Eternelle enseignements qui, cette fois, sont destinés à une humanité qui entre dans le stade de sa maturité.


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6.1. La parole est aux humbles

Quelqu'un a dit non sans raison:

L'homme n'est content de rien, sauf de son intelligence, moins il en a plus il est content.

Une petite histoire illustre bien ce que voulait dire l'auteur de ces paroles.

Sur le bord de la Seine un peintre très médiocre était en train de faire un paysage. Un touriste s'arrête.

"C'est formidable. On dirait un vrai Picasso": lui dit il.

"Vous savez, il y en a beaucoup qui m'imitent. Cela ne m'ennuie pas. Bien au contraire, j'en suis content".

Apparemment une telle opinion trop avantageuse de soi-même et qui s'appelle l'orgueil, est un sentiment inoffensif. Mais si on réfléchit bien, il est à l'origine de tous les défauts humains et ce n'est pas en vain qu'on a dit de l'orgueil qu'il est un péché capital.

L'orgueil est à l'origine de beaucoup de maux sur le plan individuel aussi bien que social. Il ne serait même pas exagéré de dire que c'est du triomphe de l'homme sur l'orgueil que dépend le destin du monde. C'est ce que nous allons voir en étudiant la question du point de vue de la science et de la religion.

Sur le plan individuel l'effet néfaste de l'orgueil se manifeste sur la santé morale et physique. Un seul exemple nous en fournit la preuve. En effet l'orgueil nous empêche de satisfaire ce besoin essentiel de notre nature intime, besoin de pardonner, de ne pas nous venger.

Autant les effets du pardon sont bénéfiques, autant les effets de la vengeance sont néfastes. Et ces effets ne sont pas à sens unique. Car le pardon non seulement contribue à l'épanouissement de la personnalité de celui qui pardonne, mais également, à l'épanouissement de celui qui se voit pardonné.

C'est la raison pour laquelle toutes les Écritures nous exhortent à pardonner à ceux qui nous offensent.

Jésus, par exemple, insiste sur la loi du pardon avec une telle force que concernant le nombre de fois qu'il faut pardonner, il dit: "Je ne te dis pas jusqu'à sept fois, mais jusqu'à septante fois sept fois" (Mat. 18/22).

Le Prophète Muhammad réserve le paradis à ceux qui pardonnent aux hommes leurs offenses: "Le paradis est destiné à ceux qui maîtrisent leur colère et à ceux qui pardonnent aux hommes leurs offenses" (Qur'an 3/128).

La science tient un langage identique. En effet, elle permet de déceler au moyen d'instruments précis les effets néfastes de la vengeance et de la rancune sur l'organisme humain. Quant à la colère qui est l'un des signes de l'incapacité de pardonner, les savants la comparent à un acide qui est plus corrosif pour le récipient qui le contient que pour l'objet sur lequel on le déverse.

L'effet de cet "acide" peut même être mortel.

Un savant anglais, John Hunter, assistait un jour à un congrès médical et ne pouvant supporter la contradiction de l'un de ses collègues, se laissa aller à une telle colère pendant qu'il réfutait avec véhémence les arguments de son adversaire que les artères de son coeur se dilatèrent si fort qu'il en tomba raide mort.

Qu'il s'agisse de la vengeance, de la rancune ou de la colère, c'est toujours l'orgueil qui se manifeste.

En effet, celui qui veut se venger ne reconnaît jamais son défaut ou sa faiblesse, il se dit que l'offenseur mérite une leçon. Il oublie que pour donner des leçons de morale il y a des gens mieux qualifiés que lui. Qu'il soit agnostique ou croyant, il admet que les Personnalités sublimes telles que Jésus, Muhammad, Bouddha ou Moise aient été les plus grands Maîtres en matières de morale. Qu'il se rappelle alors que ces grands Hommes, bien qu'offensés constamment, non seulement ne se vengèrent jamais, soit disant pour donner une leçon à leurs offenseurs, mais qu'ils nous donnèrent la leçon du pardon, Si donc on justifie son désir de se venger en disant que c'est pour donner une leçon, C'est qu'on se croit plus qualifié que ces Maîtres en matière de morale. C'est donc de l'orgueil.

Si se venger c'est de l'orgueil, ne pourrait-on pas dire que se froisser c'est aussi dans une certaine mesure de l'orgueil. Car celui qui se froisse, qui en veut à son prochain, tout en retenant sa colère, ne désire-t-il pas dans le fond de son coeur que l'offense qui lui a été faite soit vengée d'une manière ou d'une autre. D'ailleurs, la religion comme la science condamnent un tel état d'esprit.

Jésus dit: "Et lorsque vous êtes debout, faisant votre prière, si vous avez quelque chose contre quelqu'un, pardonnez lui" (Marc 11 /25).

D'autre part, pour les savants celui qui contient sa colère, tout en désirant que l'offenseur soit puni est comparable au chauffeur qui au volant d'une voiture, appuie sur le frein en tenant le pied sur l'accélérateur. Cela détraque la voiture. Cela détraque celui qui est rongé par le sentiment d'être froissé.

Nous arrivons donc à cette conclusion qu'étant donné ses effets néfastes pour l'individu, l'orgueil est condamné aussi bien par la religion que par la science.

Non moins néfastes sont les effets de l'orgueil sur le plan social. En effet, de l'avis des sociologues, l'une des causes de la désunion conjugale est la fréquence des scènes de ménage. Or ces scènes de ménage commencent d'ordinaire par des propos contradictoires, continuent par des paroles dures, pour aboutir finalement à une querelle. Et dire qu'avec un peu moins d'orgueil on aurait pu éviter tout cela.

Une petite histoire nous en donne l'illustration:

"Papa - demande un petit garçon, au dîner - comment les guerres éclatent-elles?"

"Et bien, mon cher - commence le père - mettons que la France se dispute avec l'Angleterre."

"La France ne se dispute jamais avec l'Angleterre - interrompt la mère.

"Je n'ai jamais dit que la France se disputait avec l'Angleterre" - répond le père, "J'ai dit: mettons".

"Avec tes "mettons" tu vas lui fourrer un tas d'idées fausses dans la tête."

"Evidemment - répond le père - s'il n'écoute que toi il ne risque pas d'avoir une seule idée dans la tête."

Et l'atmosphère atteint le point où la vaisselle risque de voler en éclats.

Et juste à ce moment on entend la petite voix de l'enfant:

"Merci papa, merci maman, j'ai compris comment les guerres éclatent."

Si l'une des parties avait un peu moins d'orgueil, elle aurait suivi ce conseil du Bouddha: "Faites le bien par des silences opportuns".

Mais non, l'orgueil enlève à l'homme le courage de dire ces trois mots, les plus difficiles d'ailleurs à prononcer "j'ai eu tort".

Dans le monde d'aujourd'hui ces scènes de ménage deviennent de plus en plus fréquentes, ce qui conduit à l'anémie de l'amour conjugal, anémie qui finit souvent par la mort de l'amour conjugal: le divorce.

C'est peut-être l'une des raisons pour lesquelles les jeunes, sous prétexte de garder leur liberté, préfèrent de plus en plus le mariage libre; en Amérique, par exemple, le nombre de ces mariages a doublé en un an. Pourquoi, se disent-ils, chercher des querelles, quand on peut les éviter.

"Papa - demande le petit - pourquoi les nouveaux mariés se donnent-ils la main devant monsieur le maire?

"C'est une tradition, tu n'as pas remarqué que les boxeurs avant le combat se donnent toujours la main?"

Tout en étant l'un des fléaux de notre siècle, le divorce en entraîne un autre: la délinquance juvénile. En effet, les statistiques françaises montrent que 85 % des jeunes délinquants proviennent des familles désunies.

Mais les effets néfastes de l'orgueil ne s'arrêtent pas là. Sur le plan mondial l'orgueil est à l'origine de la plupart des guerres.

Voici quelques exemples.

Napoléon III poussé par l'orgueil, provoqua la guerre de Crimée en se rangeant au côté de ceux dont il rejetait la religion (les Turcs)contre ceux dont il professait la religion (les Russes). En réalité, il voulait venger la défaite de son oncle, mais ouvertement, il prétendait qu'obéissant à sa mission divine il voulait seulement défendre les opprimés.

Bahá'u'lláh (Fondateur de la Foi baha'ie) se trouvait à cette époque dans la prison pestilentielle de St Jean d'Acre et Ses disciples étaient persécutés à outrance. Il écrivit à ce monarque que puisqu'il déclarait avoir reçu de Dieu la mission de défendre les opprimés, il devait se lever pour défendre les milliers de femmes et d'enfants baha'is qu'on massacrait depuis plus de 20 ans ; et que c'était toujours Dieu qui le lui demandait.

S'il est Dieu, je suis deux fois dieu, se serait écrié Napoléon III après avoir reçu la lettre de Bahá'u'lláh.

Alors Bahá'u'lláh lui écrivait une deuxième lettre, lui prédisant la perte de son pouvoir par suite de son refus de défendre les opprimés. L'année après, Napoléon III, à l'apogée de sa gloire, croyant prendre Berlin d'assaut, entra en guerre contre la Prusse, guerre qu'il perdit et durant laquelle lui-même fut fait prisonnier, pour finir ses jours en exil.

Non moins orgueilleux était son vainqueur, le roi de Prusse, à qui Bahá'u'lláh rappela le cas de Napoléon III, lequel, précisait-Il, avait été bien plus puisant que lui. Il perdit son pouvoir, lui écrivit Bahá'u'lláh, parce qu'il ne s'était pas levé pour défendre la justice ; il en sera de même du roi de Prusse, s'il suit l'exemple de son prédécesseur (Napoléon III).

Cette prophétie se réalisa par la défaite allemande de 1918.

Mais ce ne fût pas qu'à Napoléon III et au roi de Prusse que Bahá'u'lláh déclara Sa mission par des Lettres.

Il s'adressa à tous les monarques de Son époque, par une Lettre générale, leur donnant des conseils et des directives susceptibles de soulager le monde, les exhortant à exercer la justice envers tous, à s'occuper des pauvres, à cesser d'accroître leurs dépenses militaires, à réduire leurs armements, à concilier leurs différends, et poser la base d'une paix durable.

Mais l'orgueil des monarques les empêcha d'écouter l'appel du Prisonnier de Si Jean d'Acre. Alors Bahá'u'lláh écrivit que, par suite de leur refus de s'unir et d'établir la justice, le pouvoir leur avait été arraché. Effectivement, fait sans précédent, en moins d'un siècle plus d'une vingtaine de monarchies absolues disparurent l'une après l'autre à une cadence incroyable. Et s'il reste encore quelques monarchies, leur pouvoir n'est plus que symbolique.

Ce pouvoir qui a été arraché aux rois devait, par décret divin, passer aux mains des humbles de la terre.

C'était d'ailleurs prévu par les Écritures du passé. Jésus dit "Les humbles seront les plus grands de tous" (Jean 18/14).

Plus précis est le Prophète Muhammad quand il prédit: "Et nous désirons accorder nos faveurs aux humbles de la terre, et nous en ferons des guides parmi les hommes et ils seront nos héritiers" (Qur'an 28/4).

La question qui se pose maintenant est celle-ci:

Pourquoi a-t-il prévu que ce soit aujourd'hui que le pouvoir passe aux mains des humbles?

C'est qu'aujourd'hui on se trouve devant le choix: S'UNIR ou PÊRIR. Et que ce ne sont que les HUMBLES qui peuvent S'UNIR et UNIR.

En effet, les humbles ayant le sentiment de leur faiblesse, recherchent l'acquisition de plus de force. Et sachant que l'union fait la force, il est naturel qu'ils pensent à s'unir, ce qui, à son tour, est l'exemple pour encourager et entraîner tout le monde à s'unir.

N'ayant pas une haute position, les humbles sont comparables aux gens qui se trouvent au pied d'une montagne.

Ils cherchent donc à "monter" par l'union, Cette "ascension" les conduit au sommet de la montagne. Et comme il n'y a qu'un sommet ils s'y rejoignent, ils s'unissent. L'humilité est donc une nécessité pour la réalisation de l'unité.

Ceci dit, voyons quels sont les obstacles sur le chemin conduisant à l'unité. Ces obstacles sont nombreux. Nous allons en citer quelques uns.

1 - Le premier obstacle c'est qu'on divise l'humanité en deux familles: la famille de ceux que Dieu aime et la famille de ceux que Dieu n'aime pas. Selon les baha'is il n'y a qu'une famille, la famille humaine, et Dieu aime tous les membres de cette famille humaine.

2 - Un deuxième obstacle c'est que les adeptes de chaque religion croient qu'eux seuls détiennent la Vérité et que les autres ne détiennent pas cette Vérité. Selon les baha'is il n'y a qu'une Vérité et toutes les religions détiennent cette vérité, car au fond il n'y a qu'une Religion et les soi-disant différentes religions sont les différents stades de cette Religion unique qui est en constante évolution.

3 - Un troisième obstacle c'est qu'en leur état actuel, les religions ne contribuent pas à l'entente et à l'harmonie en agissant comme si elles avaient un autre but.

Selon les baha'is, le but de la religion est l'entente et l'harmonie. Si une religion ne visé pas ce but il vaut mieux l'abandonner.

4 - Un quatrième obstacle est l'inégalité des droits des femmes et des hommes. Selon les baha'is les femmes doivent jouir des mêmes droits que les hommes.

5 - Un cinquième obstacle c'est le manque de collaboration entre la science et à la religion.

Pour les baha'is l'accord et la collaboration entre la science et la religion est un principe sacré.

Ce qui est remarquable c'est que ces cinq principes baha'is (parmi bien d'autres) destinés à éliminer les cinq obstacles que j'ai cités sont présentés sous forme imagée par St Jean dans sa vision du Jour Promis (Apocalypse 21.) où l'unité sera réalisé "Un seul pasteur, un seul troupeau".

En effet, St Jean présente la Foi du Jour Promis comme une nouvelle cité sainte descendue du ciel. Sa base, dit-il, est jaspe et ses murailles sont ornées de différentes pierres précieuses parmi lesquelles, citons après le jaspe, la calcédoine, l'émeraude, la sardoine et le sardonyx, correspondant par leurs caractéristiques aux cinq principes baha'is que nous avons mentionnés, en tant que principes de base pour la réalisation de l'unité.

Voyons d'abord ce que signifie l'expression "les murailles de jaspe".

1) Le jaspe est une pierre précieuse qui attire notre attention sur sa couleur rouge, couleur du coeur. Ce qui signifie qu'il faut voir la couleur du coeur des hommes et non pas la couleur de leur peau ou celle de leur opinion. La couleur de tous est la même, ce qui évoque l'idée de l'unité de l'humanité.

Or l'unité de l'humanité est le principe le plus important, le plus essentiel de la Foi baha'ie ; les "murailles" de l'édifice baha'i sont donc en jaspe.

2) La calcédoine' attire notre attention sur sa couleur d'une blancheur remarquable. Or le blanc est le symbole de la pureté et d'autre part c'est la combinaison de sept couleurs, ce qui signifie que les sept religions (Adam, Noé, Abraham, Moise, Jésus, Muhammad, Bahá'u'lláh avec Son Précurseur le Bab) vu leur pureté essentielle, en réalité ne font qu'UNE.

C'est l'unité de base de toutes les religions, qui est un deuxième principe baha'i.

3) L'émeraude attire notre attention sur sa couleur verte. Le vert est le symbole de l'harmonie. Les feuilles vertes s'harmonisent avec les fleurs de toutes couleurs. Par conséquent nous devons fixer notre regard sur l'HARMONIE en tant que but de la religion, ce qui est un troisième principe baha'i.

4) La sardoine est une pierre qui se compose de deux couches qui en réalité n'en font qu'une. C'est le symbole des deux couches de la société: homme et femme, qui au fond ne sont qu'une et une seule unité. L'égalité des droits de la femme et de l'homme est un quatrième principe baha'i.

5) Le sardonyx est une pierre précieuse qui se présente sous deux couleurs différentes suivant la manière dont on la tient. Mais c'est toujours la même pierre. C'est la science et la religion qui ne font qu'un, bien qu'elles jouent deux rôles différents. L'accord et l'unité entre la science et la religion est un cinquième principe baha'i.

Et je m'arrête là, ce qui ne veut pas dire qu'il y a seulement cinq principes dans la Foi baha'ie. Les principes baha'is sont beaucoup plus nombreux, mais ses Écrits nous en présentent douze comme les plus importants. Et il arrive que St Jean dans sa vision nous parle précisément de douze pierres précieuses constituant les ornements de la "nouvelle cité sainte", douze pierres précieuses qui, par leurs caractéristiques, représentent d'une manière imagée les douze plus importants principes baha'is.

A noter que Si Jean donne bien d'autres détails concernant le Jour Promis. Il n'entre pas dans mes intentions de vous en parler ni de les interpréter.

Notre devoir aujourd'hui ce n'est pas d'interpréter cette vision mais d'en faire une réalité ; ce qui implique cette vertu sublime qui est l'humilité.

La parole est donc aux humbles de la terre.


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6.2. La puissance de la patience

On attribue à un sage cette histoire sur la patience:

Une nuit - dit-il - j'ai rêvé qu'un nouveau magasin s'était ouvert dans notre ville. Un ange était derrière le comptoir. Non sans émotion je lui demandai ce qu'il vendait.

"Tout ce que votre coeur désire" - m'a-t-il répondu.

"En ce cas, je voudrais la paix sur terre: n'en avons nous pas assez d'être toujours découragés ; tout le monde est mécontent, pourquoi tant de difficultés et d'épreuves?"

"Arrêtez - dit l'ange en souriant - vous n'avez pas tout-à-fait compris. Ici nous ne vendons pas de fruit, rien que des graines."

Cette histoire donne une belle illustration de la patience. D'abord cette image de graine et de fruit. Quand une graine est enterrée, elle n'est pas pressée d'exiger du soleil et de la pluie qu'ils lui apportent leur aide a afin qu'elle devienne le plus tôt possible un arbre fruitier. Le soleil et la pluie n'ont pas signé un contrat avec la graine, contrat qui les engage à remplir précipitamment le rôle qui leur est assigné par la Providence. Lentement et sûrement ils lui portent assistance, assistance sans laquelle la graine ne pourrait donner de fruit.

La graine est patiente, elle sait attendre, elle sait endurer, et elle sait qu'elle doit supporter aussi bien la chaleur du soleil que les orages inévitables sans lesquels elle ne peut manifester sa valeur: sa capacité de porter des fruits.

Cette image doit se graver dans l'esprit de l'homme afin qu'il sache que lui aussi doit supporter les orages de la vie, afin d'être en mesure de manifester sa vraie valeur.

Car lui aussi est destiné à porter des fruits, ces fruits étant les vertus qu'il doit acquérir. Et ces vertus, il ne peut les acquérir s'il n'a pas la patience. C'est ce que nous allons voir.

En effet, si l'homme n'a pas assez de patience, à la moindre épreuve il se décourage, et se décourager c'est désespérer. Se désespérer c'est ne pas pouvoir attendre le bien qu'on désire, c'est attendre le pire, c'est le pessimisme, c'est penser que tout va plus mal, c'est le mécontentement. Le mécontentement c'est l'ingratitude. L'ingratitude c'est l'orgueil. Et l'orgueil entraîne le mépris. Et le mépris tue le meilleur de l'homme.

Le manque de patience empêche donc l'être lui-même de porter ses fruits sous forme de courage, d'espérance, d'optimisme, de rayonnement en toutes circonstances, de gratitude, de respect et d'amour de tout ce qui existe.

Quand on a la patience on reçoit toutes ces récompenses. La récompense de la patience est donc illimitée. Et ce n'est qu'un des aspects de la récompense de la patience. Mais d'une manière générale et dans tous les domaines la récompense de la patience est illimitée.

Voilà pourquoi Bahá'u'lláh dit: "Pour toute vertu il y a une mesure de récompense sauf pour la patience, vertu pour laquelle Dieu a dit: "Quant aux patients leur récompense est illimitée".

Dans un autre passage des Écrits baha'is, nous lisons: "Pour toute chose il y a un temps bien défini, comme pour tout fruit il y a une saison bien déterminée".

Ou encore: "Rien ne peut être réalisé, tant que son temps n'arrive. Et lorsque son temps arrive tout devient non seulement possible mais facile et simple".

Qui Peut croire que le charbon puisse se transformer en diamant. Et pourtant c'est ainsi, car le charbon sait attendre jusqu'à ce que "son temps", le temps de la cristallisation, arrive.

Ce qui semblait impossible devient possible, facile et simple.

Cet exemple, ainsi que celui de la graine, montre que tout dans la nature a sa récompense par la patience. Il en est de même en ce qui concerne l'homme, le sommet de la création. Pour lui il ne s'agit pas seulement de chercher sa récompense par la patience: toute son existence en dépend, et c'est la patience qui donne un sens à sa vie.

D'abord son existence physique, sa santé en dépendent. En effet, quand il manque de patience, il ne sait pas faire face aux difficultés inévitables de la vie ; il est constamment inquiet, s'irritant au moindre contretemps apparent. Et cet état d'angoisse constante est à l'origine Te beaucoup de maladies que dans le temps on appelait imaginaires et qu'aujourd'hui on appelle psychosomatiques.

Par contre, celui qui a de la patience supporte avec calme les épreuves de la vie, ne s'irrite pas à la moindre difficulté et garde toujours sa confiance dans l'avenir. Pour lui le temps peut arranger beaucoup de choses. Une petite histoire pour illustrer un tel état d'esprit.

Un homme était condamné à mort. On lui a demandé son dernier voeu. "Me présenter une fois au roi" répondit-il. Ayant obtenu cette permission, il parvint à obtenir sa grâce en échange de la promesse faite au roi qu'avant un an, par ses soins, le cheval de sa Majesté aurait appris à voler, faute de quoi la sentence serait exécutée.

En l'espace d'un an - expliquait-il - l'un des trois peut mourir, ou le roi, ou moi, ou le cheval. Et puis bien d'autres choses pourraient arriver pour décider de mon sort.

L'homme qui a de la patience vit dans le présent. Pour lui le passé est à jamais révolu et on n'y peut rien, quant à l'avenir on n'en connaît rien Il ne s'apitoie donc pas sur lui-même en accusant le passé, pas plus qu'il ne s'inquiète de ce qui va se produire dans l'avenir.

Il n'est jamais pressé pour décider de se lancer dans une entreprise avant mûre réflexion, s'en tenant toujours à la formule.

On a toujours le temps.

On raconte que lorsqu'il se trouvait aux prises avec les problèmes d'une complexité telle qu'il ne leur trouvait pas de solution, le vieux sage Talleyrand faisait dire qu'il était "en conférence", puis il allait se coucher. Et lorsqu'il se décidait à se lever c'était généralement pour constater que certains de ses problèmes s'étaient résolus d'eux-mêmes et que la situation était éclaircie.

Non moins important est le rôle de la patience dans la science. Les avantages matériels que les découvertes scientifiques nous offrent, sont les fruits de la patience des savants. À titre d'exemple citons le cas d'Edison, ce savant qui a fait plus de 2000 découvertes. Il avait une patience exceptionnelle pour supporter des échecs pendant ses expériences.

Et lorsqu'on lui a demandé ce qu'il apprenait quand il échouait dans ses milles façons de procéder sans résultat, il a répondu: "Et bien j'apprends mille façons de ne pas procéder".

Les hommes de Lettres ont la même patience. Au temps où il terminait ses études à l'université de Yale, Sinclair Lewis confia à son professeur de littérature que son rêve était d'écrire.

- "Mais vous mourrez de faim" s'exclama le professeur.

- "Voilà ce qui m'est parfaitement égal" - répondit Lewis.

- "En ce cas, vous réussirez, Monsieur".

Et il a réussi.

Non moins patients sont les célébrités dans le domaine de l'art.

- "Maître - disait un jour une dame à Paderevsey - qu'avez vous comme patience pour arriver à une telle perfection."

- "Vous vous trompez - lui répondit-il - Je n'ai pas plus de patience qu'un autre. Seulement je m'en sers."

Mais l'exemple parfait de la patience est fourni par les Fondateurs des religions.

Dans l'une de leurs prières, les baha'is récitent ces paroles "Si Tu n'avais pas d'autres preuves pour Tes créatures, rien que Ta patience malgré Ta puissance aurait suffi (comme la plus grande preuve)" paroles qui sont adressées à la Manifestation de Dieu dans la Personnalité sublime des Messagers de Dieu, pour la patience desquels aucune limite ne peut être imaginée.

En effet, prenons le cas de Jésus dont la puissance était telle qu'Il parvint à unir sans aucun moyen matériel tant de peuples, là où tous les moyens militaires ou autres avaient échoué ; Jésus dont le pouvoir sur les hommes était tel qu'ils préféraient sacrifier leur vie plutôt que de manifester la moindre infidélité à son égard. Et malgré cette puissance et ce pouvoir, Il a supporté avec une patience incroyable toutes les souffrances qu'on Lui a fait subir, souffrances qu'Il a acceptées volontairement parce qu'Il avait décidé de se sacrifier pour le salut de l'humanité.

Et le Bab, Précurseur de la Foi baha'ie, ainsi que Bahá'u'lláh son Auteur, n'ont-Ils pas manifesté la même puissance que leurs Prédécesseurs en unissant les hommes de toutes religions, opinions, races, classes? N'ont-Ils pas montré leur pouvoir sur les hommes, étant donné que ces derniers sacrifièrent leur vie par milliers plutôt que de manifester la moindre infidélité à leur égard?

Et malgré cette puissance et ce pouvoir. Ils ont supporté avec une patience dépassant toute imagination les mêmes souffrances que celles de leurs Prédécesseurs et toujours dans le même but: réaliser l'entente et l'harmonie entre les hommes.

Y arrivera-t-on un jour? demandent les sceptiques.

Oui, répondent les baha'is, car la patience vient à bout de tout.


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6.3. Le secret des foyers heureux

Il y a plusieurs années j'ai lu dans le périodique e Sélection" un article tellement émouvant que je ne puis pas l'oublier, et, comme il convient au sujet que nous allons traiter ce soir, permettez-moi de vous le résumer.

C'est un officier chinois de l'île de Formose qui raconte l'histoire de son mariage.

Je souffrais - dit-il, de l'inflammation de la cornée de mon oeil droit, ce qui le rendait presque aveugle. Et mon oeil gauche était atteint d'une autre maladie qui, bien que moins grave, risquait de me faire devenir complètement aveugle.

Selon l'oculiste la seule solution était la transplantation de la cornée. Mais où trouver cette cornée. Il fallait attendre plusieurs années et de plus je n'avais pas l'argent nécessaire à l'opération.

Un jour ma femme me dit "Un homme illettré est aveugle bien qu'il puisse voir. Un homme instruit ne peut pas être aveugle, il a besoin de ses deux yeux. Il faut vous faire opérer".

Et elle a tellement insisté que j'ai mis mon nom sur la liste d'attente du chirurgien.

Un jour l'oculiste m'a téléphoné en disant qu'un conducteur accidenté avant de mourir avait demandé à son épouse de vendre les parties intactes de son corps afin de couvrir les frais d'instruction de ses enfants, et qu'il fallait profiter de cette occasion exceptionnelle.

- "Mais je n'ai pas l'argent nécessaire" - répondis-je.

- "C'est votre épouse qui s'en est chargée" - me répondit-il.

Je n'ai donc pas pu hésiter et j'ai consenti à subir l'opération.

Un mot concernant ma femme et notre mariage. J'avais dix-neuf ans quand mon père me maria à la fille de l'un de ses amis, fille que je n'avais jamais vue et que je vis pour la première fois dans la chambre nuptiale. Elle était laide et paraissait avoir quarante ans, bien que n'en ayant même pas vingt. Je n'ai pas pu partager le lit avec elle. J'ai quitté la chambre nuptiale et même la maison, pour m'installer à l'école où j'étais maître nageur. Mon père m'a fait revenir, ce qui n'a pas arrangé les choses. On continuait à faire chambre à part. Ma mère ne cessait de me reprocher mon comportement en disant: "Tu es cruel envers elle. Il est vrai elle n'est pas attrayante, mais elle a un bon coeur. Tu ne la regardes pas, tu ne lui parles même pas, et elle ne se plaint jamais".

Mon père tenait le même langage. Finalement j'ai été amené à partager la chambre avec elle. De notre mariage naquit une fille. Elle n'était pas heureuse, parce que notre foyer n'était pas un heureux foyer.

Durant trente années de mariage rarement j'adressais la parole à ma femme. Et je n'ai jamais dit un seul merci pour tout ce qu'elle faisait pour moi. Et pourtant, pas un seul instant elle ne se permettait de se reposer. À ses moments libres, elle fabriquait toute sorte d'objets, nattes, chapeaux , etc. pour les vendre et mettre l'argent de côté, argent qui, plus tard, m'a permis de couvrir les frais de l'opération. Pour mon séjour à l'hôpital elle m'a envoyé, par notre fille, un transistor, pour lequel je ne l'ai même pas remerciée.

L'opération ayant réussi, je voulus avant tout aller au tombeau du conducteur accidenté qui m'avait rendu la vue.

Mais avant d'y aller, je suis rentré à la maison pour dire le premier merci à ma femme, dont le prix des petits travaux et les économies du ménage m'avaient permis de couvrir les frais de l'opération.

- "Merci pour m'avoir permis de voir" - lui dis-je.

Elle ne m'a pas laissé continuer. Me tournant le dos, afin de cacher son visage en sanglotant elle dit:

- "Entendre ton merci c'est tout ce que je voulais, et je suis heureuse d'avoir vécu jusque là".

- "C'est assez, maman - intervint brusquement notre fille. Dis lui que c'est toi qui as donné la cornée de ton oeil."

- "J'ai fait ce que je devais faire" - répondit-elle, tout en continuant à sangloter.

Je l'ai prise par les épaules, je l'ai regardée dans les yeux et j'ai vu que l'iris de son oeil était opaque. Je me suis jeté à ses pieds et c'est à partir de ce jour là que j'ai connu ce que c'est qu'un foyer heureux.

Si j'ai raconté cette histoire ce n'est pas pour en déduire que le bonheur au sein du foyer familial implique un sacrifice dans le genre de celui de notre héroïne. Mon but était d'en tirer quelques conclusions: aussi bien du comportement de la femme que de celui de son époux.

1) La première conclusion que nous pouvons tirer c'est que par son sacrifice la femme a montré à son mari qu'elle lui était indispensable, qu'elle était irremplaçable auprès de lui.

Et c'est le premier secret du bonheur d'un foyer: chacun doit montrer qu'il est indispensable à l'autre. Et à tous les points de vue, surtout au point de vue moral. J'estime cette précision nécessaire, car de nos jours on a de plus en plus tendance à croire qu'on se marie pour satisfaire le besoin sexuel.

Jamais depuis la Rome antique, on n'a donné à la sexualité plus d'importance qu'aujourd'hui. On va jusqu'à juger l'amour de son conjoint (ou de sa conjointe) sur la mesure de sa volupté. Les effets néfastes d'un tel jugement se font ressentir surtout quand on avance en âge. En effet, à l'âge de 50 ans, la femme n'a pas le même charme qu'elle avait à vingt ans, et l'homme physiquement ne garde pas continuellement la même passion qu'au début du mariage. Si le critère de l'amour reste la mesure de la volupté, alors avec l'âge, l'amour conjugal commence à s'anémier pour finir par mourir. Car les époux deviennent l'un pour l'autre comme ces objets qui portent l'étiquette "A jeter après usage".

Statiquement il est démontré que les mariages fondés uniquement sur la passion ne sont pas souvent heureux, car la passion est aveugle: un homme follement épris confond l'objet de sa flamme avec le portrait idéalisé par son imagination et il ne voit pas sa bien-aimée telle qu'elle est.

C'est pour cela que selon les enseignements baha'is, il faut avant le mariage que les deux parties se connaissent afin que chacun voit son conjoint (ou sa conjointe) tel qu'il est avec son caractère, son tempérament et ses goûts pour voir si on peut fonder un foyer heureux. Indiscutablement il y a une part de passion qui intervient dans le mariage et c'est la raison pour laquelle le bonheur du foyer implique que les conjoints ne se jugent pas toujours avec les mêmes critères que lorsqu'ils se sont connus. Il faut prendre en considération tous les aspects de la question aussi bien physiques que spirituels et surtout les derniers.

Le terme "union" doit nous rappeler l'union qui existe entre les différents membres de l'organisme humain où chaque membre ayant besoin de l'autre, étant indispensable à l'autre doit lui venir en aide. Si un membre ne fonctionne pas bien, l'autre doit mieux accomplir sa tâche.

Si l'estomac ne digère pas bien, la bouche doit mieux mastiquer les aliments.

Sur le plan matrimonial s'il y a défaillance de la part de l'un des conjoints, l'autre doit lui venir en aide. Si, par exemple, l'humilité manque à Madame pour reconnaître qu'elle a tort, que Monsieur lui vienne en aide en gardant le silence, loin d'insister pour lui faire avouer son erreur, qu'il cède plutôt pour lui donner une leçon d'humilité, car dans la guerre des sexes il faut toujours un objecteur de conscience.

2) Une deuxième leçon que nous tirons de cette histoire, c'est que le bonheur d'un foyer dépend de la loyauté de chacun des conjoints. Etre loyal c'est rester fidèle à son engagement. Etre déloyal c'est rompre son engagement. Par la déloyauté nous n'entendons pas seulement l'infidélité conjugale, bien qu'elle soit le pire outrage que l'on puisse infliger au statut matrimonial. Et là-dessus, les Écrits baha'is sont catégoriques, allant jusqu'à dire que e la chasteté si minime soit-elle vaut mieux qu'un millier d'années de dévotion passive et qu'une mine de connaissances".

Par la déloyauté nous entendons également la médisance. C'est une déloyauté, car lorsqu'on se marie on s'engage à s'unir. Or rien ne contribue autant à la désunion que la médisance. Il ne peut pas y avoir d'union et d'harmonie dans un foyer où les conjoints se critiquent l'un l'autre par derrière. Quand les conjoints se rabaissent l'un l'autre aux yeux des enfants, non seulement ils portent préjudice à leur propre union, mais aussi ils contribuent à la désunion des enfants, car inévitablement les uns défendront papa et les autres se mettront du côté de maman, et la vie familiale en deviendra insupportable. Bahá'u'lláh dit "Comment peux-tu oublier tes propres défauts et t'occuper de ceux d'autrui?".

"Si le feu du moi vous embrasse - nous conseille-t-Il, souvenez-vous de vos propres défauts et non de ceux de mes créatures, attendu que chacun se connaît mieux lui-même qu'il ne connaît les autres".

Ce qui semble juste et logique.

Dans l'histoire que nous avons racontée, si malgré toute l'ingratitude de son mari, malgré son comportement cruel en échange de tous les services qu'elle lui rendait, si notre héroïne l'avait critiqué par derrière, qu'aurait-elle gagné sinon la haine de son mari et finalement le divorce. Elle a agi autrement et c'est la deuxième conclusion que nous tirons de notre histoire.

3) Notre héroïne, au lieu de penser au comportement cruel de son mari, et de se laisser ronger par le chagrin, ne pensait qu'à ce que, malgré son aspect si peu attrayant, elle a son mari, sa fille, son foyer et a son but (l'affection de son mari à atteindre à n'importe quel prix). Et elle a réussi à obtenir tout ce qui lui était cher, ce qu'elle aimait.

D'une manière générale on doit adopter un tel comportement dans la vie, c'est-à-dire chaque fois qu'une mauvaise pensée nous vient à l'esprit, au lieu de nous efforcer de la réprimer, nous devons carrément penser à autre chose, à ce qui nous est cher, ce que nous aimons, ce qui nous réjouit: un succès imminent, un voyage agréable qu'on va entreprendre, un devoir que vous êtes sûr de remplir brillamment.

Encore une image pour illustrer cette idée. Vous êtes sur la route qui mène vers le lieu de rendez-vous avec votre bien-aimée. Vous ne pensez qu'à la joie de la rencontrer, de sorte que si, par hasard, quelqu'un vous offense, l'idée de vengeance (mauvaise pensée) ne vous arrête pas, vous ne vous donnez aucune peine pour la réprimer, car la joie de la rencontre domine votre esprit et ne laisse pas de place à l'idée de vengeance.

À ce sujet on a posé à `Abdu'l-Bahá (Successeur du Fondateur de la Foi baha'ie) la question suivante: "Quelle est la source des mauvaises pensées qui troublent ceux qui ne veulent pas les entretenir?".

Et Il a répondu en ces termes: "Les mauvaises pensées viennent de l'extérieur et trouvent leur réflexion en l'homme. On ne doit pas servir de miroir pour elles. On ne doit même pas les réprimer, car c'est impossible et les difficultés en s'aggravant les mettent de plus en plus en évidence. On doit constamment tourner le miroir de son coeur carrément vers Dieu, de sorte que la Lumière du Soleil de Vérité s'y réfléchisse. C'est le seul remède contre les mauvaises pensées. La face du miroir doit être tournée vers Dieu et le dos vers les mauvaises pensées".

Tourner le miroir de son coeur vers Dieu c'est PRIER et l'un des effets de la lumière qui s'y réfléchit c'est le fait qu'on voit tout en bien. Si, par exemple, on a une mauvaise opinion de son prochain, on l'oublie pour découvrir ses bonnes qualités.

Une telle attitude doit être adoptée avant tout dans le foyer familial où les conjoints doivent s'efforcer de découvrir les qualités que l'un ou l'autre possède et d'en parler, ce qui est un facteur de l'épanouissement de la personnalité. En effet, c'est dans la nature de l'homme de s'efforcer de ressembler à la bonne image qu'on se fait de lui. Plus vous dites à un homme qu'il est courageux, plus il s'efforce de se montrer courageux. Plus vous dites à une femme qu'elle est belle, plus elle se fait belle.

Mon mari, disait une dame à propos de son époux, avait un défaut, je lui dis que s'il s'efforçait de se débarrasser de ce défaut, en échange je ferai tout pour me débarrasser de l'un de mes défauts de son choix.

- "Mais tu n'en as aucun" - me répondit-il.

Après cela comment pouvais-je encore le critiquer?

S'il y a quelque chose à critiquer, ce n'est pas la personne qu'on peut critiquer, mais plutôt l'acte et avec tact. Par exemple, si Monsieur, par mégarde, laisse tomber un objet fragile que Madame vient d'acheter, au lieu de diriger sa colère contre son mari, qu'elle dise plutôt. e C , est tout de même ennuyeux comme on doit être prudent quand on se sert de tout ce qu'on fait de nos jours". Et Monsieur comprendra ce qu'elle veut dire. C'est du tact.

Le tact est une vertu nécessaire dans les rapports humains et principalement dans le mariage. C'est le tact qui implique que la femme, si elle est plus riche que son mari, ne fasse pas la moindre allusion à sa contribution au budget familial, étant donné que pour un homme la situation financière a une extrême importance en tant qu'une preuve qu'il a réussi à faire vivre sa famille. Que la femme fasse des remarques désobligeantes à ce sujet et son orgueil d'époux en souffre sûrement. Et nous arrivons ainsi à une quatrième conclusion à tirer de notre histoire.

4) Il faut que les conjoints s'interdisent de se faire des réprimandes, surtout devant les autres. C'est d'ailleurs une conséquence de la tendance à ne pas penser aux défauts de son conjoint (ou de sa conjointe) à ne pas les voir. En effet, quand on ne voit pas de défauts on n'a rien à reprocher.

Si notre héroïne avait sans cesse fait des réprimandes à son mari pour son comportement injuste, surtout devant sa belle-mère, le mari aurait peut-être définitivement quitté la maison, ou carrément divorcé. Non, elle s'est interdit de lui adresser la moindre réprimande, convaincue que ce n'est pas par des réprimandes qu'elle arriverait à changer son comportement.

Ce qui en plus de son acte de sacrifice a contribué à la réalisation du but qu'elle s'était fixé, à savoir, le bonheur de son foyer.

Il faut qu'il en soit de même en ce qui concerne tout foyer qui cherche à assurer son bonheur: les conjoints doivent s'interdire de se réprimander l'un l'autre. Les réprimandes ne peuvent se faire que dans les relations avec les enfants.

Et d'une manière générale, une telle attitude doit en principe être adoptée dans les relations humaines. Si faire des réprimandes était admis dans le passé par les Écritures c'est parce que dans le passé l'humanité traversait le stade de son enfance.

"Ceux qui pêchent reprends les devant tous afin que les autres éprouvent aussi de la crainte" (I. Timothée 5/20) lisons-nous dans le Nouveau Testament.

Mais aujourd'hui, la Foi baha'ie ne l'admet plus, étant donné que l'homme entre dans le stade de sa maturité. Un baha'i n'a pas le droit de juger qui que ce soit, c'est aux institutions de le faire.

Et à ce propos on raconte cette anecdote, dont je ne puis garantir l'authenticité, mais comme elle est très instructive, je prends la liberté de vous la raconter.

Un jour, dit-on, un pèlerin demande à Bahá'u'lláh s'il est possible que Dieu pardonne à Nemrod?

- "Dieu est miséricordieux" aurait répondu Bahá'u'lláh.

- "Est-il possible que Dieu pardonne au Pharaon?"

- "Dieu est clément" - fut la réponse.

- "Est-il possible que Dieu pardonne à Ponce Pilate?"

- "Dieu est indulgent."

- "Alors qui Dieu va-t-il juger pour le condamner à l'enfer?"

- "Les gens comme toi - l'interrompit un autre pèlerin - qui mettent leur nez dans ce qui ne leur regarde pas."

Mais revenons à notre sujet concernant le bonheur dans le foyer. Résumons-nous donc pour finir cet exposé.

Le secret des foyers heureux est dans l'effort incessant de chaque conjoint de se montrer indispensable à l'autre, comme c'est le cas des membres de l'organisme humain.

Le secret des foyers heureux est dans la fidélité conjugale, dans le respect de l'engagement à assurer l'unité et l'harmonie au sein du foyer et, par conséquent, à s'interdire la médisance, autant que les réprimandes qui portent atteinte à la dignité humaine. Ce secret réside aussi dans l'oubli des défauts et la recherche des qualités du conjoint et, indiscutablement, dans bien d'autres règles à s'imposer afin de constater combien nos ancêtres avaient raison de dire qu'UN HEUREUX MÉNAGE EST UN PETIT PARADIS.


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6.4. La joie par la foi

Un roi avait quatre fils. Lorsqu'ils eurent atteint l'âge adulte, il les confia à un maître pour qu'il leur apprenne la sagesse. Comme première leçon, le maître leur donna la formule suivante à bien apprendre: "En toutes circonstances je reste heureux".

Le lendemain, trois des fils présentèrent au maître leurs copies en disant qu'ils ont bien appris leur leçon. Le quatrième déclara qu'il n'est pas parvenu à l'apprendre. Et plus le maître travailla avec lui, plus le jeune homme persista à dire qu'il ne se voit pas digne de prétendre qu'il a bien appris la leçon en question.

Finalement le maître présenta au roi ses quatre fils. Les trois premiers reçurent toutes les faveurs du roi, quant au quatrième, il fut vivement réprimandé ; ce qui n'affecta nullement sa sérénité. Bien au contraire, il se montra satisfait de ce qui lui arrivait, au point qu'il ne dissimula même pas son sourire. Furieux, le roi ordonna qu'il soit sévèrement puni. Et le jeune homme réagit toujours avec la même sérénité et le même sourire.

Alors un sage intervint et dit au roi: "Mais c'est justement celui-là qui a bien compris sa leçon, car il reste heureux en toutes circonstances".

Cette histoire est instructive en ce sens que la vie aussi, avec ses peines et ses joies, ses hauts et ses bas, est une leçon que nous devons bien apprendre afin de rester heureux en toutes circonstances, afin de garder une joie intérieure inébranlable.

Mais où trouver la source de cette joie intérieure, c'est la question à laquelle nous allons essayer de répondre.

Certains croient trouver la source de la joie dans les plaisirs matériels ; mais si on réfléchit bien, ces plaisirs ne sont en réalité, que des remèdes contre les souffrances et une fois ces souffrances calmées, ces remèdes deviennent eux-mêmes des souffrances. Ainsi, quand on a soif, c'est un plaisir de boire de l'eau, mais une fois désaltéré, si on nous fait boire encore, on nous fait souffrir, au point qu'on peut en mourir.

Il en est de même en ce qui concerne les plaisirs de la table et tous les plaisirs matériels, car ce ne sont des plaisirs que temporairement.

Tel n'est pas le cas des sentiments spirituels. Ainsi, par exemple, quand on aime quelqu'un, la rencontre avec lui nous fait toujours plaisir. Une mère qui aime son enfant continue de l'aimer en toutes circonstances.

Si donc nous cherchons une joie inébranlable, c'est à l'acquisition de sentiments spirituels que nous devons nous entraîner, tout en profitant cependant des moyens matériels appropriés, étant donné l'interdépendance du matériel et du spirituel.

Nous avons l'habitude de diriger nos sens matériels, pourquoi oublier que nous sommes également capables de diriger nos sentiments spirituels. Si nous avons soif, nous nous dirigeons vers une source. Si nous sommes en danger, nous nous précipitons vers un abri.

Il faut qu'il en soit de même sur le plan moral. Si nous avons soif de justice, nous devons recourir à la source de justice, si nous sommes déprimés et tristes, nous devons recourir à la source de joie.

Or depuis que le monde est monde, cette source de joie reste la FOI, et les gens les plus heureux sont ceux qui ont la FOI. La joie est le but même de la FOI. Toutes les Écritures nous en parlent.

Jésus dit "Je vous ai dit ces choses afin que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite" (Jean 15/21).

Et Il a établi les lois qui ont garanti cette joie, aussi longtemps qu'on s'en tient à l'esprit de ces lois.

Or cet esprit ayant été abandonné il a fallu le ranimer, ce qui est la mission de la Foi baha'ie.

Et puis les conditions, elles aussi, ayant changé, il a fallu de nouvelles instructions garantissant la joie dans les conditions d'aujourd'hui, c'est ce qu'on trouve dans les Écrits baha'is.

Ces instructions et lois sont nombreuses. Nous allons en citer quelques unes. Mais avant de les citer, précisons que Bahá'u'lláh tient le même langage que Jésus. Il dit qu' "Il a bu jusqu'à la lie le calice de la tribulations (Quarante années d'exil, d'emprisonnement et de terribles souffrances) afin que tous les peuples de la terre puissent atteindre à la joie éternelle et qu'ils soient remplis d'allégresse".

Ou encore " L'allégresse et la joie doivent se lire sur vos visages". "Ne cédez pas à la tristesse ni au chagrin

ils causent les plus grandes misères".

Et pour ne pas y céder, Bahá'u'lláh donne des moyens dont certains ont la forme de lois.

1) Le premier moyen pour éviter la tristesse c'est de profiter de tout ce que la vie offre de bon et de beau tant sur le plan matériel que spirituel. Bahá'u'lláh dit: "Ne vous privez pas de ce qui fut créé pour vous". Et `Abdu'l-Bahá, Son successeur et interprète de Ses paroles dit: "Tout ce qui a été créé est pour l'homme, le sommet de la création, et il doit être reconnaissant des dons divers. Toutes les choses matérielles sont faites pour nous afin que notre reconnaissance et notre gratitude nous amènent à apprécier la vie comme un divin bienfait. Si nous sommes las de la vie, nous sommes des ingrats..." (Divine Philosophy p. 104).

En effet, la Nature est un cadeau de Dieu. Ne pas s'en servir c'est être ingrat, et sûrement Dieu n'aimera pas cela. C'est comme si j'offrais une bague précieuse à ma femme et que je constate qu'elle ne la porte pas. N'aurais-je pas raison d'être mécontent?

Un baha'i a le devoir d'aimer la Nature et de profiter de ses beautés. Bahá'u'lláh était le premier à donner l'exemple. Déjà tout petit il aimait la campagne et souvent on le trouvait en plein air. En prison, Il ne s'est pas plaint des conditions terribles dans lesquelles Il se trouvait, mais Il disait: "Il y a si longtemps que je n'ai pas vu de verdure".

Une mise au point est nécessaire: en prenant sa part de joie dans tout ce qui est bon et beau un baha'i ne doit pas oublier deux choses importantes:

a) Puisqu'il a le devoir d'aimer la Nature il est responsable de son bon usage. Il sait que s'il empoisonne l'air, l'eau et le sol, ce poison lui reviendra tôt ou tard ;

b) Il doit éliminer toute trace d'envie. Je m'explique. Lorsque je me promène dans un jardin public à aucun moment, il ne me vient à l'esprit la question de savoir pourquoi ce jardin ne m'appartient pas. Il faut qu'il en soit de même quand je me promène dans un jardin privé qui n'est pas à moi. Je dois en profiter avec une joie aussi pure que dans le jardin public.

2) Un deuxième moyen pour éviter la tristesse et la mélancolie et, par conséquent, vivre dans la joie, c'est de s'imposer une discipline garantissant la santé, plus particulièrement dans le domaine de l'alimentation. Un baha'i doit se nourrir d'aliments sains, sans jamais se permettre de s'empoisonner par l'alcool, par exemple, sous prétexte que l'alcool noie le chagrin. Ce qui n'est pas vrai, car tout compte fait, l'alcool arrose le chagrin.

Un autre genre de discipline alimentaire c'est le jeûne, sorte de désintoxication annuelle, grâce à un "congé annuel" donné à son tube digestif.

Ne dit-on pas que la moitié de ce que nous mangeons suffit pour nous nourrir, l'autre moitié étant pour nourrir les médecins.

3) Un troisième moyen de combattre la tristesse c'est l'activité, c'est de faire quelque chose, mais de le faire bien, même si c'est une orange qu'on épluche.

L'activité sous sa forme la plus noble c'est le travail utile. L'homme n'est pas fait pour rester inactif. Il doit travailler, cela fait partie de sa nature intime. Dans la Foi baha'ie le travail est obligatoire pour tous. De plus il doit être consciencieux, et dans ce cas, il a une valeur religieuse, étant donné qu'il équivaut à un acte d'adoration de Dieu.

4) Un quatrième moyen de combattre la tristesse c'est d'éviter la solitude, c'est aller à la rencontre de ses semblables. Là aussi, c'est une nécessité de la nature humaine. L'homme est une créature sociale. Ce n'est pas un arbre qui puisse vivre seul. Chez les baha'is les rencontres régulières constituent une obligation morale. Elles se font tous les mois à des réunions sans classe, réunions qui se composent de trois parties: prière, consultations, réception, comme le ballet se compose de trois parties: musique, mouvement et décor. Le caractère de ces réunions est tel qu'on les appelle: FÊTES.

5) Un cinquième moyen d'éviter la tristesse et de garder une joie inébranlable c'est de se fixer un BUT dans la vie. La vie n'est-elle pas comparable à un voyage? Et un voyage n'implique-t-il pas une destination? Ce but dans la vie peut être la protection des animaux, comme la maîtrise aux jeux d'échecs ou toute autre chose. L'essentiel c'est de penser aux moyens d'arriver à la réalisation du but qu'on s'est fixé, plutôt que de chercher un sujet de mécontentement et de mélancolie.

Pour un baha'i ce but c'est le salut général, autrement dit la recherche et l'application des moyens garantissant le bien-être général. Dans les circonstances actuelles, le bien-être individuel que tout le monde recherche ne dépend t-il pas du bien-être général. Comme dans l'organisme humain: s'il ne se porte pas bien, les différents organes n'en souffrent-ils pas autant?

Un baha'i s'efforce donc de faire ce qu'il peut pour changer ce monde malade, afin de contribuer à l'établissement d'une nouvelle civilisation où le bien-être général étant assuré, le bien-être individuel par principe en découlera.

Et pour constater combien le bien-être individuel dépend du bien-être général, permettez-moi de reprendre les quatre moyens que j'ai cités tantôt pour le bien-être personnel.

Nous avons vu comme premier moyen la jouissance de la Nature. Mais peut-on y compter encore longtemps avec la pollution actuelle de l'air, de l'eau, du sol et de la suppression des espaces verts? Il faut que cela cesse. Il faut changer le monde.

Nous avons vu comme deuxième moyen une discipline garantissant la santé par l'usage d'aliments sains. Mais de tels aliments sont-ils disponibles facilement étant donné tous ces conservants, solvants et colorants qu'on utilise dans les aliments?

Nous avons parlé d'une discipline protégeant la santé contre les poisons tels que l'alcool.

Mais peut-on s'imposer facilement une telle discipline dans un monde qui admet l'alcool comme faisant partie des plaisirs de la table? Il faut changer le monde.

Nous avons parlé du travail obligatoire. Mais le monde souffre du chômage. Il faut donc changer ce monde afin de créer un monde nouveau où l'on puisse trouver facilement du travail.

Nous avons parlé du travail consciencieux. Mais le monde d'aujourd'hui ne l'apprécie pas. Ce qui est si bien illustré par cette anecdote. Un patron veut embaucher un comptable. Trois candidats se présentent.

"Combien font 2 et 2 ?" - demande le patron à chacun d'eux.

"Quatre" - répondent les deux premiers, et ils ne sont pas acceptés. Le troisième obtient le poste. Au lieu de répondre 4, il avait fermé la porte, tiré les rideaux et demandé au patron: "Combien voulez-vous que ça fasse?"

Nous avons parlé des rencontres et des fréquentations régulières comme moyen d'éviter la mélancolie. Or de nos jours ce sont précisément ces fréquentations et ces visites qui sont évitées.

Monsieur Dupont dit à sa femme de se préparer pour aller visiter les Durand.

"Mais ça va les ennuyer" - répond sa femme.

"Pas du tout, c'est le contraire. Tu verras."

Et ils y vont. De retour, Monsieur Dupont dit à sa femme: "Tu as bien vu que j'avais raison. N'as-tu pas remarqué que lorsqu'ils ont ouvert la porte, ils avaient une mine renfrognée, et lorsque nous sommes partis, ils étaient si rayonnants".

Les habitants d'un grand immeuble ne se fréquentent pas et ils préfèrent qu'on ne les dérange pas. Il faut que cela change. Il faut un monde nouveau où les gens se rencontrent et se fréquentent dans la joie et dans un esprit d'unité.

6) Un sixième moyen de combattre la tristesse est d'acquérir une joie intérieure en toutes circonstances c'est de rendre SERVICE.

Un simple exemple: Supposons qu'un jour, vous sentant déprimé, vous sortiez de chez vous. Un conducteur visiblement ennuyé s'arrête et vous dit: "Ça fait deux heures que je tourne en rond et je n'arrive pas à trouver la rue, disons, Eugène Isaye".

Il arrive que, par hasard, vous connaissez bien cette rue et vous renseignez d'une manière précise le conducteur en difficulté.

Rien que ce simple service ne vous change-t-il pas le moral?

Nous avons vu que le but dans la vie pour un baha'i est le salut général. Or ce salut général ne peut être atteint que par l'unité organique. Et nous revenons toujours à l'organisme humain, dont le bon fonctionnement (le "salut") dépend de l'unité entre les différents membres, en ce sens que chaque membre en remplissant son rôle vient en aide aux autres, "sert" les autres. S'il y a donc esprit de service, il y a unité. Et en définitive, le salut général (le but de la vie) dépend de l'esprit de service. Voilà pourquoi on peut dire que SERVIR est le but de tout baha'i. Et sur la bague qu'il porte au doigt il y a un signe qui lui rappelle ce but.

7) Un septième moyen de combattre la tristesse et de garder une joie intérieure inébranlable c'est de voir en tout le bon côté.

Un exemple pour illustrer cette idée.

Après avoir terminé le premier volume de son Histoire de la "Révolution Française" Carlyle en confia le manuscrit à un éminent critique. Or par inadvertance, la femme de chambre de celui-ci utilisa ces feuillets pour allumer le feu. Mis au courant de ce fâcheux incident, Carlyle recommença son travail en inscrivant dans son journal "J'ai l'impression qu'un maître d'école invisible à mis en pièce le cahier que je lui présentais en me déclarant: non, mon garçon, tu dois faire mieux que ça".

Cet optimisme de Carlyle venait de sa profonde foi. Ce qui est normal, car la foi est l'optimisme.

8) Un huitième moyen d'acquérir la joie est précisément de donner la joie. Car en répandant du parfum sur votre prochain, inévitablement vous en ressentez vous-même l'effet agréable.

Si on réfléchit bien, on arrive à cette conclusion que tous les enseignements divins ne sont, pour ainsi dire, que des moyens de donner la joie à nos semblables.

L'histoire suivante racontée par le médecin d' `Abdu'l-Bahá en est la preuve:

Un jour, raconte le médecin en question (Yunis Khàn "Les Mémoires de neuf années de séjour en Terre Sainte".) (qui était en même temps le secrétaire et l'interprète d" Abdu'l-Bahá) pendant la période du jeûne, voyant le Maître très pâle, je lui ai demandé de rompre son jeûne.

"Ce n'est pas bien - me répondit-il. C'est une loi."

"Mais vous êtes malade, Maître."

"Non, je suis épuisé. Je vais me reposer et ça passera."

Voyant que par aucun argument je ne pouvais le convaincre, je lui dis:

"Maître, ne fût-ce que pour réjouir un coeur, rompez votre jeûne..."

"Bien volontiers, bien volontiers", me répondit-il et il rompit son jeûne.

Quant aux moyens de réjouir un coeur attristé, ils sont multiples: visiter un malade, téléphoner à une personne qui souffre moralement, venir en aide à un homme dans le besoin, écrire une lettre à une personne qui se croit oubliée et abandonnée, etc.

En donnant ainsi de la joie inévitablement on ressent la joie soi-même.

9) Un neuvième moyen de combattre la tristesse, moyen le plus puissant et infaillible, à la seule condition qu'on ait la foi, c'est la PRIÊRE. Comment la prière permet-elle de combattre la tristesse, c'est une question à laquelle une seule personne peut répondre. Et cette personne c'est vous, à la condition que vous ayez la foi. Je veux dire, que pour un croyant c'est une question d'expérience personnelle, inaccessible à toute tentative d'explication faite par autrui.

Quelques exemples pour illustrer ce que j'entends par le terme "expérience personnelle".

Vous êtes déprimé. Vous décrochez le téléphone et vous parlez à votre bien-aimée. Ceci vous change le moral. Passez l'écouteur à quelqu'un d'autre qui est également déprimé, cela ne lui changera pas le moral. Une lettre d'un ami que vous recevez à un moment de dépression morale change votre état d'esprit, la même lettre reste sans effet sur le moral d'autrui.

Il en est de même en ce qui concerne la prière qui est un langage d'amour et une question d'expérience personnelle.

Voilà, chers Amis, quelques moyens qu'utilisent les baha'is pour accomplir leur devoir d'être heureux et rayonnants de joie. Je dis bien DEVOIR et là-dessus les Écrits baha'is sont explicites: "Nous devons être heureux et faire de notre vie une action de grâce".

On entend souvent les gens dire: "Je suis d'accord avec les enseignements baha'is, mais je ne veux pas porter l'étiquette baha'ie. Ils oublient qu'il s'agit d'une étiquette portant l'inscription: JOIE et BONHEUR.

Cette joie et ce bonheur ne peuvent être acquis que par une expérience personnelle et c'est à cette expérience que les baha'is vous invitent. À vous d'accepter ou de rejeter cette invitation.


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6.5. Le mystère des miracles

Si jamais vous ouvrez un dictionnaire, cherchez à la lettre J le mot JONAS et vous lirez ceci: "Un des douze petits prophètes. Il fut rendu à la vie après avoir séjourné trois jours dans le ventre d'un poisson".

Et le dictionnaire ajoute encore cette précision Il vivait huit siècles avant Jésus-Christ".

Si on prend cette version à la lettre, il est difficile d'y croire, comme à bien d'autres histoires citées dans l'Ancien Testament.

Mais lorsqu'on en lit la confirmation par la bouche même de Jésus-Christ qui dit que lui aussi fera ce miracle et que ce sera son seul miracle (Mat. 12/39, Luc 11/29), autrement dit, que lui aussi ressuscitera trois jours après sa mort, on se demande ce que cela pourrait bien signifier réellement.

Les Écrits baha'is nous en donnent l'explication, en précisant que derrière cette histoire se cache une vérité profonde. C'est ce que nous allons voir. Mais voyons d'abord ce qu'en dit la Bible. En résumé, voilà ce que nous y lisons:

"Dieu donne à Jonas la mission d'inviter à la foi le peuple corrompu de Ninive. Jonas désobéit. Il est jeté à la mer et englouti par un gros poisson. Il y reste prisonnier trois jours. Il est dans le "séjour des morts". Il est mort. Le troisième jour, il se repent, il accepte la mission divine. Il est délivré du ventre du poisson. Il ressuscite."

Quant à l'interprétation de cette version, les Écrits baha'is disent en substance ce qui suit:

La mer c'est le monde matériel, et le poisson c'est le corps physique de l'homme, c'est la chair (par opposition à l'esprit). Se noyer dans la mer c'est se noyer dans les soucis du monde matériel (Ne pourrait-on pas en déduire que marcher sur les eaux (comme ce fut le cas du Christ) c'est fouler sous ses pieds les soucis du monde matériel) Rester prisonnier dans le ventre du poisson c'est rester prisonnier des désirs de son corps physique, de sa chair. "Remonter vivant du coeur de la mer" c'est reprendre la vie acquise par la Foi (après s'être détaché du monde matériel).

Cette interprétation est confirmée par le fait que tant que Jonas avait refusé la FOI, il était dit dans le "séjour des morts" (au lieu de "dans le ventre du poisson") et le troisième jour quand, repenti, il est revenu à la Foi, on dit qu'il est "remonté vivant".

En bref, cela veut dire que Jonas sans FOI est un mort, Jonas avec FOI est rendu à la vie. Ce qui compte en Jonas c'est la FOI.

Cette interprétation des termes "mort" et "résurrection" est en conformité avec ce que nous lisons dans le Nouveau Testament.

En effet, selon ce livre tant qu'on reste privé de la vie spirituelle, vie qu'on ne peut acquérir que par la FOI, autrement dit, tant qu'on reste en dehors de la FOI, plongé dans le monde matériel avec ses imperfections et ses vices, on est considéré comme mort.

Quelques réflexions:

1) Parlant du fils cadet d'un homme riche, qui, plongé dans les vices du monde, s'est repenti pour revenir à la vie spirituelle, Jésus dit Il était mort, il est revenu à la vie" (Luc 15/24).

2) A un disciple qui voulait aller à l'enterrement de son père incroyant, Jésus dit: "Suis moi et laisse les morts enterrer leurs morts" (Mat 8/22).
Ce qui veut dire que pour Jésus les incroyants sont considérés comme des morts.

3) St Paul, s'adressant aux Ephésiens devenus croyants dit: "Vous étiez morts... nous tous aussi... il nous a ressuscité ensemble" (Ephésiens 2/1-16).

Par conséquent, quand les Écritures parlent de la mort", elles entendent la "mort de la Foi" et quand elles parlent de la "résurrection", elles entendent la "résurrection de la Foi".

C'est ce qui s'est passé avec Jonas. Pour les habitants de Ninive, Jonas était "mort" pendant trois jours quand il "fuyait" la Foi (que Dieu l'avait chargé de proclamer). Et Jonas ressuscita le troisième jour quand cette Foi se manifesta (étant donné que Jonas, ce jour-là, accepta sa mission divine et proclama la Foi).

Et il en fut de même en ce qui concerne le Christ, ou plus exactement la Foi chrétienne appelée communément christianisme. Etant donné le reniement de Pierre et les perplexités des Apôtres après la crucifixion du Christ, il leur semblait que le christianisme (ou Christ quand à sa réalité) était mort. Mais le troisième jour quand les Apôtres sont redevenus fermes et réassurés, la Foi chrétienne (le christianisme) se ranima, ressuscita.

Voilà tout le mystère de la résurrection du Christ aux yeux des Apôtres. Je dis bien "aux yeux des Apôtres" car il n'y a qu'eux qui ont vu le christianisme (le Christ) ressuscité.

Si nous considérons la résurrection du Christ comme corporelle et, en tant que telle, la présentons comme un signe de sa grandeur exceptionnelle, Jonas n'a-t-il pas le même mérite, étant donné que lui aussi, avait ressuscité, et que le Christ lui-même le confirme.

Remarquons que non seulement la raison, mais les Écritures, elles aussi, confirment la résurrection spirituelle du Christ.

St Pierre ne dit-il pas que le Christ "a été mis à mort quant à la chair, mais rendu vivant quant à l'esprit... (I. Pierre 3/18). Or l'esprit c'est sa parole, sa doctrine, c'est le christianisme (Jean 6/63). Et c'est le christianisme qui ressuscita. Cette résurrection de la Foi chrétienne en trois jours présentait une telle importance aux yeux du Christ qu'il la prédit à une autre occasion ; "Détruisez ce temple et en trois jours je le rebâtirai" (Jean 2/19).

Par le terme "temple" Jésus entendait sa personne, le Christ. Il s'agissait en réalité comme le précise St Paul du christianisme (11. Cor. 5/16). Nous connaissons le Christ selon l'esprit, c'est-à-dire sa parole (comme il a été expliqué). Autrement dit, pour nous, le Christ veut dire le christianisme. Et en définitive Jésus voulait dire: "En détruisant mon corps, vous arriverez à détruire (apparemment aux yeux de ses disciples) le christianisme pendant trois jours seulement, après quoi je lui rendrai la vie (en inspirant la foi et la certitude à mes Apôtres).

Et c'est ce qui s'est passé pratiquement. Et c'était un miracle. Car normalement chaque fois que le fondateur d'une doctrine disparaît, sa doctrine perd sa vitalité et finit par "mourir". Et si elle ne meurt pas (ce qui fut le cas de la doctrine chrétienne) c'est que c'est un phénomène extraordinaire, un miracle.

La question qui se pose maintenant est celle-ci pourquoi Jésus attachait-il tant d'importance au miracle de sa résurrection, comme à celui de Jonas?

Les raisons en sont multiples. Nous allons en citer deux:

La première et la plus importante est que Jésus par la même occasion voulait nous faire comprendre le sens de son Retour (ce Retour qui est l'essence même de l'Évangile).

Il a voulu dire que par le terme "Retour" il faut entendre le retour de l'esprit, cet esprit qui se manifeste par la Parole et sa puissance (Ma parole est esprit (Jean 6/63)). Nous en trouvons la meilleure illustration lorsque Jésus parle du Retour d'Elie, attendu par les Juifs. Il dit que c'est Jean Baptiste qui est le Retour d'Elie "C'est lui qui est l'Elie qui devait venir" (Mat. 11 / 14) tout en précisant que "Elie doit venir et établir toutes choses" (Mat. 17/11).

Or, physiquement Jean Baptiste ne pouvait pas être l'Elie du passé, pas plus que celui qui devait venir pour établir toutes choses".

Il s'agit donc de ce que caractérise essentiellement Elie, il s'agit de son esprit manifesté par la Parole et sa puissance. Et c'est la raison pour laquelle l'Évangile dit que Jean Baptiste était Élie parce qu'il avait l'esprit d'Élie (Luc 1/17).

Comme Élie était mort bien des siècles avant Jean Baptiste, parler de son retour c'est parler de sa résurrection. Et son retour, comme sa résurrection n'existent qu'en esprit, manifesté par la Parole et sa puissance.

Si donc aujourd'hui dans les enseignements baha'is on trouve la même Parole, dotée de la même puissance, que celle révélée il y a deux mille ans, on peut dire qu'on est en présence du Retour du Christ en esprit. C'est d'ailleurs ainsi que la Reine Marie de Roumanie expliquait son adhésion à la Foi baha'ie, en disant qu'elle y avait trouvé le véritable esprit de Jésus par ailleurs méconnu et négligé.

Une deuxième raison pour laquelle Jésus a tant insisté sur sa résurrection, c'est que non seulement en lui on doit voir ce qui le caractérise essentiellement, ce qui est appelé esprit, mais qu'en toutes choses on doit voir sa réalité apparemment invisible (cette réalité qui s'appelle esprit) et qu'on doit fermer les yeux à l'apparence.

Craignant qu'on ne le comprenne pas assez, qu'on ne saisisse pas bien ce point capital, Jésus va jusqu'à dire que c'est le but même de sa mission: "Je suis venu pour que ceux qui ne voient point voient et que ceux qui voient deviennent aveugles" (Jean 9/39).

Par ces paroles Jésus voulait dire que ceux qui ne voient point l'esprit, le voient, et que ceux qui voient la forme, la chair, ne le voient point, deviennent aveugles devant l'apparence des choses.

Car, précise-t-il, afin de ne pas laisser la moindre place à une autre interprétation "la chair ne sert de rien, c'est l'esprit qui vivifie" (Jean 6/63).

Partant de là, nous allons essayer de comprendre l'esprit de quelques uns des enseignements du Christ.

1. Baptême:

Selon l'interprétation baha'ie, l'esprit du baptême est dans l'amour du prochain, autrement dit, le baptême d'eau signifie le baptême d'amour. En effet, selon la religion l'eau est symbole de la vie : "Il les conduira aux sources des eaux de la vie" (Ap. 7/17) et "Nous sommes passés de la mort à la vie parce que nous aimons les frères" (l Jean 3/14).

Selon la science aussi l'eau c'est ce qui donne la vie, puisque sans eau il n'y a pas de vie:

eau = ce qui donne la vie

De l'autre côté, selon la religion, l'amour c'est ce qui donne la vie (1). Selon la science aussi l'amour est ce qui donne la vie:

amour = ce qui donne la vie

Par conséquent, le baptême d'eau c'est le baptême d'amour. Être baptisé c'est être engagé à aimer.

C'est cela l'esprit du baptême et c'est conforme au Nouveau Testament qui dit: "Le baptême c'est l'engagement d'une bonne conscience envers Dieu" (I. Pierre 3/21).

Or engager sa conscience envers Dieu c'est s'engager à faire ce qu'Il demande. Et Il ne nous demande qu'une chose, c'est de nous aimer les uns les autres.

Ce n'est donc pas par le baptême d'eau qu'on peut reconnaître un chrétien, mais par le baptême d'amour.

"À ceci tous reconnaîtront que vous êtes les disciples, si vous avez de l'amour les uns des autres) (Jean 13/35).

2. Eucharistie:

L'esprit de l'eucharistie est dans la fraternisation. C'est ce que nous allons voir.

En effet, en montrant le pain, Jésus a dit: "Ceci est mon corps". Puisque son corps était là, tout comme le pain et qu'on pouvait bien les distinguer, matériellement le pain ne pouvait pas être le corps du Christ. C'est le langage imagé comme celui qu'il a tenu à une autre occasion, lorsqu'il a dit: "Je suis le pain descendu du ciel" (Jean 6/5 1). Or Jésus est venu du sein de Marie et non pas du ciel.

Tout cela est un langage imagé où "venu du ciel" veut dire "venu d'en haut, de Dieu ; le Christ, veut dire le christianisme, sa Parole ("La parole a été faite chair" Jean 1/ 14: cela ne signifie-t-il pas que Christ = Parole) qui est venue d'en haut, de Dieu, cette Parole qui nourrit l'esprit, comme le pain nourrit le corps (Par le verset e Je suis le pain de vie" (Jean 6/47). Jésus ne veut-il pas dire que sa Parole donne la vie à l'esprit comme le pain donne la vie au corps).

Et lorsqu'il a rompu le pain, le Christ a dit "Faites ceci en mémoire de moi" (Luc 22/19).

Or en Orient (d'où Jésus est venu) rompre le pain ensemble c'est le symbole de fraternisation. Par conséquent, le Christ voulait dire: "Invitez-vous les uns les autres , fraternisez et pensez à moi", le "moi" étant sa Parole (Parole faite chair) Parole d'amour et d'unité.

C'est cela l'esprit de l'eucharistie, selon les enseignements baha'is. Pour les baha'is l'UNITÉ étant la manifestation extérieure de l'amour, ils s'engagent à se réunir mensuellement à des réunions dont les participants sont d'origines différentes au point de vue classe, race, opinions, religion et nation. Ils y prient ensemble, se consultent ensemble, rompent le pain ensemble. Cet entraînement à l'esprit d'unité est leur baptême, cette fraternisation par des invitations et consultations mutuelles est leur eucharistie.

On a l'habitude de finir un exposé par une conclusion. Permettez-moi de le faire par une question:

"A-t-on plus de chance d'être sauvé par le baptême et l'eucharistie pris à la lettre qu'en les pratiquant quant à l'esprit comme le font les baha'is?"


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6.6. La magie du silence

Quand on veut parler des bienfaits du silence on ne peut s'empêcher de se rappeler cette parole de l'éminent humoriste Bemard Shaw qui disait: "Rien ne vaut le silence. Je voudrais parler des heures et des heures là-dessus".

Apparemment cette parole nous fait rire, mais elle cache une vérité indéniable, car si on pouvait garder le silence chaque fois qu'il est opportun et même nécessaire de le faire, bien des maux pourraient être évités tant sur le plan individuel que familial ou social.

Le silence est un besoin de la nature humaine au même titre que la parole en est un autre. L'un comme l'autre, utilisés au bon moment, exercent un pouvoir magique.

Ne dit-on pas que le silence est, après la parole, la seconde puissance du monde. Et ce n'est pas une découverte de notre siècle. Nos ancêtres, le savaient. Et mieux que nous, car ils s'efforçaient de s'y entraîner.

Ainsi, par exemple, en Perse antique il y avait une société dont les membres s'engageaient à ne pas recourir à la parole pour se faire comprendre. C'est par des signes qu'ils s'expliquaient. Cette société se développa avec une telle rapidité et acquit une telle puissance que les autorités s'en inquiétèrent et finalement la déclarèrent illégale, craignant que ses membres puissent tramer un complot sans qu'on arrive à le découvrir.
Quand quelqu'un voulait faire partie de cette société, il devait attendre devant la porte jusqu'à ce que les responsables se consultent et prennent une décision concernant son cas. Or un jour arrive un homme bizarre. Le président de la société l'ayant vu, prit un verre, le remplit d'eau jusqu'au bord, lui faisant comprendre qu'il ne restait plus de place pour lui.

Et le bonhomme en question prit un pétale de fleur qu'il mit délicatement sur la surface de l'eau du verre, faisant ainsi comprendre à son tour qu'il ne demandait presque pas de place et que par son adhésion rien ne changerait. Tous les membres furent réjouis de son geste et unanimement l'admirent dans la société. Concernant cette société il faut préciser que ses membres n'étaient pas contre la parole, et qu'ils n'en rejetaient pas la valeur. Ils divisaient la philosophie divine en deux parties, la première pouvant être acquise par les conférences et les dissertations, la deuxième par le silence et la méditation en se tournant vers Dieu. C'est cette deuxième méthode qu'ils appliquaient.

À remarquer qu'on se tourne vers Dieu ou qu'on ne se tourne pas, il est très difficile d'appliquer la méthode du silence dans la vie, ce qui a poussé quelqu'un à dire: "On a besoin d'environ deux ans pour apprendre à parler et de toute une vie pour apprendre à se taire".

Ceci dit, voyons pourquoi et quand l'homme a besoin du silence.

Rappelons-nous d'abord ce point capital que l'homme a deux natures. Il y a d'abord sa nature matérielle, par laquelle il ressemble à l'animal (nature qui est caractérisée par les cinq sens et ses exigences). Il y a ensuite sa nature spirituelle par laquelle il se distingue de l'animal. En langage plus simple l'homme possède deux réalités: son corps et son esprit (l'animal n'en a qu'un, son corps).

Le corps de l'homme a besoin du silence, comme le corps de l'animal qui en a le même besoin. L'homme comme l'animal, tous deux, ont besoin du silence ; avant tout, pour pouvoir dormir, bien que même dans le bruit ils arrivent à s'endormir. Mais quand ce bruit dépasse une certaine limite le corps en souffre. Cette souffrance chez l'animal peut même entraîner sa mort.

Ainsi le hurlement continu d'une sirène suffit pour tuer un rat enfermé dans une cage.

Pour l'homme on fait intervenir une unité qui sert à mesurer l'intensité du bruit. L'homme peut supporter sans gêne au maximum le bruit comparable à celui d'une voiture de sport. Mais au-delà de ce maximum (comme c'est le cas du bruit d'un avion à réaction au moment du décollage) les effets néfastes du bruit commencent à se manifester sous différentes formes, dont nous citons quelques unes:

1) Diminution du rendement de travail. On a constaté que le bruit peut diminuer de 30 % le rendement d'un travailleur manuel.

2) Perte du sommeil.

Les savants ont démontré que le bruit même de faible intensité, tout en n'étant pas suffisant pour réveiller le dormeur, l'empêche d'avoir un sommeil continu, de sorte que celui-ci doit se contenter de petits sommes successifs bien moins réparateurs. D'une manière générale, le bruit exerce ses effets néfastes sur le système nerveux, qui, lui-même agit sur la contraction cardiaque, la respiration, la digestion etc.

3) Aggravation des maladies.

Le périodique "Sélection" rapporte le cas de ce savant qui, hospitalisé pour son ulcère à l'estomac, constata qu'une certaine douleur revenait à intervalles réguliers. Et il découvrit que c'était précisément aux moments du passage des camions sous sa fenêtre. Il se boucha les oreilles et les douleurs passagères cessèrent.

4) Diminution du pouvoir de perception des sons.

On a constaté des cas de surdité (bien que passagère au début) chez les individus travaillant dans les milieux bruyants.

Ce qui est plus triste c'est que non seulement l'individu souffre du bruit, mais sa famille et la société où il travaille en subissent les conséquences néfastes. Car les études faites sur les individus travaillant dans des usines bruyantes ont montré que ceux-ci s'entendent difficilement avec leurs semblables, s'irritent et se mettent facilement en colère, par opposition aux gens qui travaillent dans des milieux calmes (les habitants de la campagne, par exemple) et qui sont généralement moins susceptibles et plus sociables.

Prenant en considération les effets néfastes du bruit sur le plan individuel et social, un savant italien estime que les ravages causés par le bruit dépasse ceux de la tuberculose.

Les savants ont donc raison d'ajouter le bruit à la liste des fléaux de notre siècle. L'un des responsables de ce fléau est l'usage excessif des voitures, ce qui est non seulement la cause de la pollution acoustique, mais également la cause de la pollution de l'air, phénomène si néfaste pour la santé. Et ce qui est non moins grave c'est que l'homme perd de plus en plus l'habitude de marcher, cet exercice qui est nécessaire pour le maintien de la santé, exercice dont l'importance a été souligné à maintes reprises par `Abdu'l-Bahá, interprète des enseignements baha'is.

Mais revenons à notre sujet. La conclusion à laquelle nous sommes arrivés c'est que le CORPS de l'homme a besoin du silence. Mais comme nous l'avons dit, il y a encore une autre réalité; l'ESPRIT. Or il arrive que l'esprit de l'homme a autant besoin du silence que son corps, si ce n'est pas beaucoup plus. C'est ce que nous allons voir.

L'esprit de l'homme se manifeste par la faculté de perception et de concentration. Pour cela il a besoin du silence. À ce propos citons le cas de cette émission de l'une des stations de Radio de l'Est qui rencontre un succès grandissant.

Il s'agit de trois minutes de silence absolu précédant la conférence. Cette idée a surgi brusquement d'un ennui technique empêchant le programme d'être exécuté et le conférencier déjà présenté de commencer son exposé. Etonnés, puis enthousiasmés par ce silence inattendu, les auditeurs écrivaient à la direction dans l'espoir que cette initiative puisse être répétée. Le directeur, tenta l'expérience avec succès. Et depuis, trois fois par jour, les auditeurs peuvent écouter et entendre ce SILENCE. Pour dire avec quelle impatience les auditeurs attendent ce SILENCE et quelle satisfaction ils y trouvent il suffit de noter qu'alors que d'habitude ils parlent en écoutant l'émission d'une conférence ou d'une chanson, ils se taisent quand arrive l'instant du silence.

L'esprit se manifeste par la faculté de méditation. À ce propos il est bon de dire quelques mots sur la "méditation transcendantale".

D'abord e méditation" veut dire réflexion qui aboutit à l'approfondissement d'un sujet". Quant au mot "transcendantal" il signifie "au-delà de la pensée".

La "méditation transcendantale" est une pratique de détente et de méditation où chacun se voit attribué un son qu'il n'est pas tenu à comprendre, mais qu'il répète en silence en concentrant son attention sur une activité quelconque du corps, disons sur l'acte de respiration et comme nous venons de le dire, cherchant par la méditation et par la paix de l'esprit, la solution des problèmes quotidiens et le comportement à adopter.

Indiscutablement, d'abord au point de vue de la détente et du calme, cette pratique a ses mérites, et surtout de nos jours quand l'homme ne respire plus mais s'asphyxie, ne mange plus, mais avale, ne marche plus, mais court, ne s'amuse plus mais s'énerve, ne parle plus, mais crie.

Ne serait-il pas mieux, disent les baha'is, qu'au lieu de répéter des sons incompréhensibles, et de concentrer son attention sur une activité quelconque du corps, qu'on dise des paroles traduisant l'état d'esprit qu'on doit acquérir et qu'on concentre son attention sur l'activité de l'esprit, ce qui, en bref, s'appelle PRIERE.

Chez les baha'is ces prières sont révélées par le Fondateur de leur Foi pour chaque cas (demande d'assistance, paix de l'esprit, guérison, protection, etc.).

Le but de la prière étant l'ACTION, on prie pour savoir comment agir.

On prie pour apprendre à SERVIR dans le SILENCE. On prie pour contenir sa colère. On prie pour éviter de se disputer, de se quereller. Dans tous ces cas les bienfaits du silence sont évidents car il assure la santé de l'esprit comme la santé du corps, selon ce qui a été dit. Seulement en ce qui concerne l'esprit, il ne s'agit pas de l'influence du silence extérieur, mais surtout du silence que nous devons nous imposer volontairement.

Et c'est là-dessus que je vous demande la permission de dire quelques mots.

Considérons le cas du service dans le silence. Il est évident que les gens aiment mieux que ce soient nos actes qui parlent plutôt que notre langage, autrement dit les gens préfèrent le service dans le silence plutôt qu'avec le son de la trompette.

Dieu ne nous apprend-Il pas à servir dans le silence lorsqu'Il dit à Elie: "J'aime Mes adorateurs inconnus". Or la meilleure façon pour exprimer son adoration à l'égard de Dieu c'est de SERVIR Ses créatures. Et la meilleure façon pour servir c'est donc servir sans se faire connaître sans le montrer, autrement dit, en restant inconnu.

Ne lisons-nous pas dans l'Évangile: "Lors donc que tu fais l'aumône ne sonne pas de la trompette devant toi.

Mais quand tu fais l'aumône, que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta main droite".

La terre elle-même en pleine activité par son mouvement autour du soleil, capte ainsi son énergie en nous assurant la vie ; entendons-nous le bruit de son mouvement, de son activité, de ses services? Non, elle nous sert dans le silence, et c'est là que nous devons avoir un exemple devant nos yeux: exemple disant qu'il faut servir tout le monde et sans ostentation. Et c'est précisément la définition que donne Bahá'u'lláh de l'homme d'aujourd'hui. "Aujourd'hui, dit-Il, l'homme est celui qui sert l'humanité toute entière". Comme l'humanité tout entière ne peut pas voir les services qu'un homme lui rend, il s'en suit que le véritable service est celui qu'on rend à tous sans se faire voir, sans se faire connaître, dans le silence, sans en parler.

Quant au silence à garder en face de l'offense qu'on reçoit, quand on est poussé à se mettre en colère, ses effets sont aussi bienfaisants pour celui qui contient sa colère par le silence, que pour celui qui est la cause de la colère, si ce n'est pas plus pour le premier, étant donné les conséquences 4léfastes de la colère sur la santé physique et morale.

On a donc tout intérêt de garder le silence face aux offenses reçues mais un silence sans la moindre trace de rancune.

Et pour finir un mot sur les bienfaits du silence afin d'éviter les disputes et les querelles. Combien de scènes de ménage pourraient être évitées si seulement l'une des parties avait le courage de garder le silence. À noter que si ces scènes de ménage se répètent, elles conduisent à l'anémie de l'amour conjugal, laquelle anémie aboutit finalement au divorce, qui est un des fléaux de notre siècle.

Un baha'i a le devoir moral d'éviter à tout prix de se disputer avec son prochain, surtout dans le domaine

de la religion, car, selon la Foi baha'ie, le but de la religion c'est de contribuer à l'entente et l'harmonie.

Si en entrant en discussion avec son prochain concernant la religion on sent qu'on l'irrite, ce n'est plus une contribution de la religion à l'entente et à l'harmonie, c'est le contraire. Il faut donc recourir au silence qui est alors l'argument le plus irréfutable.

C'est cette attitude qu'adoptait `Abdu'l-Bahá, interprète des enseignements baha'is. Et à ce propos permettez-moi de vous lire un extrait du livre du pasteur Ives (Les voies de la liberté) devenu plus tard baha'i. Et c'est par cet extrait que je termine mon exposé.

Un jour qu`Abdu'l-Bahá interprétait les paroles de Jésus d'une manière absolument différente de la nôtre, je ne pus m'empêcher de protester en disant: "Personne après tant de siècles de controverse n'ose interpréter avec une certitude ce que Jésus voulait dire. Je ne peux pas accepter ce que vous dites".

Son interprète me regarda avec un regard si furieux que je ne l'oublierai jamais, regard qui voulait dire: "Qui es-tu pour contrarier `Abdu'l-Bahá?".

Par contre, `Abdu'l-Bahá lui-même me regarda d'un regard pour lequel je reste éternellement reconnaissant à Dieu. C'était le regard d'un amant qui cherche à comprendre sa bien aimée.

Il garda un long silence pendant lequel il a sûrement prié. Puis d'une voix douce et avec un sourire séduisant, il me dit que je suive mon chemin et lui le sien. Il m'a fait sentir toute ma liberté d'apprécier ou de rejeter ce qu'Il disait.

"Mes yeux s'emplirent de larmes et je murmurai: pardonnez-moi, je vous prie."


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6.7. La lumière ne fait pas de bruit

Il y a un proverbe japonais qui dit e Les gens sages sont ceux qui profitent de leur propre expérience, mais plus sages sont ceux qui profitent de l'expérience des autres".

Sages, nous le sommes tous, car personne ne se plaint de son manque de sagesse. Mais nous pouvons être plus sages en profitant de l'expérience des autres, de ceux qui ont vécu avant nous, expérience que nous décrivent les pages de l'Histoire.

Commençons, si vous le voulez bien, par cette page qui nous parle de ce qui s'est passé il y a une quarantaine de siècles.

Nous sommes en Mésopotamie, avec sa fameuse capitale Babylone, symbole de la puissance et de la civilisation matérielle de l'Antiquité. Le pays est sous la domination de Nemrod, le Super Grand de son époque. Concernant sa puissance, il suffit de lire ce qui est écrit dans la Bible: "C'est lui qui commença à être puissant sur la terre" (Genèse 10/8).

Quant à la civilisation de cette époque, ne suffit-il pas de constater qu'aujourd'hui encore, après plus de 4000 ans, on continue d'exprimer son admiration devant les fameux jardins suspendus. l'une des sept merveilles du Monde?

Nous sommes donc en présence d'une puissance matérielle gigantesque et d'une civilisation matérielle très avancée.

Quant au point de vue moral, les Babyloniens civilisés d'il y a quarante siècles ne s'étaient fixés qu'un seul but dans la vie: jouir au maximum des plaisirs temporels, en appliquant la formule "La fin justifie les moyens". Donc pour arriver à son but tous les moyens sont bons, mensonge, tromperie, chantage, hypocrisie ; en résumé, ce que nous, les civilisés du 20' siècle, voyons aujourd'hui, avec cette différence qu'à l'époque il n'y avait pas de hold-up, pas d'enlèvement d'enfants, pas de prise d'otages, etc. Et puis, les idoles étaient en forme de statues, et non pas de billets de banque, comme c'est le cas aujourd'hui.

La situation peut donc se résumer en ces mots: déséquilibre entre les forces matérielles et les forces spirituelles, le même déséquilibre que nous constatons aujourd'hui.

C'est donc dans une telle situation que prend naissance un phénomène mystérieux et extraordinaire. Un homme seul, du nom d'Abraham se lève et condamne la civilisation matérielle de son époque, se déclarant porteur d'une Lumière destinée à guider les hommes vers une nouvelle civilisation à la fois spirituelle et matérielle, en parfait équilibre.

Les autorités de l'époque croient pouvoir éteindre cette Lumière en éloignant sa Source, je veux dire en exilant Abraham.

À cette époque l'exil signifiait condamnation à mort. Paradoxalement, par cet exil non seulement cette Lumière ne s'est pas éteinte, mais elle exerça son influence. Grâce à cette Lumière, pour la première fois, une civilisation basée sur la croyance en l'unité de Dieu a été fondée, tandis que la civilisation de Nemrod s'est effondrée avec le temps.

Et, tant que les adeptes d'Abraham s'en tiennent à l'esprit de ses enseignements tout va merveilleusement bien. Mais avec le temps l'esprit se perd et il n'y a plus que la forme qui reste.

C'est alors que commence la décadence de la civilisation fondée par Abraham. Sa puissance faiblit de jour en jour, jusqu'au moment où l'on arrive à voir ses adeptes autrefois maîtres, devenus esclaves ; et quels esclaves ! esclaves d'un pays que leur ancêtre Joseph avait gouverné, esclaves de l'Egypte.

Nous arrivons donc à cette page de l'Histoire qui nous parle d'une civilisation avancée scientifiquement, puissante matériellement et corrompue moralement.

Il s'agit de la civilisation égyptienne ayant à sa tête Pharaon.

La situation est identique à celle qui existait six siècles auparavant en Mésopotamie: une civilisation qui rappelle celle de Babylone et où le nouveau Nemrod s'appelle Pharaon.

Babylone est de retour, Nemrod est de retour.

Peut-être le phénomène mystérieux qui a pris naissance à Babylone (phénomène inauguré par Abraham) est-il également de retour.

Effectivement, cette fois encore l'Histoire nous parle d'un homme seul (Moïse) sans aucune aide matérielle, qui se lève et condamne la civilisation matérielle de son époque, celle de Pharaon, se déclarant porteur d'une Lumière destinée à guider les hommes vers une civilisation à la fois spirituelle et matérielle en parfait équilibre.

Et cette fois encore cette Lumière qui ne fait pas de bruit conduit tout un peuple, le peuple juif (voué à l'anéantissement) vers une merveilleuse civilisation. D'esclaves des Egyptiens, les Juifs redeviennent des maîtres avec des rois tels que David et Salomon.

Une fois de plus, aussi longtemps que les adeptes de Moïse s'en tiennent à l'esprit des enseignements de Moïse tout va merveilleusement bien. La renommée des Juifs s'étend partout, au point que les Sages de la Grèce, tels que Socrate viennent en Syrie pour s'instruire chez eux.

Mais malheureusement avec le temps les Juifs négligent l'esprit des enseignements de Moïse pour s'attacher à la forme en ne pratiquant plus que les rites et les cérémonies extérieures qui n'exercent aucune influence sur la vie morale. Et c'est alors que commence la décadence de la civilisation fondée par Moïse, et que les juifs redeviennent esclaves, tantôt des Chaldéens, tantôt des Persans.

Et nous arrivons à cette page de l'Histoire qui nous parle une fois de plus d'une civilisation avancée scientifiquement, puissante matériellement et corrompue moralement. Il s'agit de la civilisation romaine, ayant à sa tête, César, avec son siège à Rome.

La situation est identique à celle qui régnait quinze siècles plus tôt en Egypte ou vingt et un siècles auparavant à Babylone, raison pour laquelle Rome a été baptisée "Babylone moderne".

Babylone est donc de "retour". Nemrod qui autrefois était de "retour" sous le nom de Pharaon, cette fois est de "retour" sous le nom de César.

Ne se pourrait-il pas que le phénomène inauguré par Abraham ou après par Moïse soit également de "retour". Autrement dit que la même Lumière réapparaisse une fois de plus.

D'autant plus que Moïse l'avait prédit en ces termes:

Le seigneur, votre Dieu, vous suscitera d'entre vos frères, un prophète comme moi (Actes 3/22).

Effectivement, l'histoire parle de la manifestation d'un prophète comme Moise ou du "retour" de Moïse en esprit. Et ceci dans la personnalité sublime de Jésus Christ, porteur de la même Lumière que celle d'Abraham ou de Moïse.

"Je suis la Lumière du monde" déclare Jésus-Christ, comme ses prédécesseurs. Et cette Lumière sans le moindre bruit conduit le monde vers une civilisation à la fois spirituelle et matérielle, en parfait équilibre.

Et tant qu'on s'en tient à l'esprit des enseignements de Jésus, tout va merveilleusement bien. Mais malheureusement avec le temps le clergé a commencé à ajouter ses idées à cette Vérité, oubliant que: "ajouter à la Vérité, c'est y retrancher" comme l'avait prédit le Talmud.

On s'est, une fois de plus, attaché aux cérémonies extérieures et aux rites qui n'ont la moindre influence ni sur le sort de l'individu, ni sur celui de la société. On s'est attaché à la forme au détriment de l'esprit, ce qui, comme par le passé, a entraîné la décadence de la civilisation fondée par Jésus.

Et nous arrivons à cette page de l'Histoire qui nous parle du dix-neuvième siècle quand le monde se trouvait plus ou moins dans les mêmes conditions qu'à la veille de l'apparition d'Abraham, de Moïse, de Jésus. Un monde témoin d'une civilisation matériellement puissante, scientifiquement avancée, moralement corrompue. Un monde dirigé par des Grands jouissant des mêmes pouvoirs que Nemrod, Pharaon et César. Tout nous rappelle le passé: on est pour ainsi dire en présence du "Retour" de la civilisation babylonienne (ou égyptienne ou romaine) comme on est en présence du "Retour" de Nemrod (de Pharaon ou de César). Cette situation a conduit un certain nombre de savants à se demander s'il ne faudrait pas s'attendre au "Retour" du même phénomène ou de la même Lumière qui s'est manifestée par Abraham, Moïse et Jésus.

Ainsi, par exemple l'éminent savant français Lecomte du Nouy écrit (L'homme et sa destinée): "Les Romains civilisés d'il y a deux mille ans se seraient bien étonnés si on leur avait dit que le destin de leur civilisation se trouvait entre les mains d'un Jeune Juif, originaire de l'une de leurs colonies lointaines, crucifié entre deux brigands...

L'homme qui dans un ou deux mille ans sera tenu pour le plus grand de notre époque existe peut-être aujourd'hui, ou vivait hier; nous n'avons aucun moyen de le découvrir soit parce que nous sommes trop intelligents, soit parce que nous ne le sommes pas assez".

Mais c'est surtout les philosophes spiritualistes et les théologiens qui s'intéressèrent vivement à la question. Ils se sont plongés dans les Écritures pour voir s'ils peuvent y trouver quelques prédictions concernant la réapparition de cette Lumière, comme ce fut le cas de la Lumière chrétienne, prédite par Moïse. Et ils ont trouvé ces prédictions.

Mais ce qui est triste c'est qu'à quelques exceptions près, la plupart ont pris non seulement le terme "Retour" à la lettre, mais également les prédictions précisant la réapparition de cette Lumière derrière les nuées. Ils n'ont pas pensé que par le terme "Retour" il faut entendre le retour des qualités, de l'essence, de l'esprit. Ainsi, par exemple, le soleil d'aujourd'hui peut être considéré comme le "Retour" du soleil d'il y a 2000 ans, étant donné que tous les deux ont les mêmes caractéristiques essentielles (chaleur, lumière, etc.). De plus, la prédiction parlant de la réapparition de cette Lumière derrière les nuées veut dire qu'il y aura toujours des circonstances qui empêcheront de voir cette Lumière, comme les nuées empêchent de voir la lumière du soleil.

Ainsi, par exemple, Moïse était venu "derrière les nuées", car en tant que Messager de Dieu, il devait avoir une réputation irréprochable ; or il avait commis précédemment un meurtre, ce qui fut un facteur empêchant de voir cette Lumière, ce fut une nuée cachant ce "Soleil".

De même Jésus était venu de Nazareth, or selon l'opinion de l'époque "Rien de bon ne pouvait venir de Nazareth". De plus on ne connaissait pas son père. Tout cela rendait difficile le fait de voir cette Lumière. Jésus est donc venu "derrière les nuées".

Or selon les prédictions bibliques le Christ devait revenir derrière les nuées. Attendre son retour physique c'est adopter la même attitude que les hindouistes, qui depuis des milliers d'années attendent le retour de Krishna, oubliant le fait qu'il y a eu entre temps plusieurs "Retours" de Krishna, dans les personnalités sublimes de Bouddha, de Zoroastre, de Moise, de Jésus, etc.

Mais revenons au cas des théologiens chrétiens. Pour le moment, laissons de côté le fait qu'ils ont adopté la même attitude que les théologiens hindouistes ; reconnaissons leur cependant un mérite indiscutable, c'est d'avoir trouvé la date exacte du Retour promis.

À titre d'exemple, nous allons mentionner quelques uns de ces théologiens chrétiens.

Pour Emmanuel Swedenborg, le philosophe suédois, la Lumière promise devait réapparaître en 1844 (voir son livre "Arcana Coelestina). Pour le pasteur allemand Hoffman, c'est également en 1844 que la Lumière promise devait réapparaître.

Le dit pasteur va même s'installer en Terre Sainte pour y être témoin de la réapparition de la Lumière promise, venant derrière les nuées.

En Amérique ce fut le théologien Miller, fondateur de la secte adventiste qui, ayant trouvé la date de 1844, monta sur la Montagne Rocheuse pour être, avec ses disciples, parmi les premiers à voir la Lumière promise réapparaissant dans les nuées du ciel.

Dans bien d'autres pays, tels que l'Angleterre (avec Levy Way), la France (avec Goussain), la Suisse (avec Petry), la Hollande (Hans Peters) etc. des chercheurs ont trouvé la même date de 1844 pour la réapparition de la Lumière promise.

Que s'est il passé en 1844? La Lumière promise est elle apparue? si oui, quelles étaient les " nuées" qui empêchèrent de la voir? À ces questions nous répondrons, si Dieu le veut, lors d'une autre conférence.


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6.8. Les signes du jour promis

On lisait un roman en famille. Arrivé à un passage où il était dit: "Il souleva la portière et entra", le fils aîné dit: "C'était sûrement une porte qu'il souleva, et entra".

"Mais non - dit maman - c'était un rideau qu'il souleva et entra".

"Mais pas du tout - intervint papa - il y avait une concierge qu'il prit dans ses bras et entra".

Cette histoire illustre bien ce qui arrive quand on interprète arbitrairement les paroles d'un auteur sans chercher à comprendre ce qu'il avait réellement en vue.

Et c'est malheureusement ce qui se passe lorsqu'il s'agit du langage imagé des Écritures, objet de ma conférence de ce soir.

Lors de l'exposé intitulé "La Lumière ne fait pas de bruit" nous avons vu que selon les érudits et les théologiens chrétiens l'année 1844 devait marquer le "Retour de la Lumière du Monde" (Le Christ) (St Jean 8/12).

Or si l'on étudie les ouvrages des érudits et des théologiens des autres religions on voit que précisément cette même date a été annoncée par eux comme la date du "Retour de la Lumière" qui leur avait été promise.

Ce soir, si vous voulez bien, nous allons étudier la Bible et le Qur'an (à titre d'exemple) pour voir avec quelle précision et quelle concordance ces deux Livres nous parlent.

1) Selon l'Ancien Testament

La vision de Daniel (à qui Jésus nous renvoie en parlant de son Retour) nous amène par un simple calcul, à l'année 1844.

Et cette vision, Daniel le précise bien, concerne le Jour Promis (Voir Daniel 8 / 17). En parlant de ce Jour, il dit que ce sera 2300 jours après l'édit de la reconstruction du Temple de Jérusalem (Date du premier retour des enfants d'Israël en Terre Sainte). Mais, selon la Bible "Le jour du seigneur est une année (Nombres 14/34) donc la date du Jour Promis est 2300 ans après le dit édit. Or quand Jésus naquit, 456 années s'étaient écoulées depuis cet édit. Nous arrivons donc à l'année 2300 - 456 = 1844.

2) Selon le Nouveau Testament.

Dans ses "Révélations" St Jean en parlant e des choses qui doivent arriver" dit en substance ceci (Voir Apocalypse 10 et 11).

"Avant la septième trompette un livre viendra du ciel et deux témoins prophétiseront pendant 260 jours. e Or la septième trompette, comme nous le verrons dans un instant, c'est le Jour Promis (Révélation baha'ie). Avant cette Révélation c'est le Qur'an qui est venu du ciel et les deux témoins sont le Prophète Muhammad lui-même et son successeur 'Ali.

1260 jours, comme nous l'avons expliqué c'est 1260 ans.

Donc le Jour Promis viendra en 1260 selon l'Hégire, ce qui correspond exactement à 1844 de l'ère chrétienne (voir le calendrier comparatif).

3) Selon le Qur'an

Voici ce que nous lisons: Ils disent: "Quand donc s'accomplira cette promesse?. Dis leur: pour VOUS dans le délai d'un jour" (34/28-29). Et le Qur'an précise ce qu'il entend par le terme "un jour": Un jour auprès de Dieu fait mille ans selon votre calcul (22/46).

Puisque le Prophète Muhammad dit "pour vous", cela signifie pour les musulmans. Or l'inspiration islamique a cessé en l'an 260 de l'Hégire, avec la mort du dernier Imam, successeur inspiré et descendant du Prophète. Ceci nous amène à l'année 1000 + 260 = 1260 de l'Hégire, c'est-à-dire la même date que Jésus révèle à son apôtre Jean, date qui correspond à 1844 de l'ère chrétienne.

Remarquons qu'il y a bien d'autres versets, aussi bien dans le Qur'an que dans le recueil des traditions islamiques, qui confirment l'année 1260.

Nous voyons ainsi que l'Ancien Testament, le Nouveau Testament et le Qur'an sont unanimes sur la date de 1844 de l'ère chrétienne, ou 1260 de l'Hégire.

Mais il y a bien d'autres signes sur lesquels ces Livres sont d'accord. Parmi ces signes mentionnons le Retour des enfants d'Israël en Terre Sainte. "Voici, je les rassemblerai de tous les pays où je les ai chassés. Je les ramènerai dans ce lieu" (Jérémie 32/37) dit la Bible en parlant du Jour Promis.

Et le Qur'an précise: "Et lorsqu'arrivera le temps promis... ils (les enfants d'Israël) entreront dans le Temple, comme ils y étaient entrés la première fois(Enfants d'Israël 7).

Or la première entrée des enfants d'Israël dans le Temple de Jérusalem (premier retour suite à l'édit du roi Artaxerxes) a commencé 456 ans avant que Jésus ne soit né, c'est la date historique que prend Daniel comme point de départ pour ses prophéties.

Et le deuxième Retour a commencé en 1844 par l'Édit de Tolérance, grâce auquel les Juifs obtinrent la permission d'entrer en Terre Sainte. Et c'est à ce deuxième Retour que fait allusion Isaïe en disant: "Dans ce même temps (Jour Promis) le Seigneur étendra une seconde fois sa main (Isaïe 11/15).

En résumé, la date du Jour Promis qui, selon les Écritures, est 1844, coïncide avec le deuxième Retour des enfants d'Israël en Terre Sainte, ce qui est un signe historique de ce Jour.

Mais pourquoi un nom nouveau pour la Foi de ce Jour (j'entends le nom BAHA'I). C'est la question qui nous est souvent posée. C'est que d'abord chaque "Jour" a un nom nouveau, qui est celui de la Personne qui l'a inauguré: le Jour de Bouddha, le Jour de Moïse, le Jour du Christ etc. Et aujourd'hui, c'est le Jour de BAHÀ, Fondateur de la Foi BAHA'IE.

De plus, selon les mêmes Écritures ce Jour doit porter un nom nouveau. "Et l'on t'appellera d'un nom nouveau" dit Isaïe (62/2) en parlant du Jour Promis.

Nous avons mentionné comme signe du Jour Promis le Retour des enfants d'Israël en Terre Sainte, signe que personne ne peut nier. Mais il y a bien d'autres signes qui, si on les prend à la lettre, ne sont pas arrivés. C'est que précisément il ne faut pas les prendre à la lettre. Tout d'abord pour la simple raison que ce serait illogique ; un langage imagé ne doit pas être pris à la lettre. En effet, l'un de ces signes est la chute des étoiles. Comment peut-on parler de la chute des étoiles sur la planète alors que nous savons actuellement que la plus petite d'entre elles est un millier de fois plus grande que la terre. Cela équivaudrait à parler de la chute d'une montagne sur un grain de moutarde, ce qui est illogique.

Un autre signe c'est que les cieux disparaîtront avec fracas. Or, à un autre endroit on est mis en garde de ne pas rester endormi quand de tels signes se manifesteront:

Craignez qu'ils ne vous trouvent endormi à son arrivée" (Marc 13/36).

Comment peut-on rester endormis quand se produisent ces phénomènes aussi terribles que la disparition des cieux avec fracas, ou la chute des étoiles?

Indiscutablement ce sont des paraboles destinées à être expliquées lors du Jour Promis: "Je vous ai dit ces choses en paraboles. L'heure vient où je ne vous parlerai plus en paraboles, mais où je vous parlerai ouvertement du Père" (Jean 16/25).

Et précisément le premier livre que Bahá'u'lláh a révélé est consacré à l'explication de ces paraboles (Livre de la Certitude).

Sur la base de ce livre nous allons voir l'explication de certains signes du Jour Promis, signes présentés en paraboles:

1. Que signifie "la fin du monde" - "le temps de la fin" - "la fin des siècles"?

Jésus dit "La moisson est la fin du monde" (Mat. 13/39). Or la moisson c'est le stade de maturité dans la croissance d'une plante. Pour l'humanité c'est le stade de maturité dans son évolution. L'humanité d'aujourd'hui n'entre-t-elle pas dans le stade de sa maturité? Nous sommes donc à la fin du monde, au stade final de l'évolution de l'humanité.

"La fin du monde" ou "la fin des siècles" peut également signifier la fin d'un monde corrompu ou la fin des siècles de corruption. Chaque nouvelle révélation met fin au monde corrompu de son époque, raison pour laquelle St Paul parlant de la corruption du passé dit: "Nous sommes parvenus à la fin des siècles (I. Corinthiens X-II).

Il est à remarquer que le texte anglais dit: "Nous sommes parvenus à la fin du monde".

2. Que signifie le signe disant que "Les cieux passeront avec fracas"?

Le ciel est le symbole de tout ce qu'il y a de plus élevé. C'est aussi une allusion à la religion. De même que toutes les bontés matérielles: l'eau, la lumière, la chaleur... viennent du ciel, toutes les bontés spirituelles viennent de la religion. Les cieux passeront ou "s'évanouiront" (Esaïe 1/6) signifie que les religions s'évanouiront ce que l'on constate aujourd'hui dans toutes les religions.

3. Que signifie l'obscurcissement du soleil?

Cet obscurcissement ne peut être matériel car si, pendant une seule seconde le soleil nous privait de sa lumière, il ne resterait plus sur terre la moindre trace de vie, tout serait mort. Et ce n'est pas pour les morts que le Christ doit revenir. Comme le soleil est la source de lumière matérielle, la religion est la source de la lumière spirituelle que représente l'AMOUR. Si la religion n'est pas cause d'amour, alors ce soleil se trouve obscurci, ce qui est le cas aujourd'hui: ne voyons-nous pas les religions divisées en plusieurs sectes antagonistes

Nous sommes donc à la fin du monde, car on en voit ce signe qu'est l'obscurcissement du soleil.

4. Que veut dire "La terre sera consumée"?

Par la terre ou le terrain il faut entendre les idées et les opinions. C'est comme l'expression "sonder le terrain" qui signifie chercher à découvrir les idées et les opinions des autres.

La terre sera consumée signifie donc les idées tombées en désuétude doivent disparaître, phénomène dont nous sommes témoins aujourd'hui.

5. Que signifie "Les nuées derrière lesquelles le Christ doit revenir"?

Les nuées symbolisent ce qui empêche de voir la lumière du soleil. Par conséquent, cela signifie qu'il y aura des facteurs qui empêcheront de voir le soleil spirituel qu'est le Christ.

De ce point de vue on peut dire que le Christ était déjà venu derrière les nuées. En effet, qu'est ce qui a empêché les Juifs de voir cette Lumière qu'était le Christ?

- Le changement des lois en tant que première nuée. Pour les juifs, la loi judaïque était révélée pour l'éternité et leur Promis devait les confirmer et non pas les changer. Or Jésus avait changé certaines lois, et pour les juifs rien que cela suffisait pour ne pas Le reconnaître.

- La condition humaine du messager de Dieu en tant que deuxième nuée. Par condition humaine nous entendons les caractéristiques telles que le lieu de naissance, l'humiliation apparente, etc. Ainsi, par exemple, pour les juifs leur Promis " devait venir d'un lieu inconnu" or Jésus venait de Nazareth, d'où selon eux "Rien de bon ne pouvait sortir". Ce qui d'une autre manière empêcha les juifs de voir cette Lumière qu'était le Christ.

6. Que signifie cette souveraineté qui doit caractériser l'avènement du Promis?

Par la souveraineté il faut entendre la souveraineté spirituelle, et non pas matérielle. Jésus lui-même ne disait-Il pas qu'Il n'est pas le souverain de ce monde?

"Mon royaume n'est pas de ce monde. Si mon royaume était de ce monde, mes serviteurs auraient combattu pour moi, afin que je ne puisse être livré aux juifs" (Jean 18/36).

Le Nouveau Testament n'appelle-t-il pas Jésus: "Le chef des rois de la terre" (Apocalypse 1/5). Et pourtant Jésus à l'époque où St Jean lui donnait ce titre, n'était nullement un roi, mais selon les Romains "civilisés" il n'étaient qu'un "jeune juif crucifié à côté de deux brigands".

Jésus était donc un roi spirituel et devait revenir comme un roi spirituel régnant sur les coeurs.

7. Que faut-il entendre par "le son de la trompette" dont il est parlé dans les Écritures comme signe du Jour Promis?

Le son de la trompette signifie l'appel du Messager de Dieu. Si l'on prend le son de la trompette à la lettre, il devient impossible de concilier ces deux signes apparemment contradictoires: l'avènement du Christ comme un "voleur dans la nuit" et "le son de la trompette" qui doit accompagner cet avènement. Ce n'est tout de même pas avec une trompette qu'un voleur vient dans la nuit.

Chaque révélation est le son de trompette, et selon St Jean (chap. 11) c'est avec la septième trompette que "le royaume du monde est remis à notre Seigneur et à SON CHRIST (Apocalypse 11-15). Remarquons qu'il dit à SON CHRIST, c'est-à-dire à SON OINT par le Saint Esprit, autrement dit à son messager. Or le septième messager c'est BAHÀ'U'LLAH en partant d'Adam comme premier messager, Noé étant le second, Abraham le troisième, Moïse le quatrième, Jésus le cinquième, Muhammad le sixième. Bahá'u'lláh (avec son précurseur le Bab) le septième.

8. que signifie la famine en tant que signe du Jour Promis?

Par famine il faut entendre la famine spirituelle. Famine veut dire manque de pain et le pain symbolise la foi. De même que le pain donne la vie matérielle, la foi donne la vie spirituelle, raison pour laquelle Jésus s'est comparé au pain en disant: "Je suis le pain de vie" (Jean 6-35). Par conséquent, le manque de pain veut dire manque de foi. Et que voyons-nous aujourd'hui? Le manque de foi a atteint de telles proportions qu'on parle de la mort de Dieu. Ne sommes-nous pas au Jour Promis, dont l'un des signes est la famine?

9. Que signifie la chute des étoiles?

Par étoiles il faut entendre les chefs religieux qui, par l'apparition de la nouvelle révélation tombent.

Le Nouveau Testament compare aux astres errants les gens qui renient Jésus-Christ: "Ce sont des astres errants auxquels l'obscurité est réservée pour l'éternité" (Jude 1/ 13).

10. Que signifie la résurrection des morts?

Par le terme résurrection il faut entendre la résurrection spirituelle, autrement dit, lorsque les qualités spirituelles telles que l'amour, la justice, la charité... reprennent vie on ressuscite. Et ceci ne peut se faire que par la foi.

Le Nouveau Testament abonde en passages confirmant cette interprétation de la résurrection.

Nous en citons quelques uns:

1. A un disciple qui voulait aller à l'enterrement de son père non-croyant, Jésus dit: "Suis-moi et laisse les morts enterrer leurs morts" (Matt. 8-22).

Ceci signifie que les non-croyants, considérés comme morts (par Jésus) doivent se charger de l'enterrement des morts physiques.

2. Si la mort dont parle la Bible est physique, alors le chrétien ne doit jamais mourir, puisque le Christ dit: "Quiconque croit en moi ne mourra jamais" (Jean 11/26).

3. Pour confirmer que les non-croyants sont considérés comme morts, St Paul dit: "Relève-toi d'entre les morts" (Éphésiens 5-14).

4. Et pour bien préciser que la résurrection se fait par la foi, St Paul dit: "Vous êtes aussi ressuscités en lui, avec lui, par la foi (Colosiens 11- 12).

5. Afin de bien faire comprendre que ce n'est pas le corps qui ressuscite Si Paul déclare clairement: "Mais quelqu'un dira: comment les morts ressuscitent-ils et avec quel corps reviennent-ils? Insensé ! Ce que tu sèmes, ce n'est pas le corps qui naîtra" (1. Corinthiens 15-35/37).

St Paul compare le corps humain à la graine, qui une fois enterré, sort de la terre non pas sous la forme de la même graine, mais sous la forme d'une plante: manifestation de l'esprit qui se trouve dans la graine (esprit végétal). Par conséquent, la "renaissance" se fait en esprit (par la foi).

6. Et pour ne pas laisser subsister le moindre doute concernant l'interprétation de la résurrection, St Paul s'adressant aux Ephésiens devenus chrétiens, dit encore: "Vous étiez morts... nous tous aussi... il nous a ressuscités ensemble" (Éphésiens 11-1/6).

Ici Si Paul parle de sa résurrection. Effectivement, tant qu'il restait incroyant et persécuteur des chrétiens, il était mort, et lorsqu'il acquit la foi, en Jésus Christ il est ressuscité.

Voilà, chers amis, l'explication des signes du Jour Promis (selon les Écrits baha'is).

N'y trouvez-vous pas ce langage ouvert que Jésus nous a promis en disant: "Je vous ai dit ces choses en paraboles. L'heure vient, où je ne vous parlerai plus de paraboles, mais où je vous parlerai ouvertement du Père" (Jean 16/25).


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6.9. Tomber martyr - ce fut leur seul désir

Un jour, l'un des disciples d'Avicenne(Illustre savant du 10ème siècle) lui dit: "Maître, si jamais tu te déclares le prophète de Dieu, je serai ton premier disciple". Avicenne ne dit rien, mais quelques jours après, il le réveille à l'aube pour lui demander un verre d'eau.

"Maître, il n'est pas bien de boire de l'eau à cette heure-ci" lui répondit son élève sans bouger de son lit.

Un instant après ayant entendu l'adhan (Appel à la prière chez les musulmans) il se lève précipitamment pour aller à la mosquée.

"Tu vois, lui dit Avicenne, voilà la différence entre ce que dit un prophète et ce que dit un homme ordinaire. Ton maître qui est devant tes yeux et que tu vois, te demande de te lever pour lui chercher un verre d'eau, et tu ne l'écoutes pas. Mais le prophète, ce prophète que tu ne vois pas, t'a demandé, il y a des siècles, de quitter ton lit pour aller à la mosquée, et tu lui obéis scrupuleusement."

Cette histoire est instructive en ce sens qu'elle illustre l'influence de la parole de Dieu, influence si puissante que durant des siècles et même des millénaires, les gens restent toujours prêts à lui obéir au prix non seulement de leur confort matériel ou de leurs biens terrestres, mais encore de leur vie afin de tomber en martyr pour l'amour de Dieu.

Indiscutablement il y a des martyrs dans tous les mouvements (politique, patriotique, etc.) mais ce qui est particulier à ces martyrs, c'est que leur but garde toujours un caractère matériel, et que leur nombre reste toujours limité à une catégorie bien déterminée.

Ainsi, par exemple, les mouvements politiques revendicatifs d'avantages sociaux ne comptent jamais parmi leurs martyrs des gens jouissant pleinement des biens matériels et disposant de grandes richesses.

Ce n'est pas le cas des martyrs pour la foi. Et plus particulièrement en ce qui concerne la Foi baha'ie dont les 20000 martyrs non seulement n'avaient en vue aucune considération matérielle, mais en plus étaient originaires de toutes les religions et de toutes les couches de la société en commençant par les gens très pauvres pour finir par des hommes immensément riches et occupant de très hautes positions dans la société.

Ce soir nous allons rappeler l'histoire de deux frères qui étaient infiniment riches et qui sacrifièrent à la Foi non seulement leurs biens mais leur vie.

Il s'agit de deux frères Mirza Hossein et Mirza Hasan, originaires de la ville d'Isfahan. Leur père était parmi les disciples du Bab (Précurseur de la Foi baha'ie) à qui il les a présentés quand ils avaient respectivement 11 et 9 ans.

En 1852, avant d'atteindre l'âge de 20 ans, tous deux allèrent à Bagdad pour faire visite à Bahá'u'lláh (Fondateur de la Foi baha'ie) qui à cette époque, s'y trouvait en exil. De retour a Isfahan, ils se donnèrent coeur et âme aux oeuvres de bienfaisance, tout en s'occupant de leur commerce, où ils obtinrent un succès auquel personne ne pouvait s'attendre. Leur réputation atteignit les autres villes de l'Iran, de sorte que beaucoup de commerçants de différentes villes entrèrent en relation avec eux.

Malgré toutes leurs activités aussi bien dans le domaine du commerce que dans celui de la Foi, ils trouvaient toujours le temps d'assister les malheureux, de venir en aide aux nécessiteux, de consoler les affligés et par tous les moyens de manifester leur générosité à l'égard de tout le monde. Durant l'année de la famine à Isfahan, ils sauvèrent de la mort un très grand nombre de leurs concitoyens.

Sur le plan religieux, ils organisaient chez eux des réunions d'information sur la Foi, invitant régulièrement et recevant chez eux des enseignants de la Foi, ce qui n'était un secret ni pour les autorités civiles, ni pour les autorités ecclésiastiques.

A cette époque, le gouverneur d'Isfahan était le fils aîné du Shah, un nommé Zello's Soltan, un tyran qui avait versé le sang de beaucoup d'innocents. Concernant sa cruauté on raconte qu'un jour, accompagné de ses chiens féroces, il se trouvait à la campagne, lorsqu'un paysan lui tendit une lettre où il se plaignait de l'injustice du chef du village. En réponse le gouverneur fit signe à ses chiens de se jeter sur le malheureux et de mettre fin à ses jours par une mort atroce, spectacle auquel il prenait plaisir.

Quant aux chefs ecclésiastiques il y en avait deux parmi eux qui se distinguaient particulièrement par leur esprit satanique ; le premier était l'Imàm Jom'ah (Prêtre musulman qui les vendredis à la tête des croyants récite la prière rituelle à la mosquée) d'Isfahan, et le second un certain Shaykh Bàqir.

L'Imam Jom'ah avait confié la gestion de ses biens immobiliers aux deux frères Mirza Hossein et Mirza Hasan, et il en profitait pour leur demander sans cesse les sommes considérables afin de jouir pleinement des plaisirs de ce monde.

Tant que les deux frères lui payaient tout ce qu'il leur demandait, il n'attachait aucune importance à ce que ses créanciers soient des baha'is et soient très actifs dans la propagation de leur foi. Peu lui importait, à cette époque, si les baha'is étaient terriblement persécutés partout en Iran et surtout à Isfahan.

Ce fut alors que les deux frères écrivirent une lettre à Bahá'u'lláh, Lui exprimant leur désir de tomber martyrs pour la Foi.

Telle resta la situation jusqu'en 1879. Quand les deux frères ayant fait le compte de l'imam Jom'ah s'aperçurent que sa dette s'élevait à un montant de plus de 18 mille toumans (Somme équivalent à presque 26000 dollars à l'époque et par conséquent à des dizaines de millions de dollars à notre époque). Ils lui demandèrent donc de s'en acquitter et c'est alors que l'idée diabolique vint à l'esprit de l'imam Jom'ah de faire disparaître les deux frères sous l'accusation d'être baha'i.

Il en paria un jour à un autre mollah, un nommé Shaykh Bàqir, lequel approuva pleinement son projet.

Mais il fallait encore l'accord du gouverneur. Ils allèrent donc chez celui-ci, et lui dirent que profitant de leur haute situation sociale et de l'estime générale, les deux frères attiraient les habitants d'Isfahan à la cause de Bahá'u'lláh et qu'au train où allaient les choses, il ne restera bientôt plus de trace de l'islam. "Votre devoir est donc de les faire disparaître" insistèrent-ils.

"Mais ils n'ont rien fait pour que je les fasse arrêter. Au contraire, leur conduite est irréprochable et ils jouissent précisément de l'estime générale. Pour quel crime vais-je les faire exécuter?" dit le gouverneur.

"Il n'y a pas de crime plus grand que de quitter l'islam pour adopter une nouvelle religion" fut la réponse des mollahs.

"Mais ils sont des descendants même du Prophète Muhammad. Que vais-je répondre à Dieu?".

"C'est à nous de répondre à Dieu".

"N'oubliez pas qu'ils représentent les intérêts de beaucoup de commerçants, lesquels subiront de grandes pertes par la disparition des deux frères. Ils porteront plainte au Shah lui-même. Que vais-je répondre au Shah?"

"C'est à nous de répondre au Shah, comme aux commerçants".

Finalement, ils arrivèrent à le convaincre de la nécessité de l'exécution des deux frères, en lui promettant une part des bénéfices qu'ils en tireraient. Et pour le tranquilliser, ils lui remirent un document signé, par lequel ils assumaient la pleine responsabilité de cette condamnation à mort.

D'un commun accord, ils décidèrent de garder le secret jusqu'au jour de la célébration de la naissance du Prophète Muhammad, jour où les personnalités de la ville rendent visite aux autorités ecclésiastiques et civiles pour leur présenter leurs meilleurs voeux.

"Ce sera une occasion pour faire arrêter les deux frères" dirent-ils.

Or ce jour-là, le frère aîné Mirza Hossein accompagné de Mirza Ismail (le troisième et le plus jeune des trois frères) alla à la réunion en question. Et au moment où ils prenaient du thé, sur un signe de l'Imam Jom'ah, on leur arracha les tasses pour les jeter dehors, en tant qu'objets touchés par la main des infidèles et, par conséquent, impurs. Après quoi on se mit à les humilier et à les insulter. Et finalement on les arrêta pour les amener chez le gouverneur.

Comme Mirza Hasan, le second frère était absent, l'Imam Jom'ah chargea ses serviteurs d'aller le chercher.

Mirza Hasan se trouvait chez un mollah très pieux. Celui-ci, au courant du dessein diabolique de l'Imam Jom'ah , voulut garder son protégé, mais sur l'ordre du gouverneur, la douleur au coeur il dut livrer Mirza Hasan aux gardes qui le réclamèrent "Ne soyez pas triste" dit Mirza Hasan à son hôte "c'est l'heure de mon martyr qui approche ; je m'y attendais avec joie depuis longtemps".

Ceci dit, il donna sa montre à l'un des gardes, et tout ce qu'il avait avec lui, il le partagea parmi les autres.

Amené auprès du gouverneur, il y rencontra ses deux frères. A peine arrivé il vit le gouverneur s'attaquer à lui avec des propos injurieux, maudissant sa foi:

"Excellence" lui dit-il "si vous saviez ce que je sais, vous n'auriez pas tenu ce langage indigne de vous".

Le gouverneur explosa, lui donna une gifle et se mit à le frapper sur la tête avec sa canne. Puis il ordonna que l'on enlève aux trois frères leurs vêtements, qu'on les enchaîne et qu'on les mette en prison. Ce qui fournit à l'Imam Jom'ah une excellente occasion de faire piller leur maison et de s'approprier leurs biens mobiliers (chameaux et marchandises) et immobiliers.

Mais d'autre part, alarmés par la nouvelle de leur arrestation les commerçants des différentes villes envoyèrent des télégrammes au Shah et au gouverneur, leur expliquant les préjudices qu'ils auraient subi. Le Shah avait ordonné d'envoyer les prisonniers à Téhéran. Mais, désirant mettre la main le plus tôt possible sur les biens des victimes, le gouverneur décida d'en finir avec eux et de n'annoncer au clergé la réception du télégramme du Shah qu'après l'exécution des deux frères. Il essaya pourtant de leur faire renier leur foi et leur promit la liberté contre une forte somme d'argent liquide.

Les deux premiers des frères lui dirent que tomber martyr pour la Foi était leur seul désir en ce monde.

Afin d'avoir la vie sauve le troisième (le plus jeune des trois) consentit à payer 9000 touman (Equivalent de 13000 dollars à époque (plusieurs millions aujourd'hui)) et à dire qu'il n'était pas baha'i.

Il fut donc libéré et envoyé chercher l'argent promis. Quant aux deux autres, sur la base de la sentence signée par le clergé et de l'engagement de celui-ci à être responsable en ce monde et dans l'autre, le gouverneur ordonna le bourreau de les décapiter.

À la vue du bourreau avec son épée tirée du fourreau Mirza Hossein, le frère aîné dit à son cadet: "C'est moi que les tyrans veulent tuer. Il vaut mieux que tu dises que c'est seulement ton frère aîné qui est baha'i ce qui te permettra de sauver ta vie et de pouvoir protéger ma femme et mes enfants".

"Non, mon cher frère, Dieu est le Seul Protecteur. Restons toujours ensemble, même dans l'au-delà".

Touché par ce dialogue et se sentant déjà endetté à leur égard à cause de leur générosité incessante dans le passé, le bourreau les supplia de renier leur foi, pour lui permettre ainsi de ne pas commettre cet acte ignoble.

"Mais tu ne fais que ton devoir" répondit le frère cadet.

Alors il leur banda les yeux pour procéder ensuite à la décapitation, tâche qui lui parut difficile, car chacun désirant être le premier à offrir son sang, empêchait l'autre d'avancer. Cette scène tragique dura presqu'une heure devant les yeux des deux mollahs, leurs vrais meurtriers. Finalement ceux-ci firent signe au bourreau de porter le coup fatal au moment où les deux frères étaient dans les bras l'un de l'autre et ne cessaient d'invoquer BAHÁ'U'LLÁH.


Maison d'Éditions Baha'ies - D/1974/1547/5xxxxxxxx


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7. FASCICULE 7 - Les Prodiges de ces temps merveilleux

PRÉFACE

"Bien que la concorde régnât au cours des cycles passés, le manque des moyens de communication appropriés rendait impossible l'organisation de l'unité de toute l'humanité. Les continents demeuraient largement séparés. Même entre les peuples d'un seul continent, les ententes et les échanges de pensées étaient pour ainsi dire impossibles.

En conséquence, les rapports, la compréhension mutuelle et l'unité entre les peuples et familles de la terre ne pouvaient être envisagés. Par contre, de nos jours, les moyens de communication se sont développés de telle sorte que les cinq parties du monde se sont virtuellement fondues en une seule. De même tous les membres de la famille humaine, peuples et gouvernements, villes et villages dépendent de plus en plus les uns des autres.

Il n'est plus loisible, à aucun d'entre eux de s'isoler avec la prétention de pouvoir se suffire à soi-même. D'autant plus que les liens politiques qui unissent tous les peuples et les nations, ainsi que les attaches de commerce, de l'industrie, de l'agriculture et de l'éducation sont tous les jours renforcés. Il parait donc évident que l'unité de l'humanité peut être réalisée en cette époque. Ce n'est véritablement rien d'autre qu'un des prodiges de ces temps merveilleux de ce siècle admirable" (`Abdu'l-Bahá (cité dans " le but d'un Nouvel Ordre Mondial")

Ceci est un extrait des Écrits bahá'is choisi par l'auteur pour justifier le titre du présent fascicule; celui-ci est un recueil des conférences exposant des principes tels que l'unité de l'humanité, principes qui une fois réalisés, seront considérés comme les " prodiges de ces temps merveilleux".


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7.1. Quel monde voulons-nous

Un professeur avait l'habitude de coter sévèrement ses élèves. Un étudiant lui ayant demandé pourquoi il n'avait eu que 7 sur 10 à une interrogation, le professeur lui expliqua son système de notation:

7 est une bonne note, 8 est une note excellente, je donne 9 à celui qui dit tout ce que je sais, et 10 à celui qui m'apprend quelque chose.

C'est un peu mon cas ce soir, car en réalité c'est un examen que je vais passer devant vous étant donné que je vais essayer de me rappeler ce que j'ai appris à l'école bahá'ie, et de vous l'exposer en résumé, tout en espérant que je n'aurai pas une mauvaise note.

Parmi toutes les histoires instructives qu'on m'a racontées il y en a deux que je n'oublierai jamais, car elles illustrent pour moi ce qu'il y a d'essentiel dans la foi bahá'ie.

La première histoire dit ceci:

Abraham, très hospitalier de nature, attendit en vain toute une semaine que quelqu'un vienne chez lui. Finalement un jour arriva un centenaire. On prépare un repas copieux et toute la famille se met à table. Et avant de commencer à manger, tous récitent leurs prières sauf le centenaire en question. Abraham lui en demande la raison.

- Je suis païen - répondit le vieillard.

Là-dessus Abraham le mit à la porte. Alors il entendit une voix venant du ciel qui lui disait:

"Abraham, j'ai nourri cet homme pendant cent ans, et toi tu n'as pas voulu lui donner à manger une seule fois?"

Cette histoire m'a permis de comprendre que Dieu ayant créé l'homme ne l'abandonne pas à son sort, et ne le prive pas de Ses bienfaits, peu importe qu'il croie en Lui ou qu'il se dise païen.

Quel est le père qui ayant formé une famille mettrait dehors celui de ses enfants qui dit ne pas croire en lui?

De cette histoire, j'ai encore compris ceci: si, dans une famille les enfants nés en différents pays, élevés dans des climats différents, et ayant par conséquent différentes couleurs de peau et possédant une diversité de tempéraments et de goûts, si ces enfants doivent s'entendre et se soumettre à une commune discipline, il faut qu'il en soit de même en ce qui concerne la famille humaine dont Dieu est le Père.

Et plus tard encore j'ai compris que c'est là l'essence même des enseignements bahá'is et que c'est là un principe nouveau dans l'histoire des religions, principe connu sous le nom de " unité " du genre humain". Principe nouveau, car il ne faut pas oublier que selon toutes les Écritures du passé, l'humanité se divisait en deux familles; la première composée des "gens du Livre de Dieu " et par conséquent, aimés de Dieu - la seconde, formée " des peuples de l'erreur" et par conséquent, rejetés par Dieu. La première étant les fruits du " bon arbre", la seconde les fruits du " mauvais arbre".

"Vous êtes les fruits d'un même arbre, dit Bahá'u'lláh, le Fondateur de la foi bahá'ie. Par cette Parole, il voulait dire qu'il n'y a pas deux arbres, un bon et un mauvais. Il n'y a qu'un seul arbre et tous les hommes en sont les fruits.

Autrement dit, un seul Père, et une seule famille: la famille humaine. Et c'est ma famille puisque j'en fais partie. Tous sont mes frères, et non pas seulement ceux qui partagent ma foi, comme ce fut le cas dans le passé où l'on faisait une distinction entre les frères et les païens (voir Mat. XVIII-15-17).

A ce propos permettez-moi de vous lire quelques extraits des Écrits bahá'is.

"Aux yeux du créateur, tous ses enfants sont égaux. Il répand sa bonté sur tous. Il ne favorise pas telle ou telle nation. Il les a créées toutes au même titre. Puisqu'il en est ainsi, pourquoi établir des divisions et séparer les races les unes des autres? Pourquoi créer ces barrières de superstitions et de traditions qui amènent la discorde et la haine parmi les peuples.

La seule différence qui existe entre les membres de la famille humaine est une différence de degré. Les uns sont comme des enfants ignorants et pour parvenir à l'âge mûr doivent être éduqués. D'autres sont comme des malades et doivent être traités avec soin et tendresse. Aucun n'est méchant, ni mauvais. Nous ne devons pas éprouver de répulsion pour ces pauvres enfants, mais les traiter avec une grande bonté, instruire les ignorants et soigner tendrement les malades" (Causeries d`Abdu'l-Bahá).

Voici encore un autre extrait des Écrits bahá'is:

"Qu'il n'y ait pas de malentendu. Le principe de l'unité de l'humanité, l'essence même de tous les enseignements de Bahá'u'lláh, n'est pas une simple manifestation de soudaine sentimentalité ignorante ou l'expression d'un espoir vague et pieux. Son appel n'a pas à être identifié avec un réveil de l'esprit de fraternité et de bonne volonté parmi les hommes. Il ne vise pas non plus, à seulement entretenir une harmonieuse coopération entre des peuples et des nations autonomes. Ce qu'il renferme est plus profond. Ses aspirations sont plus grandes qu'aucune de celles que les Prophètes du passé furent autorisés à formuler.

Son message ne s'adresse pas seulement à l'individu, il s'intéresse en principe à la nature des rapports essentiels qui doivent relier entre eux, tous les États et nations considérés comme les membres d'une seule famille humaine" (Shoghi Effendi: "Le but d'un Nouvel Ordre Mondial").

Quant à la seconde histoire que je vous ai promise je crois l'avoir racontée lors d'une autre conférence. En ce cas, permettez-moi de la rappeler.

Parvenu à Babylone, le roi Alexandre convoqua les chefs spirituels de son époque.

- Dites moi, leur demanda-t-il, si vous adorez un Etre suprême?

- Qui, votre Majesté - fut la réponse.

- Alors comment appelez-vous cet Etre Suprême?

- Brahama - répondit le prêtre indien - ce qui signifie le Grand.

- Hermoz - dit le prêtre zoroastrien - ce qui signifie la Lumière.

- Jéhovah, répondit le prêtre juif - ce qui veut dire Il était, Il est, Il doit venir.

Dorénavant, dit Alexandre, vous n'avez qu'un roi et vous n'aurez qu'un seul Seigneur, et il s'appelle Zeus!

Les prêtres consternés, se demandaient si on pouvait ainsi changer le nom du Seigneur qu'ils adoraient depuis toujours. Alors un vieux sage intervint et dit au roi:

- Me permettriez-vous de dire un petit mot?

- Certes, dit Alexandre.

Alors, le vieux sage se tournant vers les prêtres leur demanda:

- Comment appelez-vous le soleil?

Et chacun disait le nom sous lequel on désignait le soleil. - Et si dorénavant vous l'appeliez tous du même nom: HELIOS, le soleil ne continuerait-il pas de vous donner sa lumière?

On dit que le roi, confondu par cette remarque, déclara en guise de conclusion:

- Que chacun appelle son Seigneur comme il l'entend. Je vois maintenant que ce n'est pas le nom, ni l'image qui fait cet Etre Suprême.

Si la première histoire nous a amené à conclure que Dieu répand Sa bonté sur tous, la deuxième nous confirme cette vérité.

En effet, la deuxième histoire compare Dieu au soleil. Or le soleil donne sa lumière à tout le monde.

Et chose remarquable, toutes les Écritures comparent les messagers de Dieu au soleil. C'est d'ailleurs cette comparaison qui, avec le temps, a amené les zoroastriens à devenir adorateurs du soleil.

Pour les chrétiens, Jésus est " la lumière du monde" (Jean 8/12)

De plus, toutes les Écritures prédisent le Retour" du même " Soleil". En se comparant au soleil et en prédisant leur " Retour " les messagers de Dieu veulent laisser entendre leur unité, c'est-à-dire que c'est toujours le même soleil qui réapparaît et que ce qui change c'est sont point de lever.

Ainsi par exemple, Krishna parle de son " Retour " en ces termes:

"Chaque fois qu'il y a un déclin dans la justice je reviens".

Et pour citer un autre exemple encore rappelons-nous que Jésus aussi parle de son " Retour". Ce qui veut dire que le "soleil" d'il y a 4000 ans qui devait "revenir" (Krishna) et le même " soleil " qui est " revenu " il y a 2000 ans (Jésus) et que ce " soleil " qui à son tour devait " revenir " est ce même " soleil " qui est apparu aujourd'hui (Bahá'u'lláh). Et en bref cette apparition et réapparition du soleil se poursuit éternellement.

Ceci nous amène à un deuxième principe bahá'i, principe connu sous le nom d'unité de base de toutes les religions et unité de leurs fondateurs.

De ce point de vue la religion bahá'ie est la Religion renouvelée plutôt qu'une nouvelle religion.

Mais pourquoi alors utilise-t-on le terme "nouvelle religion "?

Afin de répondre à cette question rappelons-nous la définition du mot " Religion " selon les Écrits bahá'is.

"La religion ce sont les relations essentielles résultant des réalités des choses" (`Abdu'l-Bahá).

Ainsi, par exemple, la religion dit:

"Ne cherche pas à voir les défauts d'autrui et ne t'humilie pas".

C'est qu'il y a une relation entre le fait de s'apercevoir des défauts d'autrui et le fait de s'humilier. Car il a été démontré que celui qui parle des défauts des autres possède précisément lui-même ces défauts. Par conséquent lorsqu'il en parle il révèle ses propres défauts et, inévitablement, cause sa propre humiliation aux yeux des autres. N'est-il pas évident que s'il ne possédait pas ces mêmes défauts il ne les apercevrait pas chez les autres? C'est comme si dans votre conversation j'aperçois un mot chinois; cela prouverait que je possède la langue chinoise.

Autre exemple:

Bahá'u'lláh dit:

"Evitez la tristesse et le chagrin, car ils entraînent de grandes calamités".

C'est qu'il y a une relation entre la tristesse et le malheur. L'un de ces malheurs ce sont les maladies dites psychosomatiques, incurables par la médecine traditionnelle, maladies découlant d'un état de mécontentement perpétuel et d'une mélancolie permanente.

Le professeur Paré va jusqu'à prétendre que "le cancer est fait de mélancolie".

Nous disions donc que la religion ce sont les relations essentielles entre les réalités des choses. Or ces relations sont de deux natures. La première catégorie de relations concerne le domaine de la moralité et de la spiritualité (amour, patience, persévérance, charité etc ...). Cette catégorie de relations, étant essentielle, reste immuable. Toutes les religions nous exhortent au même amour, à la même patience, à la même charité. Et comme avec le temps ou les oublie, la religion se renouvelle. De ce point de vue il n'y a donc pas une "nouvelle religion" mais "la religion renouvelée".

La deuxième catégorie de relations concerne plutôt les lois sociales, telles que celles du mariage ou celles punissant les délits et les crimes et bien d'autres du même genre. Cette seconde catégorie de relations est d'importance secondaire et change avec le temps. Elle a pour but de satisfaire aux exigences de l'époque en contribuant ainsi à la mise en application efficace de la première catégorie de lois. Partant de ce point de vue il est permis de dire que la religion change et on peut alors parler d'une " nouvelle religion".

Afin de mieux éclaircir cette question passons en revue quelques relations essentielles découlant des réalités des choses, relations qui ont changé et qui sont nouvelles donnant l'image d'une nouvelle religion.

I. Relations entre l'homme et la femme:

Dans le passé la femme était comme une enfant par rapport à un adulte (l'homme) Et c'est la raison pour laquelle toutes les religions du passé lui imposaient la soumission à la volonté de l'homme, considéré comme son supérieur.

Et si la femme restait inférieure à l'homme, ce n'était pas parce que potentiellement elle était inférieure, c'est parce qu'elle ne recevait pas d'éducation.

Mais aujourd'hui l'éducation étant devenue généralisée et obligatoire, la femme se montre aussi capable que l'homme, et il n'y a aucune raison pour qu'elle soit considérée comme inférieure à l'homme. L'égalité des droits s'impose donc et cette égalité des droits contribue au véritable amour entre les époux. Il y a donc de nouvelles relations essentielles entre les réalités des choses. Ce qui justifie la notion d'une nouvelle religion. Ceci s'applique précisément à la foi bahá'ie dont l'un des principes est l'égalité des droits de la femme et de l'homme.

La foi bahá'ie est donc de ce point de vue une nouvelle religion. Ce qui n'empêche pas que du point de vue purement spirituel elle soit considérée comme la "religion renouvelée".

II. Relations entre l'homme et son prochain:

Dans le passé, pour un homme, le prochain était d'abord son voisin, puis son concitoyen et plus tard son compatriote (l'amour de la patrie faisant partie de la religion). Mais aujourd'hui pour un bahá'i le prochain est tout habitant de la planète, et c'est cette planète qui est sa patrie.

Comme il est parlé de l'amour du prochain en tant qu'un signe de foi, comment peut-on le mieux concrétiser ce signe, cet amour pour tout habitant de la planète, si ce n'est par le produit d'un travail qui doit lui profiter. Le travail consciencieux devient donc l'amour rendu visible et par conséquent c'est l'un des signes de la foi.

Voilà pourquoi le travail consciencieux est un autre principe sacré de la foi bahá'ie.

Et de ce point de vue aussi la foi bahá'ie est une nouvelle religion.

Pour être plus précis il faut dire que pour un bahá'i le prochain n'est pas seulement un contemporain, mais plutôt toute personne faisant partie de la génération future, car pour un bahá'i le paradis terrestre n'est pas pour aujourd'hui, mais plutôt pour demain, et c'est pour demain qu'il s'engage à travailler consciencieusement aujourd'hui.

III. Relations entre l'homme et l'autorité:

Dans le passé c'était un individu qui faisait l'autorité (spirituelle ou civile).

Ainsi, par exemple, dans toutes les religions le pouvoir ecclésiastique se trouvait dans la main d'un individu (rabbin, prêtre, mollah, etc..)

Et c'était conforme aux exigences du temps, car l'instruction n'était pas généralisée et ne pouvait pas l'être; elle restait donc l'apanage d'un très petit nombre de personnes qui formaient le clan des dirigeants spirituels.

Mais aujourd'hui l'instruction étant généralisée on n'a plus besoin d'un clergé. Ce qui ne veut pas dire que les bahá'is soient anticléricaux: un élève qui a déjà appris à lire et à écrire n'a plus besoin de maître mais cela ne veut pas dire pour autant qu'il soit devenu un adversaire du maître.

Dans le foi bahá'ie ce n'est plus l'individu qui fait l'autorité, mais la communauté et cela par voie de la consultation.

Cette question à elle seule devrait faire l'objet d'une conférence, aussi allons-nous nous borner à indiquer comment cela se passe.

Sur le plan local d'abord. Etant donné que les bahá'is se rencontrent mensuellement pour se consulter et s'entraîner à l'esprit de service, ils arrivent à distinguer les meilleurs serviteurs de la communauté, et les élisent comme administrateurs au sein d'une institution qui constitue l'autorité locale.

Sur le plan national, l'institution faisant autorité est également élue parmi les meilleurs serviteurs du pays, serviteurs qui par élection deviennent des instructeurs et font partie d'un ensemble indivisible.

Il en est de même sur le plan mondial où ce n'est toujours pas l'individu qui fait l'autorité mais une institution composée des meilleurs serviteurs mondiaux, devenus administrateurs, toujours par élection.

Ce qu'il est important de noter c'est que les membres de ces institutions ont une CONSCIENCE UNIVERSELLE.

Qu'ils soient des représentants locaux, nationaux ou mondiaux, ils se considèrent comme natifs de la planète tout entière et non pas comme natifs de leur ville natale ou de leur pays d'origine, et, par conséquent ils défendent les intérêts de toute la race humaine.

Et ceci est une autre contribution à l'amour de tout habitant de la planète; contribution cette fois au niveau des institutions.

IV. Relations entre les autorités:

Jusqu'ici les autorités locales d'un pays cèdent un certain nombre de leurs pouvoirs et privilèges à leur institution nationale dont les membres ont un sentiment national et se considèrent comme les défenseurs de l'intérêt national. Ainsi, par exemple, Lincoln n'a jamais favorisé ,les intérêts de sa province natale, le Kentucky.

Il n'a jamais voulu l'abolition de l'esclavage par priorité pour sa ville natale, pas plus que pour le Nord de l'Amérique, mais il avait le sentiment qu'il fallait le faire dans l'intérêt de tout le pays. Il avait raison, et il y a réussi brillamment.

Or aujourd'hui il faut monter d'un échelon, il faut que les autorités nationales cèdent un certain nombre de leurs droits et privilèges à une autorité mondiale.

Puisque de nos jours on parle beaucoup du pétrole, citons-le comme exemple. Selon les enseignements bahá'is une nation possédant des gisements de pétrole n'a pas le droit d'en augmenter le prix à sa guise ni d'en réduire l'exploitation au gré de ses caprices. Le contrôle en doit incomber à une autorité mondiale, composée des représentants de toutes les nations et parmi celles-ci la nation productrice en question; une autorité au sein de laquelle les représentants des nations placent l'intérêt du monde entier au-dessus de l'intérêt de leur propre nation. Tout comme dans la gestion d'un gouvernement national, les ministres bien que natifs de différentes villes placent l'intérêt du pays au-dessus de l'intérêt de leur cité natale.

De telles relations entre les autorités nationales et une autorité mondiale sont absolument nouvelles et la religion bahá'ie étant la première à les proclamer, elle doit être considérée une fois encore comme une " nouvelle religion " tout en restant par ses enseignements purement spirituels la " religion renouvelée".

Mais à tout cela, j'entends déjà l'objection: "ça paraît tellement évident aujourd'hui". Oui, aujourd'hui bien sûr mais pas hier, mais pas il y a plus de cent ans, quand la femme n'avait pas les mêmes droits qu'aujourd'hui, quand mon prochain devait être mon compatriote, quand les autres étant des étrangers contre lesquels il y eut tant de guerres, quand c'était l'individu qui faisait l'autorité et non pas l'institution, quand une autorité mondiale paraissait comme une pure utopie.

Et juste à cette époque tout cela a été révélé par la plume de Bahá'u'lláh, raison pour laquelle les historiens impartiaux le reconnaissent comme un connaisseur des lois régissant l'évolution de l'humanité.

Et c'est justement là une des caractéristiques des messagers de Dieu qui révèlent anticipativement et progressivement les lois qui sont en conformité avec le degré de l'évolution de l'humanité. C'est ce qu'on appelle LA REVELATION PROGRESSIVE

qui implique qu'aucune religion ne peut prétendre détenir la vérité absolue et définitive.

Remarquons que l'équivalent de cette révélation progressive en religion c'est en science la théorie de la relativité.

Que dit cette théorie? Einstein lui-même le définit ainsi:

"La totalité des phénomènes physiques est d'un caractère tel qu'elle ne fournit pas de base pour introduire le concept de mouvement absolu" (Les conceptions morales, sociales et scientifiques d'Einstein).

Et c'est en substance ce que dit le principe de la révélation progressive.

"La totalité des phénomènes spirituels (révélations) est d'un caractère tel qu'elle ne permet pas d'introduire le concept de la vérité absolue".

La vérité est révélée progressivement par des messagers de Dieu qui se succèdent.

En effet, Moïse dit:

"Le Seigneur votre Dieu vous suscitera d'entre vos frères un prophète comme moi" (Actes 3/22)

Donc la révélation de la vérité ne s'est pas arrêtée avec Moïse.

Jésus, à son tour, dit qu'il a beaucoup de choses à dire et que ce sera la tâche d'un autre (Jean 16/12)

Et il prie pour l'avènement de ce Promis: "Et moi, je prierai le Père et il vous donnera un autre consolateur" (Jean 14/16).

Donc la révélation de la vérité ne s'est pas arrêtée avec Jésus, elle est restée relative.

Encore plus précis est le Prophète Muhammad qui parle des messagers qui viendront après lui.

Quant à Bahá'u'lláh c'est clairement et sans la moindre ambiguïté qu'il proclame le principe de la révélation progressive, tout en précisant que la vérité révélée par Lui reste relative.

Cette vérité est exposée dans une centaine d'ouvrages Écrits par Bahá'u'lláh il y a plus de cent ans. Tout ce que les bahá'is demandent c'est qu'on y jette un coup d'oeil afin de voir si oui ou non tout ce qui se passe dans le monde d'aujourd'hui n'a pas été prévu dans ces Écrits et si Bahá'u'lláh n'a pas donné le remède pour tant de maux dont souffre actuellement l'humanité.

Qu'on jette un coup d'oeil sur les Écrits de Bahá'u'lláh afin de voir si le plus grand mal qui accable l'humanité n'est pas en définitive son manque d'unité et si rien que par application sincère du seul principe de l'unité du genre humain, qui engage tout homme à considérer tous les habitants de la planète comme ses frères on ne s'acheminerait pas vers ce MONDE UNI que nous désirons tous.


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7.2. L'écho de l'aventure scientifique

Une nuit, un étudiant de l'Université de Copenhague fit un rêve étrange. Il se vit dans un soleil de gaz brûlant. Des planètes tournaient autour de ce soleil auquel elles étaient reliées par de minces filaments. Soudain le gaz se solidifia et le soleil et les planètes se réduisirent.

L'étudiant en question (il s'agit du futur atomiste Bohr) se réveilla à ce moment et eut conscience qu'il venait de découvrir le modèle de l'atome. Le " soleil " était le centre fixe autour duquel tournoyaient les électrons. Toute la physique atomique moderne et ses applications sont sorties de ce rêve, ce rêve qui a donné à Bohr de CROIRE en ce qu'il ne pouvait pas VOIR. Et en récompense on a pu par la suite VOIR ce qu'on a CRU.

En effet par la suite, grâce à un calcul mathématique précis, on a démontré l'existence de l'atome, autrement dit, on a VU l'atome en tant que la plus petite particule de matière.

Etant donné que par sa structure l'atome est comparable au système solaire et que dans ce système existent des mouvements d'une vitesse hallucinante prouvant la présence de réserves d'énergie, on s'est dit qu'il fallait CROIRE qu'il en était de même en ce qui concerne l'atome. On a donc CRU à l'existence des réserves d'énergie dans l'atome et, par la suite, on a VU ces réserves d'énergie. Et cette fois ce ne sont pas les savants seuls qui ont VU cette puissance de l'atome, mais le monde entier (j'entends la puissance dégagée par la fission de l'atome à Hiroshima, par exemple)

En bref, on a CRU en l'existence de l'atome, cette particule invisible (car il en faut 5 millions pour couvrir un point), on a CRU en sa puissance puis on a VU ce qu'on a CRU.

Cette façon de CROIRE d'abord, pour VOIR ensuite, cette façon révolutionnaire qui caractérise la science moderne nous fait penser à la façon de CROIRE et de VOIR en matière de FOI.

La FOI ne nous invite-t-elle pas a CROIRE en ce qu'on ne peut pas VOIR et en récompense de cette croyance, à VOIR ce qu'on a CRU?

Remarquons que c'est cette même façon de VOIR les choses que la science d'il y a un siècle reprochait à la religion, estimant que préalablement tout doit être expliqué et vu pour qu'on puisse y croire.

Mais avec la découverte de l'atome, l'orgueil et la vanité de l'homme reçurent un coup terrible. Et plus la science progresse, plus le savant devient humble en croyant ce qu'il ne peut pas voir, autrement dit plus le savant revient à l'idée de la FOI.

Et c'est la raison pour laquelle les penseurs d'aujourd'hui soulignent le caractère religieux de notre époque.

Ainsi, par exemple, Teilhard de Chardin dit:

"Quoi qu'on dise, notre siècle est religieux, plus religieux probablement que tous les autres, seulement il n'a pas trouvé le Dieu qu'il puisse adorer (Introduction sur la vie chrétienne).

Et l'éminent savant Einstein remarque:

"Un contemporain a dit non sans raison qu'à notre époque généralement vouée au matérialisme, les savants sérieux sont les seuls qui soient profondément religieux" (Conceptions scientifiques et sociales d'Einstein)

Et ce qui est remarquable c'est que les hommes politiques tiennent un langage identique.

Ainsi, par exemple, Jean Jaurès dit:

"Tout ce que nous voulons dire aujourd'hui, c'est que l'idée religieuse un moment effacée, peut rentrer dans les esprits et dans les consciences, parce que les conditions actuelles de la science les prédisposent à la recevoir. Il y a dès maintenant si on peut dire, une religion toute prête, et si elle ne pénètre pas les profondeurs de la société c'est que le régime social actuel est un régime d'abrutissement et de haine, c'est-à-dire un régime irréligieux ("Le matin des magiciens" - Louis Pauwels)

Et c'est la situation devant laquelle se trouve l'humanité pour la première fois dans son histoire. En effet il y a d'un côté ce progrès sans précédent dans le domaine de la science et de l'autre la manifestation de cette aptitude à l'acquisition des valeurs morales.

On peut facilement comprendre cette situation si on compare l'évolution de l'humanité à l'évolution physique de l'homme.

Quand on est enfant on n'est apte ni à l'acquisition des connaissances scientifiques très étendues, ni à la manifestation consciencieuse des vertus hautement appréciées.

Un enfant regardant le ciel voit le soleil qui ne reste pas toujours à la même place et il en déduit que le soleil est en mouvement par rapport à la terre. Mais une fois adulte, il peut comprendre et s'expliquer le mouvement de la terre par rapport au ciel.

Sur le plan moral, pour un enfant un rien constitue une catastrophe, est la fin du monde; mais une fois adulte, il devient capable de supporter avec courage les plus terribles épreuves.

De même, vous dites à un enfant qu'il ne faut pas qu'il se bagarre avec l'enfant du voisin; il vous écoute pour un certain temps, puis pour un rien il redevient agressif et la bagarre avec l'enfant du voisin recommence.

Mais une fois adulte, il devient capable de respecter les rapports de bon voisinage non seulement dans un immeuble, mais dans une ville, puis dans un pays, et demain dans le monde entier.

Il en est de même en ce qui concerne l'humanité. Elle a évolué durant des milliers d'années pour arriver aujourd'hui au stade d'adulte où elle a manifesté ses aptitudes insoupçonnées pour l'acquisition des plus hautes connaissances scientifiques. En un siècle, l'humanité a réalisé cent fois plus de progrès que durant six mille années de son histoire. C'est tout de même prodigieux.

Sur le plan moral, on constate le même prodige. S'il y a un siècle les jeunes gens se laissaient influencer et exciter par des slogans tels que patriotisme ou nationalisme et trouvaient naturel d'être hostiles à l'égard des "étrangers" (cette hostilité pouvant aller jusqu'au déclenchement d'une guerre), aujourd'hui les mêmes gens sont au premier rang des combattants pour le mondialisme prêts à tout sacrifier pour l'accomplissement de ce noble idéal, en attendant sa réalisation pratique.

S'il y a un siècle, les hommes découvraient on ne sait où des " arguments " en faveur de la guerre, aujourd'hui on justifie la nécessité de la coexistence pacifique, en attendant sa réalisation pratique.

S'il y a un siècle, on insistait sur la rivalité dans le domaine économique aujourd'hui on parle de la collaboration en attendant sa réalisation effective à l'échelle planétaire.

Combien de temps cet état d'attente va-t-il durer?

A cette question les bahá'is répondent en disant que cet état d'attente va durer tant que l'humanité n'aura répondu à la voix de la civilisation spirituelle ou à l'Appel à la Civilisation Spirituelle.

Car aujourd'hui il y a deux voix qui se font entendre, deux appels qui sont lancés à l'humanité.

La première voix, c'est celle de la civilisation matérielle qui se fait entendre de plus en plus par le fait que pour le présent, elle nous rend la vie matérielle facile et agréable à vivre, mais pour l'avenir avec son gaspillage, sa pollution, ses machines de guerre etc.. elle nous réserve de terribles calamités.

Puis il y a la deuxième voix, le deuxième appel, auquel, malgré l'ensemble de toutes ses capacités l'humanité n'a pas encore répondu.

C'est l'appel à la civilisation spirituelle. Appel à l'unité, appel dont le premier effet, s'il est écouté, permettra d'éviter les résultats indésirables du premier appel matérialiste que nous venons de mentionner, tout en donnant le champ libre à ses effets bienfaisants. C'est un fait indéniable, prouvé par 6000 années d'expérience, expérience qui est un maître terrible; elle vous fait passer l'examen, ensuite elle vous apprend la leçon.

Allons-nous passer une fois encore cet examen terrible pour en tirer une leçon? Allons-nous oublier la leçon du passé qui dit que toute civilisation matérielle qui néglige les bienfaits de la civilisation spirituelle aboutit à la discorde, à la désolation et à la guerre?

Juste quelques tristes exemples.

Je ne peux m'empêcher de citer d'abord comme exemple celui qui s'est gravé dans mon esprit, car il s'agit de la région où je suis né et où j'ai passé mon enfance; elle se trouve entre la mer Caspienne et le fleuve Amou Daria. C'est aujourd'hui un désert habité par les bêtes sauvages. Et dire que dans le passé c'était une région prospère, réputée par ses centres culturels et commerciaux, célèbres par ses savants et ses artistes. Si tout cela, si toute cette civilisation matérielle avancée a disparu c'est à cause de l'oubli et de la négligence des principes spirituels, entraînant la désunion, la discorde et finalement les guerres dévastatrices entre Persans et Turkmènes.

Mais puisque nous sommes en Occident, pourquoi aller en Orient, pourquoi aller chercher si loin? Les deux Grandes Guerres d'Occident n'ont-elles pas fait plus de 50 millions de victimes?

Et pourtant c'est en Occident que la civilisation matérielle est à son apogée.

C'est en Occident que le premier appel, celui du matérialisme est le mieux écouté.

La situation est-elle meilleure aujourd'hui quand on pense qu'on dépense autant pour un soldat que pour l'éducation de 80 enfants, quand on nous dit que le stock atomique actuel suffit pour détruire 27 planètes comme la nôtre?

Admettons même qu'on décide de ne jamais s'en servir et que, s'il y a une guerre, on s'en tienne aux armes dites conventionnelles, mais peut-on écarter l'hypothèse d'un accident technique, ou bien qu'en un moment de désespoir l'un des belligérants appuie sur le bouton pour déclencher l'Apocalypse?

Un journaliste demanda à Einstein quelle serait l'arme de la prochaine guerre, bombe atomique, bombe H ou rayon de la mort?

- Oh, je n'en sais rien - répondit le savant, mais pour la suivante je peux vous dire: ce sera le lance-pierres.

Sur la couverture d'une revue humoristique, on voyait l'image d'un cannibale et en face de lui un général blanc regardant fièrement les cadavres d'une centaine d'hommes qu'il avait tués.

- Vous allez manger tout cela? demande le cannibale d'un air étonné.

- Bien sûr que non - répond le général - nous, nous sommes civilisés.

Quelle civilisation que celle qui rend l'homme plus sauvage que l'animal! Quel est donc l'animal qui tue ses semblables? Il n'y en a pas. Mais l'homme " civilisé " tue ses semblables par centaines, par milliers, par centaines de milliers.

Vous avez remarqué que lorsque deux animaux d'une même race se battent, ils ne vont jamais jusqu'à la mort. A un moment donné l'un des deux se considère comme inférieur et il tourne le dos à son adversaire. C'est le signe qu'il s'est soumis, et le combat s'arrête.

Mais lorsque deux hommes se battent avec les instruments modernes, il faut que l'un abatte l'autre. Et c'est toujours grâce aux armes que la science met à la disposition de l'homme d'aujourd'hui.

Mais assez de maudire l'obscurité, allumons une chandelle. Pourquoi ne pas profiter rien que de cette leçon de la science moderne qui dit: CROIS en ce que tu ne peux pas VOIR, afin de VOIR par la suite en récompense, ce que tu as CRU.

Appliquons cette leçon de la science, nous qui sommes attachés à l'esprit scientifique, croyons-en cette deuxième VOIX que j'ai mentionnée au début de mon exposé, croyons à cette VOIX qui appelle à L'UNITE pour VOIR par raisonnement et expérience qu'elle UNIT réellement.

Et comment s'appelle-t-elle cette VOIX?

Depuis que le monde est monde elle s'appelle RELIGION. Le mot même signifiant UNIR, car il vient du latin RE étant un préfixe et LIGARE signifiant lier ensemble.

Mais j'entends déjà l'objection: pourquoi alors cette religion n'est elle pas arrivée, dans le passé, à unir les peuples?

D'abord il n'est pas juste de dire que la religion dans le passé n'est pas arrivée à unir les hommes. Ce serait nier toute l'histoire des civilisations. Elle a uni, elle a lié ensemble différents peuples, et c'est la raison pour laquelle nos ancêtres lui ont donné ce nom qui veut dire " lier ensemble". Nos ancêtres ne pouvaient pas donner le nom REMEDE à quelque chose qui ne guérissait pas. A moins que nous traitions nos ancêtres de menteurs.

Nous oublions deux faits importants.

D'abord le fait que chaque remède, tout en gardant sa composition a une durée de validité, et que pour rester efficace il doit être renouvelé. Puis il y a le fait que dans le passé l'humanité traversait le stade de son enfance et qu'un enfant, à peine le processus de guérison commencé, cesse de prendre le remède et Evidemment retombe malade. C'est ce qui s'est passé dans le passé: tant qu'on prenait ce remède, tant qu'on s'en tenait à l'esprit de la religion tout allait bien, mais le jour où l'on a abandonné l'esprit de la religion, où l'on a abandonné le vrai remède pour prendre des "pseudo remèdes" fabriqués de n'importe quoi, la maladie (la désunion) a recommencé.

Ce n'est pas le cas aujourd'hui quand l'homme a atteint la maturité et comprend que le remède doit être renouvelé et est capable d'appliquer ce remède consciencieusement sans l'abandonner au premier caprice, comme le fait l'enfant. Et c'est cette même maturité qui lui a permis de manifester aujourd'hui ses capacités potentielles en science; qui l'a rendu capable de manifester ses capacités latentes dans le domaine de la morale, c'est-à-dire en religion, afin de s'entendre et de s'unir avec ses semblables.

Ajoutons à cela le fait que, par bonheur, la science à l'état actuel de son évolution facilite cette UNION étant donné les moyens qu'elle fournit pour favoriser les rapports entre les peuples, les échanges de pensée, la compréhension mutuelle et les ententes.

Et c'est cette même science qui a créé une telle interdépendance entre les peuples qu'ils sont condamnés à s'unir.

Il nous reste donc à trouver la puissance unificatrice dont nous avons besoin, ce remède renouvelé qui a fait ses preuves durant des milliers d'années.

Afin d'arriver au but dans cette recherche, les bahá'is proposent humblement d'appliquer la méthode scientifique, c'est-à-dire prendre en considération la composition et les caractéristiques du remède en question,... que ses effets pratiques sur ceux qui y ont recours, pour se demander si finalement ce n'est pas dans la foi bahá'ie qu'il faut voir le " Remède renouvelé " recherché inconsciemment par un monde en désarroi.


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7.3. Le respect de la vie est un signe de la foi

Il n'y a pas longtemps, j'ai lu dans une revue une remarque disant en substance ceci

Le jour du sabbat, les juifs orthodoxes ne doivent toucher ni à l'argent, ni aux allumettes, ni aux appareils mécaniques. Aussi, à cette occasion les ascenseurs de certains immeubles d'Israël sont-ils modifiés de façon à s'arrêter automatiquement tous les deux étages sans qu'on soit obligé d'appuyer sur un bouton.

Cette remarque m'a fait penser à l'état actuel des religions dites classiques, où on trouve encore des gens qui croient qu'avec de telles pratiques ils manifestent leur foi. Et pourtant selon le témoignage de l'histoire c'est précisément cette même foi qui, à chaque époque où l'humanité traversait une crise, lui venait en aide non seulement en lui fournissant les moyens d'en sortir, mais en plus en lui permettant de fonder une nouvelle civilisation à la fois matérielle et spirituelle.

Et je dis bien à la fois matérielle et spirituelle, car c'est cela qui permettait à l'homme de VIVRE dans le vrai sens du terme.

Et l'on peut dire qu'on vit dans le vrai sens du terme quand notre bien-être spirituel et matériel sont tous deux garantis. Ce qui à son tour implique que l'homme lui-même adopte le comportement qui convient par rapport à son prochain et à la nature.

Ce que doit être ce comportement, c'était la mission des fondateurs des religions de le définir. Et ils le faisaient en conformité avec les exigences du temps.

Dans le passé, les conditions de la vie étaient telles qu'il suffisait simplement de définir le comportement de l'individu par rapport à son prochain. C'est ce que la religion définissait en deux mots: l'amour du prochain.

Mais aujourd'hui, les temps ont changé et seul l'amour du prochain ne suffit pas. Il faut l'amour de toute la création.

Pourquoi et comment? C'est ce que nous allons voir en détail.

Avant tout rappelons-nous que la terre que nous habitons est en parfait équilibre. Tout fonctionne automatiquement en parfaite harmonie afin de nous assurer la vie. A nous de respecter les règles qui garantissent l'équilibre de ses éléments.

Quels sont ces éléments?

1° L'air

En moyenne toutes les 5 secondes nous aspirons de l'air. Sans l'air nous ne pouvons pas vivre. Cet air doit être pur.

Dans les conditions normales d'utilisation il se purifie lui-même. Nous participons dans une certaine mesure à cette opération au moyen de nos poumons.

Les océans et les plantes y jouent le rôle principal: en échange du gaz carbonique que nous éliminons, les océans par les algues qui y vivent fournissent 2/3 et les plantes 1/3 de l'oxygène qui rend l'atmosphère respirable. Si le gaz carbonique est irrespirable pour nous, en échange il est nécessaire pour les plantes. L'équilibre est donc assuré. Par contre, si nous rejetons dans l'air tout élément étranger, il nous revient tôt ou tard, et nous rendons ainsi l'air irrespirable.

Et c'est précisément cela que nous faisons aujourd'hui.

Avec notre civilisation de gaspillage (nos autos, nos usines...) nous rejetons dans l'atmosphère plus de gaz carbonique que n'en demandent les plantes, et, par malheur, d'un autre côté nous supprimons les plantes: double erreur.

Notre situation est comparable à celle d'un homme enfermé dans son garage avec le moteur de sa voiture en marche. Cet homme est condamné à la mort par asphyxie. Ce garage est l'atmosphère terrestre, où selon l'éminent savant Dorst, au rythme actuel de la pollution de l'air, l'homme n'a pas plus de 2 siècles à vivre.

Ajoutons-y bien d'autres matières que nous rejetons dans l'atmosphère diminuant ainsi notre chance de survie. Situation critique dont la seule solution réside dans le respect de la vie où l'air joue un rôle primordial.

Mais où est cette solution? A cette question nous répondrons en conclusion de notre exposé.


2° Le deuxième élément de la vie c'est l'eau. Son importance est aussi vitale que celle de l'air.

Cette eau doit être naturelle. Elle constitue le principal élément de notre organisme. Et en plus par de nombreux organismes qu'elle contient, organismes presque tous comestibles, l'eau est également une nourriture pour nous.

Nous devons donc respecter l'eau au point de vue qualité. Si nous y répandons des substances nocives, elles se concentrent dans les tissus des animaux aquatiques dont nous nous nourrissons, et, par conséquent, d'une manière indirecte nous absorbons ces substances nocives.

Ajoutons y (comme nous l'avons déjà mentionné) qu'étant donné que c'est principalement grâce aux algues marines que l'air est respirable, il faut assurer la vie à ces algues en empêchant toute introduction de substances nocives dans l'eau marine. Raison de plus pour le respect de l'eau.

Et que faisons-nous aujourd'hui. Nous polluons l'eau par toutes sortes de déchets industriels qui tuent précisément ces algues.

Au rythme actuel de la pollution universelle il faut prévoir que l'eau potable et celle qui, par ces algues nous permet de respirer, manquera partout dans moins de 80 ans.

Déjà la Hollande importe de l'eau potable de Norvège. Et on en manque en Amérique Latine.

En plus de qualité, la question de quantité d'eau se pose donc également. Car d'une manière générale la provision d'eau est très limitée. Si le globe avait la taille d'un neuf, elle équivaudrait à une goutte. Là aussi notre civilisation de gaspillage ne permet pas de respecter l'eau, pas de respect au point de vue quantité.

Une fois de plus nous sommes confrontés à une situation critique, dont il faut trouver la solution. Où est cette solution?

A cette question nous répondrons en conclusion de notre exposé.


3° Le troisième élément de notre planète est le sol.

J'entends par le sol cette surface de la planète qui se prête à la culture, grâce à laquelle nous obtenons la majeure partie de nos aliments. Or il arrive que cette surface cultivable n'est qu'une faible partie de notre planète, la majeure partie étant couverte par les océans. Il convient donc d'en faire bon usage. C'est ce que précisément nous ne faisons pas.

Nous épuisons artificiellement le sol par des produits chimiques.

Nous l'empoisonnons directement ou indirectement par cette gamme de produits nocifs appelés herbicides, insecticides ou autres pesticides.

Et ces poisons nous reviennent en définitive, puisque introduits dans le sol, il passent dans les aliments que nous consommons.



4° Le quatrième élément de notre planète est l'énergie.

J'entends par là les réserves de combustibles tels que pétrole, mazout, gaz etc... Ces réserves sont limitées. Il faut donc en prendre soin. C'est ce que nous ne faisons pas: nous les gaspillons. Ce gaspillage non seulement nous fait courir le risque d'être un jour à court d'énergie, mais de plus, ce même gaspillage introduit dans l'air des produits toxiques qui aspirés nous empoisonnent lentement et inévitablement.

Situation une fois de plus critique. Quelle en est la solution? Nous la mentionnerons en conclusion de notre exposé.


5° Le cinquième élément de notre planète ce sont les plantes.

Les plantes non seulement nous permettent de respirer, mais elles nous nourrissent également. C'est le mouvement invisible des centaines de milliers de lèvres rangées sur la face inférieure de chaque feuille qui absorbe le gaz carbonique rejeté par nous, et qui expire l'oxygène dont nous avons besoin. Ce sont les plantes qui fournissent la majeure partie de la nourriture que nous consommons. Les plantes nous guérissent en cas de maladie. De sa naissance jusque sa mort, l'homme utilise la cellulose pour s'abriter, se vêtir, se chauffer. Le papier, ce moyen nécessaire à notre instruction, ne vient-il pas des plantes?

Et quelle est notre attitude par rapport à ce monde végétal? Ou bien nous l'empoisonnons directement (sous prétexte de conservation ou protection) ou bien nous le supprimons pour faire des parkings, des usines dont on peut se passer facilement.

Situation toujours critique qui demande une solution. Quelle est cette solution, nous la mentionnerons en conclusion de notre exposé.


6° Le sixième élément de notre planète c'est le règne animal, où nous trouvons notre source d'alimentation et d'habillement (lait, neuf, miel, laine, etc). Ajoutons-y le rôle de facteur d'équilibre que jouent les animaux sur notre planète.

Malgré tous les bénéfices que nous tirons de ce monde, notre attitude à son égard est aussi impitoyable que dans le cas des autres mondes.

Quant à la solution à cette situation, nous en parlerons en conclusion de notre exposé.


7° Le septième élément constituant notre planète, élément qui est le sommet de toute la création c'est l'HOMME. L'homme qui doit se servir de tous les autres éléments pour assurer son existence. Ce à quoi il peut arriver sans trop de peine s'il s'en sert avec modération.

Car il y a assez d'air, assez d'eau, assez de sol, assez d'énergie, assez de plantes, assez d'animaux pour que l'homme puisse mener une vie agréable. Mais l'homme dans sa négligence dépasse les limites de la modération et crée le déséquilibre.

"Il rejette trop de gaz carbonique dans l'atmosphère par trop d'autos, trop d'usines. Il déverse dans l'eau trop de déchets. Il épuise trop le sol par trop de produits chimiques. Il consomme trop de raisin pour en dénaturer le jus sous forme d'alcool. Il consomme trop de bois pour en faire trop de papier afin de faire trop de publicité dans trop de journaux, que les concierges des immeubles transportent directement à la cave pour jeter dans les poubelles. L'homme consomme trop d'énergie pour avoir chez soi une température, dont il se plaint en été..." (Denis de Rougemont "l'Avenir est notre affaire").

Bien entendu tous ces "trop " c'est pour le monde occidental. Par contre, pour le tiers monde c'est le terme " trop peu " qu'il faut utiliser.

En bref, l'homme crée le déséquilibre non seulement dans le monde minéral, végétal, animal, mais également dans son propre monde, le monde humain.

Situation une fois de plus critique, situation qui demande une solution.

Le moment est venu de parler de la solution à apporter à cette crise générale.

La solution est dans le RESPECT de la VIE. Et le respect de la vie implique le respect de toute la création, le respect du monde minéral, végétal, animal et humain, de la part de l'élément perturbateur actuel qu'est l'homme.

Or le respect de la vie n'est pas une question de contrainte imposée par une loi draconienne. C'est une question de conscience qui incite l'homme à aimer ce qui garantit la vie. Le respect de la vie est donc le fruit de l'amour de toute la création.

Or ce n'est pas la science qui par une de ses opérations peut inculquer l'amour dans le coeur de l'homme. La preuve c'est que ce sont précisément les pays les plus avancés scientifiquement qui souffrent le plus de l'irrespect de la vie par suite du manque d'amour pour la création tout entière.

Comme pour l'amour du prochain c'est la religion qui doit intervenir. Et si dans le passé la religion n'a parlé que de l'amour du prochain, en tant que signe de la foi, passant sous silence l'amour de toute la création, c'est que la question ne se posait pas, la vie n'étant pas en danger. Mais la question se pose aujourd'hui, ce qui fait que c'est toujours la religion, à l'état actuel de son évolution (j'entends la foi bahá'ie) qui nous en parle avec force, définissant l'amour de toute la création comme un signe de la foi.

Et cet amour est inculqué dans le coeur de l'homme dès son enfance par l'éducation.

Dans les écoles bahá'ies, on commence à inculquer dans le coeur de l'enfant l'amour du monde minéral. Et ceci non seulement du point de vue physique, mais également du point de vue moral. Ainsi, par exemple, non seulement on parle de la terre si nécessaire pour que les plantes y poussent (ces plantes qui nous nourrissent), cette terre qui est la source de toutes nos richesses. Mais on parle également de la patience et de l'humilité avec laquelle cette même terre supporte tous nos fardeaux, nos biens mobiliers et immobiliers.

Quelle leçon de service rendu avec humilité! Un tel bienfaiteur, si humble et patient mérite d'être aimé! Et quand on aime quelque chose on ne l'empoisonne pas. Aussi, un enfant bahá'i devenu adulte ne tolère pas l'introduction des poisons dans le sol, ni son épuisement.

Puis dans les écoles bahá'ies on passe au monde végétal qui est également l'une des sources qui pourvoient à nos besoins. On rappelle à l'enfant comment les plantes, en échange du gaz asphyxiant, nous donnent le gaz vivifiant. Une fois de plus c'est une leçon de morale, car on est en présence d'un " ami " qui en échange du " poison " nous donne du " miel". Un tel " ami " mérite d'être aimé.

On rappelle à l'enfant combien les messagers de Dieu aimaient le monde végétal. On cite, par exemple, Bahá'u'lláh qui a souffert pendant quarante ans en exil et en prison et qui s'est plaint une seule fois en disant

"Il y a si longtemps que je n'ai pas vu de verdure". Tellement il aimait les espaces verts.

Elevé dans un tel esprit un enfant bahá'i ne peut qu'aimer le monde végétal.

Et devenu adulte il ne peut tolérer ni l'empoisonnement ni la suppression de la verdure.

Puis, toujours dans les écoles bahá'ies, on passe au monde animal. On parle aux enfants des services que les animaux ont rendu et continuent de rendre à l'homme. On leur parle de tant de produits laitiers que nous consommons, des neufs, du miel et de bien d'autres choses qui sont fournies par le monde animal.

On leur parle des histoires d'animaux, histoires illustrant leurs qualités, ce qui doit servir de leçon pour l'homme. On leur parle de la fidélité du chien. A titre d'exemple on leur parle du chien de Mozart: le corbillard des pauvres qui transportait la dépouille de Mozart pour être jetée dans une fosse commune, n'était accompagné que de son chien.

On leur parle des colombes en leur faisant remarquer que lorsqu'elles se rencontrent même pour la première fois, quelle que soit leur couleur, elles s'associent affectueusement, partageant la nourriture sans se battre.

En tenant un tel langage à l'enfant bahá'i on lui apprend à aimer le monde animal, de sorte que devenu adulte il n'a plus besoin d'être membre de la société protectrice des animaux.

Il est déjà un bon ami pour les animaux.

En bref, c'est par l'éducation à l'école qu'on apprend à l'enfant bahá'i l'amour de la création, et, par conséquent, le respect de la vie. C'est par l'éducation qui est amour de la création, ce respect de la vie devient partie intégrante de sa foi.

C'est cela le but de la religion: la religion veut dire éducation.

C'est l'éducation qui fait de l'enfant bahá'i le futur écologiste, sans qu'apparemment il en porte le titre. Et il n'a pas besoin de ce titre car il connaît les lois de la" MAISON " où il habite.

En effet, qu'est-ce que l'écologie?

Le mot vient du grec OIKOS (maison) et LOGOS (connaissance). C'est donc la connaissance des lois de la maison au sens d'habitat ou d'environnement. Et ce sont précisément ces lois que l'enfant bahá'i apprend à l'école pour les respecter consciencieusement dans la vie.

Jusqu'ici nous avons parlé de l'amour pour le monde minéral, végétal et animal. Et c'est à dessein que j'ai mis l'amour du monde humain pour la fin, car c'est le couronnement de l'amour pour la création.

Un enfant bahá'i apprend à l'école que " la terre n'est qu'un seul pays et que les hommes en sont les citoyens " que par conséquent, son prochain est tout habitant de la terre, qu'il soit en Occident ou dans le tiers monde.

Partant de là, devenu adulte, l'enfant bahá'i ne peut pas tolérer ni les " trop " de l'Occident ni les " trop peu " du tiers monde.

Il s'en tient donc à la modération, cette vertu qui est lamentablement négligée par notre civilisation de gaspillage. Et c'est cela qui est à l'origine de l'injustice sociale.

Si c'est seulement aujourd'hui que les penseurs s'aperçoivent du manque de modération et de l'injustice qui s'en suit, il y a plus de 100 ans que le fondateur de la foi bahá'ie l'a prévue en ces termes:

"Quiconque s'attache à la justice ne saurait en aucune circonstance passer les bornes de la modération. La civilisation tant vantée par les représentants les plus qualifiés des arts et des sciences apportera de grands maux à l'humanité si on lui laisse franchir les limites de la modération. La civilisation d'où découle tant de bien lorsqu'elle est modérée, deviendra, si elle est portée à l'excès une source aussi abondante de mal".

Ne sommes-nous pas les tristes témoins de la réalisation de cette prophétie?

N'avons-nous pas le devoir de mettre fin à nos excès?

"Que vont dire les générations futures - écrivait René Cassin - de ce que nous aurions pu faire et que nous n'avons pas fait, et de ce que nous aurions pu ne pas faire et que nous avons fait?"


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7.4. L'islam et ses révélations

Lors de son séjour à San Francisco, `Abdu'l-Bahá (le fils aîné de Bahá'u'lláh (fondateur de la foi bahá'ie) et interprète de ses Enseignements.) reçut une lettre venant de juifs qui se disaient avoir été tellement touchés par ses paroles que leur rabbin était allé voir le prêtre chrétien pour lui dire: "puisque la restauration de votre église endommagée demande beaucoup de temps, venez dans notre synagogue pour faire vos prières. Les dimanches elle sera à vous et les samedis elle restera pour nous".

Si cela se passait il y a un demi-siècle entre deux représentants ecclésiastiques, aujourd'hui les institutions elles-mêmes sont à la recherche des moyens d'entente. Ce qui est un fait nouveau caractéristique de notre siècle, contrairement aux siècles du passé avec ses guerres de religion.

Mais aujourd'hui il ne s'agit pas seulement de l'entente entre les religions, il s'agit de l'union de tous les peuples croyants et incroyants, union possible seulement aujourd'hui étant donné que d'abord, l'humanité entre dans le stade de sa maturité et que par conséquent elle a la capacité de s'unir, et ensuite que la science grâce à ses réalisations, facilite cette union.

Dans le passé ces facteurs favorables n'existaient pas et l'union des peuples n'était pas possible. Voilà pourquoi toutes les Écritures ont prédit une longue période de troubles et de guerres.

Ce qui n'empêche pas que les mêmes Écritures prédisent l'avènement d'un Jour où " il y aura un seul troupeau et un seul pasteur", où tous les peuples seront unis.

Ces mêmes Écritures, dans le but de préparer les peuples pour ce Jour Promis, leur ont donné l'éducation préalable, tout en faisant d'avance des révélations remarquables afin de ne pas laisser subsister le moindre doute dans les esprits des croyants, et par la même occasion, en facilitant l'union de tous au sein d'une même foi.

L'objet de mon exposé de ce soir c'est de vous parler de quelques unes de ces révélations que nous trouvons plus particulièrement dans les Écrits islamiques.

Mais avant tout une mise au point est nécessaire.

Ce Jour Promis est désigné par toutes les Écritures sous différents noms: le Jour Dernier, le Jour de la Résurrection, le Jour où le Seigneur va s'asseoir sur Son Trône. Quant à l'explication de ces termes, nous la trouvons dans les Écrits bahá'is qui disent:

Par le terme "Jour" il faut entendre le Jour de chaque fondateur de religion (le Jour de Moïse, le Jour de Jésus, le Jour de Muhammad).

Le Dernier Jour veut dire le dernier de ces "Jours" qui ont éduqué l'humanité jusqu'à ce qu'elle arrive à la maturité.

C'est d'ailleurs pour cela que Jésus compare le Dernier Jour à la moisson (voir Mat. 13/39) stade de la maturité de la plante.

Quant au terme "Résurrection générale" étant donné que par le terme "Résurrection" les Écritures entendent la résurrection spirituelle, autrement dit l'adhésion à la religion correspondante et que de ce point de vue Bouddha, par exemple, a ressuscité l'Extrême Orient, Muhammad l'Orient et Jésus l'Occident, au Jour Promis tous seront ressuscités par l'adhésion à une seule foi, ce sera donc une Résurrection générale.

L'expression " le Jour où le Seigneur va s'asseoir sur Son Trône", ou le " Jour du Royaume de Dieu sur terre" cela signifie le Jour où Dieu sera le roi sur terre, autrement dit le Jour où Dieu sera obéi comme un roi est obéi. Or Dieu ne nous demande qu'une chose, c'est qu'on s'unisse. Par conséquent, ce sera le Jour de l'union de tous.

Après cette mise au point voyons ce que disent les Écrits islamiques concernant le Jour Promis. Et je dis bien les Écrits islamiques et non pas le Qur'án seulement. Car parler uniquement du Qur'án c'est comme si on parlait du " Sermon sur la montagne" (qui est la Parole même de Jésus) en laissant de côté le Nouveau Testament, qui est le recueil des paroles et des actes attribués à Jésus.

Il en est de même en ce qui concerne les Écrits islamiques. Il y a le Qur'án qui est la parole même du Prophète Muhammad. Il y a encore ce qu'on appelle HADITH, ce qui est la Parole attribuée à Muhammad lui-même ou à ses successeurs.

Dans ce qui suit, nous allons nous baser principalement sur le Qur'án et, en passant, sur quelques uns des HADITH qui font autorité pour tous les musulmans.

Le premier point à signaler concernant le Qur'án c'est que ce livre dit en termes explicites que pour toute religion il y a une durée limitée

"pour chaque peuple il y a un temps d'une durée finie d'avance; et lorsque ce temps fixé arrive, ils ne peuvent ni reculer en arrière, ni avancer d'une heure". Qur'án 7/32.

Tout en précisant: "chaque peuple a son messager" Qur'án 10/48.

Et pour qu'on n'interprète pas le mot "peuple" autrement qu'en entendant par ce mot l'ensemble des croyants de ce message le Prophète Muhammad ajoute:

"C'est ainsi que nous avons fait de vous un peuple intermédiaire entre le passé et l'avenir". Qur'án 2/137.

Ce qui, en passant, signifie qu'il y aura un autre peuple après le peuple islamique.

Enfin pour dire que la Révélation divine ne s'arrête pas à l'Islam, et qu'elle est progressive, le Qur'án dit encore: "En vérité viendront vers vous des messagers du milieu de vous, qui vous révéleront mes versets. Alors quiconque craindra Dieu et fera le bien, ils n'auront rien à craindre et ils ne seront point attristés" Qur'án 7/33.

Mais la Révélation dont ne cesse de parler le Prophète Muhammad c'est celle du Dernier Jour. Cette croyance au Dernier Jour présente à ses yeux une telle importance que souvent en parlant de la croyance en Dieu, il ajoute la croyance au Dernier Jour. Ainsi par exemple, il promet la récompense céleste non seulement à ses disciples, mais à tous sans exception, à la condition qu'ils fassent le bien et qu'ils croient en Dieu et au Dernier Jour (Qur'án 2/59)

Ces explications données, voyons quelles sont les précisions présentées par les Écrits islamiques concernant le Dernier Jour ou le Jour Promis:


I. Dans le Qur'án nous lisons

"Ils disent: quand donc s'accomplira cette promesse... Dis leur: pour vous dans un délai d'un jour" (Qur'án 34/28-29)

Et le Qur'án précise ce qu'il entend par le terme " un jour":

"Un jour auprès de Dieu fait mille ans selon votre calcul" (Qur'án 22/46). Et puisqu'il dit: pour vous, cela signifie pour les musulmans. Quant aux mille ans en question, il faut les compter à partir du moment où l'inspiration islamique a cessé, ce qui eut lieu en l'an 260 de l'hégire avec la mort du dernier successeur inspiré du Prophète.

On arrive donc ainsi à l'année

1000 + 260= 1260 de l'hégire date à laquelle commence l'ère bahá'ie avec la révélation de son précurseur le Báb.


II. Dans le Qur'án, nous lisons ce verset qui est une confirmation du précédent: "Il dirige la Cause depuis les cieux jusqu'à la terre. Puis elle remontera jusqu'à Lui en un jour dont la mesure est de mille ans selon votre manière de compter" (Qur'án 32/4)

Par " la Cause" le Prophète Muhammad entend sa Cause qui sera " rappelée après mille ans". Ce qui signifie que la cause islamique servira de direction pour les peuples pendant mille ans à partir de la cessation de l'inspiration qu'elle reçoit. Ce qui, une fois de plus, nous amène à:

260 + 1000= 1260 de l'hégire.

Avant de poursuivre nos références aux Écrits islamiques précisons ce point qu'en arabe chaque lettre a son équivalent numérique. Ce qui fait que souvent au lieu de préciser un nombre (ou une date) par des chiffres on le précise par un ensemble de lettres (ou par un mot) dont la somme des équivalents numériques donne le nombre (ou la date) en question. Ceci dit, revenons à nos références.


III. Il y a une tradition (HADITH) attribuée à l'Imam 'Ali (le successeur du Prophète) qui dit: "En l'an Quars (Quars en arabe signifie "Plantation") l'Arbre de la Direction Divine sera planté".

Or la somme des équivalents numériques des lettres du mot Quars est 1260. Ce qui signifie qu'en l'an 1260 l'Arbre promis sera planté.

A ce propos rappelons-nous que Jésus a comparé le prophète à l'arbre en disant qu'on reconnaît un bon arbre à ses fruits.


IV. Presque le tiers des sourates du Qur'án commence par des lettres qui apparemment n'ont aucune signification littéraire. Ainsi, par exemple, la sourate de la Génisse commence par 3 lettres A.L.M.

Les érudits islamiques appellent ces lettres les "lettres lumineuses " et les traducteurs occidentaux les appellent " lettres mystérieuses". En réalité, elles sont restées mystérieuses jusqu'à la révélation bahá'ie qui a donné la clef de ce mystère, étant donné que ces lettres conduisent à l'année 1260. C'est ce que nous allons expliquer.

Selon une tradition attribuée à l'Imam Sàdiq, celui-ci, se référant aux " Lettres Lumineuses", aurait dit " arrivé à A.L.M.R. le Promis apparaîtra" Additionnons donc les équivalents numériques de ces lettres jusqu'à A.L.M.R. en commençant par la sourate de la Génisse qui commence par les lettres A.L.M.

TABLEAU DES SOURATES:

Noms des Sourates -- Lettres mystérieuses des sourates -- La somme des équivalents numériques

Sourate de la Génisse -- A. L. M. -- 71

Sourate de la Famille d'Imran -- A. L. M. -- 71

Sourate d'A'raf -- A. L. M. S. -- 161

Sourate de Jonas -- A.L.R. -- 231

Sourate de Hud -- A.L.R. -- 231

Sourate de Joseph -- A.L.M.R. -- 271


Ce qui donne un total de 1267. Comme l'ère hégire commence 7 ans après la déclaration de Muhammad, ceci nous amène à 1267 - 7 = 1260, selon l'hégire.


V. Citons enfin un extrait du recueil des HADITHS (traditions islamiques) dont l'auteur est MUHYID-DIN-I ARABI qui dit: "l'année de la révélation promise est donnée par la moitié du plus petit commun multiple des 9 chiffres, ce qui est 2520, divisé par 2 nous avons 1260.

A propos de l'année 1260, remarquons que St. Jean nous en parle à maintes reprises dans ses révélations (sujet que nous étudierons lors d'une autre conférence). A titre d'exemple pour le moment, mentionnons ce passage (Ap. 10/11) où en parlant des deux témoins (Muhammad et 'Ali son successeur) il dit qu'ils prophétiseront 1260 jours ce qui signifie 1260 ans (voir Nombres 14/34)

Une deuxième remarque à faire à propos de 1260 qui marque le début de l'Ere inaugurée par BAHA (Bahá'u'lláh est souvent désigné par le première partie de son nom, à savoir BAHA) c'est que ce nombre 1260 symbolise précisément BAHÁ. En effet, d'un côté, la somme des chiffres qui composent 1260 et 9 :

1 + 2 + 6 = 9

et d'un autre côté, la somme des équivalents numériques du nom BAHA est également 9.

Pour les bahá'is 9 est un nombre sacré et est appelé le nombre de BAHA. Remarquons, en passant, que dans le nombre 9 on voit tous les nombres, 1,2,3,4,5,6,7,8 comme dans la foi bahá'ie on voit toutes les huit religions précédentes qui existent aujourd'hui (ce que le " Larousse du 20° siècle" exprime en disant que c'est l'aboutissement de toutes les religions).


VI. En arabe le nombre 10 est le symbole de l'universalisme (nombre universel).

Ce nombre universel 10 ajouté au nombre de BAHA 9 nous donne 19 qui est un autre nombre sacré pour les bahá'is dont le calendrier est précisément basé sur 19 (suivant le calendrier bahá'i l'année se compose de 19 mois et chaque mois de 19 jours ce qui nous donne 361 jours, auxquels s'ajoutent 4 jours spéciaux appelés Jours Intercalaires). Il arrive que mystérieusement tout le Qur'án est basé sur 19.

A titre d'exemple mentionnons quelques références:

1) le Qur'án commence par l'invocation de Dieu avec Ses attributs: "Au nom de Dieu le Très Miséricordieux le Compatissant", invocation qui en arabe contient 19 lettres.

2) Le nombre de fois où cette invocation est répétée dans le Qur'án est un multiple de 19, soit:

6 x 19 = 114

3) Le nombre de fois où le mot Dieu est répété est 2698 ce qui est un multiple de 19 :

142 x 19 = 2698

4) L'attribut Le Très Miséricordieux (en arabe) est répété 57 fois ce qui est un multiple de 19 :

3 x 19 = 57

5) L'attribut Le Compatissant est répété 114 fois ce qui est un multiple de 19 :

6 x 19 = 114


VII. Abud Davud dans son recueil des HADITHS (traditions islamiques) rapporte cette Parole de Muhammad:

Le Mihdi (nom sous lequel les musulmans attendent le précurseur de l'ère nouvelle) est de ma descendance. C'est sur la base de cette prophétie que les musulmans ne perdent jamais de vue la descendance du Prophète.

Car pour eux c'est le premier signe par lequel ils peuvent vérifier si la revendication d'être Mihdi correspond à la vérité.

Or le Báb, messager précurseur de la foi bahá'ie était précisément le descendant direct du Prophète Muhammad.


VIII. Le Qur'án donne d'une manière imagée le nom du messager précurseur de l'Ere Nouvelle (le Báb):

Il demande " A quand le jour de la résurrection? Lorsque le soleil et la lune seront réunis (Qur'án 75/6-9)

Physiquement le soleil et la lune ne peuvent jamais se réunir. C'est donc un langage imagé, dont voici l'explication;

Par le "soleil" il faut entendre le prophète lui-même (titre que tous les prophètes s'attribuent ; Jésus, par exemple, dit: "Je suis la lumière du monde") et par la " lune" (astre qui reçoit la lumière du soleil) il faut entendre son successeur 'Ali.

La réunion de 'Ali et de Muhammad fait 'Ali Muhammad qui est précisément le petit nom du Báb.


IX. Abu Davud dans son recueil des HADITHS (traditions islamiques) dit que le prophète aurait précisé:

"Le Mihdi régnera 7 ans"

Or le Báb, après sa déclaration n'a vécu que 7 ans pour être fusillé dans la 7° année de son règne spirituel.


X. Non seulement sur le Báb (précurseur) mais également sur Bahá'u'lláh lui même, le Qur'án donne des précisions.

Ainsi, par exemple concernant la date de son message le Qur'án abonde en ce verset qui parle de l'année après HIN " Vous apprendrez son message après Hin (Qur'án 38/88).

Or l'équivalent numérique de HIN est 68. Après 68 c'est 69 et c'est précisément en l'an 69 (soit 1269 AH) que Bahá'u'lláh reçut l'ordre divin le désignant comme messager du Jour Promis.


XI. Comme confirmation de cette interprétation, nous trouvons un autre verset du Qur'án qui dit que son signe sont les deux lettres T et S (appelées en arabe TA et SIN (voir Qur'án 27/1)

Or la somme des équivalents numériques de ces deux lettres est 69. Cela revient à dire que 69 est une prophétie du Qur'án, prophétie dont la réalisation sera un signe prouvant que le Qur'án est infaillible.


XII. Et ce qui est remarquable c'est que dans la sourate suivante le Qur'án ajoute la lettre M (appelée en arabe MIM) en disant que c'est encore un signe du Qur'án.

Or l'équivalent numérique de M est 40. Ce qui veut dire qu'après 69 le nombre 40 est encore significatif. Or comme nous l'avons dit c'est en 69 que Bahá'u'lláh reçoit l'inspiration divine, quant au nombre 40 c'est le nombre des années qu'il a vécues après son élection comme messager. En effet, c'est précisément la 40° année de sa mission que Bahá'u'lláh s'est éteint. C'est donc un signe prouvant l'infaillibilité du Qur'án.

Ce qui confirme cette interprétation c'est que selon les traditions islamiques Muhammad aurait dit " Jésus séjournera sur terre 40 an;". A noter que Muhammad identifie la manifestation du Jour Promis au retour de Jésus.


XIII. Le Qur'án prédit même le lieu où Bahá'u'lláh a fait la déclaration de Sa mission:

"Dieu appelle au " Séjour de la Paix" et Il guide qui Il veut vers le sentier droit" (Qur'án 10/26)

Or c'est la ville de Baghdád qui est connue sous le titre " le séjour de la Paix" (Daro's'Salam)

Et c'est précisément à Baghdád que Bahá'u'lláh a fait Sa déclaration.


XIV. Les recueils des HADITHS (traditions islamiques) poussent les précisions jusqu'au point où ils prédisent le lieu où le Promis doit s'éteindre, ce qui constituera un lieu de pèlerinage.

A titre d'exemple citons ces deux extraits du livre de Ibn'i Majalláh: "En vérité 'Akká est une ville de la Syrie que Dieu a réservée pour lui accorder Sa grâce".

Et encore: "Heureux celui qui fait le pèlerinage à 'Akká et heureux celui qui visite le pèlerin d'Akká".

Les Écrits islamiques abondent en prophéties concernant la révélation bahá'ie. Et c'est précisément sur la base de ces prophéties si précises et si claires que parmi des milliers de martyrs il y avait un très grand nombre d'érudits islamiques qui préférèrent renoncer à leur vie plutôt que de rejeter la révélation bahá'ie, ce qui pour eux aurait signifié le rejet même de l'Islam.


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7.5. C'était prévu, le saviez-vous?

Voyant l'un de ses paroissiens dormir pendant la lecture de la Bible, le pasteur lui en fait la remarque.

- N'avez-vous pas dit - lui répond le bonhomme - qu'il faut écouter la parole de Dieu, les yeux fermés.

C'est peut-être ce qui se passe surtout quand on lit cette partie de la Bible qui est appelée Apocalypse. Le langage de ce livre est tellement allégorique et difficile à comprendre que l'expression " les yeux fermés " s'appliquerait bien dans ce cas.

C'est d'ailleurs la raison pour laquelle chaque fois qu'il s'agit d'un style difficile à comprendre, d'un style obscur, on le qualifie d'apocalyptique.

Mais ceci n'est vrai que pour ceux qui ne connaissent pas l'interprétation de l'Apocalypse selon les Écrits bahá'is, interprétation qui non seulement nous ouvre les yeux mais éveille notre curiosité et approfondit notre foi.

Ce soir, nous allons lire ensemble les trois premiers chapitres de l'Apocalypse tout en nous référant aux interprétations bahá'ies - ce qui nous permettra d'y découvrir des détails historiques d'une précision incroyable, et, en passant, d'en tirer de très intéressantes conclusions.

St. Jean commence son livre en disant que tout ce qu'il écrit, lui a été révélé par Jésus-Christ

"Révélation de Jésus-Christ que Dieu lui a donnée pour montrer à ses serviteurs les choses qui doivent arriver bientôt et qu'il a fait connaître à son serviteur. (Ap. 1/1)

Une première conclusion qu'on peut tirer de cette première parole de l'Apocalypse est que Jésus n'est pas Dieu, puisqu'il est dit qu'il a été inspiré par Dieu (on ne peut tout de même pas être inspiré par soi-même).

Exactement comme St. Jean ne peut pas être Jésus puisqu'il a été inspiré par Jésus.

St.-Jean a servi de miroir devant Jésus comme Jésus a servi de miroir devant Dieu.

C'est d'ailleurs la raison pour laquelle St. Paul dit " Jésus est l'image de Dieu" (11. Cor. 4/4)

Ou encore "Jésus est le médiateur" (Heb. 12/24)

Autrement dit Jésus est le messager de Dieu ou l'envoyé de Dieu, comme ce fut le cas pour ses prédécesseurs.

Une telle conception de la station de Jésus met fin à l'une des sources de conflit entre la science et la religion: Einstein n'a-t-il pas dit que la principale source du conflit entre la science et la religion est le concept de Dieu incarné.

St. Jean continue en appelant Jésus " Témoin fidèle" (Ap. 1/5)

Mais de quel témoignage s'agit-il? Il s'agit de témoignage de " ce qui va arriver" (Ap. 1/1)

Jésus dans l'Apocalypse rend donc le témoignage de l'avenir, de ceux qui viendront après lui, comme "tous les prophètes ont rendu de lui le témoignage" (Actes 10/43)

Et c'est là que réside toute la valeur de l'Apocalypse. C'est surtout un témoignage concernant le Jour Promis.

St. Jean compare au son de la trompette la révélation qu'il a reçue " J'entendis derrière moi une voix juste, comme le son d'une trompette qui disait..." (Ap. 1/10)

Le son de la trompette c'est donc la voix de Dieu (puisque la source première de toute la révélation est la voix de Dieu). Et c'est en parlant de cette même voix que St. Paul dit: "Au son de la trompette de Dieu" (I. Thessal. 4/16).

C'est cette voix, la voix de Dieu, qui dit à St. Jean: Ce que tu vois, écris-le dans un livre et envoie-le aux sept Églises" (Ap. 1/11)

Qui sont ces sept Églises?

Apparemment St. Jean parle des sept premières missions chrétiennes, qu'il désigne de leurs noms. Mais selon l'interprétation donnée par les Écrits bahá'is il s'agit des sept missions divines qui se sont manifestées par les sept religions du cycle adamique: sabéenne, hindouiste, judaïque, bouddhiste, zoroastrienne, chrétienne, islamique.

Bien des arguments confirment cette interprétation. Nous en citons quelques-uns.

1° Le mot église ou temple est le symbole extérieur de la religion: de même que la religion unit les hommes, le temple réunit les hommes en son sein.

2°En disant à Pierre:

"Tu es Pierre, sur cette pierre je bâtirai mon Église" (Mat. 16/ 18)

Jésus voulait dire que Pierre sera le pilier sur lequel la religion chrétienne sera bâtie.

3° La traduction en français des noms mêmes des églises citées par St. Jean nous fait penser dans chaque cas à l'église (ou la religion) correspondante. Ainsi par exemple, Philadelphie, le nom de la sixième église (sixième religion) veut dire "Amour fraternel", ce qui nous fait penser à la religion chrétienne. Ajoutons à cela le fait que l'église de Philadelphie n'est mentionnée dans aucun autre document, et il n'y a que St. Jean qui en parle.

4° L'étude même de chaque message adressé à chacune des églises ne nous laisse d'autre choix que d'admettre qu'il s'agit d'une religion et non pas d'une église chrétienne.

Ainsi, par exemple, si nous admettons que la première lettre est adressée réellement à l'église d'Ephèse, pourquoi alors cette réprimande:

"Tu as abandonné ton premier amour. Souviens-tu donc d'où tu es tombé" (Ap. 2/4)

Et pourtant l'église d'Ephèse était l'une des églises les plus florissantes des temps apostoliques. Cette lettre ne pouvait donc pas être adressée à l'église d'Ephèse. Mais si l'on admet que cette première lettre est adressée à la première religion c'est-à-dire la religion sabéenne, la réprimande de Dieu est parfaitement justifiée, car les sabéens avaient complètement abandonné leur premier amour et ils étaient tombés dans l'abîme de l'ignorance.

Nous arrivons donc à cette conclusion que les Sept Églises destinataires des lettres dictées par la voix de Dieu sont les Sept Religions que nous avons déjà mentionnées.

Et ces Lettres sont datées du Jour à venir (le Jour promis) puisque toutes les révélations de St.-Jean concernant " les choses qui doivent arriver " dans l'avenir.

St. Jean continue son introduction en comparant les sept Églises (ou les sept religions) aux sept chandeliers au milieu desquels il voit " quelqu'un qui ressemblait à un Fils d'Homme" et que c'était précisément ce quelqu'un qui lui dictait ces messages.

"Je me retournai pour connaître quelle était la Voix qui me parlait. Et après m'être retourné, je vis les sept chandeliers et au milieu des sept chandeliers quelqu'un qui ressemblait à un Fils d'Homme" (Ap. 1/12-13.)

Or le Fils d'Homme c'est le titre que Jésus s'attribuait, donc ce quelqu'un qui dictait ces Lettres ressemblait à Jésus, autrement dit c'était un messager de Dieu comme Jésus. Et puisque c'était du Jour Promis dont ce quelqu'un parlait il s'agit du messager du Jour Promis.

A ce stade des révélations de St. Jean on ne peut s'empêcher de se poser la question: "mais enfin qui est-ce qui parle à St. Jean, est-ce Jésus (comme il l'a précisé au début de ses révélations) ou bien est-ce ce messager de Dieu comme Jésus (comme il le précise à ce stade de ses révélations)?

Pour les bahá'is, il n'y a pas de contradiction, il n'y a pas de différence , puisqu'en définitive c'est la voix de Dieu qui parle, Dieu étant UN, Sa voix est UNE, peu importe la personne par qui cette voix se fait entendre.

La Parole reste la même, c'est le Porte-parole qui change. Et le Porte-parole pour aujourd'hui, selon les arguments irréfutables et les prophéties précises de toutes les Écritures c'est BAHÁ'U'LLÁH.

C'est donc par la voix de Bahá'u'lláh que les sept lettres sont adressées aux adeptes des sept Religions en question.

Notons que St. Jean lui-même donne quelques précisions concernant l'auteur de ces Lettres.

"Ses cheveux étaient blancs comme de la neige" (ap. 1/14)

A l'âge de 35 ans, emprisonné dans une prison pestilentielle, enchaîné avec ses amis par des chaînes tellement lourdes qu'il en garda les traces toute sa vie, dans l'impossibilité de s'allonger sur le sol, où fourmillaient des insectes, écrasé par la douleur que lui causaient les souffrances de ses disciples, Bahá'u'lláh a tant souffert que malgré son jeune âge, ses cheveux sont devenus blancs comme de la neige.

St. Jean ajoute un autre détail:

"Ses yeux étaient comme une flamme de feu" (Ap. 1/14)

Tous ceux qui ont vu Bahá'u'lláh confirment ce détail frappant.

Le professeur Brown écrit: "Ses yeux perçants semblaient pénétrer jusqu'aux tréfonds de l'âme"

Après cette introduction, St. Jean commence les sept lettres, à l'étude desquelles nous allons procéder.

D'après ce que nous avons dit la première lettre s'adresse aux Sabéens.

La lettre commence par la reconnaissance des mérites des croyants, elle continue par des réprimandes et finit par la promesse du salut, ce qui illustre bien l'historique de chaque communauté religieuse qui commence à s'en tenir fermement à l'esprit de la religion, puis avec le temps, néglige l'esprit pour s'attacher à la forme, d'où la décadence. Puis vient la renaissance et le salut par l'acceptation de la nouvelle révélation, révélation promise par leurs Écritures.

- "Je connais tes oeuvres, ton travail et ta persévérance" (Ap. 2/1) lisons-nous dans la lettre qui continue ainsi: "Mais ce que j'ai contre toi c'est que tu as abandonné ton premier amour. Souviens-toi donc d'ou tu es tombé, repens-toi et pratique tes premières oeuvres" (Ap. 2/4)

Et la lettre finit par cette promesse:

"A celui qui vaincra je donnerai à manger l'arbre de vie" (Ap. 2/7)

Ce qui veut dire celui qui vaincra sa négligence en acceptant le message du Jour Promis " goûtera de l'arbre de vie", autrement dit reprendra vie ou ressuscitera spirituellement. Comme St. Paul y fait allusion en parlant de ceux qui ont accepté le Christ.

"Nous qui étions morts par nos péchés, Dieu nous a rendu à la vie avec Christ " Eph. 2/5).

Cette lettre retrace l'historique du peuple sabéen qui durant des milliers d'années a abandonné l'esprit de sa religion à un tel point qu'il n'en reste pas la moindre trace aujourd'hui.

De plus, jusqu'ici ce peuple n'a connu aucun messager après son Prophète. Mais avec la révélation bahá'ie à laquelle ils ont adhéré (et c'est leur cas principalement en Afrique) ils ont " mangé de l'arbre de vie", autrement dit, ils ont ressuscité spirituellement.

La deuxième lettre de l'Apocalypse est adressée aux hindouistes.

Cette lettre insiste sur la pauvreté et les souffrances du destinataire " Je connais tes tribulations et ta pauvreté (bien que tu sois riche)" (Ap. 2/9)

"Ne crains pas de ce que tu vas souffrir" (Ap. 2/10)

Prédiction qui se justifie dans le cas des hindouistes qui continuent de souffrir de la pauvreté malgré toutes les richesses de leur pays.

A remarquer que le mot Smyrne (nom de l'Église destinataire se traduit en français par le mot " opprimée " ce qui est une fois de plus confirmé par le sort de la communauté hindouiste)

Et la lettre finit comme toutes les autres par la promesse:

"Je te donnerai la couronne de vie" (Ap. 2/10)

Comme dans le cas des Sabéens, il s'agit de la vie spirituelle, de la résurrection spirituelle par l'acceptation du message du Jour Promis.

Cette prophétie est le mieux réalisée dans le cas des hindouistes, puisque ce sont eux qui, par comparaison avec les adeptes des autres religions, ont manifesté infiniment plus de réceptivité pour l'acceptation du message bahá'i montrant ainsi qu'ils ont bien obtenu " la couronne de vie " et qu'ils sont ressuscités spirituellement.

Mais dans cette lettre, il y a un point qui mérite une attention particulière. C'est que St. Jean parle de la " seconde mort " dont ils ne souffriront plus: "Celui qui vaincra, n'aura plus à souffrir de la seconde mort" (Ap. 2/11)

Que signifie la seconde mort?

Physiquement on ne peut pas mourir deux fois. Il s'agit donc de la mort spirituelle par la décadence morale (la mort par les péchés, comme le dit St. Paul) La première mort des hindouistes c'est leur décadence morale au point où jusqu'ici ils ont rejeté toutes les révélations qui ont suivi celle de leur prophète Krishna. Mais aujourd'hui en acceptant le message bahá'i (et par conséquent, tous les messages précédents) Message de résurrection morale, étant donné le stade de maturité dans lequel entre l'homme de notre ère, ils ne seront plus menacés de décadence morale, et ils ne feront que progresser: "Ils ne souffriront plus de la seconde mort".

L'Apocalypse confirme cette interprétation en soulignant la maturité de l'humanité au Jour Promis:

"La mort ne sera plus" (Ap. 21/4) ce qui signifie: Fini la décadence morale.

La troisième lettre est adressée à la communauté judaïque à qui le message reproche sa doctrine de Balaam:

"Tu as des gens attachés à la doctrine de Balaam" (Ap. 2/14)

La doctrine de Balaam est précisément une expression judaïque symbolisant l'idolâtrie. Qu'est-ce que l'idolâtrie si ce n'est l'amour de tout sauf de Dieu et plus particulièrement l'amour de l'argent.

N'est-ce pas une allusion aux juifs étant donné qu'il y a déjà 2000 ans Jésus leur adressait le même reproche: "l'amour de Mamon" (Mat. 6/24)

Et la lettre finit par la promesse:

"A celui qui vaincra, je donnerai de la manne cachée et je lui donnerai une petite pierre, et sur cette pierre blanche est écrit un nom nouveau" (Ap. 2/1-7).

La "manne cachée " c'est le symbole de la nourriture divine qui donne la vie ce qui nous rappelle une fois de plus la " couronne de vie" ou " l'arbre de vie".

Serait-ce par hasard qu'en s'adressant aux juifs le message parle de la "manne cachée " dont la promesse leur avait été donnée au temps de Moïse (Es. 16/4)

Quant à la petite pierre sur laquelle est écrit un nom nouveau; il s'agit de la pierre sertie dans la bague que portent les bahá'is et sur laquelle est gravé le nom BAHÁ (nom du fondateur de la foi bahá'ie) (un nom nouveau)

Serait-ce une fois de plus par hasard qu'en s'adressant précisément aux juifs que le message parle d'un nom nouveau, ce qui leur avait été promis par Esaïe: "Et l'on t'appellera d'un nom nouveau" (Esaïe 62/2)

La prophétie relative à la " manne cachée " promise aux juifs a également été réalisée, étant donné qu'après avoir rejeté les révélations qui ont suivi celle de Moïse, les juifs acceptent aujourd'hui la révélation bahá'ie (et par conséquent toutes les autres) montrant ainsi qu'ils ont eu leur part de la " manne cachée " ou de la nourriture divine qui donne la vie.

La quatrième lettre est adressée aux zoroastriens.

Après avoir adressé les mêmes reproches qu'aux autres communautés, le message leur promet plus particulièrement " l'Etoile du Matin".

"Et je lui donnerai l'étoile du matin" (Ap. 2/28)

Or l'étoile du matin est le signe précurseur du lever du soleil.

Cette prophétie s'est réalisée par la manifestation du Báb - Précurseur (Etoile du Matin) de la révélation bahá'ie.

Serait-ce par hasard que cette promesse a été donnée aux zoroastriens qui attendent précisément leur Promis sous le nom de USHIDAR-NAM, ce qui signifie l'Etoile du Matin?

Serait-ce par hasard que cette Etoile du Matin apparaît dans le pays même de Zoroastre, c'est-à-dire en Iran?

La cinquième lettre est adressée au bouddhistes.

Comme les autres lettres, elle commence par des réprimandes, mais cette fois le ton est plus fort:

"Je sais que tu passes pour être vivant et tu es mort" (Ap. 3/1)

Or il arrive que la religion bouddhiste tout en étant la plus grande au point de vue numérique a subi une telle décadence (mort spirituelle) qu'on l'appelle doctrine athée.

Et la lettre finit, comme toutes les autres par la promesse de la vie (spirituelle) "Celui qui vaincra... je n'effacerai point son nom du livre de la vie" (Ap. 3/5)

La sixième lettre est adressée aux chrétiens, à qui elle reproche plus particulièrement leur faiblesse:

"Voici, parce que tu as peu de puissance..." (Ap. 3/8)

En effet parmi toutes les religions, c'est la religion chrétienne qui s'est montrée trop faible pour garder son unité et son esprit pacifique. Car c'est elle qui s'est divisée en un très grand nombre de sectes (nombre dépassant largement celui des autres religions) et où les guerres les plus meurtrières se sont livrées entre chrétiens.

Mais en échange, grande est la récompense qui leur est promise en cas de triomphe:

"Celui qui vaincra, je ferai de lui une colonne dans le temple de mon Dieu" (Ap. 3/12)

Ce qui veut dire qu'aux croyants d'origine chrétienne il a été promis de servir de pilier pour la foi du Jour Promis.

Et c'est ce que nous constatons précisément aujourd'hui, étant donné que ce sont surtout les bahá'is d'origine chrétienne qui sont en train de bâtir le Nouvel Ordre Mondial fondé par Bahá'u'lláh.

Serait-ce par hasard que c'est en s'adressant aux chrétiens que le Message leur prédit la " Nouvelle Jérusalem" (symbole extérieur de la religion) et " un nom nouveau "?

Les chrétiens ne sont-ils pas attachés plus que quiconque au nom du fondateur de leur religion, au nom du Christ, en rejetant la possibilité de la naissance d'une nouvelle religion? N'est-ce pas que pour eux, pas de " nouvelle Jérusalem " pas de "nom nouveau".

Et comme à dessein c'est en s'adressant aux chrétiens que la lettre dit: "Celui qui vaincra... j'écrirai sur lui le nom de mon Dieu et le nom de la ville de mon Dieu, de la nouvelle Jérusalem qui descend du ciel, d'auprès mon Dieu et un nom nouveau" (Ap. 3/12)

Et nous arrivons à la septième lettre qui s'adresse aux adeptes de l'islam.

La lettre commence comme toutes les autres par des réprimandes et finit comme toutes les autres par une promesse.

Ce qui est remarquable dans cette lettre c'est qu'à maintes reprises il y est fait mention de la "Porte".

"Voici, je me tiens à la PORTE et je frappe. Si quelqu'un entend ma voix et ouvre la PORTE, j'entrerai chez lui" (Ap. 3/20)

Or le mot Báb (précurseur de la foi bahá'ie) traduit en français signifie PORTE (terme justifié par le fait que le Báb se présentait comme MOYEN d'accès à la foi bahá'ie).

En nous rappelant le fait que le Báb était d'origine islamique on ne peut s'empêcher de se demander:

Serait-ce par hasard que c'est en s'adressant aux adeptes de l'islam que le message fait à maintes reprises mention de la PORTE?

Ne devrait-on pas, une fois de plus y voir une prophétie accomplie?

De nos jours, tout le monde parle de la justice. Appliquons ce merveilleux principe à la lecture de ces quelques pages de l'Apocalypse que nous venons d'étudier.

Quand on pense à tant de prophéties qu'on y trouve, prophéties accomplies avec tant de précision.

Quand on pense que c'est en s'adressant aux zoroastriens que le message parle de l'Etoile du Matin, nom sous lequel ils attendent le messager du Jour Promis.

Quand on pense que c'est en s'adressant aux chrétiens que le message parle d'un nom nouveau, et non pas toujours du même nom (Christ) auquel ils sont attachés.

Quand on pense que c'est en s'adressant aux adeptes de l'islam que le message mentionne à maintes reprises le nom Porte, ce nom étant celui du messager précurseur de la foi du Jour Promis, et ce messager étant précisément d'origine islamique.

Quand on pense que c'est en parlant de ce même islam que le message mentionne 666 comme une année néfaste, et que c'est précisément à cette date que la décadence de l'Islam a commencé (par la trahison de la dynastie des Ommayades).

Quand on pense que l'année 1260 (l'année 1260 de l'hégire correspond à l'année 1884 de l'ère chrétienne) date du Jour Promis, y est prédite à sept reprises (peut-être à dessein, à l'intention des sept religions déjà mentionnées).

Quand on pense à la réalisation de tant de prophéties, ne devrait-on pas se demander si cette dernière prophétie qui dit "qu'il n'y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur" (Ap. 21 /4) doit aussi se réaliser par application du programme qui a précisément commencé en 1260 et que nous y avons un rôle à jouer.


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7.6. L'homme, ce talisman suprême

Un tireur d'élite cherchait un partenaire pour son numéro au cirque.

Un candidat se présente.

- Voilà comment je procède. Vous tenez un cigare entre les lèvres et je le coupe en deux avec une balle, ça va?

- Et si vous ratez, et si je reçois votre balle en pleine figure?

- Dans ce cas, Evidemment on remboursera les spectateurs.

Cette anecdote illustre bien l'état d'esprit qui règne à notre époque, où l'homme est devenu une marchandise, ou ce qui est pire encore, un objet portant l'étiquette " à jeter après usage".

Et pourtant l'homme est le sommet de la création, sa station est infiniment élevée. Et le but de la FOI c'est d'éduquer l'homme pour qu'il en prenne conscience et qu'il la justifie par sa conduite.

"L'homme est le talisman suprême - lisons-nous dans les Écrits bahá'is - Mais, faute d'éducation convenable, il a été frustré de ce qui lui appartient en propre".

Ou encore:

"Voyez en l'homme une mine riche en gemmes d'une inestimable valeur. Mais seule l'éducation peut révéler les trésors de cette mine et permettre à l'humanité d'en profiter".

Dans la Bible il y a une charmante image qui illustre bien comment Dieu nous amène à ce que nous prenions conscience de notre haute destinée. Voilà exactement ce que nous y lisons

"Pareil à l'aigle qui remue sa couvée, Voltige sur ses petits, Déploie ses ailes, les prend Les porte sur ses plumes, L'Eternel seul a conduit son peuple, Et il n'y avait avec lui aucun dieu étranger" (Deuter 31/1112)

L'aigle choisit habituellement pour son nid les points les plus hauts des montagnes, points inaccessibles aux autres oiseaux. Ce qui fait que ses petits ont PEUR de quitter leur nid et ne le veulent pas.

Pourquoi le quitter, en effet, ils y ont leur sécurité, ils y sont nourris, sans peine, ni souci. Ils ne peuvent pas s'imaginer l'immensité de l'espace qui leur est destiné, ni qu'un jour ils seront appelés à voler de leurs propres ailes, à s'élancer vers le soleil ; ni qu'un jour, à leur tour, ils seront appelés à faire une autre nichée. Pour le moment, ils n'en ont pas le moindre désir.

Que fait alors leur mère? Elle sait que ses petits ne doivent pas rester au nid éternellement. Et ce ne serait pas gentil de les y abandonner à leur sort. La première chose qu'elle fait c'est qu'elle remue, et remue bien fort, son nid. Le nid tremble, pour les petits c'est tout ce qu'il y a de plus désagréable, ils y étaient si bien. Non, ils doivent bouger, ils doivent se remuer. Ensuite la mère étend ses ailes, voltige sur les petits pour leur montrer qu'eux aussi doivent se servir de leurs propres ailes, qu'ils doivent essayer de quitter ce trou car ce n'est pas là leur vraie demeure, celle-ci étant l'immensité de l'espace. Mais les petits ne bougent pas, ils ont PEUR. La mère continue de voltiger, mais en vain, car les petits ne veulent rien comprendre. Alors délibérément, elle les déloge, les pousse dehors. Les petits tombent tête première dans l'effroyable espace infini, crient, hurlent, battent les ailes, affolés à l'extrême.

Et au moment où ils sont sur le point de culbuter, la mère qui ne veut jamais leur malheur, intervient, elle tend ses ailes sous eux, afin de les porter et de les ramener à leur nid, leur permettant ainsi de se calmer et de se préparer pour une autre tentative.

Et l'épreuve recommence, se poursuit malgré les cris des petits, malgré leurs échecs possibles, et elle continue jusqu'à ce qu'ils arrivent à avoir CONFIANCE en eux-mêmes, et s'envolent de leurs propres ailes dans l'immensité de l'espace infini qui est leur royaume, leur nid n'étant qu'une demeure temporaire.

Essayons de comprendre cette métaphore.

L'aigle ce "roi du ciel" a toujours été le symbole de l'esprit supérieur. Ce qui nous amène à conclure de la métaphore biblique que la Providence connaissant nos faiblesses, nos craintes, nous guide jusqu'à ce que nous arrivions à nous envoler de nos propres ailes, à découvrir notre vrai monde, qui n'est pas le monde de craintes et de soucis. Tant que l'homme n'a pas atteint la maturité morale, il reste comparable à l'aiglon attaché à son nid où il se voit en sécurité et ne pense qu'à être bien nourri.

Mais ce n'est pas là qu'il doit rester. Il doit s'envoler bien plus haut, il doit PROGRESSER, de façon illimitée. Ce progrès sans limite étant l'un des signes distinctifs de l'homme. L'animal est incapable de ce progrès, qu'il ne faut pas confondre avec l'adaptation physique au milieu. L'oiseau d'aujourd'hui fait son nid exactement comme son ancêtre d'il y a 6000 ans. Mais l'homme d'aujourd'hui fait son nid bien mieux que l'homme d'il y a 6000 ans. La colombe d'il y a 6000 ans est aussi pacifique qu'elle l'est aujourd'hui. Mais le pacifisme de l'homme d'aujourd'hui peut aller jusqu'au sacrifice de sa vie.

L'homme est donc destiné à progresser et ceci aussi bien du point de vue matériel que spirituel.

A ce propos voilà ce que nous lisons dans les Écrits bahá'is.

"Il est bon et louable de progresser au point de vue matériel, mais en même temps il ne faut pas négliger le progrès spirituel bien plus important. C'est seulement en nous perfectionnant spirituellement autant que matériellement que nous pouvons faire de réels progrès et devenir des êtres parfaits. C'est dans le but d'apporter cette lumière et cette vie spirituelle que sont venus tous les Grands Educateurs" (Causeries d`Abdu'l-Bahá à Paris)

L'homme d'aujourd'hui fait de plus en plus de progrès dans le domaine matériel, il s'entoure de luxe et de tout le confort moderne, ne refusant rien à sa nature physique. Mais dans le fond de son coeur il n'est pas heureux. Les statistiques américaines montrent que 50% des hommes interrogés ne sont nullement satisfaits de leur sort et croient que demain le monde ne sera pas meilleur qu'aujourd'hui.

Ils ont le sentiment qu'ils ne se trouvent pas dans leur milieu. Et c'est vrai, l'homme est un être plutôt spirituel que matériel, et par conséquent il est heureux dans un milieu spirituel. C'est comme un poisson qui est un être aquatique et il n'est heureux que dans un milieu aquatique.

Quant à ceux qui apparemment se disent satisfaits, ils sont comparables à ces aiglons dont parle la Bible, ils croient que c'est dans leur " nid " qu'ils peuvent avoir leur sécurité et leur bonheur. Alors l'" Aigle " mère " remue " leur nid. J'évoque par là tous ces troubles qui s'intensifient de jour en jour. Retenu par ses soucis matériels interminables l'homme n'attache que peu d'importance à ces avertissements: "Les aiglons ne bougent pas". Alors l'" Aigle " délibérément, déloge les aiglons de leur nid. J'entends par là les épreuves inévitables que nous subissons, qui nous font crier, hurler, battre des ailes.

Par ces cris, je veux dire nos cris d'alarme concernant l'approche des événements apocalyptiques. Nous nous efforçons de faire quelque chose pour notre sécurité, nous organisons des conférences de désarmement, par exemple.

A ce propos, permettez-moi de vous lire ces quelques lignes que j'ai trouvées dans une revue américaine:

"Depuis 1945 plus de 6000 rencontres se sont déroulées entre américains, soviétiques et diplomates d'autres pays pour parler du "désarmement" et de son sous-produit, la " limitation des armements " Mais en 32 ans les accords passés mutuellement n'ont pas fait disparaître une seule arme".

La seule décision que peuvent prendre les participants à ces conférences c'est celle de se mettre d'accord pour ne rien décider. Un journal humoristique va plus loin en écrivant: "quand on participe à ces conférences pour le désarmement on a l'impression que c'est là que se prépare la prochaine guerre".

On est désespéré, on se voit en danger imminent.

Et juste à ce moment de désespoir, juste au moment où nous, les " aiglons " sommes sur le point de culbuter, l'" Aigle " intervient, déploie ses ailes pour nous y prendre et nous ramener à notre " nid " , en permettant à nos nerfs de se calmer.

J'entends par cette image du salut temporaire, les efforts désintéressés déployés par ces âmes nobles que Dieu suscite afin de préparer l'opinion publique pour la réalisation de l'unité dans l'ordre politique, l'unité de pensée dans les entreprises mondiales, l'unité dans la liberté, l'unité des nations, l'unité des races ...

Mais ce n'est toujours pas la sécurité définitive pour nous. Car nous continuons toujours à compter sur les autres sans avoir acquis pleine confiance en nous-mêmes pour "nous envoler par nos propres ailes".

L'épreuve recommence alors. L'"Aigle" intervient de nouveau avec les épreuves qu'il nous fait subir. Et ces épreuves se succèdent jusqu'à ce que nous arrivions à avoir CONFIANCE en nous-mêmes, autrement dit jusqu'à ce que nous nous CONNAISSIONS, grâce à la découverte de nos capacités latentes infinies, capacités dues à cette FORCE mystérieuse d'origine divine qui est en nous.

Puisque cette FORCE est d'origine divine, nous ne pouvons la découvrir qu'à sa source. Et cette source jaillit d'âge en âge quand l'humanité se trouve au bord de l'abîme du désespoir. J'entends par là la révélation divine apportée par ces Personnalités sublimes telles que Moïse, Bouddha, Jésus, Muhammad et pour aujourd'hui Bahá'u'lláh.

Ces personnalités fondent pour ainsi dire une école où l'on apprend à découvrir ses capacités latentes, autrement dit à SE CONNAÎTRE

Dans le domaine scientifique, c'est dans une école de science qu'on apprend à découvrir ses capacités scientifiques latentes, à se connaître du point de vue scientifique. Il en est de même en religion. C'est dans une " école de religion" (dans la foi religieuse) qu'on arrive à découvrir ses capacités spirituelles latentes, à se connaître spirituellement.

Et comme en science il y a en religion plusieurs degrés conformes à l'évolution de l'homme; aussi son " école" comprend-elle plusieurs degrés. Le degré actuel de cette "école" c'est la foi bahá'ie et c'est par la citation de quelques unes de ses paroles que je terminerai mon exposé, paroles qui ne font qu'inspirer CONFIANCE en l'homme, cette confiance qui lui permet de s'envoler par ses propres ailes vers les hauteurs sans limites du progrès infini qui lui est réservé.

Ces quelques citations ne sont qu'une goutte de cet océan de paroles adressées par Dieu à l'homme dans les Écrits bahá'is

"Tu es ma forteresse, pénètre à l'intérieur pour y vivre en sécurité."

Mais l'homme est tellement plongé dans la jungle des préoccupations matérielles qu'il lui est difficile de découvrir cette forteresse cachée en lui.

Ou encore:

"Tu es ma lampe et ma lumière est en toi. Puise en elle ton éclat".

Mais l'homme est tellement aveuglé par l'éclat des plaisirs matériels, qu'il lui est difficile de découvrir la lumière qui est en lui.

Ou encore:

"Tu es mon bien, et mon bien ne périt pas, pourquoi crains-tu mourir.

Tu es ma lumière et ma lumière ne s'éteindra jamais..."

Mais l'homme est convaincu qu'il va mourir, que sa vie va s'éteindre, et, partant de là qu'il doit profiter au maximum du présent et à n'importe quel prix. Et c'est là la plus grande entrave sur la voie de son PROGRÈS, progrès devant manifester ses capacités latentes et inestimables en tant que talisman suprême. Il oublie que justement il est une créature faite pour progresser indéfiniment (par opposition aux autres créatures) ce qui implique que lui soit réservée une vie éternelle.

Et précisément le rôle de la FOI c'est de lui apprendre la voie du progrès tout en lui assurant la vie éternelle.

A nous donc le choix une vie éphémère ou la vie éternelle.


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7.7. La conquête de l'espace ou la paix sur la terre

On dit qu'on ne peut comprendre la vie qu'en se tournant vers le passé, et que pour vivre il faut regarder vers l'avenir.

Afin de comprendre la vie, nous allons donc nous tourner vers le passé, et afin de voir comment il faut vivre nous allons jeter un coup d'oeil vers l'avenir.

Ce qui est triste c'est que l'homme d'aujourd'hui n'a pas l'habitude, ou n'a pas le temps de se tourner vers le passé; quant à l'avenir, rares sont ceux qui s'y intéressent, l'essentiel étant la pleine jouissance des plaisirs matériels du jour présent.

Voir le passé et l'avenir est un don merveilleux qui n'est confié qu'à l'homme seulement. Et les deux puissances qui lui permettent de manifester ce don, et, par voie de conséquence, de voir le passé et l'avenir, ce sont la science et la religion. Nous allons ce soir en tirer parti dans notre étude de la vie.

Le passé nous est transmis par les pages de l'histoire. Et ces pages nous apprennent que chaque fois que l'homme oublie ce passé qui lui permet de s'instruire, et omet de se tourner vers l'avenir afin de progresser, chaque fois qu'il oublie qu'il est HOMME et qu'il doit se distinguer de l'animal, apparaît le plus mystérieux d'entre les hommes, j'entends le fondateur de religion (ou Mutant, pour utiliser le terme des matérialistes).

Seul contre tout le monde, sans un seul humain capable de l'instruire, de le guider, de l'aider, de le comprendre, de partager ses responsabilités, lui, comme un voyant, parmi les aveugles se lève pour éduquer moralement les hommes, pour les "humaniser" (selon le terme des matérialistes).

Je vais vous citer juste deux exemples, puisés ailleurs dans les révélations judaïque, chrétienne et islamique, dont les circonstances vous sont connues.

Remontons donc de 3000 ans dans l'histoire. Voilà nous sommes en Iran ! Ce pays se trouve en état de décadence aussi bien matérielle que spirituelle. L'agriculture, principale source de vie, est complètement négligée, la plupart des terres restent incultes, là où il n'y a pas de marais, des plantes sèches les remplacent. La stérilité provoque la famine et la famine tue lentement les Iraniens et personne ne s'en soucie, car compte pour si peu la vie humaine.

Mais il n'y a pas que la famine, la mortalité augmente de jour en jour, des maladies résultent de l'abandon de l'hygiène: les villes sont infestées de mortelles puanteurs s'élevant des cadavres humains abandonnés négligemment sur les routes ou, à la rigueur enterrés à fleur du sol, tout près des villes. Quant à la situation morale, c'est le règne de la corruption intégrale. L'hypocrisie et le vol sont tellement à la mode qu'au moment même où les Iraniens organisent des deuils bruyants et se couvrent la tête de cendres, d'autres dérobent sur les tombes les offrandes apportées par ostentation, aux âmes des morts.

En ce qui concerne le gouvernement du pays, il est divisé entre un grand nombre de petits princes prétentieux ou des roitelets vaniteux ou, plus exactement, entre des magiciens et des jongleurs, car, en réalité ce sont eux qui dirigent le malheureux pays.

Bref, le pays est englouti dans les ténèbres de l'ignorance, de la discorde de l'injustice et de la cruauté.

Et juste dans un tel milieu apparaît le prophète Zoroastre, produisant une transformation spontanée dans la façon de penser et la conduite de ses concitoyens, raison pour laquelle les savants matérialistes lui attribuent le titre de mutant.

Avec Zoroastre commence une ère de prospérité et de justice non seulement pour les Iraniens, mais aussi pour les habitants des autres pays. En effet, c'est grâce à Zoroastre que l'Iran a donné au monde un roi tel que Cyrus, que les historiens mentionnent en tant que premier fondateur de la charte des droits de l'homme, étant donné qu'il accordait leurs droits aux opprimés. C'est Cyrus qui délivra les juifs captifs des Babyloniens. le prophète Esaïe l'appelle "Mon berger" (Esaïe 44/28)

L'histoire nous relate un phénomène identique, mais cette fois en Inde.

Cela se passe presque cinq siècles après l'apparition de Zoroastre.

Nous sommes donc en Inde, pays qui traverse alors l'une des périodes les plus sombres de son histoire. Le pays meurt lentement. C'est un suicide collectif. Il s'agit de la doctrine d'ascétisme et de mortifications que pratiquent les Hindous. Voulez-vous en connaître quelques perles?

Ne jamais s'asseoir, se contentant de s'accroupir sur les talons comme les chameaux.

Ne dormir que sur les ronces.

Jeûner au point d'arriver à une maigreur squelettique.

Et ces pratiques étaient si profondément enracinées dans la vie hindoue que même de nos jours il en subsiste d'abondantes traces.

Mais là n'est pas tout, ce n'est rien à côté des pratiques incroyables telles que manger des excréments de vache, boire de l'urine, faire le voeu de vivre comme des chiens, en ne marchant qu'à quatre pattes et en ne mangeant que ce qu'on leur jette à terre.

Et dire qu'on fait tout cela pour, soi-disant se perfectionner afin d'éviter d'être incarné en animal, oubliant le fait qu'en s'identifiant au chien, on augmente sa chance d'être réincarné en chien.

Mais le danger ne s'arrête pas là, car il ne s'agit pas de la satisfaction des caprices d'un petit nombre d'Hindous. Il s'agit d'une doctrine prêchée par la caste la plus honorée du pays, par les Brahmanes, la première des quatre castes d'Hindoustan, les moines hindous. On peut facilement imaginer quel doit être l'avenir d'un pays dont les habitants abandonnent toute activité sociale pour s'adonner à de telles pratiques.

C'est précisément au milieu d'une telle corruption qu'apparaît Bouddha, fondant une religion qu'aujourd'hui encore, est par le nombre de ses croyants la plus grande parmi toutes les autres.

Bouddha fonde une nouvelle civilisation à la fois matérielle et spirituelle et ceci, non seulement en Inde, mais dans bien d'autres pays tels que le Japon, la Chine, le Tibet, etc...

Puisqu'on parle des Hindous et du bouddhisme, rappelons-nous un fait qui doit être mentionné. C'est que le symbole du bouddhisme et de l'hindouisme est le lotus. Le lotus est, en réalité, le symbole du messager de Dieu. C'est une fleur parfaite. Elle est symétrique et extrêmement belle. Elle pousse dans les marécages. Et de cet amas de bourbe et de boue, elle émerge absolument pure et parfaite.

Ce qui illustre bien le cas du messager de Dieu. En effet, par son corps il vient de la terre, de la boue. Il est originaire du pire des pays de la planète.

Il apparaît parmi les plus corrompus des peuples de la terre. Ce qui fait que personne ne peut dire que c'est un environnement favorable qui l'a formé et ce qui prouve qu'il n'y a qu'une force extraordinaire et surnaturelle (Dieu) qui peut le créer.

Ceci dit, revenons au bouddhisme pour voir, selon les pages de l'histoire qui tant qu'on s'en tenait à l'esprit des enseignements de Bouddha, la civilisation fondée par lui progressait dans tous les pays où cette religion avait pénétré.

Mais à partir du moment où l'on a abandonné l'esprit pour s'attacher à la forme et aux cérémonies extérieures, le bouddhisme a perdu sa pureté primitive et sa décadence a commencé pour aboutir à une telle situation que de nos jours il n'est même pas reconnu, par bien des historiens, comme une religion.

Non moins triste fut le sort du Zoroastrisme à partir du moment où ses adeptes ont abandonné l'esprit de la foi pour s'attacher aux rites. La notion de la divinité a été tellement perdue de vue qu'aujourd'hui pour eux le soleil est le bon dieu.

Pour être juste, avouons que les autres religions n'ont pas fait exception à cette règle de décadence. Quand on pense qu'une religion qui a explicitement interdit la guerre sous quelque forme que ce soit, une religion ne parlant que de l'amour (j'entends la religion chrétienne) est tombée dans un tel état que les guerres les plus meurtrières eurent lieu entre ses adeptes... que peut-on attendre des autres religions où la guerre sainte était permise.

La décadence fut donc la règle générale selon l'histoire dont nous tournons les pages pour arriver au 18ème siècle, moment où le monde entier est atteint d'un mal sans précédent. L'injustice, la tyrannie et la cruauté règnent partout. Les peuples, soi-disant civilisés, non seulement tyrannisaient les pays arriérés, en les privant de leurs richesses naturelles, mais en plus, en vendant et achetant leurs habitants, comme des bêtes.

Mais même à l'intérieur de leur pays régnait une telle injustice qu'il nous est difficile d'y croire aujourd'hui: pensez qu'en France, par exemple, tous les frais de l'état étaient supportés par le peuple (97% de la population) et que les riches étaient dispensés de l'impôt.

La religion qui pratiquement devait être la cause de l'entente et de l'unité était devenue le facteur de discorde et de haine. Jamais les catholiques et les protestants ne se détestèrent si fort qu'au 18ème siècle. Jamais les sectes musulmanes ne se haïssaient autant qu'au 18ème siècle. Voilà ce qui dit l'éminent historien-philosophe Carlyle, à propos du 18ème siècle.

"Un siècle qui n'a pas d'histoire et ne pouvait guère en avoir. Le siècle le plus riche en mensonges... qui n'avait plus aucune conscience de ses erreurs, tant il en était imprégné, qui s'était ancré si fort dans l'aberration et s'en était tellement inspiré qu'en vérité la mesure était comble" (Frédéric le Grand)

Li l'éminent historien, sur la base de l'étude de l'histoire conclut: "il fallait une fois de plus aux paresseux, aux frivoles enfants des hommes une révélation divine pour les empêcher de sombrer complètement dans un état bestial" (Frédéric le Grand)

Mais où cette révélation divine devait-elle prendre naissance? Où ce "Lotus" devait-il faire son apparition?

Dans un " marécage " d'après l'étude de l'histoire. Et ce " marécage", selon le témoignage de la même histoire c'était l'Iran. Car le " Jour" qui devait suivre la "nuit" du 18ème siècle (j'entends le 19ème siècle) il n'y avait pas de pays aussi corrompu que l'Iran. Ce pays où 20000 têtes devaient tomber pour avoir élevé la voix contre la corruption qui y régnait.

Et c'est précisément en Iran que la foi bahá'ie pris naissance au 19° siècle.

Que disent les bahá'is? Que vise la foi bahá'ie?

Tournons un regard vers le passé, voyons ce qui se passe à présent et pensons à l'avenir pour apprendre à vivre: disent les bahá'is.

Un journal britannique écrivait:

"Au cours des trente-trois années passées, il y a eu des combats continuels sur le globe, ou, comme l'a calculé un professeur hongrois " il n'y a pas eu 26 jours sans une guerre quelque part dans le monde".

Ce professeur a également calculé qu'au cours des 30 années passées, 25 millions d'humains sont morts sur le champ de bataille.

Et ces guerres continuent. Elles reviennent incroyablement cher. Et c'est nous qui en payons le prix. Vous a-t-on révélé qu'en moyenne, l'Etat dépense pour un soldat autant que pour l'éducation de 80 enfants?

Ce qui est triste c'est que ces dépenses augmentent tous les ans, et restent toujours à notre charge. Situation qu'à prévue infailliblement, il y a plus de 100 ans, Bahá'u'lláh (à l'époque que certains appellent " le bon vieux temps"

"O assemblée de rois - écrivait-il - nous vous voyons tous les ans augmenter vos dépenses et en faire supporter le poids à vos sujets. C'est une grande injustice. Craignez les lamentations de l'opprimé et ses larmes, ne lui donnez pas un fardeau qu'il ne puisse pas porter" (Lettre à la Reine Victoria)

Indiscutablement une partie de ce que nous payons à l'Etat est destinée à la recherche scientifique et permet de guérir les maladies, d'éduquer les enfants, de faire des routes etc... mais le majeure partie est réservée directement ou indirectement aux préparatifs guerriers baptisés du nom "défense nationale".

Les amateurs de sensationnel nous diront: et les exploits spatiaux ! vous les oubliez ! Ces exploits qui plongent tout le monde dans l'admiration. Ces hommes qui se promènent dans le cosmos, ces satellites qui tournent autour de la terre, ces fusées qui se lancent à la conquête des galaxies!

En réponse à de telles remarques que peut-on dire si ce n'est que tout cela a quelque chose de troublant quand on pense que l'argent qui y est dépensé suffirait amplement à donner à manger à l'univers tout entier.

N'oublions pas que sur les 50 millions d'hommes qui meurent chaque jour, 35 millions meurent de faim et de sous-alimentation.

Attendons nous à ce que ces 35 millions d'hommes poussés à la limite de leur résistance, ne trouvent plus qu'une seule issue: prendre au prix de leur vie et par la violence, à ceux qui ont de quoi se rassasier.

Ou bien attendons nous qu'éclate une guerre atomique pour tirer la leçon qui s'impose? Cette menace existe plus que jamais, et dans les proportions les plus effrayantes qu'on puisse imaginer, car les bombes qui ont été lancées à titre expérimental sur les régions désertes avaient une puissance 600 fois plus grande que celle d'Hiroshima.

Peu de temps avant sa mort, Einstein signait avec d'autres savants une déclaration qui était un avertissement et une supplication et dans laquelle il était précisé que:

"Au cas où les bombes H seraient massivement employées il faudrait prévoir le décès d'une partie de l'humanité par des torturantes maladies et enfin la mort lente de tous les êtres vivants".

Pourquoi la mort lente de tous les êtres vivants? Parce que l'atmosphère autour de la terre sera empoisonnée radioactivement dans une proportion qui rendrait toute vie impossible.

Et dans les abris souterrains? pourrait-on nous rétorquer. "Ceux qui y trouveront refuge seront épargnés par la guerre atomique; ils en sortiront pour commencer une nouvelle vie".

A cette remarque la biophysicien américain John Platt répond en ces termes: "Même si c'était possible, ce ne serait qu'un ajournement temporaire et tragique du problème, cela équivaudrait à tomber à mi-chemin du précipice? à se relever tant bien que mal pour s'écraser au fond peu après. Les survivants finiraient-ils par quitter leurs abris pour ensevelir les morts et relever les ruines avec la seule perspective de retourner sous terre 20 ans plus tard, une fois reconstruites les forces nucléaires? Et cela pour recommencer 20 ans après !"

L'éminent savant a raison quand il dit " et cela pour recommencer 20 ans après".

Si cela recommence 20 ans après c'est qu'on l'a voulu. Ce n'est pas automatiquement que cela se fera. C'est qu'il y a des esprits guerriers qui déclenchent ces guerres. Puisque les guerres commencent dans l'esprit de l'homme, c'est par l'esprit qu'il faut commencer à instaurer la paix.

En effet, comment peut-on abolir la guerre entre des nations composées d'individus qui, dans leur coeur mènent une guerre dissimulée, cachée, les unes contre les autres: guerre de race, guerre de classes, guerre d'opinion...

C'est donc par les coeurs qu'il faut commencer.

Il faut unir les coeurs.

"Et là, la science ne peut pas nous sauver " dit Einstein.

Si ce n'est pas le science (et ceci est démontré par l'expérience) que nous reste-t-il alors?

Il ne nous reste que la religion.

Mais quelle religion? Il n'y en a pas deux ou trois. La même religion qui, au cours de l'histoire a fait preuve de sa puissance unificatrice tant qu'on se tenait à son esprit, comme nous l'avons prouvé au début de notre exposé par des exemples irréfutables.

Il faut donc pour unir les coeurs, recourir à la même puissance, c'est-à-dire à la religion, à la condition que son esprit soit ranimé et que ses nouveaux principes satisfassent les exigences de notre temps. En d'autres termes, il faut recourir au stade actuel de l'évolution de la religion. C'est comme en science médicale; pour guérir les maux on a toujours recours à la science médicale mais au stade actuel de son évolution: traite-t-on maintenant les maladies par la saignée et la purgation? Non, on applique les méthodes modernes.

Quant à la religion, elle aussi suit le cours de l'évolution. et c'est au stade actuel de son évolution qu'il faut recourir. Ce stade est !a foi bahá'ie qui a, pour ainsi dire le même esprit que "les religions du passé" à leur état primitif et pur, mais qui apporte, en plus, de nouveaux principes qui satisfont les exigences de notre époque.

Et quel est le rôle de la science? La science facilite l'union que nous cherchons. Elle sert, pourrait-on dire, de véhicule pour ce pèlerinage vers l'unité et la paix, pèlerinage qui, selon la foi bahá'ie se fera en sept étapes:

1 ° unité dans le domaine politique

2° unité de pensée dans les entreprises mondiales

3° unité dans la liberté

4° unité dans la religion 5° unité des nations

6° unité des races

7° unité des langues.

C'est la contribution à la réalisation de ce vaste programme que constitue le but de tout bahá'i. C'est cela qui donne un sens à sa vie. C'est en cela que le monde jugera sa valeur dans la vie.

L'homme n'est-il pas comparable au bois qui porte le drapeau, bois dont le valeur n'est pas dans sa taille, ni dans sa couleur, mais dans l'emblème qu'il déploie. et cet emblème aujourd'hui c'est l'Unité et la Paix.


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7.8. L'argent fait-il le bonheur?

Un homme riche vient trouver un sage pour lui demander pourquoi il est si égoïste. Le sage le conduit près de la fenêtre:

- Regarde - lui dit-il - et dis moi ce que tu vois.

- Des gens - répondit l'homme riche

Le sage le conduit alors devant une glace

- Et maintenant qu'est-ce que tu vois?

- Je ne vois que moi-même.

- Et bien - lui dit le sage - la vitre est en verre, et le miroir aussi. Mais le verre du miroir est recouvert d'un peu d'argent et sitôt qu'intervient un peu d'argent, tu cesses de voir les autres et tu ne vois que toi-même.

Indiscutablement d'une manière générale la richesse entraîne l'égoïsme. C'est l'aspect négatif de l'argent. Mais voyons-en pour le moment l'aspect positif.

Si j'ai raconté cette histoire ce n'est pas pour en déduire que pour ne pas être égoïste, il ne faut pas avoir d'argent, il faut rester pauvre. Loin de là. Pour nous nourrir, nous avons besoin d'argent. Pour nous habiller, nous avons besoin d'argent. Pour avoir un logement, nous avons besoin d'argent. Pour nous distraire, nous avons besoin d'argent. Pour guérir en cas de maladie, nous avons besoin d'argent. Pour nous faire des relations, nous avons besoin d'argent.

Arrêtons-nous là pour remarquer tout de suite qu'il est vrai que l'argent donne des remèdes, mais pas la santé, qu'avec l'argent on a des distractions mais pas la joie, qu'avec l'argent on se fait des relations, mais pas des amis.

Or pour être heureux on a besoin de la santé, de la joie et des amis.

Ne serait-il pas possible qu'on ait tout cela, qu'on soit heureux, tout en ayant de l'argent. Autrement dit, l'argent peut-il faire le bonheur? C'est la question à laquelle nous allons essayer de répondre.

Pour les bahá'is la réponse se trouve dans les Écrits de leur foi. Nous allons donc y recourir en nous rappelant quelques extraits.

Bahá'u'lláh dit:

"Chacun est enjoint de s'occuper d'une manière ou d'une autre: art, commerce, etc. Nous avons décidé d'identifier votre labeur avec un acte d'adoration de Dieu."

Ou encore:

"Ne gaspillez pas votre temps en paresse, en indolence et occupez-vous de ce qui est avantageux pour vous et pour les autres " Ou encore " Le plus méprisable des hommes devant Dieu est celui qui s'assied et qui mendie".

Il s'en suit que pour un bahá'i, le travail est obligatoire. Ce qui fait que personne n'a le droit de ne rien faire sous prétexte qu'il a un héritage de son père. Il n'a pas le droit non plus de recourir à la mendicité. Dans le cas où il s'agit d'une question d'incapacité, c'est à la communauté de s'en charger. Mais en aucune façon la communauté ne doit tolérer la mendicité comme occupation pour qui que ce soit.

De plus, puisque le texte dit que le travail doit être avantageux pour tous ce n'est donc pas n'importe quel travail qui est prescrit à l'homme mais un travail utile.

A ce propos le Docteur Esslemont écrit:

"Que d'énergie gaspillée aujourd'hui dans le monde en luttes stériles et en compétition qui détruisent et neutralisent les efforts des autres ! Et que d'efforts perdus d'une manière plus néfaste.

Si tous les humains travaillaient et si tous leurs efforts manuels ou intellectuels étaient profitables, comme le recommande Bahá'u'lláh, alors les ressources nécessaires à une vie saine, confortable et digne suffiraient amplement pour tous. Il n'y aurait plus ni taudis, ni famine, ni misère, ni servage industriel, ni surmenage qui mine la santé."

On en est bien loin encore . Et la meilleure preuve c'est cette armée de travailleurs intellectuels et manuels qui perdent leur temps et notre argent pour faire des armes de guerre ou pour en inventer de plus en plus terribles.

Une deuxième condition pour le travail selon les enseignements bahá'is, c'est qu'il soit consciencieux. Un tel travail équivaut à l'adoration de Dieu, autrement dit, à une prière, et, par conséquent, le lieu d'un tel travail devient une sorte de temple symbolique. Si donc l'éducation religieuse, chrétienne ou islamique, inculque qu'en principe on ne vole pas son prochain dans le lieu de prière (temple, mosquée) l'éducation bahá'ie fait qu'étant donné que le lieu du travail devient une sorte de lieu de prière, un bahá'i ne vole pas son prochain dans le lieu de son travail.

Chaque seconde il y a trois naissances. Si tous, ou la majorité des gens s'engageaient à éduquer leurs enfants dans cet esprit, d'ici une vingtaine d'années l'humanité serait débarrassée de ce fléau qu'est le vol généralisé par le travail malhonnête.

Deux financiers conversent:

- Mon cher, on peut gagner de l'argent de mille façons, mais il n'y en a qu'une qui soit honnête. - Laquelle? - Ah! Je savais bien que vous ne la connaissiez pas.

Une troisième condition pour le travail c'est qu'il soit fait avec modération.

Ce qui n'est malheureusement pas le cas de nos jours où l'homme gâche sa santé pour construire une fortune. Puis, dépense sa fortune afin d'essayer de recouvrir sa santé. Et il constate, avec tristesse, que c'est trop tard.

Ce n'est pas ainsi que doit agir un bahá'i, car pour lui, veiller au maintien de sa santé est un devoir religieux qu'il est tenu de remplir.

En résumé, chez les bahá'is l'argent est gagné par un travail utile, consciencieux et accompli avec modération.

Et si l'on ajoute à ces trois conditions une quatrième qui dit qu'on doit faire, dans la mesure du possible, le travail pour lequel on est fait et qu'on aime (ce qui pour le moment est un idéal lointain) alors un tel travail peut nous faire gagner la santé, la joie et les amis.

Autrement dit, l'argent gagné par un tel travail peut faire notre bonheur.

Remarquez que j'ai utilisé le terme " peut", - "peut faire notre bonheur".

C'est qu'il y a encore une condition qui doit être remplie. Et quelle est cette condition?

C'est que l'argent ainsi gagné soit dépensé pour le bien des siens et de tous.

Car il ne faut pas oublier qu'il y en a qui amassent l'argent sous prétexte d'économiser pour leurs vieux jours.

Un centenaire avait gagné à la loterie nationale

- Que ferez-vous de cet argent - lui demanda un reporter.

- Je vais le mettre de côté pour mes vieux jours - répondit-il.

D'autres amassent cet argent par crainte de devenir un jour pauvres et dans le besoin.

Etre économe et penser aux jours où l'on pourrait être dans le besoin, c'est bien, mais l'essentiel c'est de profiter du présent en dépensant l'argent pour le bien des siens et de tous.

A ce propos permettez-moi de vous citer un extrait des Écrits du Gardien de la foi bahá'ie:

"Nous devons être comme la fontaine ou la source qui continuellement se vide de tout ce qu'elle a, et qui sans cesse est réapprovisionnée par une source invisible. Le secret d'une vie juste c'est de donner sans discontinuité pour nos semblables, sans que la crainte de la pauvreté ne nous arrête et avec confiance en la bonté inépuisable de la Source de toute richesse et de tout bien" ("Directives du Gardien")

Nous pouvons donc nous résumer en disant que l'argent gagné par un travail utile, consciencieux, accompli avec modération et dans la mesure du possible un travail pour lequel on est fait, l'argent gagné de cette façon peut contribuer à notre bonheur à la condition qu'on le dépense pour le bien des siens et de tous.

Concernant ce dernier point il est opportun de nous rappeler ce que dit Bahá'u'lláh ("Les Paroles Cachées").

"Les hommes les meilleurs sont ceux qui gagnent leur vie dans leur métier et, par amour de Dieu, le Seigneur de tous les mondes, qui dépensent leur argent pour eux-mêmes et pour leurs semblables".

Ou encore:

"La libéralité et la générosité sont mes attributs, heureux celui qui se pare de mes vertus".

Mais entendons-nous bien sur le mot "générosité". La générosité ne consiste pas à donner aux autres ce dont on n'a pas besoin, mais au contraire, ce dont on peut avoir besoin.

La petite fille dit à sa mère:

- Maman, Monsieur le curé nous prie de donner une boite de conserves pour les pauvres"

- Tu pourrais peut-être prendre des sardines à la moutarde qu'aucun de nous ne veut manger - lui répond la mère.

- Mais alors - dit la petite d'un air consterné - ça veut dire que nous serons aidés par les pauvres.

La générosité consiste à venir en aide à son prochain dès qu'on le voit dans le besoin. Et ceci sans tarder. On dit: "qui donne vite, donne deux fois".

Pour que sa générosité ne soit pas simplement la manifestation d'un élan de sentiment, mais qu'elle fasse partie intégrante de sa vie, un bahá'i contribue volontairement et régulièrement au fonds local de sa ville, au fonds national de son pays et au fonds international, ou bien à l'un de ces fonds et cela suivant ses possibilités et sans la moindre contrainte. Ces fonds sont régis par les Institutions correspondantes (Locales, Nationales ou Mondiale) qui les dépensent, soit conformément aux désirs spécifiques du donateur, soit en conformité avec les besoins prévus par les budgets établis d'avance.

Si chez les bahá'is ce sont les institutions qui sont chargées de dépenser les contributions des membres de la communauté, c'est qu'en principe, une institution grâce à la consultation, est plis qualifiée que l'individu pour savoir comment dépenser, autrement dit BIEN dépenser. Et bien dépenser est tout un art qui n'est pas à la portée de tous.

C'est tellement vrai qu'on pourrait dire que la vraie richesse ce n'est pas avoir de l'argent, mais d'en dépenser sagement.

Jusqu'ici nous avons parlé de l'argent en tant qu'un bon serviteur qui contribue à notre bonheur.

Mais n'oublions pas que ce serviteur est capable de devenir un maître, et qu'alors c'est un mauvais maître. Et c'est cela qui est triste. Car de nos jours il devient de plus en plus un maître puissant qui dicte ses lois aussi bien au sein de la famille qu'en société.

D'abord pour former une famille par le mariage, ce qui compte avant tout c'est l'argent.

- Ce jeune homme qui est venu me demander ta main, est-ce qu'il a de la fortune? demande papa à sa fille. - C'est drôle, il m'a posé la même question à ton sujet -répond la fille.

L'amour entre les époux une fois mariés dépend encore de l'argent.

- Si je t'aime ma chérie? Ecoute je veux bien te répondre, mais je voudrais d'abord savoir ce que cela me coûtera - demande Monsieur à Madame.

Et s'il pose cette question c'est que sûrement par expérience il en voit la nécessité.

Les relations entre les enfants et les parents dépendent aussi de l'argent.

La belle-mère de Carnegie avait deux grands fils à l'université, et ceux-ci lui causaient beaucoup de tourments, car ils ne répondaient jamais à ses lettres. Carnegie paria un jour 100 dollars qu'il recevra une réponse sans même la demander. Il écrit une lettre très gaie à ses neveux, leur annonçant incidemment qu'il leur envoie à chacun un billet de 5 dollars. Il omit toutefois de mettre l'argent dans la lettre. La réponse arriva par retour du courrier.

Remarquez qu'il ne faut pas trop accuser les jeunes, car dès leur enfance tout les encourage à aimer l'argent.

Un professeur navré confiait à l'un de ses collègues:

- ces jeux radiophoniques sont déplorables pour la jeunesse. Maintenant chaque fois qu'un élève répond bien à une question, il s'attend à recevoir de l'argent.

L'argent est devenu le passeport le plus apprécié. Avec de l'argent vous pouvez même changer l'opinion qu'on se fait de vous.

Le Maréchal Delafer entre victorieusement à Metz et ne veut pas recevoir les juifs " déicides". Son ordonnance n'arrive pas à le faire changer d'idée. Alors les juifs lui font savoir qu'ils voudraient lui offrir un cadeau.

- Au fond - dit alors le Maréchal à son ordonnance - sont-ils responsables de ce que leurs ancêtres ont fait? Et il les reçoit.

Ce qui est triste c'est que cet amour pour l'argent s'intensifie de plus en plus en portant préjudice à l'amour conjugal, à l'amour filial, à l'amour du prochain, lesquels s'anémient de jour en jour. Et lorsque le vrai amour s'anémie, tout s'anémie. Les principes les plus élémentaires s'oublient. Ce qui n'empêche que le mot " principe " s'emploie de plus en plus, au point que si l'on vous dit: "ce n'est pas pour l'argent, c'est pour le principe " vous pouvez être sûr que c'est pour l'argent.

On sacrifie tout pour amasser de l'argent. Et plus on en amasse, plus on en veut, plus on s'oublie.

Bahá'u'lláh dit:

"Sachez que la richesse est une lourde barrière entre le chercheur et son désir, entre l'amoureux et son bien-aimé. Bien peu, parmi les riches, abordent aux rives de l'Approche et entrent dans la Cité du contentement et de la résignation. Il a du mérite, véritablement, le riche que son opulence ne prive pas du Royaume éternel et des richesses impérissables..."

Que signifie "aborder aux rives de l'Approche et entrer dans la Cité du contentement et de la résignation"?

Il s'agit de s'approcher de Dieu. Peut-on s'approcher d'un Roi si on refuse de faire ce qui lui plaît, si on évite de faire sa volonté?

Non. Il faut donc faire la volonté du Roi pour se permettre de s'approcher de lui, pour être compté parmi ses proches. Or la volonté de ce Roi se résume en deux mots:

AIMER SON PROCHAIN

Et on aime son prochain quand on s'efforce d'acquérir le sentiment qu'on ne fait qu'un avec lui. Comme c'est le cas entre la mère et son enfant.

Sentir qu'on ne fait qu'un avec son prochain, c'est très difficile, sinon impossible pour un égoïste. Et il arrive que l'égoïsme soit le premier effet néfaste de l'opulence.

Afin donc de nous faire éviter l'égoïsme et, par voie de conséquence, chercher à faire la volonté de Dieu, Bahá'u'lláh dit encore:

"Toi, tu recherches l'or, et moi je désire que tu t'en libères. Tu crois que la richesse est de posséder de l'or, et moi je sais que la richesse est de t'en détacher".

Et comment peut-on se détacher de l'argent si ce n'est qu'en en gagnant et en le dépensant pour le bien de tous. Il s'agit donc pour un bahá'i de gagner de l'argent afin de pouvoir montrer qu'il est capable de s'en détacher par sa libéralité. Autrement , s'il ne gagne pas d'argent, s'il n'en possède pas, comment peut-il montrer qu'il en est détaché: on ne peut pas se détacher de ce qu'on n'a pas.

On peut donc résumer le point de vue bahá'i concernant l'argent en disant qu'il faut gagner de l'argent par un travail utile, consciencieux, fait avec modération et conforme à nos capacités (dans la mesure du possible) et de dépenser cet argent pour le bien des siens et de tous.

L'argent ainsi gagné contribue à notre bonheur.

Puisque nous parlons de la contribution au bonheur, faisons une mise au point.

Jusqu'ici nous avons parlé des bienfaits et des méfaits de l'argent, de son aspect positif et de son aspect négatif. A proprement parler, il n'y a ni bienfait, ni méfait, il n'y a ni aspect positif, ni aspect négatif, pour qu'on puisse parler d'un changement d'aspect.

Parlons plutôt d'un changement d'attitude.

Le responsable de ces soi-disant bienfaits et méfaits ce n'est pas l'argent.

C'est la VALEUR que nous lui attribuons et l'attitude que nous adoptons à son égard. Le même montant d'argent peut faire croire à un homme qu'il est heureux alors qu'il fait croire à un autre qu'il est malheureux; dans les deux cas aucun n'est heureux s'il ne sait que faire de ce montant d'argent et comment le dépenser.

A ce propos, rappelons-nous l'histoire de ces deux noyés qu'on repêche le même jour dans une rivière. Le premier un pauvre homme qui était tombé accidentellement à l'eau parce qu'ayant gagné 10000 F. à la Loterie Nationale il s'était senti si heureux que pour fêter sa chance il avait trop bu. L'autre, un financier malchanceux qui s'était suicidé parce qu'il ne lui restait plus que 10000 F. à son compte bancaire et qui se croyait malheureux de ne plus pouvoir mener le train de vie auquel il était habitué.

L'un comme l'autre, pour le même montant d'argent, ont perdu la tête et la vie.

Conclusion, ce n'est pas à proprement parler l'argent qui peut contribuer ou ne pas contribuer à notre bonheur, c'est la conception vraie ou fausse que nous nous en faisons. Tout dépend de notre façon de penser qui est le fruit de notre FOI.


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7.9. La joie du martyre le poussa à danser

Un jour un roi accompagné de ses ministres et de plusieurs invités partit en voyage pour chasser sur une terre située très loin de la cour. Il ordonna qu'à cette occasion on emporte un coffre rempli de pierres précieuses, chargé sur un cheval qui devait suivre sa monture.

A mi-chemin, il fut surpris en se retournant de ne voir derrière lui que son premier ministre, les autres se trouvant très loin en arrière, dans une confusion indescriptible.

- Qu'est ce qui se passe - demanda le roi à son ministre.

- Il y a une demi heure - répondit celui-ci, suite à la chute du coffre de bijoux, les pierres précieuses furent éparpillées sur le sol et tous s'y précipitèrent pour en avoir une part.

- Et toi tu n'as pas pensé à avoir ta part? demanda le roi. Ces bijoux n'ont-il pas de valeur?

- Si, Majesté, ces bijoux sont très précieux, mais pour les autres. Quant à moi j'aime mieux être avec vous. Car pour moi, c'est vous qui êtes tout ce qu'il y a de plus cher au monde.

Cette histoire s'applique bien au cas de ces martyrs qui pouvaient profiter de tous les honneurs et de tous les biens de ce monde, jouissant pleinement de la vie, mais préférant rester fidèle à leur Bien-Aimé, le fondateur de la foi qu'ils avaient embrassée et sacrifier joyeusement leur vie par amour de Lui.

Ce soir, je vais vous lire quelques pages de l'histoire de ces martyrs (Extrait de " Dawn Breakers").

Il s'agit de l'un des héros de la foi bahá'ie qui jouissant d'un grand respect à la cour du Shah, mais aux yeux de qui de tels honneurs n'avaient pas la moindre valeur, car ce qui pour lui était tout ce qu'il y a de plus cher c'était la Foi.

Il s'agit de HAJI SULAYMAN KHAN.

Il était le fils de l'un des officiers au service du père de Muhammad Shah.

Haji Sulayman Khan montra dès ses premières années un détachement marqué pour le rang et la fonction publique. A partir du jour où il embrassa la Cause du Báb (Précurseur de la foi bahá'ie) le monde dans lequel son entourage était plongé suscita sa pitié et son dédain. La vanité de leurs ambitions ne lui était que trop évidente. Alors qu'il était tout jeune, il sentit un ardent désir de s'échapper du tumulte de la capitale et de chercher refuge dans la sainte cité de Karbilá. Là il rencontra Siyyid Kàzim (érudit qui préparait ses élèves pour la venue du Báb) et devint l'un de ses adeptes les plus fervents.

La piété sincère, sa frugalité et son amour de la solitude étaient quelques-uns des principaux traits de son caractère.

Il séjourna à Karbilá jusqu'au jour où l'appel du Báb lui parvint par le truchement de deux de ses amis les plus intimes. Il embrassa avec enthousiasme le nouveau message. Plus tard, durant le pèlerinage du Báb à la Mecque, il le rencontra lui-même.

Afin de se joindre aux défenseurs du fort de Tabarsi, il quitta Karbilá pour Tihrán, mais arriva trop tard et ne put les rejoindre à temps. Il resta donc dans la capitale et continua à porter le genre d'habit qu'il s'était choisi à Karbilá. Le petit turban qu'il avait sur sa tête et la tunique blanche qui cachait son abà (manteau sans manches) noir ne plaisaient guère à Amir Nizam, le premier ministre qui ne pouvait pas admettre qu'un fils d'officier s'habille de cette façon.

Il l'obligea donc à se débarrasser de ces vêtements et à endosser un habit militaire comme son père. Il alla même plus loin en insistant pour qu'il accepte un poste dans l'administration gouvernementale. Mais Sulayman Khàn refusa catégoriquement.

Il passait la plupart de son temps en compagnie des disciples du Báb, particulièrement avec ceux qui avaient survécu aux événements de Tabarsi. Il les entourait d'un soin et d'une amabilité vraiment étonnants. Lui et son père étaient si influents à la cour du Shah, que le premier ministre, malgré le massacre du Báb, non seulement lui épargna la vie, mais s'abstint effectivement de toute acte de violence à son égard.

Bien qu'il se trouvât à Téhéran lorsque les sept compagnons du Báb qui étaient ses amis les plus intimes furent exécutés, personne n'osa demander son arrestation. Même à Tabriz où il était allé dans le but de sauver la vie du Báb, personne parmi les habitants de cette ville n'osa lever le petit doigt contre lui.

Amir Nizam qui était parfaitement au courant de toutes ses activités, et de tous les services qu'il rendait à la Cause du Báb, préféra ignorer ses actes plutôt que de précipiter un conflit entre lui-même et son père.

Voyant qu'il était arrivé à Tabriz trop tard pour sauver le vie du Báb, Sulayman Khàn décida d'arracher des mains de l'ennemi les restes du Báb, fût-ce au prix de sa propre vie.

Le Kalantar (le maire) qui était un de ses amis lui conseilla d'attendre et de suivre ses conseils plutôt que de s'exposer à ce qui était pour son ami la mort certaine.

C'est donc par l'intermédiaire de l'un des hommes du Kalantar qu'il réussit, au milieu de la nuit, à emporter les restes du Báb du bord du fossé, où ils avaient été jetés, puis pour aller les cacher dans une usine dont le propriétaire était l'un des croyants. Plus tard, il les transporta en un lieu plus sûr et finalement à Tihrán, conformément aux instructions de Bahá'u'lláh.

Après l'attentat contre la vie du Shah toute la communauté des disciples du Báb fut injustement accusée de complot et subit de terribles massacres. Et l'une des victimes de ce massacre fut Haji Sulayman Khàn, dont le martyr et ses circonstances furent racontées par Kad Khuda (chef de quartier de la ville ou chef de village).

"Moi et mes hommes - dit-il - reçûmes l'ordre d'acheter neuf chandelles pour les introduire nous-mêmes dans les trous profonds que nous devions faire dans la chair de Haji Sulayman Khàn. On nous dit, d'ailleurs, d'allumer toutes ces chandelles, aux battements des tambours et au son des trompettes de conduire la victime à travers le marché jusqu'au lieu de son exécution. Là, nous reçûmes l'ordre de couper son corps en deux parties dont chacune devait être suspendue par nos soins de chaque côté de la Porte Naw. Ce fut d'ailleurs Haji Sulayman Khàn lui-même qui avait choisi cette façon d'être exécuté".

Auparavant, Hajibu-d-Dawlih (chef de police de la cour) avait été chargé par le Shah de se renseigner sur la complicité de l'accusé et au cas où son innocence aurait été constatée de le décider à rejeter sa foi: s'il acceptait, il fallait lui épargner la vie. Dans le cas contraire, il devait être mis à mort de la façon qu'il désirerait.

Les investigations de Hajibu-d Dawlih le convainquirent de l'innocence de Haji Sulayman Khan.

L'accusé, dès qu'il fut informé des instructions de son souverain, s'exclama avec joie: "jamais aussi longtemps que du sang coulera dans mes veines, je n'accepterai de rejeter ma foi en mon Bien-Aimé! Ce monde que " le Commandeur des fidèles (titre de Ali l'Imam qui a succédé au Prophète Muhammad) a comparé à un cadavre en décomposition ne m'éloignera jamais du Désir de mon coeur"

On lui demanda la façon dont il désirait être exécuté. "Percez des trous dans ma chair" répondit-il " et placez dans chaque blessure une chandelle. Allumez neuf chandelles sur tout mon corps et conduisez-moi dans cet état à travers les rues de Tihrán. Appelez la foule à venir être le témoin de la gloire de mon martyre. Peut-être le souvenir de ma mort laissera-t-il une empreinte dans leur coeur et les aidera-t-il au moment où il se souviendront de l'intensité de ma tribulation, à reconnaître la Lumière que j'ai embrassée. Après mon arrivée au pied de la potence et la dernière prière que j'aurais faite au cours de ma vie terrestre, coupez mon corps en deux et suspendez mes membres de chaque côté de la porte de Tihrán, pour que la foule qui passera sous elle puisse être témoin de l'amour que la foi du Báb avait installé dans le coeur de ses disciples et pour que cette foule puisse voir les preuves de leur dévotion"

"Hajibu-d Dawlih dit à ses hommes de se conformer aux voeux exprimés par Haji Sulayman Khàn et me chargea de le conduire à travers le marché jusqu'au heu de son exécution. Au moment où ils se préparaient à enfoncer leur poignard dans sa poitrine, Haji Sulayman Khàn fit un brusque mouvement pour arracher l'arme de leurs mains tremblantes afin de l'enfoncer lui-même dans sa chair".

- Pourquoi vos mains tremblent-elles, pourquoi craignez vous, pourquoi hésitez-vous? s'écria-t-il en avançant son bras pour s'emparer du poignard. "Laissez-moi le faire moi-même, et allumer les chandelles moi-même".

De crainte qu'il ne nous attaquât au moyen de l'arme dont il voulait s'emparer, j'ordonnais à mes hommes de ne pas céder à sa demande et je leur dis de lui attacher les mains derrière le dos.

"Laissez-moi - supplia-t-il, vous montrer les endroits où je veux que vous enfonciez votre poignard. Et je ne vous demanderai rien d'autre.

Il leur dit de lui percer deux trous dans la poitrine, deux dans les épaules, un dans la nuque et quatre autres dans le dos, au total neuf.

Avec un calme stoïque il endura ces tortures. La fermeté se lisait dans ses yeux. Tandis qu'il gardait un silence mystérieux et ininterrompu, ni le hurlement de la multitude, ni la vue du sang qui coulait sur tout son corps, ne purent le décider à rompre le silence.

Impassible et serein, il resta ferme jusqu'à ce que les neuf chandelles furent mises en place et allumées.

Lorsque tout fut achevé en vue de sa marche vers la scène de sa mort, il s'avança droit comme une flèche, avec une inflexible force d'âme, rayonnant de son visage, entraînant la foule qui se pressait autour de lui, vers l'endroit où il devait voir la fin de son martyre.

De temps en temps il s'arrêtait, et regardant les spectateurs déconcertés, il s'écriait: "quelle plus grande pompe et quel plus grand faste que ce qu'on voit aujourd'hui, lorsque j'avance vers la couronne de gloire! Glorifié soit le Báb qui peut susciter une telle dévotion du sein de ses amants et qui peut le nantir d'un tel pouvoir".

Parfois comme enivré par la ferveur de cette dévotion, il s'exclamait: "Dans le passé quand on a jeté Abraham au feu, à l'heure de l'agonie il supplia Dieu d'alléger ses souffrances. Et il entendit une voix du ciel qui disait: "O feu puisses-tu être frais et que la paix soit sur Abraham ! " Mais ce Sulayman s'écria du fond de son coeur ravagé par le feu: "Seigneur, Seigneur, que ton feu brûle sans cesse en moi et fais que sa flamme consume mon être".

Comme son regard tombait sur la cire pétillante dans ses blessures, il éclata dans un accès de délice effréné: "si seulement Celui dont la main a enflammé mon âme pouvait être là pour voir mon état". Ne croyez pas que je suis enivré par le vin d'ici bas " cria-t-il à la grande foule qui restait frappée de stupeur à la vue de son comportement "c'est l'amour de mon Bien-Aimé qui m'a rempli l'âme et qui fait que je me sens doté d'une souveraineté que les rois peuvent m'envier".

"Je ne puis me souvenir des exclamations de joie qui lui sortaient de la bouche au moment où il s'approchait de sa fin. Tout ce que je me rappelle ce sont quelques unes des paroles émouvantes qu'il fut porté à adresser à la foule des spectateurs à son heure d'exaltation. Les mots me manquent pour décrire l'expression de ce visage, ou l'effet de ses paroles sur la foule".

"Il se trouvait encore dans le bazar lorsqu'une brise vint attiser le feu des chandelles fichées sur sa poitrine. Comme elles fondaient rapidement leur flamme atteignit bientôt le niveau des blessures dans lesquelles elles avaient été enfoncées. Nous qui suivions à quelques pas derrière lui, pûmes entendre avec netteté le grésillement de sa chair. La vue du sang coagulé et du feu qui couvrait son corps, au lieu de le faire taire, semblait augmenter son enthousiasme. On pouvait encore l'entendre, cette fois s'adresser aux flammes, alors que celles-ci dévoraient l'intérieur de ses plaies:

"vous avez depuis longtemps perdu votre agressivité, ô flammes et avez été dépourvues de votre pouvoir de me faire souffrir. Dépêchez-vous, car de vos langues de feu je peux entendre la voix qui m'appelle vers mon Bien-Aimé"

La paix et la souffrance semblaient avoir disparu dans l'ardeur de son enthousiasme. Enveloppé de flammes, il marchait comme un vainqueur vers la scène de sa victoire. Il avançait au milieu de la foule excitée comme un flambeau au milieu des ténèbres qui l'entouraient. En arrivant au pied de la potence il lança à nouveau un dernier appel à la foule des spectateurs: "ce Sulayman que vous voyez devant vous en proie à ce feu et à ce sang ne jouissait-il pas jusqu'à ces derniers temps des honneurs et des richesses que le monde peut conférer? Qu'est-ce qui a pu le faire renoncer à cette gloire terrestre et à accepter en échange une si grande humiliation et une telle souffrance?"

Se prosternant alors en direction du tombeau de l'Imam Zadeh Hasan, il murmura certaines paroles en arabe que je ne pus comprendre.

"Mon oeuvre à présent est achevée - cria-t-il au bourreau, dès que sa prière fut terminée " Viens et fais la tienne !"

Il était encore en vie lorsqu'on coupa son corps en deux au moyen d'une hache. La louange de son BienAimé, malgré les incroyables souffrances, se lisait sur ses lèvres aux derniers moments de sa vie.

A ce récit que nous trouvons textuellement dans le livre de l'historien Nabil, livre intitulé "Dawn Breakers" ajoutons un court extrait du livre "Les récits d'un voyageur":

L'extraordinaire héroïsme avec lequel Sulayman Khàn supporta ces tortures effroyables est réellement remarquable, et j'ai entendu à maintes reprises, les gens dire qu'il ne cessait durant la longue agonie qu'il endura, de manifester sa joie pour l'honneur du martyre qu'il avait acquis.
Il chantait même des vers parmi lesquels celui-ci Par la voie de Shiraz Je reviens maintenant Avec des airs et des grâces C'est la folie de l'amant "Pourquoi ne danses-tu pas " lui demandèrent les bourreaux avec ironie, puisque tu trouves la mort si agréable?", "Danse donc, Sulayman - s'écria-t-il et il se mit à danser et à chanter. "Les tresses de l'Ami je les ai dans une main et dans l'autre c'est une coupe que je tiens. C'est ainsi que je danse. J'en prends plaisir. Je n'ai pas d'autre désir."


Maison d'Éditions Baha'ies - D/1974/1547/5xxxxxxxx



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8. FASCICULE 8 - vivre et aimer ne font qu'un

A la famille Ghaznavi

PRÉFACE

"L'amour est la cause réelle de la vie. D'autre part, la séparation conduit à la mort. Dans le monde de la création matérielle, par exemple, toutes les choses doivent effectivement leur vie à l'unité. Les éléments dont se composent le bois, le minéral et la pierre sont retenus ensemble par la loi de l'attraction. Si cette loi cessait un instant d'agir, ces éléments ne resteraient pas assemblés ; ils se sépareraient et l'objet cesserait d'exister sous cette forme particulière. La loi de l'attraction a réuni certains éléments pour former cette belle fleur. Mais quand cette force d'attraction cessera d'agir au coeur de la fleur, elle se décomposera et cessera d'exister en tant que fleur.

Il en est ainsi du grand corps que constitue l'humanité. Les lois merveilleuses de l'attraction, de l'harmonie et de l'unité assurent la cohésion aux éléments de cette admirable création.

Il en est de même du tout ou de ses parties: qu'il s'agisse d'une fleur ou du corps humain, quand le principe de l'attraction se retire l'homme ou la fleur cesse de vivre. Il est donc clair que l'attraction, l'harmonie, l'unité et l'amour sont les causes de la vie, tandis que la répulsion, la discorde, la haine et la séparation conduisent à la mort."

Ces paroles ont été prononcées il y a presque septante ans à Paris par `Abdu'l-Bahá, interprète des enseignements bahá'is.

Aujourd'hui, plus que jamais on en saisit toute l'importance, car on voit que pour vivre l'humanité n'a d'autre choix que de s'unir. Et comme l'unité est la manifestation extérieure de l'amour, il serait plus juste de dire que pour vivre il faut s'aimer.

C'est la raison pour laquelle l'auteur de ce fascicule composé de neuf conférences données sur la vie et l'amour a choisi comme titre pour l'ensemble " Vivre et aimer ne font qu'un".


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8.1. Mille façons d'aimer

Il y a un très ancien livre qui s'appelle le Talmud. Ce livre est plein de sagesse et de beaucoup d'histoires instructives.

Je vals vous en raconter une ce soir.

Le livre en question dit que le site du Temple de Salomon était anciennement un champ légué par un père à ses deux fils qu'il aimait profondément. Les deux garçons ayant labouré et cultivé ensemble le champ en question en retirèrent une bonne récolte. Puis chacun des fils estimant que l'autre a travaillé plus que soi-même et que, par conséquent, il mérite plus de la moitié de la récolte, une nuit, il emporte de son entrepôt autant de gerbes qu'il peut afin de les placer en cachette dans le dépôt de son frère.

A mi-chemin ils furent étonnés de se rencontrer chacun chargé de gerbes de blé. Devinant l'intention l'un de l'autre, ils jetèrent à terre leurs fardeaux et les larmes aux yeux ils s'embrassèrent.

Le Talmud dit que c'est sur cette terre consacrée par les larmes d'amour et l'esprit de fraternité que le Temple de Salomon fut érigé.

C'est une très belle histoire de l'amour entre deux frères.

Mais qu'est-ce qu'il faut entendre par le terme frère? Le dictionnaire donne cette définition: "Deux êtres humains sont appelés frères s'ils ont le même père".

Et qu'est-ce qu'un être humain? Qu'entend-on lorsqu'on dit: "c'est un homme, c'est vraiment un homme"? Est-ce un homme parce qu'il a des yeux, des oreilles ou d'une manière générale cinq sens? Sûrement pas, étant donné que l'animal possède ces mêmes cinq sens, souvent même plus perfectionnés que ceux de l'homme.

Qu'est ce qui donc distingue l'homme de l'animal? Ce sont ses qualités morales, ses attributs spirituels. C'est donc le point de vue spirituel qui doit l'emporter quand on veut définir l'homme. Et son véritable père est celui qui est à l'origine de ses qualités spirituelles, celui qui, pour ainsi dire, lui donne naissance au point de vue spirituel.

Vu sous cet aspect l'homme n'a comme père que Dieu seul. C'est Dieu qui est notre Père à tous. Nous avons donc tous un même Père qui est Dieu ; nous sommes tous des frères habitant la même maison (la planète) sous le même toit (le voûte des cieux). La seule différence parmi les frères c'est qu'il y en a qui sont comme des enfants, il faut les traiter comme on traite les enfants. Il y en a qui sont comme des malades, il faut les soigner ; il y en a qui sont comme des gens peu instruits, il faut leur donner plus d'instruction, et tout cela sans rejeter qui que ce soit de notre famille, sans exclure qui que ce soit de la famille humaine.

Ce n'est pas là le langage que pouvait tenir la religion dans la passé. Et la raison en est bien simple. C'est que l'humanité se trouvait encore au stade de son enfance, et ne pouvait pas encore comprendre un tel langage. Il en résulte que par le terme "frère" on entendait uniquement les coreligionnaires. Ainsi, par exemple, selon l'Évangile celui qui obéissait à l'Église était un frère, s'il désobéissait, c'était un païen (Mat.18/17).

Il en était de même dans l'islam, où il est dit "les musulmans sont des frères".

Mais dans la foi bahá'ie, stade actuel de l'évolution de la religion, tous les habitants de la planète sont des frères.

Ceci dit, voyons comment un bahá'i s'efforce de mettre en pratique cet amour fraternel dont parle l'histoire du Talmud.

Cet amour commence d'abord au sein du foyer familial, où en premier lieu il s'agit de l'amour entre les époux.

De nos jours on confond cet amour avec les relations sexuelles, oubliant le fait que l'appétit sexuel provoque un intérêt passionné pour le corps, tandis que le véritable amour tout aussi passionnément s'intéresse à la personne tout entière avec son caractère, son tempérament et ses goûts.

Un tel amour implique qu'on se connaisse avant de se marier, condition primordiale dans le mariage bahá'i, condition qui n'est généralement pas remplie dans notre société actuelle. On se marie sans se connaître et, par conséquent, sans s'aimer vraiment ; la satisfaction sexuelle l'emporte sur toute autre considération.

Si, dans le passé, on cherchait à aimer sans tomber dans la luxure, aujourd'hui on veut assouvir sa sexualité sans aimer. On juge l'amour du partenaire par le degré de sa volupté. Les effets néfastes d'un tel jugement se font ressentir quand on avance en âge, car avec l'âge la femme perd son charme, et l'homme ne garde pas la même passion qu'au début du mariage.

Dans le monde d'aujourd'hui le mariage " coup de foudre " sans qu'on se connaisse, sans qu'il y ait vraiment amour, finit souvent par être considéré comme une folie.

Ginette demande à son amie mariée:

"Qu'est-ce que tu penses d'Oscar?"

"C'est un fou" répond son amie.

"Figure-toi qu'il veut se marier avec moi".

"Et bien tu vois".

Et ce sont précisément de tels mariages conclus sans amour véritable entre les futurs conjoints qui finissent par des divorces, ce qui constitue à son tour un fléau social.

Il faut donc, selon la foi bahá'ie, qu'avant le mariage on se connaisse, on se comprenne.

La connaissance vient avant l'amour.

La tradition symbolise les vertus sous forme d'anges qui sont au nombre de neuf. Et parmi ces anges la première place est occupée par l'ange de la connaissance et la seconde par celui de l'amour.

La connaissance précède donc l'amour. On doit donc avant tout s'efforcer de se connaître pour voir s'il y a similitude de goûts d'habitudes, de but dans la vie...

C'est cette similitude qui permet que non seulement, l'amour soit ressenti, mais que cet amour croisse avec le temps. Le mariage est un être vivant, et, en tant que tel il doit croître.

Remarquez qu'il s'agit de la similitude et non pas de l'identité des goûts. L'identité est impossible, car tout être humain, selon la foi bahá'ie, est unique à tous les points de vue.

Disons en passant que l'un des moyens pour se connaître c'est de s'efforcer de connaître les beaux-parents. Car de même que les parents laissent un héritage matériel, la nature a voulu qu'ils laissent un héritage psychologique.

Mais comme il est impossible de se connaître parfaitement, de même qu'il est impossible d'arriver à l'identité des goûts et du caractère, il faut s'efforcer de rester objectif, c'est-à-dire accepter son partenaire (ou sa partenaire) tel qu'il est et non pas tel qu'on voudrait qu'il soit. Le mari doit céder autant qu'il faut de ses préférences, et la femme, de son côté doit faire le même effort.

L'objectivité est donc la deuxième moyen d'assurer l'amour conjugal.

Un troisième moyen pour assurer l'amour conjugal c'est de mettre des lunettes roses. Les partenaires doivent s'appliquer à voir le bon côté des choses plutôt que les mauvais.

"Ma femme - disait un mari - a deux habitudes qui me gênent. Un jour je lui ai proposé de s'en débarrasser, en échange je chercherai à me guérir de deux défauts de son choix."

"Je n'en connais aucun - m'a-t-elle répondu. Après cela comment pouvais-je penser à ses défauts".

Ce n'est pas que monsieur n'ait aucun défaut. Il en avait sûrement, mais elle y fermait les yeux, ce qui a poussé son mari à en faire autant.

Voilà un merveilleux exemple à suivre. Par contre, ce qu'il faut absolument éviter, c'est de chercher des défauts, et ce qui est pire encore, c'est d'avoir des soupçons.

En voilà un exemple:

Un monsieur décide de se présenter aux élections municipales.

"Tu es fou - lui dit sa femme - Personne ne votera pour toi. Tu n'auras que deux voix".

"Voyons chérie, il faut toujours être optimiste. Et bien tu verras".

Le soir du scrutin on fait les comptes. Le candidat a trois voix.

"Ah ! s'écrie sa femme - je savais bien qu'il y a une autre femme dans ta vie".

De tels soupçons dans la vie familiale sont réellement impardonnables. Et le Prophète Muhammad a raison en disant: "Certains soupçons sont des péchés".

Un quatrième moyen pour contribuer à l'amour conjugal c'est de s'interdire les propos durs et de ne tenir qu'un langage doux.

Ce quatrième moyen est en réalité indissolublement lié au troisième. Car lorsqu'on découvre une bonne qualité, il faut en parler. Les Arabes disent: "On reconnaît un homme par ses deux petits organes, son coeur et sa langue".

En effet quand on a un coeur pur on ne voit que le bon côté des choses, et on en parle quand on a une langue douce.

Lorsqu'on adopte une telle attitude on peut dire que le ménage devient un petit paradis créé par les époux et les mots qu'ils échangent.

Un cinquième moyen pour contribuer à l'amour conjugal c'est la consultation. Les Écrits bahá'is insistent sur la capacité de se consulter. Savoir se consulter pour les bahá'is est une vertu, qu'ils s'efforcent d'acquérir aussi bien au sein du foyer familial, que lors de toutes leurs réunions.

A noter qu'habituellement la consultation n'est qu'une façon respectueuse de demander à quelqu'un d'être de notre avis. Nous cherchons uniquement la confirmation de notre opinion, alors qu'il nous serait plus profitable de connaître un point de vue différent.

`Abdu'l-Bahá dit que l'étincelle de vérité jaillit du choc des opinions, et il nous demande de nous consulter les uns les autres même dans les petits problèmes qui surgissent dans la vie.

Un tel conseil s'applique plus particulièrement au cas des époux, car ce sont deux personnes qui étant plus souvent ensemble qu'avec d'autres, ont inévitablement plus de petits problèmes, grâce auxquels elles apprennent de mieux en mieux la façon dont on doit se consulter.

Disons en passant que l'un de ces petits problèmes est le problème d'argent, dont la solution est dans le fait de faire caisse commune et de se consulter.

Un sixième moyen pour contribuer à l'amour conjugal c'est la générosité.

En faisant caisse commune chacun doit s'efforcer de laisser une part plus grande pour l'autre, cette part étant assimilable aux gerbes que chacun des frères de notre histoire décida de déposer dans l'entrepôt de l'autre.

Un septième moyen pour contribuer à l'amour conjugal c'est le service, ce qui est la manifestation même de l'amour.

Là encore il faut qu'il y ait compétition entre les époux, compétition dans le genre de celle des deux frères: chacun doit s'efforcer de rendre plus de services que l'autre. Que le mari lave la vaisselle, par exemple, cela ne fait que contribuer à plus d'affection et d'amour au sein du foyer familial.

Notons, en passant, que les bahá'is portent une bague dont l'inscription leur rappelle cet esprit de service.

Un huitième moyen pour contribuer à l'amour conjugal c'est que les partenaires se soucient de leur santé, étant donné que leur moral dépend de leur santé, et que le moral joue un grand rôle dans les relations conjugales.

Pour les bahá'is le maintien de la santé est un devoir qu'ils remplissent en s'imposant volontairement une discipline alimentaire garantissant la santé corporelle. Ainsi, par exemple, ils s'abstiennent des boissons alcoolisées. Et l'on connaît assez la responsabilité de l'alcool dans les scènes de ménage et la désunion conjugale qui en résulte.

Un neuvième moyen pour contribuer à l'amour conjugal, moyen sublime, c'est le recours à la prière, autrement dit la demande adressée à Dieu pour qu'Il dissipe les malentendus et instille l'amour dans les coeurs.

Lorsqu'un bahá'i face aux frictions inévitables démesurément grossies, voit l'amour conjugal s'anémier, il a sans hésitation recours à la prière. Et comme il croit à l'effet de cette prière, généralement il obtient satisfaction.

Pour nous résumer disons que l'union conjugale est une plante qui demande des soins constants ; faute d'un effort mutuel cette plante pourrait un jour dessécher.

Ces soins peuvent se manifester de mille façons ; nous en avons cité neuf à titre d'exemple ; les voici résumées:

1° Se connaître.
2° Etre objectif.
3° Etre optimiste.
4° Recourir au langage doux.
5° Se consulter.
6° Etre généreux.
7° Servir.
8° Veiller à sa santé.
9° Prier.

Indiscutablement toutes ces considérations s'appliquent à l'amour paternel, maternel, filial et, d'une manière générale, à l'amour du prochain.

Ce qu'on appelle de nos jours le conflit des générations vient en principe de ce qu'on n'observe pas ces règles élémentaires que nous venons de citer.

Pour éviter ces conflits et créer une ambiance d'amour au sein du foyer familial, les parents doivent connaître et comprendre leurs enfants. Les parents doivent être objectifs, sans jamais s'efforcer de modeler leurs enfants conformément à l'image qu'ils se sont faite dans leur esprit. Les parents doivent toujours voir le bon côté dans le comportement de leurs enfants et les encourager. Les parents doivent se consulter avec leurs enfants, ce qui non seulement leur apprendra comment on doit se consulter, mais en plus, leur permettra de prendre conscience de leur dignité humaine.

Les parents doivent être plus généreux pour leurs enfants que pour eux-mêmes. Les parents doivent par l'exemple apprendre à leurs enfants la serviabilité. Les parents doivent, toujours par l'exemple, apprendre à leurs enfants comment on doit veiller à la santé. Les parents doivent prier pour leurs enfants, et surtout, humblement écouter la prière des enfants, ce à quoi ceux-ci sont très sensibles.

Si les cas de divorce sont rares dans les ménages bahá'is c'est que les conjoints s'efforcent, dans la mesure du possible, d'observer les règles élémentaires dont nous avons cité quelques-unes.

Et nous arrivons à l'amour du prochain, en général. La encore il faut recourir à ces mêmes moyens que nous venons de mentionner.

Mais dans les relations sociales c'est surtout par le TRAVAIL qu'on peut et on doit manifester son amour à l'égard du prochain.

Et je précise bien: on peut et on doit. On peut, car le travail c'est l'amour rendu visible. On doit, parce que notre existence même dépend du produit du travail de notre prochain. Notre santé ne dépend-elle pas de notre alimentation, et par conséquent, de la qualité du travail des fournisseurs des aliments?

Sommes-nous aujourd'hui sûrs qu'on nous nourrit d'aliments sains?

Le client flaire le repas qu'on vient de lui apporter, et fait la grimace. Le garçon fronce le sourcil et demande

"La composition du menu ne vous plaît-elle pas"

"Ce qui me déplaît c'est sa décomposition " répond le client.

Mais notre histoire ne finit pas là. Car le consommateur ne se contente pas de faire la grimace en signe de protestation. Il décide de se venger quand le restaurateur s'adresse à lui pour acheter un vêtement, par exemple. Et il l'assure

"Ce pardessus vous va comme un gant".

"C'est vrai. Les manches m'arrivent jusqu'aux bouts des doigts", répond le restaurateur plus malin que le vendeur.

Et la compétition continue entre les deux soi-disant " frères", compétition dans un esprit opposé à celui de l'histoire du Talmud.

Selon les Écrits bahá'is si un homme dans l'exercice de son métier ne s'en tient pas à l'esprit de justice, il est comparable à un roi injuste. Un commerçant, par exemple, qui vend sa marchandise trop cher est à blâmer autant qu'un souverain injuste. Dans un cas comme dans l'autre il s'agit de l'abus du pouvoir.

La tromperie par le travail est un autre fléau de notre siècle. Et l'on peut combattre ce fléau par un coup de baguette magique. La seule solution, selon les bahá'is est dans l'éducation.

Et dans cette éducation le rôle principal est joué par la religion et non par la science. Etant donné que c'est précisément là où la science est très avancée qu'on trompe les uns les autres plus que dans le pays en voie de développement.

L'éducation religieuse bahá'ie consiste à considérer le travail consciencieux comme signe de la foi. Or on adhère à la foi bahá'ie quand on se sent en mesure de s'imposer volontairement, par amour pour l'humanité, l'observance d'un certain nombre de lois et de principes. Partant de là celui qui entre dans la communauté bahá'ie s'engage à faire consciencieusement son travail et à éduquer ses enfants dans ce même esprit.

C'est cette éducation qu'on donne dans les écoles bahá'ies. A supposer qu'on en fasse autant dans toutes les écoles du monde, d'ici une vingtaine d'années ce fléau disparaîtrait complètement. On y arrivera tôt ou tard, en attendant il faut bien commencer, car pour tout il y a un commencement, et les bahá'is sont les premiers à commencer.

Tout en donnant une telle éducation à leurs enfants, les bahá'is eux-mêmes s'appliquent à faire leur travail aussi consciencieusement que possible, s'efforçant ne fut ce que de cette manière de justifier le titre qu'ils ont adopté volontairement.

Ce titre a été défini par `Abdu'l-Bahá en 1912 quand il a débarqué à New York pour une tournée de conférences en Amérique.

En réponse à la question d'un représentant de la presse qui lui demande qu'est ce qu'un bahá'i, il répondit:

"Etre bahá'i signifie simplement aimer tout le monde, aimer l'humanité et s'efforcer de la servir, travailler pour la paix et la fraternité universelle".


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8.2. Quelle épreuve, ce langage imagé

Qu'est-ce que tu fais, papa?", demande une petite fille à son père qui était pasteur.

"J'écris un sermon pour dimanche prochain".

"D'où est-ce que tu sais ce que tu dois écrire?"

"Dieu me le dit".

"Papa, si c'est Dieu qui te le dit, pourquoi alors effaces-tu constamment ce que tu écris?"

Cette histoire nous rappelle tout ce qui a été écrit et effacé par les différents auteurs concernant l'Apocalypse de St. Jean. Si ces écrits ont été effacés c'est que les événements ont démenti les interprétations qu'ils donnaient anticipativement.

La raison en est bien simple: l'Apocalypse étant d'origine divine, il n'y a que dans une source d'origine divine qu'on peut en trouver l'interprétation. Ce qui est précisément le cas de la révélation bahá'ie, dans les Écrits de laquelle on trouve l'interprétation du langage imagé de l'Apocalypse.

Combien ces interprétations correspondent à la vérité et sont justifiées par le temps, c'est ce que nous allons voir en étudiant ce soir deux chapitres seulement de l'Apocalypse.

Si, généralement, le nom de cet ouvrage reste comme le symbole d'allégories obscures et effrayantes, ce n'est pas le cas pour les bahá'is. Car grâce à leurs Écrits ils ont l'explication de toutes les allégories ; et non seulement ils ne sont pas effrayés par les prédictions de ce livre, mais, bien au contraire, ils y voient l'annonce de la Bonne Nouvelle du Jour Promis.

St. Jean commence le quatrième chapitre de son livre en disant: "Après cela, je regardai, et voici, une PORTE était ouverte dans le CIEL". Ap. 4/1.

Selon l'interprétation bahá'ie le ciel est le symbole de tout ce qu'il y a de plus élevé. C'est une allusion au monde divin. De même que toutes les bontés matérielles: l'eau, la lumière, la chaleur... viennent du ciel, toutes les bontés spirituelles viennent du monde divin.

Cette interprétation du terme ciel est confirmée par cette parole de Jésus qui dit qu'il est descendu du ciel. (Jean 6/51). En effet, on sait bien que Jésus en tant qu'homme est venu du sein de Marie, mais en tant que messager de Dieu il est venu du monde divin.

Que signifie le terme la PORTE?

Pour comprendre le mot CIEL nous avons eu recours au langage imagé des Écritures. Logiquement nous devons en faire autant pour comprendre la signification du mot PORTE.

Ouvrons donc la Bible. Nous y trouvons cette parole de Jésus qui dit:

"Je suis la porte". (Jean 10/9).

Jésus en tant que messager de Dieu s'attribue le titre de LA PORTE. Par conséquent lorsque St. Jean parle d'une PORTE ouverte dans le CIEL, il entend un messager de Dieu comme Jésus.

Mais il ne peut s'agir de Jésus lui-même, étant donné qu'en réalité ce n'est pas St. Jean qui parle, mais c'est Jésus qui dicte à St. Jean cette prophétie concernant " des choses qui doivent arriver". De plus il est parlé d'UNE Porte et non de LA Porte.

Ce messager de Dieu c'est le Báb précurseur de la foi bahá'ie. St. Jean, par la suite, à sept reprises prédit la date de son apparition. (Ce qui fera l'objet d'une autre conférence).

Remarquons que le mot même LE BAB traduit en français signifie LA PORTE.

Qu'est-ce que le Báb voulait exprimer par ce terme?

A ce propos le Professeur E. G. Brown écrit

"Il voulait exprimer par le terme "Báb" qu'il était la "Porte", la voie d'accès de la grâce menant à un certain Etre encore caché derrière le voile de Gloire...". Et c'est ce que précisément on peut déduire des révélations ultérieures de St. Jean, qui continue ses prédictions en disant

"La première voix que j'avais entendue, comme le son d'une trompette, et qui me parlait, dit: Monte ici, je te ferai voir ce qui doit arriver dans la suite". (Ap. 4/1).

Le terme " le son de la trompette " souligne de plus qu'il s'agit d'une révélation divine. Nous en avons la confirmation dans cette parole de St. Paul

"Le Seigneur lui même... au son de la trompette de Dieu descendra du ciel". (Thés. 4/16).

Ce " son de la trompette " invite St. Jean à monter par la PORTE, c'est-à-dire à reconnaître le rang du Báb pour voir " quelqu'un assis sur le trône et ayant l'aspect d'une pierre de jaspe et de sardoine"

"Et voici, il y avait un trône dans le ciel, et sur ce trône quelqu'un était assis". (Ap. 4/2).

Voyons qui est ce "quelqu'un".

Le trône est le symbole de la souveraineté. C'est le synonyme du rang du messager de Dieu, le Roi spirituel (Titre que Jésus s'est attribué). Il s'agit donc d'un messager de Dieu.

Et quelles étaient les caractéristiques de ce messager de Dieu qui était assis sur le trône?

"Celui qui était assis avait l'aspect d'une pierre de jaspe et de sardoine ; et le trône était environné d'un arc en ciel semblable à de l'émeraude". (Ap. 4/3).

Le jaspe a la couleur du sang, et le sang est le symbole de la force. Ne dit-on pas que Jésus par le sang a délivré l'homme du péché, ce qui signifie que Jésus par sa force spirituelle a permis à l'homme de se débarrasser de ses vices, car l'homme est trop faible pour y parvenir seul sans le recours de cette force.

Dire que l'homme assis sur le trône avait l'aspect d'une pierre de jaspe, c'est-à-dire qu'il avait la même force que Jésus. Quant à la sardoine, c'est une pierre qui se compose de deux couleurs: rouge et blanche. Le rouge symbolise la force et le blanc - la pureté (la moindre tache se voit sur le fond blanc).

Le blanc rayonnant de sa personne signifie que sa doctrine présente la même pureté que celle de Jésus (ou de ses prédécesseurs).

Donc ces deux caractéristiques (le rouge et le blanc) de l'Homme assis sur le trône expriment le fait qu'il s'agit bien d'un messager de Dieu.

Et ce qui confirme cette interprétation du blanc et du rouge, c'est que plus loin (Ap. 7/14) il est dit concernant les élus de Dieu: "ils ont des robes blanchies par le sang". Mais le sang n'est pas blanc pour blanchir, tandis qu'il est logique de dire que la force spirituelle nous blanchit, nous purifie de nos défauts.

Mais il y a une autre interprétation du blanc qui n'est pas moins importante. C'est que dans le blanc il y a sept couleurs (rouge, orange, jaune, vert, blanc, indigo, violet). Et nous en voyons le mystère dans le fait que, selon St. Jean

"Le trône était environné d'un arc-en-ciel semblable à de l'émeraude". or l'arc-en-ciel se compose de sept couleurs, chaque couleur symbolisant une force spirituelle. Cela revient à dire que vers le trône convergent les sept forces spirituelles, ou les sept religions existantes (sabéenne, hindouiste, judaïque, zoroastrienne, bouddhiste, chrétienne, islamique).

D'après cette interprétation la doctrine du messager en question doit être le point de convergence de toutes les religions. (A remarquer que le Larousse du XXe siècle en parlant du " bahá'isme " présente cette religion comme l'aboutissement de toutes les autres).

St. Jean dit que l'arc-en-ciel était semblable à de l'émeraude. Etant donné que physiquement l'arc-en-ciel n'est pas vert, il ne peut s'agir que d'un langage imagé, dont nous allons chercher la signification.

L'émeraude par sa couleur verte symbolise la verdure, et la verdure - le retour du printemps. Par conséquent, si ce qui entourait le trône évoquait la verdure, le printemps, c'est qu'avec ce " Trône" (ce Messager) on sera en présence du Printemps, Printemps spirituel (comme les sept Printemps spirituels qui l'ont précédé).

Cette interprétation est confirmée par la suite de la vision de St. Jean qui dit:

"Devant le trône brûlaient sept lampes ardentes qui sont les sept esprits de Dieu". (Ap. 4/5).

En effet, de quelles sept lumières spirituelles pourrait-il s'agir si ce n'est que de sept lumières spirituelles dégagées par les sept religions que nous avons déjà mentionnées.

D'ailleurs St. Jean ne nous laisse pas le moindre doute puisqu'il dit que c'était les sept esprits de Dieu. Or Dieu n'a pas sept ou huit esprits ; Il ne s'agit que d'un seul esprit qui s'est manifesté à sept reprises par les sept religions apparues jusqu'au Jour promis.

Mais il est temps de répondre à cette question: Qui est cette personne assise sur le trône, cette personne que la Porte (Le Báb) a fait voir à St. Jean dans sa vision?

Qui est cette personne qui " ressemble à un Fils d'Homme" (Ap. 1/13) donc à Jésus, puisque le Fils d'Homme c'est le titre de Jésus?

Qui est cette personne qui est comme le jaspe, donc dotée de la même puissance que Jésus?

Qui est cette personne, ce messager de Dieu, dont la religion se présente aux yeux des historiens impartiaux comme l'aboutissement de toutes les autres religions?

Cette personne, ce messager de Dieu ne peut être que BAHÁ'U'LÀH, Fondateur de la foi bahá'ie, dont le précurseur était précisément le Báb.

Ce qui est remarquable c'est que non seulement la Bible par ses prophéties confirme cette revendication, en présentant à ses lecteurs, pour ainsi dire, la carte d'identité de Bahá'u'lláh avec toutes ses caractéristiques, mais qu'en plus dans toutes les Écritures nous trouvons des prophéties identiques confirmant toujours qu'il s'agit bien de Bahá'u'lláh. Mais ce ne sont pas ces prophéties qui font l'objet de mon exposé de ce soir. On en parlera à une autre occasion.

Pour le moment poursuivons notre étude de l'Apocalypse.

Au fur et à mesure que St. Jean raconte sa vision, il nous donne des détails de plus en plus intéressants.

"Autour du trône je vis vingt-quatre trônes et sur ces trônes vingt-quatre vieillards assis, revêtus de vêtements blancs" (Ap. 4/4).

Encore le blanc qui intervient.

Mais qui sont ces vingt-quatre vieillards? A ce propos `Abdu'l-Bahá dit :

"Dans chaque cycle les élus et les saints ont été au nombre de douze. Au temps de Jacob il y avait ses douze fils ; au temps de Moïse il y avait douze têtes ou chefs de tribu ; au temps du Christ, les douze Apôtres; au temps de Muhammad, les douze Imams. Mais dans cette Manifestation glorieuse il y avait vingt-quatre individus, le double de toutes les autres, car la grandeur de cette Manifestation l'exige". ("Les Leçons de Saint-Jean d'Acre")

Une mise au point. Quand `Abdu'l-Bahá souligne la grandeur du message Bahá'i, il laisse entendre la grandeur du rang de l'homme d'aujourd'hui. Car la grandeur d'un message est en fonction de la grandeur de son destinataire. L'homme d'aujourd'hui n'est plus l'enfant d'il y a deux mille ans, il entre dans le stade de sa maturité.

Après cette mise au point revenons aux révélations de St. Jean qui écrit

"Au milieu du trône et autour du trône il y avait quatre animaux qui rendaient gloire et honneur et action de grâce à celui qui était assis sur le trône". (Ap. 4/7-9).

Selon `Abdu'l-Bahá il s'agit des quatre premiers dirigeants qui se lèveront pour propager la Cause de Bahá'u'lláh (Voir "New Keys to the Book of Revelations").

La suite des révélations de St. Jean donne plus de précisions sur le Báb et Bahá'u'lláh.

"Puis je vis dans la main droite de celui qui était assis sur le trône un livre scellé de sept sceaux". (Ap. 5/1).

Le livre scellé de sept sceaux c'est la Parole de Dieu révélée par les sept fondateurs de religion. Cette parole devait rester scellée jusqu'au " Jour promis", c'est-à-dire jusqu'aujourd'hui.

La Bible le dit clairement:

"Toi Daniel, tiens secrètes ces paroles et scelle le livre jusqu'au temps de la fin". (Dan. 16/4).

Et qui avait le pouvoir d'ouvrir les sceaux?

Selon St. Jean:

"Le lion de la tribu de Juda, le rejeton de David, a le pouvoir d'ouvrir le livre et les sept sceaux". (Ap. 5/5).

Il ne peut pas s'agir de Jésus lui-même. D'abord parce que le véritable auteur de cette prédiction c'est Jésus qui dévoile l'avenir. Et puis Jésus n'ayant utilisé que le langage imagé a promis le langage ouvert pour un autre Jour. Le temps n'est il pas arrivé pour qu'on nous tienne le langage ouvert?

Une fois de plus nous voyons qu'il ne peut s'agir que de Bahá'u'lláh qui était précisément descendant d'Abraham (donc " Rejeton de David"). Et puis c'est Bahá'u'lláh qui a fait ouvrir le sceau d'abord (Et plus tard par ses propres Écrits) par son précurseur le Báb, ce que St. Jean prédit en précisant que le livre a été remis à " l'Agneau immolé"

"Et je vis au milieu du trône... un agneau qui était comme immolé... Il prit le livre. (Ap. 5/6-7).

Cet agneau ne pouvait pas être Jésus pour les mêmes raisons que nous avons déjà mentionnées.

Cet agneau c'est le Báb, qui a inauguré l'Ere Nouvelle en l'an 1260 de l'Hégire, cette date que St. Jean prédit à sept reprises dans ses révélations. Et le Báb a du sacrifier sa vie, comme Jésus-Christ, et pour les mêmes raisons que lui. Seulement le Báb, comme l'Apocalypse l'avait prédit, a été le premier à tenir le langage ouvert. Et il était bien temps pour une humanité destinée cette fois, à s'unir à n'importe quel prix. Cette union implique l'abandon de toutes les causes de la division. Or parmi ces causes il faut citer l'interprétation erronée du langage imagé.

A titre d'exemple nous en citons deux, celui de la résurrection et du paradis, dont le Báb a donné l'interprétation dans les Écrits.

Selon le Báb, par la résurrection il faut entendre la résurrection spirituelle, autrement dit lorsque les qualités spirituelles telles que l'amour, la justice, la charité, reprennent vie chez l'individu, celui-ci ressuscite. Autrement, vivre dans la haine, la tyrannie, la soif de vengeance... ce n'est pas une vie, c'est la mort. Et de ce point de vue on ressuscite par la foi.

Notons en passant que cette interprétation est confirmée par ce que dit St. Paul en s'adressant aux Colossiens convertis au christianisme

"Vous êtes aussi ressuscités en lui et avec lui, par la foi". (Colis. 2/11).

Quant à l'interprétation du terme paradis, selon le Báb, ce n'est pas un lieu où l'on va après la mort. C'est un état d'esprit qu'on arrive à acquérir par l'amour de Dieu, lequel amour, implique l'amour du prochain.

Qu'est-ce que l'amour du prochain? Qui est notre prochain? Ce sera l'objet d'une autre conférence.

Pour le moment étant donné que nous nous aimons les uns les autres, nous n'allons pas attendre la mort pour voir le paradis, ou bien, pour ressusciter à " la fin des temps", nous sommes déjà ressuscités, et nous sommes au paradis, voilà la conception Bahá'ie.


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8.3. En deux pages, une histoire en images

A l'école Bahá'ie, pour notre éducation, nos enseignants racontent toujours des histoires instructives pour en tirer des conclusions morales. Et depuis j'ai pris l'habitude de recourir aux histoires pour développer un sujet. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je commence toujours mes conférences par une petite histoire.

Mais ce soir, je peux m'en passer, car tout mon exposé est une histoire, et pas une petite, mais une grande histoire.

Il s'agit de l'histoire de l'islam raconté par un langage imagé par l'Apocalypse et expliquée par `Abdu'l-Bahá, interprète des enseignements Bahá'is.

En deux pages, l'Apocalypse nous relate sept siècles d'avance, le destin tragique qui allait frapper l'islam, tout en consolant le lecteur par l'annonce de la fin de cette tragédie et le début d'une Ere Nouvelle en l'an 1260 de l'Hégire(1260 de l'Hégire coïncide avec l'année 1844 de l'Ere chrétienne).

Ceci dit, commençons à lire les deux pages en question et voyons comment `Abdu'l-Bahá les interprète.

Au chapitre XI de son Apocalypse, St. Jean dit:

"Alors on me donna un roseau semblable à un bâton à mesurer, et l'ange s'étant présenté me dit: Lève-toi et mesure le temple de Dieu et l'autel et ceux qui y adorent. Mais laisse le parvis qui est hors du temple et ne le mesure pas, car il a été donné aux Gentils et ils fouleront aux pieds la Sainte cité pendant quarante-deux mois". (Ap. 11 / 1-2).

"Ce roseau représente ici le symbole d'un homme parfait et la portée de cette comparaison est la suivante: lorsque l'intérieur d'un roseau est vide et qu'il est débarrassé de tout ce qu'il contenait on peut obtenir de merveilleuses mélodies. Et de même que le chant et le son ne viennent pas du roseau, que la musique vient véritablement du joueur qui souffle dedans, de même cette personne bénie a son coeur saint, libre et vide de tout ce qui n'est pas Dieu, et elle n'est que le compagnon de l'Esprit divin. Voilà pourquoi il le compare à un roseau. Et ce roseau est comme un bâton, c'est-à-dire qu'il est le sauveur des faibles et le soutien des êtres contingents ; c'est le bâton du divin Berger à l'aide duquel il fait paître son troupeau et le conduit dans les prairies du Royaume". "Les Leçons de St. Jean d'Acre " Presses Universitaires de France, Paris.

`Abdu'l-Bahá dit que par le terme " temple de Dieu " il faut entendre la religion de Dieu, car de même que la religion unit les hommes, le temple les réunit en son sein. Le temple est donc le symbole extérieur de la religion.

Quant à l'expression " mesure le temple de Dieu et ceux qui y adorent", il faut entendre le fait de comparer et de juger où en est la religion de Dieu, où en sont ses adeptes par leur comportement et leur façon de penser.

Or la seule personne qualifiée pour un tel jugement est le messager de Dieu-homme " vide de tout ce qui n'est pas Dieu", homme comparable à un roseau, dont l'intérieur est vide, homme parfait.

Et chaque fois que ce messager de Dieu apparaît, il juge où en sont les adeptes de son prédécesseur. C'est un Jour de Jugement. Jésus, par exemple, était la seule personne qualifiée pour juger si les Juifs étaient restés fidèles à Moïse. Et il a jugé en disant:

"Si vous croyiez en Moïse, vous me croiriez aussi, car il a écrit de moi". (Jean 5/46).

Ceci dit, revenons aux versets 1 et 2 du chapitre XI.

Avec les explications que nous venons de donner, il faut entendre par ces versets la prédiction concernant l'apparition d'un nouveau messager (après Jésus puisqu'il s'agit de ce qui va arriver après Jésus). Ses disciples, qui sont des étrangers (Gentils) pour Jérusalem, y viennent afin de conquérir cette ville, ils la fouleront aux pieds, mais ils respecteront le Temple de Salomon, le lieu le plus sacré.

Historiquement c'est exactement ce qui s'est passé quand au septième siècle les adeptes du Prophète Muhammad ont conquis Jérusalem, mais n'ont pas touché au Temple de cette ville.

"Mais - dit `Abdu'l-Bahá - ces versets ont une autre interprétation et une signification symbolique qui est la suivante. La Loi de Dieu comprend deux parties, l'une fondamentale, est spirituelle, c'est à dire a trait aux vertus spirituelles et aux qualités divines, et n'a ni changement ni modification... c'est la foi, le savoir, la certitude, la justice, la piété, la bonté...

La seconde partie de la Loi de Dieu qui a trait au monde matériel, et qui comprend le jeûne, la prière, les exercices du culte, le mariage, le divorce... est modifiée et transformée dans chaque cycle prophétique". "Les Leçons de Saint-Jean d Acre". (P.U.F., Paris).

Et `Abdu'l-Bahá conclut en disant que par le " temple " il faut entendre la partie spirituelle, de chaque religion qui n'est pas touchée par la nouvelle religion. Quant au " parvis extérieur " ou plus généralement la " ville " elle-même, il faut entendre la Loi qui a trait à la vie matérielle, et cette partie est abrogée (négligée, "foulée aux pieds").

Et c'est ce qui s'est passé avec l'apparition de l'islam, qui n'a pas touché aux lois spirituelles du christianisme, mais qui a changé les exercices du culte (le baptême, le carême etc.) avec son pouvoir pour quarante-deux mois. Or, quarante-deux mois c'est 1260 jours. Et chaque jour selon la Bible c'est comme une année (voir Ezéchiel 4/6). D'où une première conclusion: ces nouvelles lois (lois islamiques) qui "fouleront aux pieds" (abrogeront) les lois précédentes dureront 1260 ans. Après quoi logiquement il y a de nouvelles lois, autrement dit, une nouvelle révélation. Et c'est précisément ce qui a eu lieu avec la révélation du Báb, précurseur de la foi Bahá'ie en 1260 de l'Hégire.

Ce qui confirme cette interprétation, c'est le troisième verset du même chapitre:

"Je donnerai à mes deux témoins le pouvoir de prophétiser, revêtus de sacs pendant mille deux cent soixante jours". (Ap. XI/3).

Le terme " témoin " s'applique aux messagers de Dieu, et à ceux qui ont la même autorité de témoigner infailliblement ce qui doit arriver. C'est ainsi que, par exemple, St. Jean appelle Jésus " le témoin fidèle" (Ap. 1/5). Jésus, à son tour, appelle ses Apôtres " mes témoins" (Actes 1/8). Le Prophète Muhammad a également le titre de témoin

"Je t'ai placé comme témoin". (Qur'an 33/44).

Concernant l'interprétation du troisième verset du chapitre XI `Abdu'l-Bahá dit:

"Ces deux témoins sont vêtus de sacs, c'est-à-dire que apparemment ils n'auront pas de vêtements ; autrement dit, au début, aux yeux des autres peuples ils n'ont aucune splendeur, et leur cause ne paraît pas nouvelle, car par son côté spirituel la loi de Muhammad ressemble à celle de Jésus dans l'Évangile, et ses commandements relatifs aux choses matérielles ressemblent, pour la plupart, à ceux de la Torah.

Telle est l'interprétation des vieux vêtements". ("Les Leçons de St. Jean d'Acre").

Et `Abdu'l-Bahá précise que les deux témoins qui devaient prophétiser pendant 1260 ans sont Muhammad et 'Ali qui lui ait succédé.

Notons, en passant, que jusqu'ici nous avons deux prophéties concernant 1260.

Et St. Jean continue:

"Quand ils auront achevé leur témoignage la bête qui monte de l'abîme leur fera la guerre, les vaincra et les tuera". (Ap. XI/7).

Selon `Abdu'l-Bahá cette bête qui monte de l'abîme ce sont les BENI-OMAYADS (Dynastie des Omayades qui régna de 661 à 744.1) qui s'insurgèrent contre la loi de Muhammad et l'autorité d"Ali.

La suite des révélations de St. Jean nous apprend que

"Des hommes d'entre les peuples... verront leurs corps morts pendant trois jours et demi". (Ap. XI/9).

Selon `Abdu'l-Bahá par le terme " corps " il faut entendre la loi de Dieu. Nous trouvons une confirmation de cette interprétation dans l'Évangile, où d'un côté Jésus dit:

"Je suis le pain vivant qui est descendu du ciel". (Jean 6/51).

Et de l'autre côté en montrant le pain il dit:

"Ceci est mon corps". (Luc. 22/19).

Puisque le " pain " est descendu du ciel et que ce " pain " est son " corps", il s'en suit que ce corps est venu du ciel. Ce qui est impossible à admettre, car le corps de Jésus est venu du sein de Marie, et c'est sa Loi qui est venue du ciel. Donc par le terme " corps " il faut entendre sa Loi.

Nous trouvons une autre confirmation de cette interprétation du terme " corps " dans cette parole de St. Paul qui dit " L'Église est son corps". (Ephésiens 1/22).

Or l'Église (le Temple) est synonyme de la Loi de Dieu. Car de même que la Loi de Dieu unit les hommes, le temple les réunit en son sein (ce que nous avons déjà expliqué). Donc selon St. Paul la Loi de Dieu et le corps du Christ ne font qu'un.

Ceci dit revenons aux révélations de St. Jean.

De ce qui vient d'être dit, il résulte que l'expression " corps morts " dont St. Jean parle signifie " Loi morte", "Loi sans esprit". En effet, par suite de ce qu'on fait les Beni-Omayads, la loi islamique a perdu son esprit.

"Les corps morts sont restés exposés pendant trois jours et demi, veut dire que cette loi en apparence on la voyait pendant trois jours et demi, ce qui fait trois ans et demi (Un jour étant équivalent à un an. (Ezéchiel 4/6)) ou quarante deux mois ou 1260 jours (42 x 30 = 1260) ou 1260 ans (Un jour étant équivalent à un an. (Ezéchiel 4/6)).

C'est donc pour la troisième fois que dans l'Apocalypse nous trouvons une référence à l'année 1260.

St. Jean poursuit ses révélations:

"Et ils ne permettront pas que leurs corps morts soient mis dans un sépulcre". (Ap. 11 /9).

En effet, les Beni-Omayads n'ont pas voulu enterrer l'islam, on a gardé les apparences, en observant les enseignements ayant trait à la vie matérielle (jeûne, prière...).

"Mais après trois jours et demi l'esprit de vie de Dieu entra en eux, et ils se relevèrent sur leurs pieds". (Ap. XI/II).

En interprétant ces paroles `Abdu'l-Bahá dit:

"Ces deux individus dont les corps étaient demeurés sans esprit, ce sont les enseignements que Muhammad avait établis et que 'Ali avait promulgués. La vérité de ces enseignements avait disparu et la forme seule était restée. Une seconde fois, l'esprit revint à ces corps, c'est-à-dire que les fondements de ces enseignements furent à nouveau établis" (Les Leçons de St. Jean d'Acre). Ce qui se fit par la manifestation du Báb en 1260 de l'Hégire.

Le nombre 1260, autrement dit l'année 1260 de l'Hégire (calendrier de la révélation qui devait suivre celle de Jésus) présente une telle importance pour Jésus, qu'il l'a fait répéter à sept reprises par St. Jean. Et c'est le seul nombre qui est répété sept fois dans la Bible.

Jusqu'ici nous avons vu quatre passages où sous différentes formes St. Jean mentionne le nombre 1260:

42 mois (Ap. II/2), 1260 jours (Ap. II/3), 3 jours et demi (Ap. 11/9 et 11/11).

La suite des révélations de St. Jean nous permet de découvrir les trois autres références.

Au chapitre XII St. Jean parle de la "femme persécutée par le dragon".

La " femme " symbolise la " Loi de Dieu". Cette interprétation est confirmée par ce passage de l'Apocalypse où Jésus compare la nouvelle loi descendue du ciel à une épouse. (Ap. 21/2).

Voici exactement ce que dit St. Jean:

"Un grand signe parut dans le ciel: une femme enveloppée du soleil, la lune sous les pieds et une couronne de douze étoiles". (Ap.12/1).

Le soleil étant le symbole de l'Iran, et la lune celui de la Turquie, il s'agit de ces deux pays qui promulguèrent la loi de l'islam.

Quand aux douze étoiles il s'agit des douze imams. Le dragon c'est toujours la dynastie Beni Omayyah qui a commis tant d'injustice à l'égard de la Loi de Dieu révélée par Muhammad. Et cette Loi devait rester dans le désert (Abandonnée dans le désert) pendant 1260 jours (Ap. 12/6) ou " un temps, des temps et la moitié d'un temps" (Ap. 12/14).

L'unité du temps étant l'année, cette dernière précision veut dire " un an, deux ans et la moitié d'un an " ou " trois ans et demi " ou " 42 mois " ou " 1260 jours".

Ce qui confirme cette dernière interprétation du terme " temps " c'est que, selon St. Jean, la durée du séjour de la " femme dans le désert, d'un côté, est 1260 jours (Ap. 12/6), et de l'autre, "un temps des temps et la moitié d'un temps". (Ap. 12/ 14).

En tout cas c'est la cinquième fois et la sixième fois que St. Jean fait allusion à l'année 1260.

Quant à la septième référence à l'année 1260, nous l'avons au chapitre 13 où il est parlé de la première bête qui monte dans la mer, et qui avait dix diadèmes (Ap. 13/1). Selon l'interprétation Bahá'ie il s'agit de MU'AVIYYIH, fondateur de la dynastie Beni-Omayyad. Cette dynastie tyrannique a régné sur sept pays et trois régions sous mandat (au total dix territoires), ce que l'Apocalypse présente sous forme imagée de dix diadèmes.

St. Jean continue:

"Et il lui fut donné une bouche qui proférait des paroles arrogantes et des blasphèmes ; et il lui fut donné le pouvoir d'agir pendant quarante deux mois". (Ap. 13/5).

C'est donc pour la septième fois que St. Jean parle de 1260 années de l'islam outragé, privé de son esprit.

A ce même chapitre 13 l'Apocalypse fait une prophétie d'une précision dépassant toute imagination. En effet l'Apocalypse précise que le nombre de la bête est 666. (Ap. 13/18).

Selon l'interprétation Bahá'ie ("New Keys to the Book of Revelation") il s'agit du même MU'AVIYYIH, fondateur de la dynastie Beni-Omayyad qui a profané le sanctuaire de La Mecque où Muhammad est né, et ordonné le pillage de la Médine où le Prophète est enterré. Et ceci arriva en l'an 666.

L'Apocalypse parle également de la deuxième bête:

"Puis je vis monter de la terre une autre bête... qui parlait comme un dragon".

"Elle exerçait toute l'autorité de la première bête en sa présence, et elle faisait que la terre et ses habitants adoraient la première bête". (Ap. 13/11-12).

La seconde bête est YAZID, fils aîné de MU'AVIYYIH qui était un homme cruel, ambitieux, rusé et débauché. C'est lui qui est accusé d'avoir empoissonné l'Imam Hasan, le deuxième imam qui succéda au Prophète. Et c'est toujours Yasid qui a assassiné l'Imam HUSAYN, le troisième imam qui a succédé au Prophète.

Mais la tragédie ne s'arrête pas là. Jésus prédit qu'elle devait continuer jusqu'au Jour Promis:

"Et il lui fut donné d'animer l'image de la bête, afin que l'image de la bête parlât, et qu'elle fît que tous ceux qui n'adoraient pas l'image de la bête fussent tués". (Ap. 13/15).

L'image de la bête c'est l'image de la perversité, de la trahison, de la cruauté et de l'effusion de sang.

Cette image resta animée jusqu'au Jour Promis où les descendants de la bête en 1850 ont criblé de balles la poitrine du Báb, précurseur de la foi Bahá'ie et descendant direct du même martyr Imam Husayn.

Cette image resta animée en ensanglantant les pages de l'histoire par la mention de plus de 20000 hommes, femmes et enfants Bahá'is, parce que ceux-ci " n'adoraient pas l'image de la bête " et se sacrifiaient pour les principes de justice, d'amour et de fraternité, principes qui sont l'esprit même de notre époque.


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8.4. Nos petits candidats au bonheur

Avant de commencer mon exposé, je voudrais vous lire un extrait de l'une des publications de l'Unicef concernant l'année internationale de l'enfant.

En voici le texte:

"L'année internationale de l'enfant coïncidera avec le centenaire de la naissance du Dr. Janusz Korsczak, médecin, écrivain, travailleur social et grand ami des enfants. Il consacra toute sa vie et ses talents créatifs aux enfants, luttant inlassablement pour défendre leur droit à la dignité et à l'amour.

Janusz Korsczak est né à Varsovie en Pologne. En 1911 il devint directeur du foyer des orphelins de Varsovie. Il travailla également pour l'orphelinat " Notre Foyer".

Durant 25 ans il pratiqua dans ses deux institutions son système éducatif, sorte d'auto-gouvernement des enfants, où un tribunal (avec l'aide des responsables de l'établissement) règle les différends, un parlement édicte des lois, et un journal rend compte des événements quotidiens.

Le Dr. Korsczak fut aussi un journaliste et un chroniqueur bien connu. Ses livres pour enfants et sur les enfants ont été traduits en plus de 30 langues.

Durant l'occupation nazie en Pologne le Dr. Korsczak choisit de mourir plutôt que d'abandonner les enfants dont il avait la charge. Il fut exterminé dans le camp de la mort de Treblinka en même temps que 200 orphelins.

En observant l'année internationale de l'enfant, la Pologne rendra une nouvelle fois hommage à ce grand homme".

Quant au sujet de mon exposé, il s'agit de nos enfants qui potentiellement ont toutes les qualités pour devenir des êtres heureux et contribuer au bonheur du monde de demain. Ce qui ne peut se faire que par l'EDUCATION que nous allons leur donner aujourd'hui. Et c'est cela le sujet de mon exposé, basé sur les Écrits bahá'is.

Bahá'u'lláh dit:

"Voyez en l'homme une mine riche en gemmes d'une valeur inestimable. Mais seule l'éducation peut révéler les trésors de cette mine et permettra à l'humanité d'en profiter". (Extraits des Écrits de Bahá'u'lláh).

Si seulement on avait commencé cette éducation à l'époque où ces paroles étalent écrites, c'est-à-dire il y a plus de cent ans ! Alors nos grand-mères auraient éduqué nos mères, et celles-ci ayant reçu l'éducation appropriée se seraient souciées de notre éducation avant notre naissance pour continuer après jusqu'à faire de nous des hommes dignes de ce nom.

Permettez-moi d'expliquer ce que j'entends par l'expression " soucis avant naissance".

Selon les enseignements Bahá'is, l'éducation morale de l'enfant commence dans !e sein de sa mère. Ce qui implique pour toute la période de gestation un environnement harmonieux imprégné d'amour, de justice, de droiture et, en bref, de toutes les vertus. Ainsi il est recommandé aux mères de s'abstenir durant cette période de la lecture des romans où il n'y a que des intrigues, trahison, scènes de meurtre etc., et, en échange, de lire des ouvrages traitant des questions morales, et, plus particulièrement, des Écrits sacrés.

Une telle discipline exige que la mère en soit informée d'avance, autrement dit, qu'elle ait reçu l'éducation Bahá'ie de la part de sa mère, c'est-à-dire de la grand-mère de l'enfant.

Voilà pourquoi Victor Hugo disait: u Si vous voulez avoir un homme civilisé commencez par sa grand-mère". Cette parole fut à l'époque considérée comme une boutade, mais aujourd'hui c'est une vérité spirituelle sanctionnée par la science.

En effet, il a été récemment prouvé par des constatations scientifiques faites surtout par les spécialistes allemands que l'enfant conçu dans un mauvais environnement moral et placé immédiatement après sa naissance dans un bon environnement est très désavantagé par rapport à l'enfant conçu dans un bon environnement.

Ce bon environnement doit être maintenu après la naissance de l'enfant, avec cette différence que la mère lira à haute voix les ouvrages inculquant la morale et surtout les Écrits sacrés.

Une fois de plus les sceptiques pourront ne pas croire à l'utilité de telles lectures pour un enfant qui n'y comprend rien, mais les constatations scientifiques et les statistiques ont mis en évidence l'influence ultérieure de ces lectures régulières sur l'esprit de l'enfant. C'est comme l'effet d'une goutte d'eau qui tombe sur une pierre qui ne se manifeste qu'avec le temps, et jamais immédiatement.

Avant d'aller plus loin précisons qu'il ne s'agit pas de faire marcher un enregistreur pour l'enfant. Non, la mère doit prendre l'enfant dans ses bras, le caresser, l'embrasser, lui montrer son amour par tous les moyens. Car l'enfant a besoin de son amour autant que de son lait. Si l'un est nécessaire pour son développement physique, l'autre est indispensable pour son développement moral.

En Amérique, on a fait l'expérience suivante: on a divisé les nouveau-nés en deux groupes, le premier a été confié aux soins de leurs mères, et le second, aux soins des infirmières. Et l'on a constaté que les enfants du premier groupe apprenaient à manger, à marcher et à parler bien plus vite que ceux du deuxième groupe.

Ce n'est pas en vain qu'on dit: u Tout se décide dès le berceau". C'est dès le berceau jusqu'à sa maturité que l'enfant a besoin d'amour. Un enfant qui n'a pas été aimé, ou même n'aura pas eu le sentiment d'être aimé ne sera pas capable d'aimer.

Une crèche ne remplacera jamais la présence d'une mère au travail. Et c'est la raison pour laquelle il est déconseillé, au moins jusque l'âge de 5 ans, de priver l'enfant de l'ambiance familiale en le confiant aux institutions.

Tout cela montre à quel point le rôle de la mère est important dans l'éducation de l'enfant, et, par conséquent, combien il est nécessaire qu'elle-même soit préalablement éduquée.

Voilà pourquoi, selon la foi Bahá'ie, l'éducation de la fille l'emporte sur celle du garçon car la fille est la future mère et l'éducatrice de l'enfant.

Il est donc juste de dire que lorsqu'on éduque un homme, on éduque un individu, mais quand on éduque une femme on éduque une famille.

La mission de la mère est tellement sacrée qu'il y a une tradition citée dans le Talmud qui dit: "Ne pouvant pas être partout Dieu a créé les mères".

Le Prophète Muhammad, de son côté aurait dit: "Le paradis est sous les pieds des mères".

Dans l'éducation de l'enfant il ne faut pas négliger le rôle des jouets. L'enfant, avant même son premier anniversaire a besoin de jouets et de plus en plus variés, car c'est un moyen pour satisfaire son besoin de s'instruire.

Le premier signe de la capacité et du désir de s'instruire c'est l'intérêt que manifeste l'enfant pour les choses nouvelles.

Ce qui est démontré par l'expérience suivante: aux enfants à peine âgés de 6 mois, on a présenté le choix entre deux objets, dont l'un familier et l'autre nouveau, et l'on a constaté que l'enfant s'empare de l'objet qui est nouveau.

Il faut donc profiter de ces jouets instructifs et de plus en plus variés pour développer la capacité de s'instruire chez l'enfant.

En parlant des jouets c'est à dessein que j'ai utilisé le terme " instruction " au lieu de "éducation". Car le jouet est un moyen servant à l'instruction de l'enfant et non pas à son éducation. Il faut faire une distinction entre l'instruction et l'éducation.

L'instruction consiste dans le développement de l'intellect par l'acquisition des connaissances. L'éducation consiste à savoir discerner le bien du mal afin de faire le bien et éviter le mal, ce qui implique le développement de la volonté.

Autrement dit, l'instruction consiste à apprendre à l'homme ce qu'il ne sait pas, tandis que l'éducation lui apprend en plus à agir autrement qu'il n'agit. Les jouets ne peuvent jouer un tel rôle.

Partant de ces considérations à l'école Bahá'ie, tout en combinant ensemble l'instruction et l'éducation, on attache plus d'importance à l'éducation qu'à l'instruction.

Selon les Écrits bahá'is pendant la période préscolaire de l'enfant il faut recourir aux jouets et aux jeux pour commencer à l'instruire, car, avec les jeux et les jouets, l'enfant apprend à aimer l'acquisition des connaissances.

`Abdu'l-Bahá cite même le cas où l'on fait des bonbons sous forme de lettres de l'alphabet. De cette façon, l'enfant qui aime les bonbons aimera les lettres de l'alphabet et les apprendra avec amour.

Il ne faut jamais bourrer un enfant de connaissance, ni recourir à la contrainte. L'essentiel c'est de créer chez l'enfant l'amour pour l'acquisition des connaissances.

N'oublions jamais que l'enfant n'est pas un vase à remplir, mais une lampe à allumer.

La question de l'instruction et de l'éducation de l'enfant est étroitement liée à celle de sa santé. C'est même le premier devoir des parents et surtout de la mère de veiller à la santé de l'enfant.

`Abdu'l-Bahá conseille aux parents d'élever les enfants, dès leur naissance, dans des conditions dures, de les vêtir aussi sobrement que possible, de ne pas les protéger contre le froid, de façon à ce qu'ils aient une bonne résistance physique, et qu'ils puissent jouir d'une parfaite santé au fur et à mesure qu'ils grandissent.

Dans le même ordre d'idée, les enfants doivent être allaités par leur mère, sauf en cas d'incapacité pour cause de maladie. C'est la raison pour laquelle les mères Bahá'ies ne se laissent pas influencer par toutes ces publicités concernant les " avantages " du lait en poudre.

En cas de maladie de l'enfant le recours au médecin est prescrit par la foi Bahá'ie. Mais ce recours ne s'impose pas seulement quand l'enfant est manifestement malade. Il y a des enfants qu'on appelle " agités". C'est celui qui ne tient pas en place, se lève de table, on ne sait pourquoi, fait du bruit à l'heure où l'on dort. Il ne faut pas - dit le Dr. Soubiran - s'empresser de penser qu'un surcroît d'autorité ramènera cet enfant à la sagesse. Il ne faudrait pas, non plus, administrer soi-même un calmant nerveux. Il faut consulter le pédiatre.

De même, il y a des enfants dont le travail scolaire laisse à désirer. Il se peut - dit le Dr. Soubiran - que la cause en soit " les difficultés psychologiques provoquées par des problèmes affectifs ou par une inadaptation intellectuelle au type d'études qu'on lui propose".

Apparemment l'enfant n'est pas malade, mais psychologiquement il l'est. Il faut consulter un spécialiste.

Il y a encore le cas des enfants portés à de violentes colères.

Tous ces cas sont généralisés sous le titre " Enfants difficiles". Avec l'aide des spécialistes il faut savoir les élever sans jamais considérer les difficultés de l'enfance comme un handicap qui se prolonge tout le long de la vie".

Le Dr. Soubiran cite le cas d'Einstein qui était un enfant difficile, et il conclut qu'un enfant difficile peut avoir un brillant avenir devant lui.

L'essentiel est ne jamais se plaindre de son sort et rester toujours optimiste, ce qui est encore l'un des enseignements Bahá'is.

A noter que si aujourd'hui seulement la médecine cite comme cas de maladie l'inadaptation intellectuelle au type d'étude qu'on impose à l'enfant, il y a plus d'un demi siècle les Écrits bahá'is ont prescrit aux parents le devoir d'orienter leur enfant vers une profession pour laquelle ce dernier a des aptitudes spécifiques, ce qui, plus tard, lui permettra de faire le travail qu'il aime.

Tout ce que nous avons dit jusqu'ici concerne l'aspect physique et intellectuel de la vie de l'enfant. Abordons maintenant l'étude de l'aspect spirituel de la vie de l'enfant, en disant un mot sur son éducation.

Selon la foi Bahá'ie l'éducation de l'enfant, comme son instruction, doit toujours être basée sur l'amour et l'encouragement.

Les parents (et surtout la mère) doivent profiter du moindre geste de l'enfant pour l'encourager. L'enfant y est bien plus sensible qu'on ne le croit. Il faut surtout éviter la moindre injustice.

Ch. Dickens dit " Dans le monde où vivent les enfants rien n'est perçu avec autant de sensibilité que l'injustice". Et c'est toujours le même esprit de justice qui implique que si l'enfant fait quelque chose qui n'est pas bien on lui montre que son geste ne reste pas inaperçu ; qu'on lui fasse comprendre qu'il ne doit plus répéter ce geste, et si nécessaire, sans le blesser, gentiment avec sagesse lui reprocher son comportement.

Mais en aucun cas, précise `Abdu'l-Bahá, il ne faut recourir à la punition corporelle, car ses effets néfastes ne tarderont pas à se manifester. Et `Abdu'l-Bahá fait remarquer que les Arabes disent qu'en dressant même un cheval il ne faut jamais le battre, car l'animal deviendra rétif et méchant.

Ce n'est pas en battant l'enfant qu'on peut contribuer à son épanouissement moral. L'enfant est une plante. Personne ne frappe la jeune pousse pour la faire grandir.

Un autre point important dans l'éducation de l'enfant c'est que les parents ne se livrent pas à la médisance et ne se disputent jamais devant l'enfant. Autrement ils lui fourniront un mauvais exemple. Et l'enfant est bien plus sensible à l'exemple qu'à la parole.

D'une manière générale dans l'éducation de l'enfant le moyen le plus efficace c'est de donner soi-même le bon exemple, et éviter à tout prix le mauvais exemple, car celui-ci est bien plus facile à imiter. Si donc l'enfant se conduit mal, il faut voir si les parents se conduisent bien.

Un pédiatre explique à un père qui lui demande d'examiner son fils particulièrement mal élevé:

"Le drame avec les enfants c'est qu'ils s'obstinent à imiter leurs parents malgré tous les efforts de ceux-ci pour leur enseigner les bonnes manières".

Imiter le bon exemple des parents n'implique nullement l'imitation aveugle de leur façon de penser.

Bien au contraire, les parents doivent contribuer à ce que l'enfant apprenne à raisonner personnellement, de façon à ce que plus tard, il puisse procéder personnellement et indépendamment à la recherche de la vérité, ce qui est l'un des principes sacrés de la foi Bahá'ie.

Ce respect de la personnalité de l'enfant n'exclut pas le respect de l'autorité paternelle. Car l'enfant doit comprendre que l'éducateur ce sont ses parents et non pas lui. Ce n'est malheureusement pas le cas avec les enfants gâtés d'aujourd'hui.

Un journal humoristique américain écrivait: "Entre les parents et les enfants d'aujourd'hui il existe un nouveau malentendu, on ne distingue plus quelle génération éduque l'autre".

Un autre point dans l'éducation de l'enfant selon les enseignements Bahá'is c'est de faire comprendre à l'enfant que son pays est bien plus vaste qu'ils ne l'imagine, et que le monde est son pays.

Il faut que l'enfant sache que s'il est bien nourri, il y a dans le monde (et principalement dans le Tiers-monde) 12 millions d'enfants qui, par suite de la sous-alimentation, meurent tous les ans avant d'atteindre l'âge d'un an.

Ce qui n'empêche que nous, les parents, sachions qu'avec les deux millions de tonnes de nourriture que consomment les chiens et les chats, rien qu'en France, on peut sauver ces enfants.

Il faut que l'enfant sache que s'il est bien traîné, il y a dans le monde des enfants martyrs. Rien qu'en Amérique il y en a plus d'un demi-million tous les ans: ils sont battus, brûlés, privés volontairement de nourriture. Nous en avons en Belgique plus de 2000 par an.

il faut que l'enfant sache que s'il a tout ce qu'il faut pour bien vivre, il y a dans le monde plus de 50 millions d'enfants âgés de moins de 15 ans qui travaillent dans des conditions inhumaines pour un salaire de misère.

Elevé dans un tel esprit de conscience universelle l'enfant d'aujourd'hui et adulte de demain ne permettra plus qu'il y ait dans le monde des enfants sous-alimentés, exploités, martyrs et délinquants.

Et s'il y en a encore dans le monde, et que, dans l'immédiat nous ne pouvons pas y remédier, ou ne sommes pas disposés à assumer nos responsabilités, engageons-nous à élever nos enfants de manière à ce que la génération future soit plus heureuse que celle d'aujourd'hui.

Il est bien temps - disent les Bahá'is - qu'on commence à remédier à cette situation tragique en appliquant la méthode d'éducation dont j'ai tracé les grandes lignes, méthode révélée il y a plus de 100 ans, méthode que les Bahá'is appliquent depuis lors aussi bien dans leurs familles que dans leurs écoles, méthode qui fera de chaque enfant un petit candidat à ce bonheur dont chacun rêve.


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8.5. Le langage à tenir aux enfants

Un psychologue contemporain dit:

"Pour la croissance de l'enfant il faut deux aliments, l'amour et l'encouragement.

Si c'est aujourd'hui seulement que la science parle de l'amour et de l'encouragement en tant qu'aliment vital pour l'enfant, chez les Bahá'is c'est depuis plus de 100 ans que toute l'éducation de l'enfant est basée sur l'amour et l'encouragement.

Partant de là, comme l'enfant aime beaucoup les histoires et les images, et qu'il apprend le mieux par l'analogie, dans les écoles Bahá'ies, pour l'éducation morale de l'enfant on a principalement recours aux histoires et aux images.

Ce soir, je vais vous raconter quelques-unes de ces histoires qui se sont gravées dans mon esprit depuis que j'ai reçu mon éducation à l'école Bahá'ie.

Ceux qui s'intéressent au langage à tenir aux enfants, trouveront peut-être ces histoires intéressantes et pourront s'en inspirer dans l'éducation de leur enfant.

A l'école Bahá'ie, on commence avant tout à apprendre à l'enfant à AIMER. Et on ne se contente pas du terme AMOUR DU PROCHAIN, mais on insiste sur l'AMOUR DE TOUT LE MONDE et de TOUT CE QUI EST DANS LE MONDE. Car l'enfant doit apprendre à aimer non seulement les êtres humains, mais toute la création et, plus particulièrement, les plantes et les animaux.

A noter que c'est seulement aujourd'hui que les savants écologistes réclament cet amour.

Afin de justifier un tel amour, on commence à tenir à l'enfant des propos tels que ceux-ci.

Quand tu aimes quelqu'un, tu aimes tout ce qui lui fait plaisir, n'est-ce pas? Puisque tu aimes ta maman et que ta maman aime les fleurs, si elle demande d'arroser les pots de fleurs, tu le fais volontiers. De même tu aimes ton papa, et puisque ton papa aime son chien, tu aimes aussi son chien et tu le nourris volontiers, n'est-ce pas?

Mais les plantes et les animaux n'ont pas été créés seulement pour faire plaisir à ceux que nous aimons, ils sont en plus nécessaires à leur vie. Par conséquent, puisque nous devons aimer tout le monde, nous devons aimer tout ce qui est dans le monde, et plus particulièrement les plantes et les animaux.

Ceci dit on procède à l'étude du monde végétal pour dire combien les plantes nous sont nécessaires.

Les plantes nous nourrissent. Le pain que nous mangeons tous les jours vient des plantes. C'est du blé qu'on broie, pour en faire de la farine destinée à être cuite afin de donner du pain.

En passant on rappelle aux enfants qu`Abdu'l-Bahá a dit: "Dans le bon pain il y a tout ce qu'il faut pour nourrir l'homme". S'il dit bon pain, il entend le pain complet. Par conséquent, il est recommandé aux Bahá'is de se nourrir du pain complet.

Puis on parle de la nécessité des plantes pour l'instruction, en citant l'exemple du papier dont la substance provient des plantes.

On cite le cas des fleurs qui en plus de leur beauté nous fournissent les parfums. En passant, on rappelle aux enfants que Bahá'u'lláh a vivement!, recommandé à ses disciples de se servir des parfums.

Les plantes nous viennent en aide en cas de maladie pour la combattre efficacement. Et à ce propos, on rappelle aux enfants que Bahá'u'lláh dit: "Réduisez l'usage des médicaments et si vous trouvez qu'une herbe simple suffit, n'ayez pas recours à des drogues compliquées".

Avec tant de services que le monde végétal nous rend, on ne peut que l'aimer.

Et Bahá'u'lláh était le premier à donner l'exemple de cet amour pour le monde végétal. Déjà, quand il n'était qu'un enfant, il passait la majeure partie de son temps en plein air dans la nature.

`Abdu'l-Bahá aimait tellement les fleurs qu'il donnait l'impression de leur parler quand il plongeait son visage dans les fleurs d'une plante.

Après le monde végétal on passe au monde animal.

On cite comme exemple le lait que nous donnent les vaches, les oeufs que nous donnent les poules, le miel que nous fabriquent les abeilles et bien d'autres services que nous rendent les animaux, en général. Et l'on illustre ces services par des histoires d'animaux. Je vais vous en raconter une en exemple.

En face de l'une des gares de Tokyo, les habitants ont fait ériger une statue à un chien, en mémoire de sa fidélité exemplaire. Chaque jour ce chien accompagnait son maître, professeur de l'Université, à la gare, et venait l'attendre au retour. Un jour le professeur ne revint pas: il était mort en donnant son cours. Le chien continua pendant dix ans à venir l'attendre tous les jours.

Par de telles histoires et par des raisonnements on inspire dans le coeur de l'enfant l'amour pour le monde animal.

Par la même occasion on rappelle à l'enfant cette parole d`Abdu'l-Bahá qui dit que si on fait souffrir un animal, c'est comme si on faisait souffrir un homme avec cette différence que l'animal ne sait pas parler pour demander pitié.

Après le monde animal, vient le monde humain. Et l'on aborde alors l'amour du prochain.

Le maître à l'école Bahá'ie combine l'amour et l'encouragement, en ce sens qu'il souligne que pour tout être humain, "le prochain " en premier lieu c'est l'enfant. Et ceci pour la simple raison que l'enfant à le coeur pur, et, par conséquent, a toutes les qualités pour être aimé. L'enfant se voit ainsi aimé et encouragé.

Et afin de renforcer son impression et de le convaincre qu'il ne s'agit pas d'une flatterie, mais d'un éloge justifié, on lui raconte plusieurs histoires illustrant la pureté de son coeur.

Je vais vous en raconter quelques-unes.

"Maman - dit le petit - je veux jouer avec Jojo".

"Non - lui répond sa mère - on ne joue pas avec les enfants qui ne sont pas bons. On joue avec les enfants qui sont bons".

"Est-ce que moi je suis bon?"

"Bien sûr".

"Alors Jojo peut jouer avec moi?"

La conclusion qu'on en tire pour l'enfant c'est que, par sa nature, il est sociable, il a besoin d'être avec ses semblables, il doit rester sociable, car le charme de la vie Bahá'ie ne peut être ressenti seul, mais avec les autres. Comme le baiser qui ne se conçoit pas seul.

Une autre conclusion encore plus importante qu'on peut tirer de cette même histoire c'est que pour l'enfant, tous sont bons, l'enfant ne divise pas ses semblables en deux groupes: les bons et les mauvais, et en grandissant, il doit garder cette façon de penser pour l'appliquer à toute l'humanité, sans jamais diviser celle-ci en deux familles, les bons et les mauvais. C'est d'ailleurs le principe le plus important de la foi Bahá'ie, principe qui dit qu'il n'y a qu'une famille, la famille humaine, et que ceux que certains appellent " les mauvais " doivent être considérés comme des malades ayant besoin d'être guéris.

Une autre histoire montre la pureté du coeur de l'enfant:

"Maman - dit le petit - j'aimerais bien que Charlotte vienne dîner à la maison.

"Mais voyons, tu m'as dit hier que Charlotte n'a pas été gentille avec toi, que tu ne l'aimes plus".

"Mais c'était hier, maman".

La conclusion qu'on en tire pour l'enfant c'est que s'il se fâche suite à un acte injuste à ses yeux, c'est une réaction spontanée de défense, mais il faut oublier l'acte injuste et ne pas garder rancune, ce qui est le fait de l'enfant, étant donné la pureté de son coeur.

Voici une troisième histoire illustrant la pureté du coeur de l'enfant:

Jacques était né dans une famille riche. Pour le Nouvel An ses parents lui achètent un beau costume, et tout heureux il le met pour aller à l'école. Mais il y voit son ami Jojo habillé pauvrement, et il en devient triste.

En rentrant à la maison, il dit à sa mère de lui acheter la prochaine fois un costume bon marché.

"Pourquoi, on est assez riche pour t'en acheter deux et de même qualité".

"Alors achetez-en deux, un pour moi et l'autre pour Jojo".

La conclusion qu'on en tire pour l'enfant c'est qu'il a un coeur tendre, et qu'il ne peut pas voir ses semblables tristes et malheureux, et qu'il cherche à partager sa joie et son bonheur avec ses semblables.

Et pour qu'il ne change pas avec l'âge on lui cite cette image qui se grave dans son esprit: En répandant du parfum sur son ami on en ressent l'effet soi-même. De même en donnant de la joie on en ressent soi-même.

C'est par de telles histoires illustrant la pureté du coeur de l'enfant qu'on l'encourage et qu'on explique la raison pour laquelle les prophètes aimaient tant les enfants et exhortaient leurs adeptes à les aimer.

On cite, par exemple, l'attitude de Jésus à l'égard des enfants.

L'amour de Jésus pour les enfants était tel qu'il avoue un jour à ses disciples que, chaque fois qu'il voyait quelqu'un chérissant un enfant, il avait l'impression que c'était lui-même qui était chéri. (Mat. 18/37).

Une autre fois Jésus dit que la vérité est cachée aux sages et aux intellectuels, et elle est révélée aux enfants. (Mat. 11/25).

A ce propos on raconte aux enfants cette histoire:

"Qu'est-ce qu'il faut pour demander pardon à Dieu?"

"Il faut se croire pécheur" répond Jojo.

Et c'est vrai, dit-on aux enfants, il ne faut jamais se croire un saint, il faut toujours croire qu'on a des défauts (et on en a toujours). De cette façon on ne devient pas orgueilleux, on reste humble. Et ce sont les humbles qui sont aimés et non pas les orgueilleux.

Pour que cette idée de l'attraction par l'humilité se grave dans l'esprit des enfants on leur raconte qu'un jour un enfant a demandé à `Abdu'l-Bahá pourquoi toutes les rivières sont attirées par l'océan. Et il a répondu en disant que c'est parce que l'océan se tient plus bas que les rivières.

L'éducation Bahá'ie étant essentiellement religieuse, dans les écoles Bahá'ies on attache une grande importance à la prière.

On présente la prière comme un langage d'amour et un moyen pour demander à Dieu ce qui est bien pour nous.

On dit aux enfants:

Quand vous aimez quelqu'un vous aimez lui parler. Et bien vous aimez Dieu qui vous a tout donné. Vous voulez donc Lui parler.

Cette conversation avec Dieu c'est la prière.

Concernant la prière en tant que moyen pour demander à Dieu ce qui est bien pour nous, on leur raconte encore quelques histoires d'enfant, toujours pour les encourager dans leur foi en la prière.

A titre d'exemple je vais vous en raconter deux:

Comme il n'avait pas plu pendant longtemps, les habitants d'une ville se mirent à prier. Mais aucune prière ne fut exaucée, et la sécheresse continua. Alors on demande à une petite fille de faire une prière. C'est ce qu'elle fit et il a plu abondamment. On s'est demandé alors quelle avait été l'attitude de la fillette pour que sa prière soit exaucée. Et l'on s'est aperçu qu'elle était sortie avec un parapluie. Tellement elle avait la foi en la prière ! Et cette foi doit être tellement profonde que si ce qu'on demande à Dieu n'est pas exaucé, qu'on reste sûr que ce n'était pas bien pour nous, et que, par conséquent, le " Non " de Dieu en réponse à notre requête est le " Oui " pour notre bien. Ce qui est si bien illustré par cette histoire:

"Maman - dit une fillette à sa mère - on nous a appris que Dieu ne laisse pas les prières sans réponse".

"Mais pas toutes les prières" dit la mère.

"Si, toutes les prières - répond l'enfant - et je demanderai à Dieu de me donner des yeux tout blancs. Tu verras la réponse de Dieu demain".

La pauvre maman n'a pas fermé les yeux toute la nuit, tellement elle a souffert pour sa fille. Le lendemain elle entre dans la chambre de sa fille, et elle la trouve devant le miroir examinant ses yeux.

"Tu vois que ce n'est pas pour toutes les prières qu'il y a une réponse " lui dit-elle.

"Mais si, maman, j'ai la réponse de Dieu".

"Et qu'est-ce que c'est?"

"C'est NON. Sais-tu pourquoi, maman? " Et elle montra à sa mère le dessin qu'elle a fait d'une fillette avec des yeux tout blancs.

"Regarde comme c'est laid " dit-elle. Dieu n'a pas voulu que je sois laide. Pour m'en assurer j'ai regardé encore une fois dans le miroir afin de voir si, après ma prière, Dieu n'a pas changé mes yeux. C'est toujours NON. Et maintenant je dois faire une autre prière pour dire merci à Dieu".

C'est cette foi qu'on demande aux enfants Bahá'is de garder pour toujours afin qu'ils restent optimistes en toutes circonstances, courageux devant les épreuves inévitables de la vie, confiants en eux-mêmes et en leurs semblables et, par conséquent, bien disposés à collaborer avec tous aussi bien dans l'intérêt général que dans leur propre intérêt.

Voilà, chers amis, la méthode d'éducation Bahá'ie, méthode qui utilise le langage d'amour et d'encouragement.

A vous de juger si en appliquant cette méthode dans l'éducation de nos enfants, nous les rendons plus heureux et, par la même occasion, nous leur garantissons un avenir meilleur que celui que leur promet le monde d'aujourd'hui.


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8.6. La récompense de la persévérance

Un vieillard et son fils décident de vendre leur âne, et dans ce but le conduisent à la foire. Dépassant des gens sur leur route, ils entendent dire:

"Regardez ces deux imbéciles qui vont à pied, quand ils pourraient voyager assis sur leur âne?"

Le vieillard trouve l'idée juste. Lui et son fils montent sur l'âne et continuent leur route. Bientôt ils dépassent un autre groupe.

"Regardez ces paresseux" dit quelqu'un, "ils brisent le dos de ce pauvre animal".

Le vieillard réfléchit un instant et trouvant qu'il est plus sage que le fils descende et que seulement lui-même reste sur l'âne.

"Quel égoïste qu'il est ce père", entendent-ils remarquer un troisième groupe. "Il laisse son fils marcher à pied au lieu de lui céder sa place".

Là-dessus le père descend et cède sa place à son fils. Ils continuent leur route.

"Et voilà un père qui ne sait pas apprendre à son fils le respect de ses parents", dit un spectateur qu'ils rencontrent sur leur chemin.

Là-dessus le vieil homme et le jeune garçon réfléchissent et trouvent une autre solution. Ils lient les sabots de l'âne et le suspendent à une perche qu'ils portent sur leurs épaules. A la fin de l'après-midi, ils arrivent épuisés à un pont. Tandis qu'ils traversent la rivière les liens de l'âne se rompent et l'animal tombe dans l'eau et se noie.

Cette histoire est instructive en ce sens que dans la vie quand on se fixe un but et l'on fait son choix sur le moyen à suivre on ne doit pas attacher d'importance aux " qu'en dira-t-on " ni vouloir absolument contenter tout le monde.

Quelqu'un a dit non sans raison: "Je ne connais pas la formule du succès, mais je connais la formule de l'échec, c'est d'essayer de contenter tout le monde".

Indiscutablement il est bien plus facile dans la vie d'échouer que de réussir. Mais ce serait une exagération de prétendre qu'il n'y a pas de formule pour réussir. Cette formule existe. Elle se résume en un seul mot: PERSEVERANCE.

Et c'est vrai dans tous les cas, aussi bien dans l'accomplissement des tâches ordinaires pour gagner sa vie, que lorsqu'on vise très haut.

Le président directeur d'une société disait à un agent d'assurance

"J'espère que vous appréciez l'honneur que je vous fais, jeune homme. Savez-vous qu'avant de vous recevoir j'ai refusé de voir aujourd'hui sept courtiers comme vous".

"Je le sais", répondit l'a n t. "C'est la huitième fois que je me présente".

Grâce à sa persévéra e le jeune homme a réussi à être reçu par le président.

C'est une anecdote , maintenant je vais vous raconter un fait historique:

C'est l'histoire d'un homme qui en 1831, lancé dans les affaires, subit un échec. En 1832 lancé dans la politique, il échoue également. En 1834 il échoua dans une entreprise. En 1841 il est atteint de dépression nerveuse. En 1843 il présente sa candidature à l'Assemblée Législative, et il échoue. En 1855 il se présente à la Chambre Haute, et il échoue. En 1858 il est battu de nouveau. En 1860 il est élu Président des Etats-Unis.

Cet homme c'est Abraham Lincoln qui était destiné à abolir l'esclavage dans son pays.

Mais c'est surtout dans le domaine de la religion et de la science que la persévérance joue un rôle vital. Vital, étant donné que c'est uniquement par la persévérance dans ces deux domaines que l'homme peut garantir son bien-être matériel et spirituel.

Voyons d'abord le rôle de la persévérance dans la science.

Un homme après des années d'étude et estimant qu'il a échoué et qu'il n'a pas appris grand chose a tout abandonné et a pris le chemin du désert. Arrivé au pied d'une montagne il aperçoit une grosse pierre où les gouttes d'eau avaient creusé un petit trou. Il s'est dit alors: si avec la persévérance, une goutte d'eau perce la pierre, comment la lumière du savoir n'aurait-elle pas d'effet sur mon esprit. Et il retourna sur ses pas et reprit ses études.

Les plus grandes découvertes en science sont dues à la persévérance des savants.

Un jour, on demanda à Edison ce qu'il apprenait avec le millier d'échecs qu'il rencontrait.

Et le savant de répondre:

"J'apprends un millier de façons de ne pas procéder".

Et il a poursuivi ses expériences pour arriver à offrir à l'humanité plus de deux mille inventions.

Dans le domaine de la science, la persévérance récompense même ceux qui n'ont pas d'instruction scientifique.

Le Hollandais Anton Van Leevennoer n'avait aucune instruction - il était balayeur de rues à Delft, mais dès qu'il avait une heure de liberté, il s'exerçait à tailler de petites lentilles de verre qui ouvrirent à l'homme le terrible et merveilleux univers des microbes. Ce fut la plus grande découverte de toute l'histoire de la biologie.

Puisqu'on parle de la biologie rappelons-nous la persévérance de Dr. Koch dans sa recherche du bacille de la tuberculose.

Il travaillait dans son laboratoire parfois dix-huit heures par jour, n'autorisant personne à s'exposer aux risques d'infection. Au bout de six mois, en examinant la 271e préparation microscopique il identifia le bacille qui maintenant porte son nom.

Je vous ai cité quelques exemples du domaine de la technique et de la médecine. Voulez-vous un exemple du domaine de la littérature?

Du temps où il terminait ses études à l'Université de Yale, Sinclair Lewis confia à un professeur de littérature que son rêve était d'écrire.

"Mais vous mourrez de faim", s'exclama le professeur.

"Voilà ce qui m'est parfaitement égal " , répondit Lewis.

"En ce cas, mon ami, vous réussirez."

Et il a réussi grâce à sa persévérance, sans que celle-ci lui coûte le prix de sa vie.

Ce ne fut pourtant pas le cas des fondateurs de religion qui ont dû payer le prix de leur vie. J'entends par là les messagers de Dieu ; la plupart ont accepté le martyre parce qu'ils avaient décidé de persévérer jusqu'à l'accomplissement d leur mission.

Prenons comme exemple Jésus-Christ. Il vivait dans un monde injustice, de cruauté, d'orgueil, de tromperie, de mensonge et de tout ce qui est appelé péché. Il reçoit la mission de débarrasser l'homme de ces péchés et, par conséquent, de lui faire obtenir le pardon.

L réussite dans l'accomplissement de cette mission impliquait une persévérance qui devait lui coûter la vie. Il a persévéré et il a payé de sa vie. C'est au prix de ce sacrifice qu'il parvint à ce que l'homme se débarrasse de ses péchés et, par conséquent, se faire pardonner.

C'est ainsi qu'il faut comprendre le sens du pardon de nos péchés par le sacrifice de Jésus.

Rappelons à ce propos que dans le langage des Écritures, le péché c'est la mort (II Ephés. 2/6) et la délivrance des péchés, c'est la résurrection. Or étant donné que le sang est le symbole de la force vitale, on assimile la force spirituelle de Jésus au sang, et l'on dit que Jésus par son sang nous a délivrés de nos péchés. Autrement dit c'est grâce à la force spirituelle de Jésus que ses vrais disciples parvinrent à se délivrer des péchés.

La grandeur de la force spirituelle de Jésus était telle que Bahá'u'lláh dit:

"La plus profonde sagesse qu'aient exprimée les plus sages des hommes, les plus hautes connaissances qu'aient acquises les plus savants d'entre eux, les arts que les mains les plus habiles aient produits, l'influence qu'ont pu exercer les plus puissants monarques ne sont que des manifestations du pouvoir vivifiant dégagé par son Esprit transcendant omnipénétrant et resplendissant" (Extrait des Écrits de Bahá'u'lláh).

Si Jésus n'avait pas persévéré jusqu'au sacrifice de sa vie on n'aurait pas eu cette civilisation sans précédent, connue à juste titre sous le nom de la civilisation chrétienne.

Dès le début de sa mission, il fut soumis aux épreuves, sous différentes formes. D'abord l'incroyance de ses frères (Jean 7/3) puis les reproches des pharisiens

"Pourquoi mange-t-il avec des gens de mauvaise vie". (Mat. 9/11).

A quoi il a répondu:

"Ce ne sont pas ceux qui se portent bien qui ont besoin de médecin" (Mat. 9/12).

Ajoutez à cela les souffrances qu'il a subies de la part de ses ennemis, tout en exhortant ses disciples à persévérer comme lui-même:

"Celui qui persévérera jusqu'à la fin sera sauvé" (Mat. 9/12), ne cessait-il pas de répéter.

Et il a sauvé le monde de son époque par sa persévérance.

Un autre exemple de la persévérance c'est le cas de la révélation Bahá'ie dont le précurseur était le Báb. Ce messager de Dieu ayant entrepris une guerre sans merci contre l'hypocrisie, le fanatisme et la superstition de son époque savait parfaitement que pour triompher il devait persévérer jusqu'au sacrifice de sa vie. Et il a persévéré, ce qui finalement lui a coûté la vie. Et pourtant il lui suffisait d'abandonner sa mission pour avoir la vie sauve, mission dont le but ultime était de sauver l'humanité.

Quant au fondateur de la foi Bahá'ie, Bahá'u'lláh lui-même, afin d'avoir une idée de sa persévérance dans l'accomplissement de sa mission, il faut pouvoir s'imaginer un demi-siècle de souffrances sans précédent dans l'histoire, un demi-siècle durant lequel prisonnier dans les ans, il pouvait être exécuté à tout moment. Ce qui est le ' e des supplices pour tout condamné à mort. Car c'est surtout l'attente du moment d'être exécuté qui est atroce. Et ce " moment " pour Bahá'u'lláh n'a pas duré un instant, mais toute sa vie.

Dans son cas aussi, il suffisait qu'il cesse de persévérer dans l'accomplissement de sa mission pour être libéré et jouir de tous les honneurs et plaisirs que la cour impériale pouvait lui accorder en tant que fils de l'un de ses ministres. Mais non, lui aussi comme tous les prédécesseurs a sacrifié tout dans son amour pour l'humanité.

Un autre exemple de la persévérance c'est son fils aîné, interprète de ses enseignements, `Abdu'l-Bahá. Lui aussi a eu une vie de martyr. Il est entré en prison tout jeune et il en est sorti vieillard: une soixantaine d'années d'exil et d'emprisonnement. Et à aucun moment il ne manqua de persévérer dans l'accomplissement de sa mission de montrer par son exemple que l'homme est capable d'aimer tout le monde d'un amour parfait, grâce à l'amour qu'il a pour Dieu.

Rares sont les pages de l'histoire qui nous parlent d'une telle persévérance.

Un jour on lui a demandé comment il se faisait qu'en tout ce qu'il entreprenait il réussissait toujours et brillamment. Et il a dit:

"Je tire bien fort les voiles du voilier, j'attache solidement les cordes, je me fixe une destination. Alors je prends en main le gouvernail, avec une forte volonté et je me mets en route. Que la tempête soit forte je ne m'inquiète nullement, je ne change pas mon itinéraire, je continue ma route jusqu'à ce que j'arrive à destination". Voilà quelques exemples de la persévérance dans la poursuite du but qu'on se fixe. Nous devons avoir ces exemples toujours présents à l'esprit afin de nous en inspirer comme nos ancêtres l'ont fait, avec cette différence que eux ont payé de leur vie la défense des principes qui à leur époque étaient considérés par le monde comme une utopie, tandis qu'aujourd'hui les mêmes principes sont l'esprit même de notre temps.

Ce n'est plus le sacrifice de notre vie qui nous est demandé, mais, par contre, nous devons profiter de chaque moment de notre existence pour la mettre au service de l'unité de l'humanité, ce qui inévitablement entraînera notre propre salut.

Voilà le but sublime que chacun de nous a tout intérêt de se fixer.

Et une fois ce but futé nous devons le poursuivre avec persévérance sans attacher la moindre importance à ces " qu'en dira-t-on", toujours si nombreux.

En voulez-vous quelques exemples?

Si je suis juif, que j'accepte, comme le demande la foi Bahá'ie, de mettre sur le pied d'égalité Moïse et Jésus? Mais voyons qu'en dira-t-on chez nous, puisqu'il n'y a jamais eu un prophète aussi grand que Moïse.

Si je suis chrétien, que j'accepte, comme le demande la foi Bahá'ie, de mettre sur le pied d'égalité Jésus avec les autres prophètes? Mais voyons qu'en dira-t-on à l'Église, pour qui Jésus n'est pas un prophète, mais le Fils de Dieu.

Si je suis musulman, que j'accepte, comme le demande la foi Bahá'ie, qu'après Muhammad il y a eu d'autres prophètes, et il y en aura d'autres encore? Mais voyons qu'en dira-t-on chez nous, puisqu'il est admis que Muhammad est le dernier prophète.

Et dire que l'acceptation sans réserve de l'unité de base de toutes les religions et l'unité de leurs fondateurs est la première condition pour la réalisation de l'unité de l'humanité, cette unité sans laquelle son salut est impossible, cette unité que nous nous sommes fixé comme but à atteindre.

Si je suis juif, chrétien ou musulman, que j'accepte comme le demande la foi Bahá'ie que la femme est l'égale de l'homme? Mais voyons qu'en dira-t-on, puisque la loi de l'Etat ne lui accorde pas les mêmes droits, et que les Écritures disent clairement que la femme est inférieure à l'homme.

Et dire que sans la mise en application du principe de l'égalité des droits de l'homme et de la femme, la paix universelle est impossible, cette paix à laquelle nous aspirons tous.

Si je suis juif, chrétien ou musulman, que j'accepte de " changer " de religion, ou que mon fils " change " de religion? Mais voyons qu'en dira-t-on?

Et dire qu'au point de vue spirituel, on ne change pas de religion. Tout ce qu'on fait c'est qu'on évolue spirituellement en suivant la loi de l'évolution religieuse de l'humanité, comme on évolue scientifiquement en suivant les lois de l'évolution scientifique.

Cette évolution spirituelle n'est-elle pas une nécessité pour la réalisation de l'unité et de la paix?

Il y a encore bien d'autres " qu'en dira-t-on " qu'on ne peut pas éviter quand on accepte les principes Bahá'is. Dans tous les cas si j'ai eu le courage de faire fi de ces " qu'en dira-t-on " et que j'accepte ces principes, que je ne fasse pas partie des trois premières catégories d'adhérents, mais de la quatrième catégorie dont parle Jésus dans sa parabole du semeur:

"Un semeur sortit pour semer. Comme il semait, une partie de la semence tomba le long du chemin, les oiseaux vinrent et la mangèrent. Une autre partie tomba dans les endroits pierreux où elle n'avait pas beaucoup de terre. Elle leva aussitôt, parce qu'elle ne trouva pas un sol profond, mais quand le soleil parut elle fut brûlée et sécha faute de racines. Une autre partie tomba parmi les épines. Les épines montèrent et l'étouffèrent. Une autre partie tomba dans la bonne terre: elle donna du fruit, un grain cent, un autre soixante, un autre trente". (Mat. 13/9).

Et Jésus d'expliquer sa parabole.

"Vous donc, écoutez ce que signifie la parabole du semeur. Lorsqu'un homme écoute la parole du royaume et ne la comprend pas, le malin vient et enlève ce qui a été semé dans son coeur: cet homme est celui qui a reçu la semence le long du chemin.
Celui qui a reçu la semence dans les endroits pierreux, c'est celui qui entend la parole et la reçoit aussitôt avec joie ; mais il n'a pas de racine en lui-même, il manque de persévérance et, dès que survient une tribulation ou une persécution à cause de la parole, il y trouve une occasion de chute. Celui qui a reçu la semence parmi les épines, c'est celui qui entend la parole, mais en qui les soucis du siècle et de la séduction des richesses étouffent cette parole, et la rendent infructueuse. Celui qui a reçu la semence dans la bonne terre, c'est celui qui entend la parole et la comprend, il porte du fruit et un grain en donne cent, un autre soixante, un autre trente". (Mat. 13/18/23).

Que signifie " un grain en donne cent " si ce n'est qu'à partir du moment où celui qui comprend la nécessité des principes tels que l'unité du genre humain, la recherche individuelle de la vérité, l'unité des prophètes, l'unité, comme but de la religion, l'accord de la religion avec la science, l'abandon des préjugés, l'égalité des droits de la femme et de l'homme etc., etc., tous ces principes et bien d'autres enseignements résumant la Parole de Dieu pour aujourd'hui ; qu'à partir du moment ou celui qui s'engage à les mettre en pratique et à les propager il y en ait grâce à ses efforts cent comme lui.

C'est ainsi que l'humanité peut s'acheminer vers un monde meilleur que celui d'aujourd'hui.


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8.7. La parole, cette arme à double tranchant

Les diplomates disent:

"Tourne sept fois ta langue dans la bouche avant de te taire".

Les hommes de science nous donnent le même conseil. Ainsi, par exemple, lorsqu'on demanda à Einstein un principe infaillible pour réussir, il répondit:

"Si A est le succès, la règle peut s'exprimer ainsi:

A = X + Y + Z

X représente le travail, Y le divertissement et Z avoir un boeuf sur la langue.

Si la loi du silence nous est recommandée avec tant de clarté, indiscutablement c'est pour nous exhorter à bien penser avant de parler.

Et c'est une nécessité quand il s'agit du respect de la dignité humaine. L'homme n'est-il pas respecté par sa parole, et ne perd-il pas toujours le respect qu'on lui doit, également par sa parole? Or le respect de la dignité humaine s'impose aujourd'hui plus que jamais, car l'homme n'est plus l'enfant qu'il était il y a mille ou deux mille ans, il entre dans le stade de la maturité, ce stade qui implique que l'homme soit vigilant quant au respect de sa dignité. Ce à quoi l'exhorte avec force la foi Bahá'ie, étant donné que celle-ci est précisément destinée au stade de maturité de l'humanité.

Dans les Écrits bahá'is, nous en avons d'abondantes références. Ainsi, par exemple, nous y lisons:

"Tu es ma lampe, et ma lumière est en toi".

"Tu es ma forteresse".

"Tu es ma gloire".

"Tu es le soleil des cieux de ma sainteté, ne permets pas que les souillures du monde viennent éclipser ta splendeur. Déchire le voile de la négligence afin d'émerger resplendissant des nuages et de parer toutes les choses de la robe de vie".

Avec de telles paroles adressées à l'homme d'aujourd'hui, il lui convient donc de prendre conscience de sa dignité et de veiller à ne pas être humilié aux yeux de ses semblables, mais, bien au contraire, d'être de plus en plus respecté et estimé.

L'un des moyens pour y parvenir, c'est la parole, cette parole qui peut l'humilier, comme elle peut l'élever aux yeux de tous, cette parole qui peut être la cause de l'amour, comme elle peut créer la haine.

La parole est donc une arme à double tranchant.

Pour étudier cette question commençons d'abord par la mention des effets bienfaisants de la parole.

En tout être humain on peut trouver de bonnes qualités, comme on peut en trouver de mauvaises. Et par sa nature l'homme est très sensible à la mention de ses bonnes qualités, ce qu'on peut appeler éloges justifiés. Surtout quand ces éloges sont spontanés et sans arrière-pensée.

On a demandé à Einstein si jamais il a été impressionné par un éloge, et il a raconté cette histoire:

"Un enfant venait régulièrement chez moi pour que je lui fasse ses petits problèmes d'arithmétique. Et chaque fois, en échange, il m'apportait des bonbons. Un jour je lui ai demandé s'il était content de ce que je faisais. "Oh - me répondit-il - vous êtes formidable. Notre institutrice n'a jamais trouvé une seule erreur dans tout ce que vous faites." Et c'est de cet éloge de l'enfant que j'ai gardé le souvenir le plus doux de ma vie".

L'éloge remplace avantageusement la demande du pardon dans le cas où l'on commet une faute, et que l'on voudrait être pardonné. Ce qui est si bien illustré par cette histoire:

En servant un sculpteur qu'il admirait, un maître d'hôtel dans son émotion renversa un verre de vin sur son vêtement.

"Ça ne me serait pas arrivé en servant un moins grand homme", lui dit-il en réparant les dégâts avec sa serviette.

A quoi le sculpteur répondit à son admirateur confus

"Voilà bien le plus grand compliment que l'on m'ait jamais fait".

Les politiciens se servent de l'éloge pour gagner leur cause.

Pendant la guerre de Sécession, le Président Lincoln avait coutume de parler avec éloge des Confédérés.

"Monsieur le Président - demande quelqu'un -comment pouvez-vous parler ainsi de vos ennemis? Ne vaut-il pas mieux les détruire?"

"Mais le meilleur moyen de les détruire, c'est de les mettre de mon côté", rétorqua le Président.

A ce propos remarquons que l'éloge est bien plus efficace quand il n'est pas direct, mais vient par un tiers. Il y a une proverbe arabe qui dit: "Bénie la bouche qui profère une parole bienveillante, trois fois bénie celle qui la répète".

On a souvent tendance à ne voir que simple politesse, sinon même une flatterie dans l'éloge qu'on nous adresse directement et le fait qu'il a été fait devant d'autres, hors de notre présence, nous paraît un gage de sincérité.

L'éloge devant un tiers, ou même un mot très vaguement aimable prononcé devant un tiers est tellement efficace qu'il faut s'en servir pour réconcilier ce qui paraît inconciliable.

Dans un magasin il y avait deux vendeuses qui se regardaient toujours en chien de faïence. Un beau jour les employés furent étonnés de voir qu'elles se prirent d'amitié l'une pour l'autre. Quelqu'un demanda au directeur s'il s'en était aperçu.

"Bien sûr, répondit-il en souriant. Un jour j'ai entendu l'une d'elle dire à propos de l'autre: "Mais c'est naturel que le patron l'aime mieux, elle est plus belle que moi, et gentille avec les clients." J'ai rapporté ces propos à l'autre, et c'est ainsi que j'ai créé un admiration réciproque entre elles".

Si la vendeuse dit que sa collègue était plus belle et qu'elle l'a dit en son absence, c'est que c'était juste. Et c'est cet esprit de justice qui a tout arrangé.

C'est de cet esprit de justice que l'on doit s'inspirer quand on veut profiter de ce talisman suprême qu'est la PAROLE.

Qu'est-ce que la justice, si ce n'est que le fait de désirer pour son prochain ce qu'on désire pour soi-même. Or nous désirons qu'on fasse notre éloge, l'esprit de justice implique donc qu'on ait le même désir à l'égard de notre prochain, c'est-à-dire qu'on fasse son éloge, bien entendu justifié. Par une telle attitude, non seulement on réjouit son coeur, ce qui est le but même de la religion, mais, en plus, on contribue à l'épanouissement de sa personnalité. En effet, c'est dans la nature humaine de justifier l'éloge dont on fait l'objet, c'est-à-dire de s'efforcer de ressembler, le mieux possible, à la bonne image que les autres se font de soi.

On dit que la plante humaine ne peut s'épanouir qu'au grand soleil de l'éloge.

D'une manière imagée un Bahá'i doit toujours avoir avec lui une loupe pour découvrir les qualités apparemment imperceptibles de son prochain et d'en parler surtout à un tiers, contribuant ainsi à l'entente et l'harmonie, but qu'il se fixe lorsqu'il s'engage dans la communauté Bahá'ie.

N'oublions pas que la charité bien ordonnée commence à la maison. Partant de là tout ce qui vient d'être dit, doit être mis en pratique, avant tout, à la maison. Nulle part les mots gentils et les compliments ne sont plus nécessaires qu'au sein de la famille. Et c'est là que, malheureusement les paroles qui réchauffent le coeur et les égards sont le plus rarement accordés. Dans la vie quotidienne d'une famille les mérites sont considérés comme allant de soi, et les frictions inévitables sont démesurément grossies, si bien que personne ne songe plus à rendre hommage à personne.

Au sein d'une famille Bahá'ie, les parents doivent profiter de la moindre occasion pour échanger des compliments, contribuant ainsi à leur mutuelle estime et créant une ambiance d'harmonie, ce qui servirait de meilleure leçon pour les enfants. Parallèlement, les parents doivent profiter des effets des PAROLES encourageantes pour contribuer au développement de leurs enfants et à l'épanouissement de leur personnalité.

Il y a encore beaucoup à dire sur les bienfaits de la parole. Mais arrêtons-nous pour voir un peu le revers de la médaille.

De ce point de vue, avant tout il faut mentionner la MÉDISANCE, c'est-à-dire les propos malveillants concernant une personne. Peu importe que ces propos soient fondés ou non ; dans tous les cas, leurs effets néfastes sont inévitables et irréparables. Une petite histoire pour illustrer les effets du commérage.

Au cours d'une longue maladie, un homme s'était laissé pousser la barbe et la moustache. Quand sa femme le rejoignit dans le village où il était en convalescence, il décida de se raser. En deux temps, un jour la barbe, le lendemain la moustache. Un matin en quittant la salle à manger de l'hôtel où ils étaient descendus ils entendirent une dame âgée dire à une autre:

"Je ne sais pas qui est cette femme, mais voilà le troisième homme avec qui elle prend son petit déjeuner cette semaine".

Et ce n'est pas la première fois que la médisante en parlait à tout le monde, de sorte que la bonne femme devint la cible du village. Elle demanda alors au patron de l'hôtel d'expliquer à la bavarde qu'elle se trompait. Mais le tort était déjà fait, et il n'y avait plus moyen de le réparer.

Il y a une histoire attribuée au Prophète Muhammad, histoire qui illustre bien l'impossibilité de réparer le tort causé par le commérage:

On raconte que l'un de ses voisins demanda un jour au Prophète comment réparer le préjudice causé à un ami qu'il avait faussement accusé. Le Prophète lui enjoignit de faire le tour du village et de déposer une plume d'oie sur le seuil de chaque maison. Le lendemain le Prophète ordonna: "A présent va ramasser les plumes". Et l'homme de protester: "Impossible, le vent a soufflé toute la nuit, et elles sont irrémédiablement dispersées". "C'est exact - dit le Prophète - Et il en est de même des paroles imprudentes que tu as prononcées contre ton voisin".

Il y en a qui justifient leur médisance en disant que leurs propos sont fondés et justes. Que leurs propos soient fondés ou pas, ce qui importe c'est la conséquence néfaste de la médisance, conséquence qui est toujours l'humiliation et la désunion, l'une comme l'autre étant des actes antireligieux, car le but de la religion, c'est l'élévation du rang de l'homme et l'union de tous.

Partant de là, la médisance dans la foi Bahá'ie est interdite au même titre que le meurtre et l'adultère. Je dis bien au même titre que le meurtre et l'adultère, car Bahá'u'lláh en parlant de l'interdiction du meurtre et de l'adultère mentionne immédiatement la médisance.

Ce qui n'est pas difficile à comprendre. Car, si dans le premier cas, c'est la vie du corps qui est supprimée, et dans le second - la vie familiale, dans le cas de la médisance, c'est la vie de l'esprit qui est tuée. En effet, pour l'état d'esprit qu'y a-t-il de plus néfaste que la discorde et la haine, conséquences inévitables de la médisance.

Nous lisons dans les Écrits bahá'is ("Les Paroles Cachées" de Bahá'u'lláh - M.E.B. Bruxelles):

"La langue est destinée à me mentionner, ne la souillez pas en dénigrant autrui. Si le feu du moi vous embrase, souvenez-vous de vos propres fautes et non de celles de mes créatures, attendu que chacun se connaît mieux que les autres".

Ou encore:

"Le plus grand péché et le pire des défauts humains est la médisance, et ceci surtout quand elle vient de la part des amis. S'il y avait un moyen d'y mettre fin, et que chaque ami ne fasse que l'éloge des autres, alors les enseignements de Bahá'u'lláh se propageraient, les coeurs seraient rayonnants, les âmes deviendraient célestes, et le monde humain atteindrait le bonheur.
J'espère que les amis auront de la répugnance pour leur médisance, et qu'ils feront l'éloge les uns des autres, qu'ils considéreront la médisance comme passible de châtiment divin, et qu'ils en arriveront au point où dès qu'un ami prononce un mot de médisance, il soit discrédité aux yeux de tous. Car le défaut le Plus répugnant est de chercher les défauts des autres et non pas leurs qualités. Autant que possible il faut fermer les yeux aux défauts pour ne voir et ne parler que des qualités des gens" (Extraits des Écrits d`Abdu'l-Bahá).

`Abdu'l-Bahá subordonne donc la propagation de la foi Bahá'ie et par conséquent, le salut de l'humanité à ce qu'il soit mis fin à la médisance.

Et pour y mettre fin il ne suffit pas de s'interdire la médisance. Il faut ne pas devenir soi-même le complice du médisant en l'écoutant avec une attention encourageante, car dans ce cas la médisance devient trois fois dégradante

pour celui qui médit, pour celui dont on médit et pour celui qui prête l'oreille à la médisance.

Quelle attitude faut-il alors prendre devant un médisant? Une attitude qui lui fasse comprendre que vous le désapprouvez. A vous d'en décider. On peut dans son coeur invoquer Dieu, on peut éventuellement changer la conversation, on peut garder un silence absolu.

Remarquons que ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on nous interdit la médisance. Il y a plus de 2500 ans, Confucius citait la médisance comme l'un des sept cas où le mari pouvait répudier sa femme. Mais jamais dans l'histoire des religions la médisance n'a pas été bannie avec tant de force que dans les Écrits bahá'is. Et ceci pour la simple raison que le message Bahá'i s'adresse à une humanité condamnée à s'unir, et rien ne nuit autant à l'union que la médisance.

Il y en a qui prétendent ne pas vouloir médire, mais sous prétexte de franchise, critiquent leur prochain. Un tel comportement est aussi proscrit dans la foi Bahá'ie. D'abord parce que parler des défauts de son prochain, c'est parler de ses propres défauts et, par conséquent, s'avilir.

Un homme extrêmement laid visitant une exposition de tableaux modernes dit au peintre qui exposait ses Âœuvres:

"Regardez-moi ce tableau ! Au lieu d'un homme vous avez fait un singe".

Et le peintre de répondre:

"Monsieur, c'est un miroir, ce n'est pas un tableau". Si le visiteur s'est aperçu de la laideur, c'est qu'il avait lui-même cette laideur. Si devant quelqu'un on s'aperçoit de sa " laideur" (ce défaut) et si on en parle, on avilit son prochain et on s'avilit soi-même: double erreur.

Mais ce qui est bien plus grave, c'est que par des propos malveillants on attriste son prochain. Or attrister son prochain est un acte antireligieux, car le but de la religion c'est de donner la joie à son prochain, et non pas l'attrister. De tout ce qui a été dit, on conclut qu'en interdisant la médisance on contribue au respect de la dignité humaine, et à l'entente et à l'harmonie entre les hommes. Il faut s'y entraîner. La meilleure occasion pour un tel entraînement est la vie familiale. Car c'est là que les défauts se voient facilement à cause du contact permanent, et c'est là qu'on a l'occasion d'en parler.

Notre responsabilité commence donc au sein du foyer familial, une responsabilité non seulement pour le présent, mais encore et, surtout, pour l'avenir. Car c'est là que la génération future se forme. Dans une famille où papa médit devant le fils aîné ; et maman devant le cadet, (ou tous les deux devant leurs enfants parlant des autres), les parents s'avilissent eux-mêmes, et perdent le respect que les enfants leurs doivent. De plus par une telle attitude ils deviennent la cause de la désunion entre les enfants. Ajoutons à cela le danger que cela présente pour l'avenir, étant donné que l'image de cette ambiance de médisance se grave dans l'esprit des enfants, qui facilement s'en inspirent quand ils seront grands.

Agissant ainsi nous ne pouvons pas nous attendre à ce qu'en grandissant nos enfants puissent s'abstenir de la médisance. Cela reviendrait à les rendre paralytiques et à nous attendre à ce qu'ils puissent marcher.

Puisqu'on parle de la famille, fruit de l'union conjugale, n'oublions pas que ce qui nuit profondément à cette union, c'est non seulement la médisance, mais les propos blessants qu'éventuellement les partenaires pourraient échanger.

Bahá'u'lláh compare la langue au "feu qui couve", et en faisant cette comparaison il ajoute:

"Tandis que le feu naturel consume le corps, le feu de la langue consume les esprits et les coeurs. Celui-là ne laisse aucune trace après une heure, tandis que celui-ci dure des siècles".

Ne pourrait-on pas en déduire qu'il vaut mieux appliquer le fer rouge sur le corps de son prochain plutôt que de lui adresser des paroles qui le feront souffrir pour toujours?

Un dernier mot pour finir.

En parlant des effets néfastes que la PAROLE est capable de produire, j'ai mentionné la médisance et les propos blessants, mais il y a encore un autre effet non moins néfaste, c'est l'abus des paroles que Bahá'u'lláh compare à un " poison mortel".

Et pour éviter cet effet je m'arrête, autrement il y a encore beaucoup à dire sur la parole en tant qu'une arme à deux tranchants.


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8.8. Les derniers seront les premiers (Humilité)

Il y a une histoire orientale qu'on nous raconte à l'école Bahá'ie quand on veut étudier la question de l'humilité.

Ayez, le Grand Vizir du Sultàn Mahmud, craignant d'oublier son humble origine et redoutant de s'enfler d'orgueil, avait caché ses vieux vêtements dans un coffre qu'il ouvrait en secret le matin et le soir.

Les mauvaises langues rapportèrent au Sultàn que Ayàz abusait des faveurs royales et qu'il le trahissait s'appropriant une partie du trésor.

Le Sultàn se laissa influencer par ses propos malveillants et ordonna qu'on ouvrît le coffre en question. Ne trouvant que des vêtements en lambeaux, il convoqua Ayàz pour demander l'explication.

C'est - répondit-il au Sultan - pour ne pas oublier mon humble origine et les faveurs de Votre Majesté, sans lesquelles je ne serais pas ce que je suis.

Profondément touché le Sultan aima plus que jamais l'humilité de son ministre et lui accorda plus de confiance et de pouvoir, ce qui éleva Ayàz aux yeux de tous.

Ne pourrait-on pas voir dans cette histoire ce qui caractérise essentiellement un comportement humble, à savoir, les quatre points suivants:

1 ° Voir ses faiblesses
2° Ne pas voir ses qualités
3° Voir les qualités des autres
4° Ne pas voir les faiblesses des autres.

En effet:

1° Ayàz voyait sa faiblesse humaine qui à tout moment l'exposait au danger d'être enivré par la gloire.
Pour lutter contre cette faiblesse il a trouvé son moyen à lui.

2° Ayàz fermait les yeux à son rang.

3° Ayàz avait constamment devant les yeux les faveurs royales.

4° Ayàz ne voyait pas la légèreté avec laquelle le Sultan s'était laissé influencer par les médisants, et lui restait toujours reconnaissant.

Si on respecte ces quatre points, on peut dire qu'on est engagé sur le chemin de l'humilité. Ce qui automatiquement attire la sympathie et le respect de tout le monde, car personne n'aime, ni ne respecte les orgueilleux.

Nous allons développer ces quatre points plus en détail:


I. - Le fait de voir ses faiblesses.

C'est la définition même de l'humilité. Car selon le dictionnaire l'humilité est la vertu qui résulte du sentiment de notre faiblesse.

L'homme a-t-il réellement des faiblesses? Oui et non.

En effet, selon la conception Bahá'ie, l'homme possède deux natures: sa nature élevée ou spirituelle et sa nature inférieure ou matérielle. Sa nature spirituelle se manifeste par la force morale, par les vertus ; sa nature matérielle se manifeste par la faiblesse morale, par les défauts.

C'est cette deuxième nature que l'homme doit avoir constamment devant les yeux pour être toujours prêt à lutter contre elle. Si on ne voit pas un ennemi devant soi, on ne s'apprête pas à lutter.

D'une manière imagée on peut dire que l'homme est exposé à une double force, l'une spirituelle qui le tire vers le haut, et l'autre matérielle qui le tire vers le bas.

Notons que le monde végétal aussi est exposé à une double force: la force de gravitation qui tire la plante vers le bas, et la force de croissance qui tire la plante vers le haut.

Tant que la plante lutte contre cette force qui la tire vers le bas, elle croit, et à partir du moment où elle cesse cette lutte, elle se penche vers le bas, elle dépérit.

Il en est de même en ce qui concerne l'homme. Tant qu'il lutte contre cette force de sa nature matérielle qui le tire vers le bas, il " croît", il progresse, il s'élève, et c'est cette lutte qui conduit à l'humilité. Comme cette lutte contribue à notre élévation, il faut en déduire que l'humilité conduit à l'élévation de l'homme.

Voilà pourquoi Bahá'u'lláh dit:

"L'humilité élève l'homme et l'orgueil l'abaisse au dernier degré de l'humiliation". L'humilité n'humilie donc pas l'homme, bien que les deux mots soient de même origine.

Rappelons-nous que les hommes les plus grands dans le domaine de la religion, comme dans le domaine de la science, étaient les hommes les plus humbles.

Jésus ne voulait pas qu'on lui attribue cette vertu appelée BONTÉ. Quand on lui a dit " Bon maître " , il a protesté en disant: "Pourquoi m'appelez-vous bon? Il n'y a que mon père qui est bon".

Le Prophète Muhammad, en tant que messager de Dieu, ne pouvait pas commettre de péché, ce qui n'empêche qu'il demande à Dieu de lui pardonner les péchés du passé et de l'avenir.

`Abdu'l-Bahá dans une prière émouvante dit: "O Seigneur ! mes péchés sont les plus grands de tous. Avant tout pardonne donc mes péchés".

Un tel degré d'humilité les a-t-il humiliés? Bien au contraire, ce sont les personnalités les plus glorifiées. L'expérience montre donc que l'humilité conduit à la gloire dans le domaine de la religion.

Et il en est de même dans le domaine de la science et des lettres.

Newton attribue ses mérites à ses prédécesseurs en disant que si on le voit si haut, c'est qu'il est porté sur les épaules des géants.

Quant à ses découvertes, il les compare aux coquillages que trouve un enfant au bord d'un océan sans limite.

Dans le domaine de la littérature citons l'exemple de Victor Hugo ou de Lamartine. Certain jour Victor Hugo reçoit une lettre simplement adressée " Au plus grand poète du siècle". Il saute aussitôt dans un fiacre pour se rendre chez Lamartine. "C'est pour vous", lui dit-il. "Pas du tout, certainement pour vous", répond Lamartine.

Finalement ils ouvrent le pli: la lettre était pour Musset.

Tous ces grands hommes voyaient leur " faiblesse " là où ils étaient considérés comme forts, et ils étaient forts.

Mais il y en a qui sont faibles et qui ne voient pas leur faiblesse.

A titre d'exemple citons quelques cas:

1° Le cas où l'on manque d'objectivité, où l'on ne voit pas les choses telles qu'elles sont en réalité.

Un monsieur se rend chez un photographe pour prendre ses photos.

"Mais dites-donc, je suis moche sur ces photos", sécrie-t-il.

Et le photographe de demander:

"Voulez-vous que je les retouche?".

2° Le cas courant où l'on croit avoir toujours raison.

Un courtier prétentieux dit un jour à Talleyrand:

"Je ne parle pas beaucoup. Mais quand je dis quelque chose, ce n'est pas pour rien. Je suis sûr de mon opinion. Et je ris de tous ceux qui me trouvent ridicule.

"Alors - constata Talleyrand - personne au monde ne doit rire autant que vous".

A la première réunion du groupe Bahá'i à New-York chacun des membres insistait sur son opinion. Arrive un télégramme d`Abdu'l-Bahá disant: "Lisez le verset 30 du chapitre 19 de l'Évangile St. Matthieu".

Les amis ouvrent l'Évangile et ils y lisent:

"Plusieurs parmi les derniers seront les premiers, et plusieurs parmi les premiers seront les derniers".

Et ils comprirent que personne ne doit s'ériger en supérieur par rapport à son prochain, et ils se rappelèrent cette parole de Bahá'u'lláh qui dit:

"De tous les hommes, le plus négligent est celui qui discute vainement et qui cherche à s'élever au-dessus de son frère".

Pour un Bahá'i l'une des occasions pour s'entraîner à l'esprit d'humilité est précisément fournie par les réunions régulières où les membres de la communauté se consultent sur les affaires d'intérêt général.

3°Le cas où l'on voit qu'on a tort, mais on manque de force morale pour dire les trois mots les plus difficiles à prononcer: "J'ai eu tort".

Un jour la reine Victoria se promenait en barque sur une rivière. Une villageoise qui l'observait dit à son pasteur:

"Vous ne trouvez pas cela ridicule?"

"Mais quoi donc?"

"Mais de voir la reine ramer sur une rivière un dimanche".

Le pasteur lui rappela que Jésus lui-même s'était promené en barque sur le lac de Tibériade un jour de sabbat.

"Et alors - répliqua la villageoise - si on est deux à se tromper, cela ne prouve pas pour autant qu'on ait raison".

Il y a bien d'autres cas où l'on est faible, et où l'on ne voit pas sa faiblesse, et, par conséquent, on n'est pas humble, mais je me contente de la mention des trois cas que j'ai cités.


II. - Nous avons dit que la deuxième façon pour s'entraîner à l'esprit d'humilité, c'est de ne pas voir ses qualités.

A ce propos Bahá'u'lláh nous cite l'image de la terre qui tout en étant la source de nos richesses et de nos nourritures, avec toutes ses qualités, supporte le fardeau dont l'homme à la charge.

Il faut qu'il en soit de même en ce qui nous concerne. Nous devons supporter le fardeau des autres quel que soit notre rang ou quelles que soient nos qualités.

Le mot même HUMILITÉ vient de HUMILEM qui signifie " ce qui est à terre".

`Abdu'l-Bahá dit que si l'homme a mille qualités et un défaut, il faut qu'il ferme les yeux à ses qualités pour voir son défaut et s'efforcer de s'en débarrasser. Et il cite cette image: Supposez - dit-il - que vous avec une maison en très bon état. Quant vous vous apercevez d'une fissure quelque part vous oubliez tout ce qui est en bon état et vous vous mettez à réparer cette fissure. Il faut qu'il en soit de même en ce qui concerne le moindre défaut, quelles que soient nos qualités.


III. - La troisième façon pour s'entraîner à l'esprit d'humilité c'est de voir les qualités des autres et d'en parler face à face et, encore mieux, en leur absence.

Bien entendu parler des qualités des gens face à face est très efficace pour contribuer à l'épanouissement de leur personnalité, car c'est dans la nature humaine de s'efforcer de ressembler de plus en plus à la bonne image que les autres ont de soi. Mais d'en parler en leur absence, c'est encore plus efficace, car un tel éloge est interprété comme un gage de sincérité.

Dans tous les cas, un Bahá'i a le devoir de chercher les qualités des gens et d'en parler aussi bien face à face, qu'en leur absence.

`Abdu'l-Bahá en fournissait l'exemple parfait. Malgré son dévouement sans pareil pour servir les autres, faisant allusion à l'esprit de service qu'animait un Bahá'i, il lui écrivait: "Pour le moment c'est toi qui es enivré par le vin de service. Mais `Abdu'l-Bahá aura-t-il sa part? Prie pour lui. L'intercession est la qualité des fidèles".

Autant aux Bahá'is il est interdit de médire, autant ils sont exhortés à dire du bien des autres.


IV. - La quatrième façon pour s'entraîner à l'esprit d'humilité c'est de ne pas voir les faiblesses des autres.

Parlant de l'habitude d'un individu de jouer au jeu de hasard quelqu'un dit à `Abdu'l-Bahá: "Maître, il a passé toute la nuit à jouer au jeu de hasard".

"Faire la même chose toute une nuit ! Quelle patience, quelle persévérance ! Que fera-t-il le jour où il se donnera à la cause de Dieu !"

Ne pas fermer les yeux aux faiblesses des autres, s'occuper de leurs défauts, tout en oubliant les siens est une attitude tellement répugnante selon Bahá'u'lláh, que c'est un cas qui attire la malédiction divine.

Voilà, chers amis, quelques attitudes par lesquelles on s'entraîne à l'esprit d'humilité, on manifeste l'humilité.

Mais il y a une attitude, une humilité que je n'ai pas citée jusqu'ici, et qui est pourtant incomparablement au-dessus de toute autre humilité. Et c'est la raison pour laquelle je vais la mentionner à la fin de mon exposé. Car on est plus attentif à un exposé lorsque le conférencier dit qu'il va le finir.

Le président annonce que le conférencier va parler pendant dix minutes, puis qu'on va aller souper.

"Je ne sais pas par où commencer", dit le conférencier.

"Par la neuvième minute", s'écrient les invités.

Je disais donc il y a une humilité devant laquelle toute autre humilité passe en second plan. C'est l'humilité devant Dieu, ou pratiquement, face à la foi révélée par Dieu. En effet, à ceux qui, face à la foi Bahá'ie, déclarent, avec raison, qu'ils s'en tiennent à la méthode scientifique, les Bahá'is disent que c'est la méthode scientifique qui implique la recherche personnelle de la vérité. Par conséquent, quelle que soit leur religion ou opinion, qu'ils cherchent indépendamment et personnellement si la foi Bahá'ie n'accomplit pas les prophéties de leur religion ; et s'ils n'ont pas de religion, qu'ils cherchent si la foi Bahá'ie n'est pas la SOLUTION à tous les problèmes qui se posent aujourd'hui à l'humanité.

Après cette recherche, s'ils ont encore le moindre doute, qu'ils appliquent la méthode scientifique particulière à notre époque, cette méthode qui dit CROIRE d'abord, avant de VOIR, et comme récompense VOIR ensuite ce qu'on a CRU.

Juste un exemple pour illustrer cette méthode.

On a d'abord CRU à l'existence de l'atome, comme la plus petite particule de matière, puis on a VU scientifiquement (par un calcul précis) que, par sa dimension, l'atome est la cinquante millionième partie d'un point. Quant à la puissance de cet atome, je n'en parle pas, vous ne la savez que trop.

Si c'est la méthode scientifique révolutionnaire de notre siècle, et bien, qu'on applique, à titre d'expérience, qu'on fasse l'expérience bahá'ie pour VOIR, par la suite, si on y gagne et si l'humanité aussi y gagne.

C'est à cette HUMILITÉ que les Bahá'is invitent l'humanité.


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8.9. Le martyre d'un enfant surdoué (Ruh'u'llah)

Parmi les 20000 martyrs qu'a donnés la foi Bahá'ie, il y avait pas mal d'enfants, qui dans la plupart des cas ont perdu leur vie parce que leurs parents étaient Bahá'is. Ils ne comprenaient donc pas pourquoi on les tuait.

Mais il y avait des cas où ces enfants comprenaient parfaitement la raison de leur martyre. Et parmi ces cas il y en avait un qui était tout à fait exceptionnel, car l'enfant bien que n'ayant pas plus de douze ans déjà enseignait la foi aux grands.

C'est le cas de Ruh'u'llah Varqà qui était le second fils de Varqà, médecin, poète, martyr de la foi au temps d`Abdu'l-Bahá.

Tout petit il se distinguait des autres enfants par son intelligence, ses connaissances, ses capacités exceptionnelles et surtout son cours C'est ce que nous allons voir par quelques exemples tirés de l'histoire de sa courte vie. A l'âge de six ans il accompagna son père durant le pèlerinage en Terre Sainte où ils ont eu l'honneur d'être présentés à Bahá'u'lláh.

Un jour Bahá'u'lláh qui accordait une attention spéciale à Ruh'u'llah lui demanda

"Qu'est-ce que tu as fait aujourd'hui?"

"J'ai appris des leçons d'enseignement de la foi", répondit l'enfant.

"Sur quel sujet?"

"Sur le retour". (Il s'agit du retour de Jésus pour les chrétiens, d'Imam Husayn pour les musulmans shiites, de Krishna pour les hindouistes etc.)

"Explique-moi ce que tu as compris.

"Par le retour il faut entendre le retour de quelqu'un d'identique".

"Tu as appris mot à mot ce que ton instructeur t'a dit. Explique-moi ce que toi, tu as compris".

"C'est comme la fleur d'une plante. Cette année la plante donne une fleur que vous cueillez et mettez de côté. L'an prochain la plante donne une autre fleur qui est identique à la fleur de cette année, mais ce n'est pas exactement la même fleur. C'est une fleur identique. C'est comme ça que j'ai appris le retour.".

"Tu as très bien compris", dit Bahá'u'lláh en le caressant et en lui donnant le titre " Monsieur l'instructeur de la foi".

Remarquons que c'est au cours de ce pèlerinage qu'un soir Bahá'u'lláh appela Varqà, le père de Ruh'u'llah en audience privée. Et il lui fit beaucoup de confidences. Entre autres, Il lui révéla le rang d`Abdu'l-Bahá après lui, tout en précisant les services inestimables qu'il va rendre à la foi. Profondément touché Varqà exprime le désir de tomber martyr pour la foi, et qu'il en soit de même en ce qui concerne l'un de ses fils.

De retour Varqà se consacre entièrement à l'enseignement de la foi. Quant à son fils Ruh'u'llah, avec la permission de son père, il prenait déjà la parole aux réunions où les gens venaient pour se renseigner sur la nouvelle révélation. Et malgré son jeune âge il avançait des arguments d'une simplicité et d'une force réellement étonnantes.

A remarquer que l'enfant faisait déjà des vers, don qu'il avait hérité de son père, Varqà.

Aux réunions d'enseignement c'est souvent Ruh'u'llah qui chantait des prières qu'il avait apprises par coeur et dont il expliquait le sens des paroles.

Après l'ascension de Bahá'u'lláh, Varqà repartit de nouveau en pèlerinage, cette fois pour se présenter à `Abdu'l-Bahá.

Il était accompagné de Ruh'u'llah ainsi que du frère aîné de celui-ci.

Un jour, la sueur d`Abdu'l-Bahá appela chez elle les deux frères. Dans la chambre il y avait également les deux demi-frères (Ces deux demi-frères plus tard trahirent la foi) d`Abdu'l-Bahá en train de copier leurs leçons.

La sueur d`Abdu'l-Bahá demanda au frère aîné:

"Que faites-vous en Iran?"

"On enseigne la foi", répondit Ruh'u'llah à la place de son frère aîné.

"Et qu'est-ce que vous dites quand vous enseignez la foi?"

"Nous disons que Dieu s'est manifesté".

"Et vous dites ça à tout le monde?"

"Non, pas à tout le monde, seulement à ceux qui sont capables de croire".

"Et comment vous les reconnaissez?"

"On les regarde dans les yeux".

"Alors regardez-moi dans les yeux, et dites-moi si je suis capable de croire".

Rùhu'llà s'agenouille devant elle, regarde dans ses yeux et dit en conclusion.

"Mais vous y croyez déjà".

Alors elle montre les deux demi-frères d' `Abdu'l-Bahá.

"Regarde dans leurs yeux et dis ce que tu penses".

De nouveau l'enfant s'agenouille et regarde fixement dans leurs yeux pendant longtemps.

"Inutile", conclut-il avec désespoir. Ça ne vaut pas la peine.

A la remarque de l'enfant la soeur d' `Abdu'l-Bahá éclata de rire.

Un jour Ruh'u'llah jouant avec un enfant Bahá'i, l'entend dire une parole injurieuse. Extrêmement bien élevé et poli Ruh'u'llah ne put s'empêcher de lui frapper sur la bouche. Varqà, son père, entend les pleurs et les cris, accourt pour punir Ruh'u'llah. Celui-ci court alors tout droit vers la chambre d`Abdu'l-Bahá où il trouve refuge. Derrière la fenêtre son père lui fait signe de sortir. Et Ruh'u'llah avec les mouvements de sa tête fait comprendre à son père qu'il ne sortira pas de la chambre pour se laisser punir.

`Abdu'l-Bahá s'aperçoit de ce qui se passe et demande à Ruh'u'llah

"Pourquoi remues-tu la tête?" Et l'enfant d'expliquer ce qui s'est passé, et que son père voulait le punir.

`Abdu'l-Bahá appelle le père et lui dit: "Dorénavant tu n'as pas le droit d'offenser cet enfant".

A partir de cet incident le père adopta une attitude très respectueuse à l'égard de son enfant.

Après ce second pèlerinage Varqà retourna à Tabriz, où il ne put rester longtemps à cause des intrigues des ennemis de la foi. Il quitta donc cette ville pour s'installer à Zanjàn. Là il reçut une lettre d`Abdu'l-Bahá dont il déduisait que les Bahá'is de cette ville allaient prochainement subir de terribles épreuves.

Trop connu comme une grande personnalité dans la foi des Bahá'is et ne désirant pas servir de prétexte pour des troubles contre les Bahá'is il décida de quitter cette ville pour Tihrán.

Avant d'aller plus loin notons que, selon le voeu de Bahá'u'lláh durant ses voyages Varqà était accompagné de son fils Ruh'u'llah, qui malgré son jeune âge lui servait de secrétaire, copiant soigneusement ses poèmes pour les envoyer à `Abdu'l-Bahá.

En réponse à l'un de ces envois, un jour Varqà reçoit une lettre d`Abdu'l-Bahá. La lettre, entre autres, parlait de l'effet de la plume de l'enfant dans le domaine du progrès de la foi. Convaincu que la plume d'un enfant ne peut contribuer au progrès de la foi, que si l'encre pour cette plume est son sang, Varqà déduit que c'est Ruh'u'llah qui partagera avec lui l'honneur du martyre.

Après cette parenthèse continuons le récit du voyage de Varqà quand il quitta Zanjàn. Durant ce voyage il était accompagné d'un ami, Haji Imàn et, comme toujours, de Ruh'u'llah.

Ils firent leur première escale dans un village non loin de la ville. Ils y passèrent la nuit. Le lendemain avant de continuer leur route, sur l'ordre du gouverneur, ils furent ramenés à Zanjàn.

Vers ce temps là à Téhéran on se préparait fiévreusement pour les festivités célébrant le cinquantenaire du règne de Nàsiri'd-Din Sháh. Et à cette occasion chaque province envoyait dans la capitale un régiment de cavalerie afin de donner plus d'éclat aux festivités.

Le gouverneur décida de confier au corps expéditionnaire ses prisonniers Varqà, Ruh'u'llah et Mirza Husayn, tous enchaînés afin d'être emmenés à Tihrán.

A quelques kilomètres de Zanjàn le corps expéditionnaire s'arrêta dans un village, où l'on amena les prisonniers à une réunion des notables et des prêtres.

Le chef du village dit à Varqà:

"Je ne comprends pas comment avec toute votre érudition vous avez abandonné la religion?

"Nous n'avons pas abandonné la religion, nous avons avancé dans la religion - répondit Varqà - Et puis, j'ai cette religion de naissance. Comme c'est le cas de mon fils, qui est la troisième génération. Tout ce que je fais c'est de prouver que mon père était dans la vérité.

Alors les prêtres s'adressèrent à Ruh'u'llah:

"Et toi, qu'est-ce que tu es?"

"Moi, je suis comme vous", répondit l'enfant.

"Comment, tu es musulman?"

"Non - intervint le père - il veut dire que sa religion, il l'a imitée, comme vous, de père en fils".

Furieux les prêtres s'écrièrent:

"Pourquoi ne les tue-t-on pas? Ils insultent le clergé !"

Là-dessus ils ordonnèrent de mettre des fers aux pieds de l'enfant téméraire.

Les prisonniers passèrent la nuit enchaînés.

Le lendemain il faisait un froid insupportable. Lorsqu'on mit Ruh'u'llah sur le cheval, les pieds toujours enchaînés, il couvrit ses pieds avec son manteau, ce que le père remarqua sans rien dire. En cours de route cependant, il lui fit cette remarque:

"Mon enfant, sache que depuis Adam jusqu'ici on n'a jamais vu un enfant de 12 ans emprisonné et enchaîné sauf Siyyid'l Sajidin (L'un des descendants directs du Prophète Muhammad) qui était le premier, toi, tu es maintenant le second. Et il n'y aura jamais un troisième. J'ai été si fier quand j'ai vu, que pour la foi, on a mis des chaînes à tes pieds. Et tu as eu honte, puisque tu les cachais avec ton manteau.

"Mais papa, j'avais les pieds gelés", répondit l'enfant.

Durant tout le voyage Ruh'u'llah était tellement heureux qu'il chantait des vers et des prières.

Voyant que Mirza Husayn avait son cou enchaîné, il lui dit:

"Si seulement on enlevait les chaînes de mes pieds pour les mettre autour de mon cou ! J'en serais si fier!"

Arrivés à Tihrán, ils furent conduits à la grande prison où étaient enfermés les assassins et les grands criminels. C'est ici que le voeu de l'enfant se réalise, car on mit autour de son cou une chaîne tellement lourde que sa tête pencha, et l'on fut amené à soutenir cette chaîne avec un étai en V renversé.

Arrivé à ce stade de notre récit, laissons la parole à Mirza Husayn, qui plus tard devait écrire l'histoire du martyre de Varqà et de son fils".

"Le père et le fils - raconte-t-il - ne pensaient qu'à se sacrifier pour la foi. Tout en étant en vie on peut dire qu'ils étaient déjà des martyrs.

Une nuit quand Ruh'u'llah était plongé dans le sommeil, son père passa la main sur le visage de l'enfant et dit:

"Seigneur, ne serait-il pas possible que tu l'acceptes en sacrifice !"

Ces paroles m'ont touché aux larmes.

Après l'attentat qui mit fin à la vie de Nàssiri'd-Din Shah la veille du cinquantenaire de son règne lés bourreaux firent irruption dans la prison. Terrifiés tous tes prisonniers se demandent mais qu'est-ce qui a pu se passer,".

Arrive le sous-directeur de la prison qui nous dit:

"Levez-vous, on vous emmène au tribunal".

On s'est levé et on a voulu prendre nos manteaux.

"Ce n'est pas la peine de les prendre" - nous dit-il.

A peine sortis nous avons vu sur les toits les soldats, fusils à la main, prêts à tirer comme s'ils avaient la mission de nous fusiller tous.

Les bourreaux, de leur côté, attendaient leur tour pour intervenir.

Hajib'-dawlih (Chef de la police de la cour) écumait de rage, courant à droite et à gauche.

"Enlevez leurs chaînes et amenez-les deux à deux", hurla-t-il.

"On a commencé par Varqà et son fils Ruh'u'llah, âgé de 12 ans. On les a poussés à l'intérieur d'un long couloir conduisant à une autre aile de la prison".

"Moi et Haji imàn, sommes restés dans la cour en attendant notre tour. Arrive le gardien de la prison pour prendre un falakih (Instrument destiné à la bastonnade. Il se compose d'un bâton troué à ses bouts afin d'y passer une corde pour attacher les pieds du condamné). On a cru que c'était pour fustiger Varqà. Puis on a vu un autre bourreau tenant une épée ensanglantée et allant la laver dans le bassin de la cour. Après lui un autre bourreau portant sous les bras les vêtements de Varqà".

"Ahuris, ne sachant ce qui se passait, nous attendions notre tour quand on a ouvert la porte du couloir comme pour nous y faire entrer. Et puis on entendit un vacarme inexplicable, et la porte se referma sans que nous soyons entrés.

"On a appris alors que Hajib'd-Dawlih aurait dit qu'on nous laisse pour demain".

"Il s'était donc passé quelque chose qui l'avait bouleversé au point qu'il n'avait même pas pu remettre son épée dans le fourreau, et que ce fut l'un des bourreaux qui la lui prit pour la laver dans le bassin".

"On nous a donc conduit dans notre cachot, où nous n'avions plus rien trouvé de ce que nous y avions laissé, ni manteau, ni matelas, ni couverture".

"Cela se passait dans l'après-midi avant le coucher du soleil. Terrifiés nous sommes restés sans nouvelles des Varqà. On a supposé que le père avait été exécuté, mais qu'est-ce qu'ils ont fait du fils, se demandait-on".

"Ecrasés par l'angoisse on est resté cloué à terre jusqu'à minuit sous le regard moqueur des gardiens. L'un disait:

"Demain son vêtement sera à moi".

L'autre rétorquait en disant:

"Et moi alors?"

Finalement on a supplié l'un des gardiens qui a été en bons termes avec nous de dire ce qui s'est passé. Et il nous a raconté ceci:

Hajib'd-Dawlih dès qu'il vit Varqà lui dit: Finalement vous avez fait ce que vous vouliez faire.

Nous n'avons rien fait - répondit Varqà.

"Quoi de plus ignoble que le crime (Il s'agit de l'assassinat du Shah. Et le chef de la police s'imaginait que les Bahá'is étaient les complices de l'assassin) que vous avez commis", hurla Hajib'd-Dawlih. "Dis maintenant lequel de vous deux vais-je tuer le premier, toi ou ton fils?"

"Peu importe lequel", répondit Varqà.

Alors Hajib'd-Dawlih tira son épée et l'enfonça dans le coeur de Varqà en disant:

"Et bien, comment vas-tu?"

"Mieux que toi", répondit Varqà.

Ensuite Hajib'd-Dawlih fit signe aux bourreaux de mettre le corps de Varqà en pièces.

Ruh'u'llah voyant son sang jaillir du corps déchiqueté de son père, criait et pleurait en disant

"Papa, papa, amène-moi avec toi".

Hajib'd-Dawlih lui dit:

"Ne pleure pas, je te prends chez moi, je demanderai au Shah un bon grade pour toi et tu seras bien payé".

Je ne veux ni grade, ni argent. C'est mon père que je veux. C'est chez lui que je veux aller". Et il se mit à pleurer.

Alors Hajib'd-Dawlih ordonna qu'on apporte une corde pour l'étrangler. N'ayant pas trouvé de corde on a apporté un falakih, de la corde duquel on s'est servi pour étrangler Ruh'u'llah. L'enfant commença à se débattre en agonisant. On abandonna son corps sans vie pour venir vous chercher. Et juste à ce moment le cadavre de l'enfant sursauta pour se jeter à plusieurs pas plus loin.

Ce sursaut du cadavre de l'enfant terrifia Hajib'd-Dawlih au point qu'il quitta immédiatement la prison en ordonnant de jeter les deux cadavres dans un puits.

"Les deux autres je les tuerai demain", dit-il en quittant la prison.

Ainsi se termina la vie de l'enfant surdoué qu'était Ruh'u'llah. Et son dernier mot avant d'expirer fut l'invocation de BAHÁ'U'LLÁH.


Maison d'Éditions Baha'ies - D/1981/1547/7



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9. FASCICULE 9 - La mesure de l'amour est l'amour sans mesure

"A mon oncle et mon frère qui ont tout sacrifié pour la foi"

PRÉFACE

Parlant de l'amour lors de l'une de ses causeries `Abdu'l-Bahá dit:

"Il est nécessaire d'avoir recours à un canal, une raison, un objet, un mode d'expression pour manifester l'amour.

Il nous faut trouver le moyen de répandre l'amour parmi les hommes. L'amour est illimité, infini et sans borne. Les choses matérielles sont limitées circonscrites, finies. Il est impossible d'exprimer l'amour infini d'une manière adéquate avec des moyens limités. L'amour parfait a besoin d'un intermédiaire désintéressé, absolument libre de toute entrave. L'amour de la famille est limité, les liens du sang ne sont pas les plus forts. Il arrive fréquemment que les membres d'une famille soient en désaccord et même se haïssent.

L'amour de la patrie a ses limites: l'amour d'un pays, capable d'engendrer la haine des autres pays, n'est pas parfait. De plus les compatriotes ne sont pas exempts de querelles intestines.

L'amour de la race est limité, bien que manifestant une certaine union, celle-ci est insuffisante ; l'amour doit être libre de toute restriction. Aimer sa propre race peut signifier haïr toutes les autres et, même entre eux, les gens de même race se détestent souvent.

Les alliances politiques sont fortement entachées par la haine entre les partis ; ce genre d'amour est très borné et incertain... Tous ces liens d'attachement sont imparfaits.

Il est évident que ces liens matériels limités sont insuffisants pour exprimer l'amour universel d'une manière convenable.

Le grand amour désintéressé pour l'humanité n'est entravé par aucune de ces attaches imparfaites et quelque peu égoïstes. Ce grand Amour est le seul amour parfait et il est accessible à tous les hommes. Et l'on ne peut le ressentir que par le pouvoir de l'esprit divin" (Causeries d`Abdu'l-Bahá à Paris p. 32. M.E.B. Bruxelles 1980).

C'est cet esprit divin qui instille dans les coeurs un amour qui n'est limité par aucune considération de famille, de race, de patrie ou de politique. Il est au-delà de toutes ces considérations, il est sans limites.

Un tel amour sans limites, ni mesure ne peut être atteint que par des moyens appropriés. Et comme précisément les conférences de ce fascicule expriment, bien que timidement, quelques uns de ces moyens, le présent recueil a été intitulé "La mesure de l'Amour est l'amour sans mesure".


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9.1. L'amour n'est pas un luxe, c'est une loi

L'inventeur de l'insuline, alors qu'il était tout jeune, avait pour compagne de jeux une petite fille qu'il aimait beaucoup. Puis, un jour, elle ne vint plus jouer avec Frédéric, et peu de temps après elle mourut d'un excès de sucre dans le sang.

Il ne l'oublia jamais et étudia la médecine pour trouver le remède à cet excès de sucre dans le sang.

Et il découvrit l'insuline.

Aujourd'hui des milliers de diabétiques vivent parce que Frédéric aima Jeanne.

Un tel amour émanant du coeur pur d'un enfant n'est pas comparable à l'amour tel qu'on l'entend communément dans le monde moderne d'aujourd'hui, amour dont je vais mentionner quelques caractéristiques.

Un premier trait caractéristique de l'amour à notre époque c'est l'idée de profit. Comme en toute autre chose d'ailleurs.

Deux personnes disent s'aimer l'une l'autre si chacune trouve dans l'autre un ensemble de qualités qui lui sont profitables (comme dans une marchandise). Il peut s'agir indifféremment de deux amis, ou d'un homme et d'une femme ; l'essentiel c'est que l'échange soit profitable.

Un deuxième trait caractéristique de l'amour c'est qu'on cherche d'abord à "être aimé" pour pouvoir "aimer". Dans ce but les hommes, par exemple, cherchent à devenir riches ou à acquérir une position sociale enviable, ou d'une manière générale, remporter un succès.

Les femmes, de leur côté, afin d'être aimées ont recours aux soins de beauté et se conforment à la mode, cette mode qui est variable et souvent si difficile à comprendre.

- Chéri - demande une femme à son mari - est-ce que tu m'aimeras quand j'aurai des cheveux blancs.

- Mais tu en as eu de toutes les couleurs, et je n'ai cessé de t'aimer.

Un troisième trait caractéristique de l'amour à notre époque c'est cet amour qu'on appelle "le coup de foudre". Ce grand amour est surtout suscité par l'attraction sexuelle.

Indiscutablement l'amour de Frédéric pour Jeanne ne rentrait dans aucune de ces catégories. Et c'est la raison pour laquelle son effet ne fut pas temporaire et qu'il a duré toute la vie de Frédéric.

Et si l'on étudie plus profondément la question de l'amour, on voit que l'amour est une loi dans tous les mondes: minéral, végétal, animal et humain.

Les éléments dont se compose le minéral, en général, sont retenus ensemble par la loi de l'attraction. Si un seul instant cette attraction disparaissait ces éléments ne resteraient pas assemblés et le minéral cesserait d'exister.

Il en est de même dans le monde végétal, avec cette différence que l'effet de cette attraction, de cet amour, confère aux plantes, en plus de la capacité de cohésion, le pouvoir de croissance.

Et il en est de même en ce qui concerne le monde animal, où l'effet de cette attraction, de cet amour est encore plus grand, car il donne lieu non seulement à la cohésion et à l'attraction, mais en plus, devient la cause de l'apparition des cinq sens.

Et nous arrivons au monde humain, où l'effet de cet amour est encore plus grand étant donné qu'en plus de la cohésion, de la croissance et des cinq sens il y a l'affinité entre les coeurs, avec la solidarité et la collaboration qui en résultent.

Mais tout cela, ce ne sont que les différents degrés de l'amour dans le monde physique, degrés qui se manifestent en conformité avec les implications du monde correspondant.

Selon les enseignements bahá'is le véritable amour c'est l'amour qui existe entre Dieu et les êtres humains.

Comment peut-on s'en faire une idée, afin de pouvoir s'en inspirer?

Pour les bahá'is étant donné que les messagers de Dieu sont les manifestations de Dieu, c'est par l'amour de ces manifestations de Dieu qu'on peut juger combien Dieu aime ses créatures.

L'une de ces manifestations de Dieu était Jésus. Aurait-il accepté tant de souffrance et finalement de mourir sur la croix, s'il n'avait pas tant aimé l'humanité? C'est pour l'amour de l'humanité qu'il s'est sacrifié.

Qui parmi nous aurait accepté de sacrifier ne fut ce qu'un de ses doigts pour son prochain? Jésus a pourtant donné tout son être, toute sa vie. Peut on imaginer un amour plus grand? C'est cela l'exemple de l'amour de Dieu pour les hommes.

Et aujourd'hui avons-nous une autre image de l'amour de Dieu pour ses créatures?

Oui, d'abord en la personne du Báb, précurseur de la foi bahá'ie.

Concernant son sacrifice l'éminent orientaliste français A.L.M. Nicolas écrit:

"C'est un des plus magnifiques exemples de courage qu'il ait été donné à l'humanité de contempler, et c'est aussi une admirable preuve de l'amour que notre héros portait à ses concitoyens. Il s'est sacrifié pour l'humanité, pour elle il a donné son corps et son âme, pour elle il a subi les privations, les affronts, les injures, la torture et le martyre. Il a scellé de son sang le pacte de fraternité universelle, et comme Jésus il a payé de sa vie l'annonce du règne de l'équité, de la concorde et de l'amour du prochain"("Siyyid 'Ali Muhammad dit le Báb")

Ce qui étonne les historiens c'est qu'on a chargé tout un régiment de sept cent cinquante soldats, de fusiller le Báb, comme si un peloton d'exécution ne suffisait pas.

Tel était pourtant l'esprit sanguinaire des bourreaux iraniens de l'époque.

C'est à ces bourreaux que Bahá'u'lláh, le fondateur de la foi bahá'ie lança son défi, ce qui lui a coûté cinquante années de vie de martyr. C'était pire que le martyre, car à chaque instant il était menacé d'être exécuté.

C'était un condamné à mort face à un roi, au sujet duquel je vais vous raconter une histoire afin de montrer combien il prenait plaisir à la vue du sang.

Le journal hollandais "De Telegraaf" rapporte cette anecdote concernant la visite de Nasir'i-Din Sháh en France:

Lors du voyage de ce Sháh (qui a tué plus de vingt mille adeptes de Bahá'u'lláh) on lui a montré à Paris l'exécution d'un criminel par la guillotine (Ce qui n'était nullement en usage en France lors de la visite des chefs d'Etat. Si on a fait exception c'est que probablement on savait combien le Sháh y prendrait plaisir). Le Sháh y a éprouvé un grand plaisir, et estimant que c'était justement pour lui faire ce plaisir qu'on lui avait montré l'exécution par la guillotine, il s'écria: "Bravo ! Bravo ! C'est formidable !" Puis s'adressant à une personnalité française qui l'accompagnait: "Décapitez-en maintenant un autre !".

C'est à un tel tyran sanguinaire que Bahá'u'lláh déclara sa mission d'établir la justice dans le monde. Il était donc facile à prévoir qu'il serait condamné à disparaître, et qu'il devrait s'attendre à chaque instant à être exécuté.

On dit que pour un condamné l'instant le plus atroce c'est l'attente devant la potence. Or, pour Bahá'u'lláh, ce temps d'attente ne dura pas un instant mais toute sa vie.

Et dire que Bahá'u'lláh était le fils d'un ministre, et par conséquent, qu'il pouvait jouir de tous les honneurs et de tous les plaisirs que sa haute position lui offrait. Mais il a tout abandonné pour consacrer sa vie à l'abolition des préjugés de race, de classe, de nation, de religion afin d'établir le règne de la concorde et de l'amour parmi les hommes.

Il sacrifia sa vie pour l'amour de l'humanité.

Jésus, le Báb, Bahá'u'lláh (pour ne citer que ces trois exemples parmi bien d'autres) étaient des êtres humains que Dieu avait choisis pour manifester son amour pour les hommes afin que ces derniers s'efforcent de s'en inspirer.

Et nombreux parmi les vingt mille martyrs bahá'is furent ceux qui s'en inspirèrent en nous montrant ce qu'est le véritable amour. Permettez moi de vous en citer un exemple.

Un bahá'i condamné à mort se trouvait par hasard chez l'un de ses coreligionnaires. Les bourreaux qui ne connaissaient le condamné que de nom vinrent le chercher. "Nous sommes venus pour emmener un tel" - dirent-ils à l'hôte. "C'est moi-même" répondit celui-ci. Là-dessus il fut emmené et décapité.

Qu'est-ce qui unissait à ce point ces deux amis?

Uniquement l'amour commun pour Bahá'u'lláh, en tant que manifestation de Dieu. Par conséquent c'était l'amour commun pour Dieu qui les unissait à tel point.

Voilà pourquoi `Abdu'l-Bahá dit: "Quand vous aimez, que ce soit en Dieu et pour Dieu". Et il explique que si on aime une personne pour telle ou telle qualité, comme cette personne n'est pas une création parfaite, et qu'elle a toujours des défauts, on ne peut s'empêcher d'être déçu dès que l'un de ces défauts se manifeste. Tandis que si on arrive à aimer Dieu, qui est la perfection même, on n'est jamais déçu. Et, par conséquent, si on aime une personne par amour de Dieu on n'est jamais déçu, non plus.

Et `Abdu'l-Bahá illustre son idée par une image selon laquelle il faut considérer tout être humain comme une lettre écrite par la main de Dieu.

En effet, si on aime une personne, on aime toute lettre venant de sa part, sans en voir le moindre défaut. On aime l'auteur de la lettre, et, par conséquent, on aime sa lettre malgré tous ses défauts.

Si donc les bahá'is sont exhortés à aimer leur prochain ce n'est pas qu'ils se voient contraints de le faire, malgré tous les défauts qu'ils voient en lui, malgré toute la mauvaise opinion qu'on se fait de lui. Non, avant tout il faut qu'ils arrivent à fermer les yeux aux défauts de leur prochain, qu'ils se fassent une bonne opinion de lui. Ce qui ne peut se faire que si on le considère comme une lettre de Dieu, ce Dieu qu'ils aiment. Autrement, explique `Abdu'l-Bahá, si vous traitez gentiment quelqu'un que vous considérez comme un méchant et comme un ennemi, c'est un compromis que vous faites avec votre conscience. C'est donc une hypocrisie, ce qui n'est pas permis.

`Abdu'l-Bahá a raison en disant que c'est une hypocrisie, car cela revient à jouer un rôle, et le mot hypocrisie vient précisément de hypocrisis, mot grec qui signifie "rôle joué".

Shoghi Effendi(Le Gardien de la foi bahá'ie qui a succédé à `Abdu'l-Bahá) illustre cet amour commun par une autre image.

Un jour quelqu'un lui a demandé comment on pouvait aimer tout le monde, étant donné cette diversité de goûts et de caractères. Et il a répondu en disant que deux frères peuvent avoir des caractères et des goûts différents bons ou mauvais. Mais puisque tous les deux aiment leur seul père, et savent que ce père les aime tous les deux, tout en sachant qu'en chacun il y a une bonne qualité, étant donné leur confiance en leur père, ils s'aiment. C'est ainsi - conclut Shoghi Effendi - que nous devons nous aimer les uns les autres par amour commun de Dieu.

La beauté de cette image est dans le fait que si on mettait les deux frères avec leurs tempéraments opposés en dehors de leur famille ils se haïraient. Mais au sein de leur famille l'image de l'amour commun pour leur père est constamment devant leurs yeux, et ils s'entendent bien.

Il faut qu'il en soit de même en ce qui nous concerne nous-mêmes. L'image de l'amour de Dieu doit donc se graver dans notre esprit. Plus cette image est forte, plus elle domine notre esprit, plus nous sommes capables de ne pas voir les défauts de notre prochain ("lettre du Bien-aimé") et, par conséquent plus nous sommes capables de l'aimer.

Nous pouvons donc dire que selon les enseignements bahá'is le véritable amour est l'amour du prochain par amour de Dieu.

Tout revient donc à aimer Dieu de plus en plus afin d'arriver à aimer notre prochain de plus en plus.

Et pour arriver à aimer Dieu de plus en plus il faut avant tout se mettre de plus en plus en contact avec Lui. Ce contact se fait par la prière qui est une conversation avec Dieu.

C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les bahá'is ont des prières obligatoires qu'ils récitent quotidiennement.

Mais ils ne se contentent pas de ces prières seulement. Ils lisent les Écrits sacrés tous les jours. Bahá'u'lláh a lui seul a écrit une centaine d'ouvrages. Et les bahá'is ont de quoi remplir leur temps de lecture.

Un dernier mot pour finir.

L'amour que Jésus a comparé à Dieu (et ceci pour souligner la grandeur de cette vertu), cet amour est-il une vertu nécessaire uniquement pour ce monde?

Robert Louis Stevenson dit:

"Il semble que la vie ait des limites trop étroites pour contenir un sentiment si tendre et si vaste, et il est inconcevable que la plus puissante de nos émotions doive se contenter des moments perdus de quelques années".

Les bahá'is lui donnent raison en disant que l'acquisition de cette vertu est surtout nécessaire pour l'autre monde.

C'est comme l'acquisition de la capacité de voir (cette capacité que l'on acquiert dans le sein de la mère), elle est surtout nécessaire pour le jour où l'enfant quitte le sein de sa mère. De même l'acquisition de la capacité d'aimer (cette acquisition qui se fait en ce monde) est surtout nécessaire pour le jour où nous quittons ce monde pour l'au-delà.

Mais l'enfant vous dirait (s'il pouvait parler)

"Dans le sein de ma mère je n'ai pas besoin d'yeux".

Ne sommes-nous pas un peu comme cet enfant?


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9.2. Ce récit est à lire. C'est le passé et l'avenir

Le professeur de catéchisme demande à l'un de ses élèves:

- Sais-tu ce qu'il y a dans la Bible?

- Oui, monsieur.

- Très bien, dis-moi ce qu'il y a dans la Bible.

- Les recettes de gâteaux de maman.

C'est triste qu'il en soit réellement ainsi de nos jours, car rares sont, non seulement les enfants, mais aussi et surtout les grands qui ne savent pas ce qu'il y a dans la Bible.

Ce n'est pas le cas chez les bahá'is qui dans leurs écoles enseignent non seulement les Écrits de Bahá'u'lláh, ou de Jésus, ou de Muhammad, mais également les paroles de tous les fondateurs de religions.

Notons que cette étude des Écritures est pour les bahá'is, plus facile que pour les autres, étant donné que lorsqu'ils y rencontrent des passages imagés ou allégoriques, ils en ont l'explication dans leurs propres Écrits. Ce n'est pas le cas pour les autres. C'est pourquoi la lecture des Écritures leur semble difficile. Et c'est surtout vrai en ce qui concerne les dernières pages de la Bible où St Jean parle des révélations que Jésus lui a faites.

Remarquez que j'ai dit "Révélations" et non pas "Apocalypse" ce qui d'ailleurs revient au même, car le mot "Apocalypse" vient du grec et signifie précisément "Révélations". Mais il n'y a rien 'a y faire, le mot reste comme le synonyme d'allégorie effrayante, tandis que le terme "révélation" éveille la curiosité.

Apparemment le langage de St Jean dans ses Révélations est fort obscur, mais une fois expliqué on est émerveillé par son contenu, étant donné qu'on y trouve le récit du passé et de l'avenir.

A titre d'exemple nous allons en lire une page, ce qui nous permettra de voir combien vraies étaient ses prophéties pour le passé, et combien vraies elles le sont pour le présent et, par conséquent, pour l'avenir, si toutefois on les étudie à la lumière des explications bahá'ies. Nous verrons que c'étaient pour ainsi dire des sceaux, qui aujourd'hui sont ouverts.

Et précisément à cette même page St Jean parle de l'ouverture des sceaux.

Concernant le premier sceau, St Jean dit:

"Voici: parut un cheval blanc. Celui qui le montait avait un arc." Ap. 6/2.

Le cheval, selon les Écritures c'est le symbole du mouvement en avant. L'une des significations du cheval et de son cavalier muni d'un arc c'est la théologie avec ses théologiens qui jusqu'ici, à tort ou à raison, avançait dans toutes les religions. Je dis "à tort ou à raison" parce qu'il y a eu des théologiens qui par leurs études ont rendu des services à la religion, tandis que d'autres, au contraire, par leurs interprétations erronées des Écritures ont fait beaucoup de tort à la religion. En tout cas le cheval blanc galopait bien vite jusqu'ici.

Mais avec tout son succès apparent, cette théologie ne pouvait pas pénétrer les esprits, ce que St Jean exprime en disant que le cavalier n'avait qu'un arc, la flèche nécessaire pour pénétrer le coeur lui manquait.

Mais c'était pour le passé.

Aujourd'hui l'instruction est généralisée et l'homme entre dans le stade de maturité. Ce qui fait qu'il n'a plus besoin de théologiens avec leur théologie.

Et c'est la raison pour laquelle dans la foi bahá'ie il n'y a pas de théologien avec leur théologie. La Parole de Dieu étudiée personnellement et indépendamment est la réponse à tout. De plus, afin de prévenir tout schisme, causé par des interprétations arbitraires et contradictoires, le droit d'interpréter la Parole de Dieu n'a été donné à personne. Ce qui devait être interprété l'a été par les deux interprètes successifs `Abdu'l-Bahá et Shoghi Effendi.

Concernant le deuxième sceau, St Jean dit:

"Et il sortit un autre cheval roux. Celui qui le montait reçut le pouvoir d'enlever la paix de la terre". Ap. 6/4.

Le rouge est le symbole du sang. C'est la guerre. Et le cavalier a précisément le pouvoir de faire la guerre.

N'est-ce pas c'est ce qui s'est passé jusqu'ici? Toutes les Écritures n'ont-elles pas prédit une longue période de guerre avant que n'arrive le Jour promis?

Ce qui n'empêche que les même Écritures prédisent l'établissement de la paix mondiale au Jour promis.

Or si l'on étudie les principes bahá'is, on arrive à cette conclusion que ces principes ne visent qu'un seul but: la paix sur la terre. Et comme au fur et à mesure que le temps passe, on les applique (sans en connaître l'origine) inévitablement on s'achemine vers la paix.

Concernant le troisième sceau, St Jean dit:

"Et voici: parut un cheval noir. Celui qui le montait tenait une balance". Ap. 6/5

Le noir est le symbole des ténèbres, ténèbres de l'injustice.

Le cavalier avait une balance, emblème de la justice ; mais cette balance était déréglée: allusion à l'injustice.

Encore une fois cet état de choses ne pouvait pas continuer éternellement. Au Jour promis, une fois ses lois mises en pratique, la justice divine devait s'instaurer.

Or ces lois, on les trouve dans la foi bahá'ie, où la vertu la plus exaltée est précisément la justice, et dont les institutions dirigeantes à l'échelon local, national et mondial s'appellent Maisons de Justice, et non pas Maison de Charité, ou Maison de Pardon, par exemple. C'est pour souligner l'importance de l'application de la justice.

D'ailleurs cet avènement de la justice divine est prédit dans toutes les Écritures.

Concernant le quatrième sceau, St Jean dit:

"Et voici: parut un cheval pâle. Celui qui le montait se nommait la mort". Ap. 6/8

Le terme "mort" ne doit pas être pris à la lettre. Il faut y voir un sens figuré, comme on vient de le voir avec le mot "balance". Il s'agit de la mort spirituelle dont les signes sont l'impiété, le mensonge, la corruption morale, toutes ces calamités qui ont tant fait souffrir l'humanité.

Mais il a été prévu qu'au Jour promis, à l'ère de la maturité de l'humanité il sera mis fin à cette mort.

"La mort ne sera plus" (Ap. 21/4) prédit St Jean à la fin de ses révélations.

Avec l'ouverture du cinquième sceau, St Jean prédit la tragédie des martyrs pour la foi:

"Quand il a ouvert le cinquième sceau je vis sous l'autel les âmes de ceux qui avaient été immolés à cause de la Parole de Dieu". Ap.6/9

Et cette immolation devait durer:

"jusqu'à ce que fût complet le nombre de leurs compagnons de service et de leurs frères qui devaient être mis à mort comme eux". Ap. 6/11

En effet l'histoire nous parle non seulement des martyrs des religions du passé, mais encore, et avec plus de force, elle décrit le sacrifice de plus de vingt mille bahá'is de différentes origines au point de vue race, classe, opinion, nation et religion.

L'ouverture du sixième sceau fait prévoir des événements incroyables tels que l'obscurcissement du soleil, la chute des étoiles, etc, etc.

"Je regardais quand il ouvrit le sixième sceau ; et il y eut un grand tremblement de terre, le soleil devint noir ... et les étoiles du ciel tombèrent ...". Ap. 6/1213

Une fois de plus nous devons prendre ces signes dans leur sens figuré. Ainsi, par exemple, l'obscurcissement du soleil veut dire que la religion (lumière du monde) perdra son rayonnement, phénomène dont nous sommes témoins de nos jours.

La chute des étoiles symbolise la chute du clergé, ce que nous constatons de plus en plus.

Il est pourtant intéressant de noter que même pris à la lettre certains signes sont apparus comme signes avant-coureurs du Jour promis inauguré au XIX' siècle par la révélation bahá'ie.

Ainsi, par exemple, nu siècle précédent celui de la naissance de la foi bahá'ie, on a été témoin d'une journée baptisée de "noire", car le soleil s'est obscurci "pour une cause .inconnue" selon les savants de l'époque (étant donné que le phénomène n'était pas dû à une éclipse).

Cela se passait le 19 mars 1780.

Quant aux tremblements de terre, on sait que jamais dans l'histoire de l'humanité on n'en a enregistré un aussi grand nombre qu'au siècle dernier. (Ce qui n'empêche qu'ils continuent encore de nos jours sans faiblir d'intensité).

En continuant de lire l'Apocalypse on arrive à cette conclusion que toutes ces calamités: les guerres, l'impiété, l'injustice, la persécution des croyants ... vont continuer jusqu'à la "grande tribulation" où les "quatre vents" vont souffler sur la terre.

Et si cette "grande tribulation" n'est pas encore arrivée c'est qu'il faut que préalablement "les serviteurs de Dieu marqués du sceau remplissent leur mission (toujours selon St Jean)

"Après cela je vis quatre anges aux quatre coins de la terre ; ils retenaient les quatre vents de la terre afin qu'il ne soufflât point de vent ... Et je vis un autre ange ... il cria: Ne faites point de mal à la terre ... jusqu'à ce que nous ayons marqué du sceau le front des serviteurs de Dieu". Ap. 7/1-3

A propos de cette "grande tribulation" nous lisons dans les Écrits bahá'is:

"Nous avons fixé pour vous un temps déterminé, ô peuples! Si quand cette heure sonnera vous ne vous décidez pas à vous tourner vers Dieu, sa main s'appesantira sur vous et de graves afflictions vous assailliront de toutes parts." (Extraits des Écrits de Bahá'u'lláh).

Ceci dit revenons aux prophéties de St Jean pour voir qui sont ces "serviteurs de Dieu" et quelle est la marque qu'ils doivent porter.

Selon St Jean ils sont caractérisés par le nombre cent quarante-quatre mille:

"Et j'entendis le nombre de ceux qui avaient été marqués du sceau, cent quarante-quatre mille ... "Ap. 7/4

Que signifie cent quarante-quatre à répéter mille fois?

Ce nombre cent quarante-quatre qui caractérise les "serviteurs de Dieu" a comme somme de ses chiffres le nombre 9.

En effet : 1 + 4 + 4 = 9

Donc ce qui caractérise les "serviteurs de Dieu" chargés de mission avant la "grande tribulation" est le nombre 9.

Or le nombre 9 est le synonyme de BAHÁ, fondateur de la foi bahá'ie.

Je m'explique. En arabe, comme dans d'autres langues, chaque lettre a son équivalent numérique de sorte que si on prend la somme des équivalents numériques des lettres qui composent BAHÁ on obtient 9.

On pourrait nous faire cette remarque: Et que faites vous des trois zéros? Pourquoi prenez-vous seulement cent quarante-quatre et non pas cent quarante-quatre mille?

C'est que, pour St Jean, c'est cent quarante-quatre qui compte, étant donné qu'il précise plus loin que cent quarante-quatre est la "mesure de l'ange" (Ap. 21/17).

Par conséquent cent quarante-quatre mille veut dire mille fois cent quarante-quatre. C'est pour souligner mille fois cent quarante-quatre ou mille fois 1 + 4 + 4 = 9 ou mille fois BAHÁ.

Dire que cent quarante-quatre caractérise les "serviteurs de Dieu", c'est donc dire que BAHÁ est la "marque qu'ils portent sur leur front.

Il s'agit donc des adeptes de BAHÁ connus sous le nom BAHÁ'IS (I -étant en Orient l'équivalent de ISTE en Occident).

Nous pouvons donc nous résumer en disant que les "serviteurs de Dieu" marqués de 9 ce sont les BAHÁ'IS. Ce sont eux qui ont la mission de servir Dieu en consacrant leur vie au service de l'humanité par application des principes que nous avons déjà cités à maintes reprises.

C'est cela la signification du nombre cent quarante-quatre.

Notons en passant que d'une manière générale, lorsqu'on cherche la signification d'un terme il faut raisonner pour voir s'il faut prendre ce terme à la lettre ou bien au sens figuré. Autrement, si on prend tout à la lettre, on peut tomber sur des absurdités, dont je vais mentionner un exemple.

En parlant des "serviteurs de Dieu" au Jour promis, St Jean dit qu' "ils sont blanchis dans le sang" (Ap. 7/14). Mais le sang ne blanchit pas. Il faut donc prendre cette expression au sens figuré. Comment faut-il l'interpréter?

Selon les enseignements bahá'is le "sang" est la force vitale dégagée par la révélation divine, cette force qui blanchit, autrement dit qui purifie (le blanc étant le symbole de la pureté).

Et c'est justement avec cette interprétation que nous comprenons le sens de cette parole qui dit que Jésus par son sang a délivré l'humanité du péché. En effet c'est grâce à la force spirituelle qu'il a insufflée dans les coeurs que les hommes ont pu se débarrasser de leurs péchés.

Ceci dit revenons aux révélations de St Jean:

"Après je regardai, et voici une grande foule que personne ne pouvait compter". Ap. 7/9

"Ce sont ceux qui viennent de la grande tribulation, ils ont lavé leurs robes, et ils les ont blanchies dans le sang de l'Agneau" Ap. 7/14

En disant "Après cela" St Jean veut dire qu'une fois que les "serviteurs de Dieu" auront accompli leur mission, et qu'après la "grande tribulation" les hommes adhéreront en masse à la cause de Dieu révélée pour aujourd'hui.

A ce propos voilà ce que nous lisons dans les Écrits bahá'is: "Le monde est en travail, son agitation croit de jour en jour. Il reste tourné vers l'incroyance et la perversité. Mais, tel sera son sort, que Nous ne jugeons ni à propos, ni convenable de le dévoiler maintenant. Il s'obstinera longtemps encore dans sa perversité, mais quand l'heure fixée sera venue, apparaîtra soudain ce qui fera trembler les membres de l'humanité. Alors et alors seulement sera déployé le divin étendard, alors et alors seulement le Rossignol des cieux fera entendre sa pure mélodie".
(Extrait des Écrits de Bahá'u'lláh)


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9.3. Le bien le plus précieux (le temps)

Arrivé dans une ville Alexandre le Grand passe par un cimetière, où il voit sur les pierres tombales que l'âge d'aucun des morts ne dépasse pas une dizaine d'années.

Il en demande l'explication à l'un des sages de la ville.

- Pour nous répondit celui-ci, c'est le temps que l'homme consacre à l'acquisition des qualités morales qui compte, et cela ne dépasse pas une dizaine d'années. Autrement le temps consacré à la poursuite des choses matérielles c'est le temps perdu et qui ne compte pas.

Qu'est-ce que les qualités morales?

Nous allons en citer quelques unes.


1° - L'humilité par opposition à l'orgueil.

Si ce que nous faisons n'est pas inspiré par le sentiment d'humilité, mais par l'orgueil c'est du temps perdu.

En effet que veut dire être orgueilleux? C'est s'efforcer de briller aux yeux des autres par des qualités que l'on n'a pas, ou qu'on ne peut pas avoir.

Un tel effort pour montrer l'existence de l'inexistant, un tel effort pour réaliser ce qui n'est pas réalisable n'est il pas du temps perdu?

Le temps nous est donné pour progresser. Quand on est content de soi-même, quand on est orgueilleux, c'est qu'on ne voit pas ses défauts, ses faiblesses. Et lorsqu'on ne voit pas ses défauts ou ses faiblesses, on ne cherche pas à y remédier, on ne progresse pas. On perd son temps.

Par contre, quand on est humble, c'est-à-dire quand on a le sentiment de ses faiblesses on cherche à y remédier, à acquérir de la force, on s'engage sur la voie du progrès.

C'est lorsque j'ai le sentiment que je ne sais pas, que je cherche à savoir. Et dès que je me contente de mon savoir, comme il n'y a pas de limite dans le savoir, je m'arrête donc, je ne progresse pas.

En résumé pour progresser, donc pour ne pas perdre notre temps, nous devons avoir le sentiment de nos faiblesses, autrement dit, nous devons être humbles. Et ceci est vrai aussi bien en science qu'en religion. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour laquelle les Écrits bahá'is insistent tant sur l'humilité.


2° - Une autre qualité morale c'est la générosité.

Si ce que nous faisons n'est pas inspiré par l'idée de gagner de l'argent afin de le dépenser pour nous-mêmes et pour nos semblables, mais, par contre, pour accumuler des richesses, ces richesses que nous ne prendrons sûrement pas avec nous - mêmes dans le tombeau, c'est du temps perdu. Et c'est de l'argent perdu aussi. Mais c'est surtout le temps qui compte, car le temps perdu, on ne peut pas le retrouver, alors que l'argent perdu, on peut toujours le retrouver.

Ce qui est triste, c'est qu'il en est qui perdent leur temps pour gagner de l'argent, et puis, perdent cet argent pour tuer le temps.

Un autre cas non moins triste, une attitude non moins injuste c'est lorsqu'on dépense sa santé pour gagner de l'argent, et ensuite, on dépense cet argent pour recouvrer la santé. On agit injustement à l'égard de l'argent et à l'égard de sa santé.

Notons que dans le cas de l'accumulation des richesses c'est une double perte de temps.

En effet, d'abord on perd son temps pour avoir une chose qu'on met de côté, ce dont on ne se sert pas, c'est donc du temps perdu. Et puis n'oublions pas que l'accumulation des richesses conduit inévitablement à l'orgueil. Et l'orgueilleux, comme nous l'avons expliqué, perd son temps, parce que content de lui-même, il ne fait aucun effort pour progresser.

Nous arrivons donc à cette conclusion qu'afin de ne pas perdre son temps en gagnant de l'argent, il faut dépenser cet argent pour le bien de tous, il faut être généreux.

Dieu dit:

"La libéralité et la générosité sont mes attributs. Heureux celui qui se pare de mes attributs"("Les Paroles Cachées" de Bahá'u'lláh. M.E.B. Bruxelles éd. 1977).

Les bahá'is s'entraînent à l'acquisition de cette vertu qu'est la générosité, en contribuant volontairement et régulièrement à leurs fonds local, national ou mondial, la gestion de ces fonds étant confiée aux institutions dirigeantes, dont les administrateurs sont élus parmi les meilleurs serviteurs et la communauté.


3° - Une troisième qualité morale c'est la joie qu'on éprouve au bonheur d'autrui, par opposition au chagrin ressenti dans les mêmes conditions, ce qui est appelé l'envie.

Si le succès et le bonheur de notre prochain nous rendent triste, rien que le fait d'y penser, sans même réagir, c'est du temps perdu, et de la santé aussi.

D'abord pourquoi du temps perdu?

Parce qu'en comparant notre situation à celle de notre prochain, tout en éprouvant du chagrin, même si nous avions la capacité d'arriver à sa situation, nous paralysons cette capacité, nous perdons confiance en nous-mêmes, et, par voie de conséquence, nous perdons notre temps ; car ayant agi de la sorte nous avons dressé un obstacle sur le chemin de notre progrès.

Quant à la perte de la santé, il a été démontré scientifiquement que l'envie produit des transformations organiques préjudiciables à notre santé.

On peut même dire que par l'envie, non seulement nous perdons notre temps, notre santé, mais encore notre foi. Car l'envie est un sentiment essentiellement antireligieux, étant donné que le but de la religion c'est de donner de la joie et du bonheur à notre prochain, ce qui est loin d'éprouver du chagrin à la vue du bonheur d'autrui.

Voilà pourquoi Dieu dit("Les Paroles Cachées" de Bahá'u'lláh - M. E. B. Bruxelles 1977):

"Sache en vérité que le coeur où subsiste la moindre trace d'envie ne pénétrera jamais dans mon empire éternel".

Si on n'a pas d'accès dans l'empire de Dieu c'est qu'on a perdu la foi.


4° - Une quatrième qualité morale c'est la douceur, par opposition à la colère.

Si nous nous abandonnons à la colère nous perdons notre temps car nous perdons de vue la juste solution à adopter devant tout ce qui, à tort ou à raison, nous semble déplaisant.

Ne dit-on pas : La colère est une mauvaise conseillère.

Ou encore : La colère est un grand vent qui étouffe la flamme de l'intelligence.

Ou encore, ce qui n'est pas loin de la vérité: La colère est une courte folie.

En se mettant en colère on perd donc son temps pour perdre la tête. On a tout intérêt à se rappeler cette inscription qu'avait apposée Gandhi sur le mur de sa chambre:

"Quand vous avez raison vous pouvez vous permettre de garder tout votre calme, et quand vous avez tort vous ne pouvez pas vous permettre de le perdre."

Ajoutons à cela les effets néfastes de la colère sur la santé.

Il y a 2000 ans Jésus a dit: "Tout ce que vous mangez dans la colère se transforme en poison dans votre corps". (Évangile. texte araméen)

Bahá'u'lláh dit:

"L'envie consume le corps et la colère brûle le foie. Evitez-les, comme vous fuyez devant un lion".

Ainsi, le temps, ce bien précieux qui nous est donné, nous le perdons en paralysant notre énergie, notre santé, notre faculté de raisonner et notre dignité, ce qui est non moins grave.

Voilà pourquoi toutes les Écritures nous interdisent la colère.

Que faut-il faire devant une situation qui provoque la colère?

Les bahá'is invoquent Dieu. Et ils ont ainsi la solution. C'est une question de foi.

Quant à ceux qui se disent incroyants, qu'ils suivent ce sage conseil de Sénèque:

"Le meilleur remède contre la colère consiste à remettre à plus tard."

Ce qui ne veut pas dire qu'un peu plus tard on se permette de se mettre en colère. Loin de là Sénèque conseille de laisser intervenir ce médecin qui calme la douleur, ce médecin dont le nom est le temps.


5° - Une cinquième qualité morale c'est la retenue judicieuse dans les paroles.

Concernant cette question nous lisons dans les Écrits bahá'is:

"Tout ce qu'on sait ne peut être dit ; et tout ce qui peut être dit il n'est pas toujours opportun de le faire ; et tout ce qui pourrait opportunément être dit n'est pas toujours conforme à la capacité des auditeurs".

L'un des facteurs qui intervient dans l'application de cette sagesse est donc le temps. Profitons en pour faire du bien par des silences opportuns, comme le conseille Bouddha.

Ne perdons pas ce bienfaiteur silencieux qui est le temps.


6° - Une sixième qualité morale c'est l'adoration de Dieu par le travail consciencieux.

Je dis bien "l'adoration de Dieu" car selon les enseignements bahá'is le travail consciencieux équivaut à l'adoration de Dieu.

Par conséquent faire un travail consciencieux ce n'est pas la poursuite des choses matérielles.

Notons à ce propos qu'on a tort de croire que dans une famille le travail de papa c'est gagner de l'argent pour faire vivre sa femme et ses enfants. Indiscutablement c'est son devoir, mais il a un autre devoir, un autre travail et ce travail il doit le faire à la maison. C'est qu'il s'occupe de l'éducation de ses enfants, c'est qu'il leur donne son temps. C'est qu'il n'agisse pas comme on le fait souvent dans la société moderne d'aujourd'hui.

Installé confortablement devant son poste de T.V. et plongé dans l'admiration du match de football papa se voit "dérangé" par le petit. Pour se débarrasser de lui il lui donne quelques bonbons, mais sans succès. Puis un crayon de couleur, toujours sans succès. "Mais enfin, qu'est-ce que tu veux? lui demande-t-il. "C'est toi que je veux, papa" dit le petit. "Mais je n'ai pas le temps à perdre". Voilà une bien triste réponse que reçoivent les enfants dans beaucoup de familles.


7° - Une septième qualité morale c'est l'esprit de décision, c'est savoir décider et d'agir.

`Abdu'l-Bahá dit:

"Pour chaque chose lorsque son temps arrive, sa réalisation, non seulement devient possible mais simple et facile."

Si nous avons le sentiment que ce temps attendu est arrivé, à nous de prendre la décision d'agir et de procéder sans tarder à l'action. Nous n'avons pas le droit de perdre du temps.

Le temps est un dépôt qui nous a été donné, nous n'avons pas le droit de le perdre.

Et le temps c'est le présent. Le présent c'est tout ce dont on dispose. Le passé est à jamais révolu. L'avenir est une notion intellectuelle.

Le célèbre critique anglais Ruskin avait placé sur son bureau un petit bloc en marbre sur lequel il avait fait graver un seul mot. Et ce mot était AUJOURD'HUI.

Aujourd'hui l'humanité traverse une crise, qui, par sa gravité est sans précédent à travers toute l'histoire.

Indiscutablement il y a eu bien d'autres crises, comme celle d'il y a 2500 ans, ou 2000 ans ou 1500 ans. Et chaque fois selon le témoignage des pages de la même histoire, la solution a été apportée par la révélation correspondante: celle de Bouddha il y a 2500 ans pour l'Extrême - Orient, celle de Jésus il y a 2000 ans pour l'Occident, celle de Muhammad il y a 1500 ans pour l'Orient.

Mais ces crises étaient limitées à une région bien déterminée et de plus elles ne présentaient pas la gravité de la crise actuelle. Or aujourd'hui la crise est à l'échelon mondial et présente un caractère vital pour l'humanité.

Il faut donc trouver une solution urgente, une solution sanctionnée par l'expérience universelle. La vérité n'est elle pas ce gui est universellement expérimenté?

Consciemment ou inconsciemment nous cherchons tous cette solution mais ce qui est triste c'est que nous nous disputons sur les mots oubliant la gravité de l'heure.

Marius arrive précipitamment chez le docteur et lui dit:

- Dépêchez-vous, Docteur, ma femme est tombée en sycope.

- Mais voyons, voyons, on ne dit pas sycope, on dit syncope.

- Un cope de plus, un cope de moins, ce n'est pas cela qui sauvera ma femme. Ne perdons pas de temps, Docteur.

Et bien, chers amis, ne perdons pas le temps, cherchons la solution.

N'avons nous pas cette solution dans le même phénomène qui a fait ses preuves à travers toute l'histoire de l'humanité, à savoir la Révélation divine?

Celle d'aujourd'hui n'est elle pas dans la révélation bahá'ie qui scientifiquement et historiquement présente les mêmes caractéristiques que les Révélations du passé. N'apporte-t-elle pas, par ses principes et ses lois la solution à tous les maux dont souffre l'humanité?

Si c'est oui, pourquoi alors les gens mettent-ils du temps, comme par le passé, pour appliquer cette solution?

Je dis "comme par le passé", car n'oublions pas que le christianisme a mis trois siècles pour être adopté sur une grande échelle, le judaïsme a mis cinq siècles pour son épanouissement.

En réponse à notre question il faut envisager plusieurs catégories de gens.

La première catégorie des gens (et c'est l'écrasante majorité en Occident) est constituée par ceux qui ont tout sauf le temps pour s'intéresser à la solution de la crise actuelle.

La deuxième catégorie est constituée par les pessimistes qui tout en reconnaissant que le phénomène bahá'i est de même nature que le phénomène chrétien, ne l'accepte pas sous prétexte qu'il subira le même sort que le christianisme.

"A quoi bon, disent-ils, l'accepter". Ce qui revient à dire: "A quoi bon manger puisque demain on aura faim". De plus ils oublient que l'homme d'aujourd'hui est adulte par rapport à l'enfant qu'il était hier. Un adulte, une fois qu'il se sert d'un instrument et le trouve bon et utile ne l'abîme pas.

La troisième catégorie de gens est constituée par ceux qui sont encore plus pessimistes. Pour eux l'homme est incorrigible et le monde est condamné à périr. Ce n'est pas la peine de faire quelque chose.

Un tel raisonnement est illogique surtout au stade actuel de l'évolution de l'humanité. Cela reviendrait à supposer qu'un père élève son petit enfant jusqu'à ce qu'il devienne majeur, et une fois qu'il aura atteint l'âge mûr, le père mette fin à ses jours.

Pour un croyant il est certain que Dieu dans sa sagesse infinie n'admette pas l'anéantissement de l'humanité.

Il y a une quatrième catégorie de gens qui tout en acceptant le message bahá'i remettent au lendemain leur adhésion. Ils oublient qu'en remettant à plus tard ce qui est facile à faire on le rend difficile, et si la chose est déjà difficile on la rend impossible.

Enfin, il y a une cinquième catégorie de gens. Ce sont ceux qui sont déjà bahá'is sans le savoir. Ce sont des lampes allumées mais cachées.

Mais, comme Jésus l'a dit il y a 2000 ans, une lampe allumée reste-t-elle sous le boisseau?


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9.4. Les voyageurs du pays des mages

Lorsque Voltaire arriva à Londres en 1727 l'opinion publique était à tel point montée contre la France que le seul fait de se promener dans Londres constituait pour lui un danger.

Un jour qu'il flânait dans les rues, une foule de Londoniens le suivit en criant "Tuez le ! Mort au Français!"

Voltaire s'arrêta, fit face à la foule et s'écria:

"Anglais ! Vous voulez me tuer parce que je suis Français. Mais voyons ne suis, je pas assez puni de ne pas être Anglais?" La foule l'applaudit et lui fit bonne escorte.

Cette histoire véridique montre à quel point le préjugé qu'il soit national, politique, religieux ou racial peut aveugler l'opinion publique.

Heureusement que de nos jours ces préjugés commencent à disparaître, que l'homme commence à prendre de plus en plus conscience de son indépendance dans la recherche de la Vérité.

L'un des facteurs qui contribue à cet esprit d'investigation personnelle de la Vérité c'est l'instruction généralisée qui permet à chacun de consulter personnellement cet ami fidèle à nous tous, cet ami dont le nom est LE LIVRE.

C'est ce que nous allons faire ce soir pour nous faire une idée sur l'Iran, ce pays dont on parle si abondamment de nos jours, à cause de ce qui s'y passe actuellement.

Nous allons donc consulter les livres qui nous parlent de ce pays au point de vue géographique, historique et religieux.

Géographiquement l'Iran est un vaste pays situé au sud-ouest de l'Asie entre la mer Caspienne et le Turkestan au nord, l'Afghanistan à l'est, le Golfe Persique au sud, l'Iraq et la Turquie à l'ouest.

Historiquement à partir du XV' siècle avant l'ère chrétienne les éléments aryens firent leur apparition dans les horizons de l'Asie Mineure dont l'Iran faisait partie.

Mais l'histoire de l'Iran ou plus exactement l'histoire de la civilisation iranienne commence avec l'apparition du prophète Zoroastre de qui nous allons parler dans un instant.

Quant à l'origine du mot Iran, notons d'abord que ce pays s'appelait naguère en Occident, la Perse, mot qui provient de PARSI (une branche de la race aryenne dont le roi Cyrus était originaire).

Le mot même Iran provient de ARYA, d'où le terme ARYEN. Au cours des siècles ce mot ARYA s'est transformé pour devenir d'abord ARYAN puis IRAN.

Concernant la signification du mot ARYA on dit que cela signifie loyal, fidèle.

Rares sont les pays qui ont une histoire aussi mouvementée que l'Iran.

Dans l'antiquité l'Iran fut le centre d'un puissant empire fondé par Cyrus, six siècles avant Jésus Christ, et devint le maître incontesté de toute l'Asie occidentale.

Trois siècles après ce fut la conquête d'Alexandre le Grand qui ruina Persépolis.

Puis les Iraniens reprirent leur pays et cela dura presque neuf siècles, après quoi le pays fut conquis par les Arabes.

La domination des Arabes dura un peu plus de deux siècles. Puis les Iraniens reprirent leur pays, ce qui dura trois siècles quand au début du XIIe siècle les Mongols envahirent l'Iran. Cela ne dura pas longtemps et de nouveau les Iraniens reprirent leur pays. Cette fois aussi pas pour longtemps, car au XIVe siècle ce fut Tamerlan qui attaqua l'Iran et y perpétra des massacres.

Ensuite vinrent les Turkomans. De nouveau les Iraniens reprirent leur pays.

Puis les descendants des Mongols (Dynastie Qajar) qui devinrent maîtres de l'Iran. Ensuite vint la dynastie Pahlavi qui ne régna qu'un demi siècle pour être renversée ces derniers temps.

Le reste de l'histoire, je veux dire ce qui s'y passe aujourd'hui, vous le connaissez bien, mais là n'est pas notre propos.

Mais ce n'est pas cette histoire qui intéresse les historiens, ce n'est pas dans ces hauts et ces bas du destin de l'Iran que les historiens voient quelque chose de particulier à l'Iran.

C'est surtout du point de vue spirituel que les historiens voient un phénomène exceptionnel et particulier à l'Iran.

Ainsi, par exemple, le Professeur Gabriel Millet (Josef Strzvgowskv "Ancien art chrétien" Préface du Professeur Gabriel Millet) écrit

"L'Iran a marqué de son empreinte les grandes religions universelles".

Ou encore:

"L'Iran, dans le domaine spirituel, est dans le coeur du monde"

Ou encore:

"L'humanité doit à l'Iran ce qui fait sa noblesse".

Cette opinion est partagée par la plupart des orientalistes et plus particulièrement par les savants qui se sont penchés sur l'étude de l'histoire des religions.

Etant donné un tel intérêt porté à l'Iran du point de vue religieux, on est en droit de se demander quelle en est la raison.

C'est à cette question que nous allons essayer de répondre.

D'une manière générale quand on étudie l'histoire des grandes civilisations on constate qu'à l'origine de toute civilisation se trouve toujours un homme génial tel que Krishna, Moïse, Zoroastre, Bouddha, Jésus, Muhammad que l'Évangile compare à un maître qui part en voyage et qui revient toujours.

A la base d'une telle comparaison se trouve toujours le fait que c'est toujours la même Réalité qui revient. Comme le soleil se couche aujourd'hui, pour se lever demain, mais d'un autre point du lever. Par sa chaleur et sa lumière le soleil de demain sera pour ainsi dire le "retour" du soleil d'aujourd'hui avec cette différence que c'est seulement son point du lever quia changé, ce qui importe peu, car l'essentiel c'est sa chaleur et sa lumière.

Si l'on pousse cette étude plus loin en restant absolument impartial, on constate de plus un fait unique dans l'histoire des religions.

C'est que chaque fois qu'on arrive à une page de cette histoire qui parle de l'apparition de l'un de ces hommes géniaux, de l'un de ces voyageurs perpétuels, elle mentionne le nom de la Perse (actuellement appelée Iran) soit par le fait que l'un ou plusieurs de ces voyageurs est venu de ce pays, soit par le fait que les premiers qui ont découvert ces voyageurs sont des gens originaires de ce même pays, je veux dire de l'Iran.

Ne serait ce pas possible que ce soit l'une des raisons pour laquelle le Professeur Millet dit que "l'Iran a marqué de son empreinte toutes les grandes religions universelles"?

Afin de voir quelle est la contribution de l'Iran aux grandes religions universelles nous allons nous adresser aux pages de l'histoire des religions.

Commençons si vous voulez bien par le premier voyageur qui est venu de l'Iran. IL s'agit du prophète Zoroastre.

La situation lamentable dans laquelle se trouvait l'Iran au moment de l'apparition de Zoroastre, je l'ai déjà décrite lors d'une de mes conférences. Je vais vous en dire tout de même un mot, à la condition que vous soyez gentleman.

On dit qu'un gentleman est une personne qui lorsqu'elle a entendu quelque chose pour la dixième fois vous donne l'impression qu'elle l'entend pour la première fois.

Et bien voilà en résumé la situation de l'Iran il y a trois mille ans quand Zoroastre apparut.

Le pays se trouvait dans un état de décadence inimaginable. On dit que la paresse est mère. Elle a un fils - le vol et une fille, la faim. Cette parole illustrait bien la situation en Iran. Les Iraniens étaient devenus tellement paresseux qu'ils négligeaient complètement la culture de la terre, pourtant la principale source de la vie à cette époque.

Comme conséquence la famine faisait des ravages, et le vol devenu un phénomène tellement courant qu'on volait non seulement les vivants, mais également les morts, en ce sens qu'on dérobait aux tombes les offrandes apportées, par ostentation aux âmes des morts.

En ce qui concerne le gouvernement du pays, à vrai dire, il n'y en avait pas, car le pays était divisé entre un grand nombre de petits rois, eux mêmes dirigés par des magiciens, sorciers et charlatans.

D'un tel pays en pleine décadence Zoroastre a fait le pays le plus civilisé de son époque, civilisé matériellement et spirituellement.

Sur le plan administratif grâce à son influence mystérieuse Zoroastre parvint à unir les petits rois et mettre à la tête du pays le roi des rois, ce qu'on appelle en Iran Shahinshah.

Et à ces rois des rois Zoroastre arriva à inculquer un esprit de justice et de tolérance religieuse qui fait l'objet de l'admiration des historiens.

A titre d'exemple de l'esprit de justice de ces rois mentionnons l'édit royal de Cyrus qui après la conquête de Babylone accorda aux vainqueurs et aux vaincus des droits égaux, édit que les historiens appellent la première charte des droits de l'homme.

Un autre exemple est celui de Darius, à qui la Bible attribue cette parole:

"J'ordonne que dans toute l'étendue de mon royaume on ait de la crainte pour le Dieu de Daniel.

Car Il est le Dieu vivant ... C'est Lui qui délivre et sauve." Daniel 6/20

En lisant cette proclamation de Darius on a l'impression que l'auteur professait la foi de Daniel, à savoir la foi judaïque.

Et pourtant Darius était zoroastrien.

Une telle tolérance religieuse, un tel esprit de justice inculqué par Zoroastre à ses disciples méritent ils notre admiration? Si oui, rendons hommage à Zoroastre et reconnaissons son oeuvre en tant que première contribution de l'Iran à la civilisation spirituelle de l'humanité.

Il est intéressant de noter que Zoroastre qui est arrivé à unir les Iraniens pour former la nation iranienne, a prédit qu'un autre Messager de Dieu viendrait après lui de ce même pays, mais cette fois pour unir toutes les nations du monde. Et il précise que cela arrivera mille deux cents et quelques années après la religion des Arabes (autrement dit au treizième siècle de l'Hégire). (Cc qui coïncide avec 1260 mentionnée à sept reprises dans l'Apocalypse).

Une autre contribution de l'Iran à la civilisation spirituelle de l'humanité c'est sa contribution à la résurrection de l'esprit de la foi judaïque au cinquième siècle avant Jésus Christ.

En effet, à cette époque le Temple de Jérusalem, symbole extérieur de la foi judaïque était détruit avec la ville sainte, et les Juifs se trouvaient en captivité à Babylone. Les rois persans Cyrus, Darius, Artaxerxès, l'un après l'autre ayant délivré les Juifs arrangèrent leur retour en Terre Sainte, et leur firent rebâtir le Temple, ce qui ranima la foi judaïque qui jusqu'alors ne donnait aucun signe de vie.

C'est à cause de la délivrance du peuple juif par le roi Cyrus que la Bible par la bouche du prophète Isaïe (44/24-28) lui attribue les titres tels que "Berger", "Messie", "L'oint".

La reconstruction du Temple (avec comme conséquence la résurrection de l'esprit de la foi judaïque), oeuvre des rois persans, revêt une importance si capitale pour Daniel, qu'il prend cette date (457 avant Jésus Christ) comme point de départ pour prédire deux événements historiques dont le premier est le sacrifice de Jésus en l'an 33 et l'autre le Jour promis en 1844 (comme nous le verrons dans un instant).

Concernant le premier événement c'est-à-dire le sacrifice de Jésus, Daniel mentionne la date 490, prophétie qui se réalisa mathématiquement, étant donné que la date du départ est 457 avant Jésus Christ, et que Jésus a été crucifié en l'an 33.

457 + 33 = 490

Concernant le deuxième événement, c'est-à-dire le Jours promis, Daniel prédit la date 2300, prophétie qui se réalisa en 1844. En effet quand Jésus est né 456 années étaient écoulées depuis la reconstruction du Temple, ce qui nous donne:

2300 - 456 = 1844 (Comme l'Edit de Tolérance suite auquel le deuxième Retour des Juifs a commencé date précisément de 1844, et que le premier Retour a commencé quand 456 années étaient écoulées depuis la naissance de Jésus, le nombre 1844 + 456 = 2300 représente l'intervalle entre deux Retours)

L'année 1844 coïncide avec 1260 de l'Hégire. Et c'est la date de la Déclaration du Báb, précurseur de la foi bahá'ie.

Si concernant le lieu de naissance du Messager du Jour promis Daniel au début de sa vision fait allusion à l'Iran (Daniel 8/2) en parlant d'Elam (Cette partie de l'Iran jadis s'appelait Elam), Jérémie prédit clairement

"J'établirai mon trône en Elam". Jérémie XLIX 38 Ce qui veut dire que le message inaugurant l'Ere où le Royaume de Dieu doit s'instaurer sur terre prendra naissance en Elam (province de l'Iran dont le précurseur de la foi bahá'ie était originaire).

A noter que cette prophétie coïncide avec celle de Zoroastre. Ceci dit passons au christianisme pour voir si les Iraniens y ont joué un certain rôle. Il paraît que oui. Et c'est l'Évangile qui le mentionne en première page en précisant que les mages persans ont découvert le lieu de naissance et l'identité du futur Christ, et que c'étaient eux, ces Persans, qui les premiers adorèrent et se prosternèrent devant l'Enfant Jésus.

Cela ne reviendrait-il pas à dire que les premiers chrétiens étaient des Persans?

Quant à la date du Jour promis, si l'Ancien Testament ne la mentionne qu'une fois par la bouche de Daniel, le Nouveau Testament mentionne cette même date (1260 selon l'Hégire) à sept reprises.(Pour plus de détails voir la conférence "En deux pages - une histoire en images" du huitième fascicule de la série "Le Courage d'Aimer").

Après la Révélation chrétienne vient l'islam.

Là encore l'histoire nous parle de la part que la Providence avait réservé à l'Iran.

En effet quatre érudits persans, l'un après l'autre, prédisaient la révélation islamique.

Un certain Ruz Bih, appelé plus tard Salman, était leur serviteur. Le dernier de ces érudits dit à Salmàn: "Après mon enterrement va en Hijaz où le soleil de Muhammad va apparaître."

Celui-ci y alla, accepta l'islam et lui rendit d'innombrables services. Mais il n'était que le premier Persan à le faire. Bien d'autres après lui se levèrent pour ranimer l'esprit de l'islam à l'époque où de cette religion il n'était rien resté de spirituel.

Mais c'est une longue histoire et son exposé ne fait pas partie de ma conférence.

Voilà, chers amis, le rôle qu'a joué l'Iran dans l'histoire du judaïsme, du christianisme et de l'islam, contribuant ainsi indirectement à la civilisation de l'humanité.

Mais le couronnement de la contribution de l'Iran à la civilisation mondiale est dans le fait que, selon toutes les Écritures, la Providence avait destiné ce pays à être le berceau de cette foi mondiale qu'est la foi bahá'ie, cette foi que le Larousse du vingtième siècle présente "comme l'aboutissement de toutes les anciennes croyances."


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9.5. Conflit des générations

En parlant du conflit des générations quelqu'un a dit: "Lorsqu'un enfant atteint le palier de l'adolescence, c'est le temps pour son père, s'il veut rester à son niveau, de redescendre à celui de sa jeunesse."

En effet, tout le conflit des générations prend sa racine dans le fait que les parents n'essaient pas de se mettre à la place des jeunes.

Les parents ne se demandent pas quel serait leur comportement s'ils étaient nés dans une famille où les parents ne s'occupent pas de l'éducation de leur enfant, soit parce qu'ils "n'ont pas le temps", soit parce qu'ils estiment que c'est le devoir de l'école.

C'est pourtant le cas aujourd'hui, comme c'était le cas hier quand les jeunes étaient encore des enfants.

Que voyons-nous aujourd'hui? L'enfant n'a presque pas de contact avec son père. Et s'il en a c'est pour se voir réprimandé pour ses erreurs. Nous oublions nos propres erreurs quand nous étions encore enfants. Nous nous consolons en appelant nos erreurs "expérience". Ce qui n'empêche pas que l'enfant comprenne.

- Maman, pourquoi as-tu des cheveux gris? demande l'enfant.

- Ce sont les bêtises des enfants qui font blanchir les cheveux des parents.

- Ah ! Alors je comprends pourquoi grand-mère a les cheveux tout blancs.

Nous oublions que ce n'est pas par des critiques et des vexations qu'on peut se faire respecter par l'enfant.

Et pourtant le respect de l'autorité est une nécessité pour l'enfant. On a tort de croire que l'enfant n'est pas disposé à obéir à une autorité.

Un enfant qui quitte sa famille s'engage pourtant à se soumettre à l'autorité du chef de la bande qu'il rejoint.

Le respect de l'autorité s'apprend avant tout au sein de la famille. Ce n'est malheureusement pas le cas de nos jours où le respect de l'autorité des parents devient un vain mot.

L'adjudant réprimande le soldat qui n'a pas salué le lieutenant:

- Mais c'est mon cousin - dit l'autre.

- Quand bien même ce serait votre père, vous devez le respecter. L'enfant qui n'a pas pris l'habitude de respecter l'autorité de ses parents, néglige facilement le respect des autorités légitimes, lorsqu'il devient majeur. Et pourtant dans la société où il entre l'ordre implique le respect de l'autorité.

Selon les enseignements bahá'is le respect de l'autorité des parents présente une telle importance qu'il vient immédiatement après l'obéissance à Dieu. Il ne faut pourtant pas oublier que le respect de l'autorité des parents implique que ces derniers s'occupent de l'éducation de l'enfant dans un esprit d'amour et d'encouragement.

Les parents oublient ce qu'ils seraient s'ils étaient nés dans une famille où à dessein on laisse l'enfant "libre" sous prétexte du "développement naturel", s'imaginant qu'il vaut mieux que l'enfant apprenne lui-même l'art de vivre. Si c'est ainsi, alors qu'on le laisse libre d'apprendre l'art d'écrire ou de lire. Et pourtant l'art de vivre est bien plus difficile et bien plus important que l'art d'écrire.

En tout cas la conséquence d'une telle liberté accordée à l'enfant c'est qu'il impose facilement sa loi au sein de la famille.

Et aux parents, il ne reste qu'à se plaindre, comme ce père qui disait:

"Quand j'étais enfant je faisais toutes les volontés de mon père. Maintenant il faut que je fasse celle de mon fils. Je me demande quand je pourrai agir à ma guise?"

Un enfant qui impose sa loi au sein de la famille en prend l'habitude en grandissant, et il croit qu'il faut en faire autant en société quand il est majeur, ce qui le prédispose à la révolte contre les autorités légitimes.

Les parents oublient ce qu'ils seraient s'ils étaient nés dans une famille où c'est le père qui impose sa loi, qui traite son fils majeur comme il le traitait quand ce dernier était enfant.

La conséquence de cette façon de faire est telle que quelqu'un l'a décrite en ces termes:

Pendant ses quinze premières années les parents apprennent à leur fils à être homme. Pendant les quinze années qui suivent le fils doit apprendre à ses parents qu'il n'est plus un enfant. La foi bahá'ie condamne les deux extrêmes. Ni trop de liberté, ni trop de manifestation d'autorité.

C'est toujours une attitude d'amour et d'encouragement qu'il faut adopter.

Les parents oublient ce qu'ils seraient aujourd'hui si, durant leur enfance, ils avaient eu à leur disposition tant de films de la T.V., films, où l'enfant voit avant d'atteindre quatorze ans plus de dix huit mille scènes de meurtre (Selon les statistiques américaines), avec la possibilité de se procurer facilement et à profusion des revues pornographiques et des revues impudiques.

Et dire qu'il n'y a pas un demi-siècle, selon l'écrivain Irving Wallace, un livre fut mis à l'index parce qu'il contenait cette simple phrase: "Et cette nuit-là rien ne les sépara !"

Selon la foi bahá'ie il faut intéresser l'enfant à bien d'autres choses (jeux éducatifs, sport, collection de timbres) de façon à ce qu'il n'ait ni le temps ni l'envie de regarder de tels films, ou de lire de tels romans.

Et la meilleure façon pour réussir dans cette tâche c'est de donner soi-même l'exemple en éliminant de sa bibliothèque de tels livres, et en choisissant à la T.V. un programme convenable, de manière à ne pas être obligé à dire à l'enfant:

"Jojo au dodo, tu vois bien qu'ils commencent à se déshabiller !"

Les parents oublient ce qu'ils seraient s'ils étaient nés dans une famille où l'on n'entend que des critiques et de la médisance.

Et pourtant ce n'est pas un phénomène exceptionnel de nos jours, phénomène qui entraîne comme conséquence le fait que l'enfant, devenu majeur, s'il ne se révolte pas contre tout le monde, ne peut aimer personne, car il voit tout d'un mauvais oeil.

La foi bahá'ie interdit avec force la médisance, en général, et surtout devant l'enfant qui a le coeur si pur.

Les parents oublient ce qu'ils feraient aujourd'hui si durant leur enfance, ils avaient été mis dans une ambiance où l'on est encouragé à faire n'importe quoi pourvu qu'on gagne de l'argent, puisque, soi-disant, c'est la fin dans la vie, et que la fin justifie les moyens.

Et pourtant c'est généralement le cas aujourd'hui.

Voyant un enfant ramasser des champignons, un passant le félicite: "Tu sais déjà distinguer les champignons vénéneux de ceux qui sont comestibles?"

"Quelle importance, puisque papa a dit c'est pour les vendre".

Un enfant élevé dans cet esprit peut-il faire consciencieusement son travail quand il sera grand?

Les parents oublient ce qu'ils seraient aujourd'hui s'ils avaient grandi à une époque où à l'école, au lieu d'enseigner un programme pour la paix, on avait enseigné l'histoire des guerres, où, au lieu d'apprendre à résoudre les problèmes de la vie, on se serait contenté uniquement d'apprendre à résoudre les problèmes de physique ou de mathématiques. Et pourtant l'un n'empêche pas l'autre.

Les parents oublient ce qu'ils feraient aujourd'hui, si enfants ils avaient vécu à une époque où les églises étaient vides, et où pour attirer du monde on les "adaptaient" à l'esprit du temps.

Un fidèle racontait cette histoire amusante:

Dernièrement la chorale de notre église répétait un cantique moderne. Au dernier couplet, les chanteurs se laissèrent complètement emporter par le rythme et terminèrent sur un mouvement de valse tourbillonnante.

- Et maintenant - dit le pasteur, voulez-vous choisir vos partenaires pour le cantique suivant.

Les parents oublient ce qu'ils feraient s'ils étaient à la place des jeunes qui vivent à une époque où les gouvernements surchargent leurs sujets d'impôts de plus en plus lourds, impôts destinés principalement à assurer le budget de la guerre, appelé le budget de la défense.

Un journal humoristique en parlant des impôts écrivait: "L'homme est le seul animal qui puisse être plumé plusieurs fois".

Ce qui est parfaitement vrai à l'époque où nous vivons.

Toute cette situation constitue une MENACE pour le bien-être humain dans l'immédiat, et pour son existence dans l'avenir.

Or toute menace provoque deux mécanismes défensifs automatiques la peur et la colère.

Qu'il s'agisse de la peur ou de la colère, dans les deux cas, il faut trouver une solution. Cette solution peut être salutaire ou pathologique.

La solution salutaire consiste à évaluer d'une manière réaliste le danger, découvrir sa racine et recourir aux moyens adéquats pour l'éliminer.

La deuxième solution, solution pathologique, consiste à s'enfuir ou à rester apathique devant le danger ou bien à recourir à la violence et à l'agression.

Les personnes âgées adoptent généralement l'apathie et l'indifférence, car, estiment-elles "les carottes sont cuites".

Chez les jeunes, étant donné leur vigueur et leur force à première vue c'est la violence et l'agression qui doit convenir. Paradoxalement il n'y a pas chez les jeunes de mécontentement explosif, car ils ont le toit, le pain, le médecin, les médicaments, des divertissements, tout cela étant assuré par l'indemnité de chômage, ce qui pourrait les encourager davantage à l'indolence et la paresse. Et assurément ils préféreraient qu'on leur assure un travail, ce qui leur permettrait de vivre encore mieux.

Mais il ne faut pas oublier cette catégorie des jeunes qui préfèrent la violence et, de plus en plus, la délinquance.

Les statistiques montrent que le nombre des délinquants entre 13 et 15 ans dépasse celui des délinquants plus âgés.

Jamais dans l'histoire de l'humanité les jeunes n'ont posé autant de problèmes. Dans tous les domaines un jeune se heurte à des difficultés.

D'abord il ne peut pas étudier la branche pour laquelle il est doué.

S'il est doué en musique il doit étudier le droit, car il y a du travail pour les avocats, étant donné tous ces différends découlant de la tromperie et du mensonge. Ce qui fait que de plus en plus chacun a intérêt à avoir son avocat, comme il a son médecin ou son dentiste.

S'il est doué en peinture il doit étudier la médecine, étant donné qu'il y a du travail pour les médecins, à cause de cette multitude de maladies créées par notre "civilisation" et cette infinité de "spécialités" pour lesquelles il faut trouver des maladies correspondantes.

Mis devant une telle situation il y en a qui n'ont pas le courage de finir leurs études, d'autres, plus courageux, poursuivent leurs études et obtiennent leur diplôme. Mais dans les deux cas, une fois qu'ils commencent à travailler, les uns comme les autres se heurtent à des difficultés, car ce qu'on leur demande de faire n'est pas toujours conforme à leur tempérament droit et souvent même c'est quelque chose contre laquelle ils veulent lutter.

Prenons le premier cas quand un jeune ayant abandonné ses études est obligé de faire du commerce, par exemple.

Pour gagner sa vie il doit se conformer aux recommandations du patron qui lui dit:

"Le premier principe chez nous est celui-là: si vous proposez aux gens une chose dont ils ont absolument besoin vous gagnerez de l'argent. Mais si vous leur offrez une chose totalement inutile alors vous ferez fortune".

Prenons maintenant le deuxième cas quand notre jeune homme est devenu avocat. Là permettez moi de vous raconter une anecdote, sans accuser qui que ce soit.

Au tribunal.

- Comment ! vous rétractez tous vos aveux?

- Oui, monsieur le juge, mon avocat m'a convaincu de mon innocence.

Dans un cas comme dans l'autre ce n'est pas ce genre de "travail" que les jeunes cherchent à avoir. Mais rien à faire, ils n'ont pas le choix. Ils ont leur "travail" et ils n'ont qu'à s'en tirer.

Après le travail il y a la question du mariage qui se pose.

Notre jeune homme est informé par la presse qu'un mariage sur trois finit par le divorce et que les deux tiers qui restent mariés c'est pour sauver les apparences, le prestige, ou pour des considérations matérielles ; il est informé par la presse que 30 % des crimes se font dans les familles mêmes, que 85 % de jeunes délinquants sortes des familles dissociées.

Alors notre jeune homme se pose la question:

Serai-je heureux en mariage? Réussirai-je à constituer un foyer heureux?

Et sans avoir de réponse il se marie.

Mais il n'y a pas que le ménage et la famille, il y a la vie en société. Et là il faut se faire des amis.

Là encore il y a ce problème qui surgit: Comment se faire de vrais amis dans une société où tout est basé sur l'idée d'un échange mutuellement profitable, où tout est subordonné à des considérations financières?

Ce qui est encore un facteur de déception pour notre jeune homme.

Déception sur déception...

Voilà la perspective de la vie qui s'ouvre devant un jeune homme entrant dans la société. IL voit son avenir menacé, et devant toute menace il est naturel qu'on réagisse.

Mais comment peut-il réagir quand le pouvoir est dans la main des personnes âgées, cette génération contre laquelle il ne peut entrer en conflit avec chance de succès.

Où est-elle donc la solution à cette situation? Voilà la question dont tout jeune homme voudrait avoir la réponse.

Selon les enseignements bahá'is la solution radicale est à long terme, et elle est dans l'éducation religieuse adaptée aux exigences de notre époque, éducation qui devrait faire l'objet d'une autre conférence, bien que j'y aie fait déjà quelques allusions.

Quant à la solution à court terme pour éviter le conflit des générations c'est que les deux générations actuelles, les jeunes et les personnes âgées deviennent des AMIS les uns pour les autres, ce qui ne peut se faire que par la puissance de la foi.

Qu'on devienne AMIS au sein de la famille, que les parents deviennent des amis pour les enfants, que les membres de la communauté sans distinction de classe, deviennent des amis les uns pour les autres, et que les dirigeants soient élus parmi les meilleurs amis.

Mais dans une communauté peut-on devenir amis les uns des autres sans se rencontrer, sans se parler, sans s'inviter? Non. Voilà pourquoi dans les communautés bahá'ies les membres se rencontrent mensuellement à des réunions sans classe afin de se connaître de mieux en mieux ; afin de se consulter sur les affaires d'intérêt commun, et en définitive à devenir de plus en plus AMIS les uns pour les autres. Ce qui à la fin de chaque année leur permet de distinguer les meilleurs AMIS pour les élire dans les institutions qui dirigent les affaires de la communauté.

De cette façon dans les communautés bahá'ies non seulement il n'y a pas de conflit des générations, mais, bien au contraire, les deux générations sont amies l'une et l'autre. De plus le pouvoir n'est plus dans la main des personnes âgées, mais il est partagé entre les deux générations, et il arrive même souvent que dans une institution bahá'ie il y ait plus de jeunes que de personnes âgées.

Est-ce parce que les Écritures avaient prédit qu'au Jour promis

"Je leur donnerai des jeunes pour chefs". Esaïe 3/4


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9.6. L'homme face à la Nature

Lors d'une entrevue entre `Abdu'l-Bahá et Bergson, ce dernier demanda si l'homme faisait partie de la Nature ainsi qu'il le croyait, et si ce n'était pas le cas, quelle en était la preuve?

Voilà en substance ce qu'a répondu `Abdu'l-Bahá:

Comment procédez-vous en science pour voir si une chose fait partie d'un tout? C'est par les caractéristiques d'une partie que vous portez votre jugement sur le tout.

Ainsi, par exemple, vous prenez un verre d'eau de mer et vous l'analysez, vous déterminez ce que contient cet échantillon d'eau et vous en déduisez ce que contient la mer elle-même.

Donc ce que possède la partie, le tout doit forcément le posséder.

Partant de là, si on admet que l'homme fait partie de la Nature, tout ce que l'homme possède, la Nature doit également le posséder. Or ce n'est pas le cas. L'homme sait raisonner, la Nature ne sait pas raisonner. L'homme possède la volonté. La Nature n'a pas de volonté ...

Devant une telle argumentation simple et brève Bergson ne fit que garder le silence.

En effet à propos de l'intelligence humaine notons qu'elle se manifeste de différentes façons dont l'une est le pouvoir inventif, grâce auquel l'homme progresse dans tous les domaines.

Remarquons que l'animal n'a pas ce pouvoir inventif. Si l'oiseau fait magistralement son nid, c'est grâce à son instinct.

La preuve c'est qu'il est incapable d'y apporter la moindre amélioration avec le temps l'oiseau d'aujourd'hui fait son nid exactement comme il le faisait au temps de Noé. Mais l'homme d'aujourd'hui fait son nid d'une manière bien plus parfaite qu'au temps de Noé et ceci grâce à son intelligence.

Concernant la volonté que possède l'homme notons qu'elle est telle qu'elle lui permet de transgresser les lois de la Nature.

Dans ses Écrits et dans bien de ses causeries `Abdu'l-Bahá explique ce point d'une manière détaillée pour montrer que l'homme est le maître de la Nature.

A ce propos permettez moi de vous réciter un extrait de sa Lettre au Professeur Forel (Professeur suisse renommé en médecine et en philosophie. Récemment en son honneur on a émis en Suisse des billets de 1000 F.S. avec son image. IL adhéra à la foi bahá'ie en 1920).

"L'homme, bien qu'il soit par son corps captif de la Nature, a l'esprit et l'intelligence libres et demeure maître de la Nature. Veuillez remarquer que selon les lois de la Nature l'homme est un être qui se meut sur terre, mais l'esprit et l'intelligence de l'homme brisent la loi de la Nature, et il devient un oiseau qui s'envole dans les airs, il court les mers à toute vitesse et tel un poisson il évolue dans les profondeurs des ondes et fait des découvertes océanographiques, et cela constitue une infraction importante aux lois de la Nature.

IL en est de même pour l'énergie électrique, cette force violente et indomptée qui parvient à fendre les montagnes, l'homme l'enferme dans un verre, et cela est une infraction à la loi de la Nature.

Egalement les secrets cachés de la Nature, conformément à ses lois devraient demeuré cachés ; l'homme parvient à les découvrir, et du domaine de l'invisible, il les amène à l'évidence.

Parallèlement les propriétés des choses sont parmi les secrets de la Nature et l'homme les découvre. IL en est des événements à venir que l'homme découvre par induction alors qu'ils font encore défaut au monde de la Nature.

Les communications selon les lois de la Nature sont limitées à des distances rapprochées, tandis que l'homme, par cette puissance intellectuelle qui découvre les réalités des choses entretient des relations de l'Orient à l'Occident ; ceci est aussi une infraction à la loi de la Nature ; de même selon la loi de la Nature, l'ombre est fugace, mais l'homme fixe cette ombre sur le verre, et c'est une infraction à la loi de la Nature.

Remarquez que les sciences, les arts, les métiers, les inventions, les découvertes, tout cela constituait les secrets de la Nature qui, par la loi de la Nature, auraient dû rester cachés, mais l'homme par la puissance révélatrice a transgressé la loi de la Nature, il a amené, du monde invisible à l'évidence, ces secrets cachés. C'est encore une contravention à la loi de la Nature.

En résumé, cette force spirituelle de l'homme, qui demeure invisible, prend l'arme tranchante aux mains de la Nature et lui en assène des coups terribles. Tout le reste des créatures - malgré l'importance de certaines - est privé de ces avantages.

L'homme a une puissance de volonté et de sensibilité, mais la Nature en est privée. La Nature est contrainte, mais l'homme est libre de choisir.

La Nature est inconsciente, l'homme est conscient. La Nature est sans connaissance des événements passés, l'homme les connaît. La Nature ignore les événements à venir, l'homme par sa puissance révélatrice les connaît. La Nature n'a aucune idée d'elle-même, l'homme a connaissance de toutes choses.

Et si quelqu'un vient à penser que l'homme fait partie du monde de la Nature et que, puisqu'il réunit en lui tant de perfections, ces perfections doivent être un reflet du monde de la Nature, que la Nature doit être la créatrice de ces perfections au lieu d'en être privée, nous disons en réponse que la partie dépend du tout. !l n'est pas possible que dans la partie se trouve des perfections dont le tout est privé.

Mais en parlant de l'homme face à la Nature `Abdu'l-Bahá tire une autre conclusion, cette fois plutôt spirituelle. Il en a parlé à plusieurs occasions et plus particulièrement à l'Université de Stanford de Palo Alto en 1912 devant un millier de professeurs et d'élèves de cet établissement (A propos de cette conférence le journal "The Palo Alto" du 1/11/1912 écrivait un long article à la fin duquel l'auteur disait que si en science on découvre une vérité celle-ci n'appartient pas à un pays mais au monde entier et qu'il en est de même en religion. Si le message bahá'i vient de la Perse, le berceau de la race humaine. et le plus ancien, ce message de paix concerne également "le jeune et le plus puissant géant de l'Ouest" - Amérique).

Après avoir rendu hommage aux mérites de la science `Abdu'l-Bahá développa la question de l'harmonie existant dans la Nature.

Au point de vue physique dit-il, tous les êtres qu'ils soient du monde minéral, végétal, animal ou humain se composent des mêmes éléments qui passent d'un monde à l'autre. Ainsi, par exemple, tous les éléments qui composent le corps humain, à un moment donné se trouvaient dans le monde minéral, d'où ils sont passés au monde végétal, ensuite au monde animal et enfin au monde humain. Ce cycle terminé le mouvement de ces mêmes éléments se fait dans le sens inverse du monde humain vers les autres mondes en exerçant dans chacun de ces mondes une fonction spécifique ; la cohésion dans le monde minéral, la croissance en plus dans le monde végétal et les cinq sens qui s'y ajoutent dans les mondes animal et humain.

Ces passages des éléments d'un monde à l'autre se fait sans cesse et perpétuellement. On peut donc dire que dans tout être il y a tous les autres êtres.

La composition de tous les êtres étant une et une seule, tous les êtres, physiquement ne font qu'un.

S'il y a une telle unité dans les mondes inférieurs à celui de l'homme serait ce convenable que cette unité n'existe pas dans le monde humain, ce monde qui est supérieur à tous les autres et qui est le sommet de la création - conclut `Abdu'l-Bahá pour mettre en évidence la nécessité de l'application du principe de base de la foi bahá'ie, le principe de l'unité du genre humain.

Est-ce la diversité et la différence de caractère qui empêcheraient cette unité, comme certains le prétendent. Non, et là nous n'avons qu'à voir ce qui se passe dans les mondes inférieurs, et plus particulièrement dans le monde le plus bas: le monde minéral.

Prenons, par exemple, deux éléments, l'hydrogène et l'oxygène, ils ont des caractères opposés, l'un brûle lui-même, l'autre contribue à la combustion. Ce qui n'empêche qu'ils s'unissent pour donner naissance à l'eau, autrement dit pour assurer la vie, car sans eau il n'y a pas de vie.

Est-il alors convenable que sous prétexte de diversité on s'imagine que les hommes ne puissent pas s'unir. Bien au contraire, c'est cette diversité qui donne plus de charme quand l'unité est réalisée.

Si dans un jardin toutes les fleurs ont la même couleur, le jardin est bien moins attrayant que lorsqu'il y a des fleurs de couleurs différentes.

Puis `Abdu'l-Bahá parle de l'harmonie qui existe dans les différents mondes, une harmonie sans laquelle la vie serait impossible.

Prenons comme exemple le soleil qui donne la lumière et la chaleur à la terre avec les êtres qui y vivent. L'harmonie entre les deux astres est parfaite. Ainsi, pour ne citer qu'un petit détail, si le soleil ne donnait à la terre que la moitié de ses radiations, nous gèlerions. S'il nous en donnait une fois et demi plus qu'il en donne, nous serions grillés. Mais le soleil envoie ses radiations autant qu'il en faut, en harmonie parfaite avec les besoins de la terre.

IL en est de même en ce qui concerne le mouvement de la terre autour de son axe, mouvement dont résultent le jour et la nuit. Si la terre tournait dix fois plus lentement les jours deviendraient dix fois plus longs et la chaleur du soleil brûlerait notre végétation. La vie deviendrait alors impossible. Mais la terre harmonise son mouvement avec les besoins des êtres qui y vivent.

Le soleil et la terre sont en harmonie et en paix.

Cette harmonie existe non seulement dans les infiniment grands mais également dans les infiniment petits, les cellules, par exemple.

Qu'est-ce que la tumeur cancéreuse? C'est lorsqu'un certain nombre de cellules ne fonctionnent plus en harmonie avec l'ensemble des cellules du corps.

Si le manque d'harmonie dans les êtres bien inférieurs à l'homme entraîne de telles conséquences néfastes, inévitablement le manque d'harmonie doit entraîner des conséquences bien plus néfastes dans le monde humain, ce monde qui est infiniment plus parfait par rapport aux autres.

C'est comme dans le fonctionnement d'une machine, plus celle-ci est parfaite, plus le manque d'harmonie entre les différentes parties devient catastrophique.

L'homme d'aujourd'hui, grâce au progrès de la science, est plus que jamais le maître de la Nature, et la Nature plus que jamais est le serviteur de l'homme. Est-il logique que le serviteur ait des qualités et que le maître en soit privé?

Chez le "serviteur" (la Nature) il y a unité, harmonie et la paix. Il faut qu'il en soit de même chez le "maître" (le monde humain).

De ce qui vient d'être dit on peut conclure qu'au stade actuel de l'évolution de l'humanité l'unité est son fondement, l'harmonie et la paix son couronnement.

Et c'est précisément L'UNITÉ DU GENRE HUMAIN qui est le fondement de tous les principes bahá'is et la paix mondiale en est le couronnement.


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9.7. Le bonheur c'est croire au bonheur

Le célèbre poète allemand Goethe disait:

"IL y a neuf conditions nécessaires pour vivre heureux: assez de santé pour que le travail devienne un plaisir, assez d'argent pour subvenir à vos besoins, assez de force pour lutter contre les difficultés et les surmonter, assez de volonté pour confesser vos péchés et ne plus les commettre, assez de patience pour souffrir jusqu'à ce que vous ayez un bon résultat, assez de charité pour voir un peu de bien chez votre prochain, assez d'amour pour vous inciter à être utile et secourable aux autres, assez de foi pour réaliser les desseins de Dieu, assez d'espérance pour ôter de votre coeur l'inquiétude et la crainte de l'avenir".

Indiscutablement ce n'est pas l'ordre dans lequel Goethe énuméra ces neuf conditions qui souligne l'importance de chacune d'elles pour contribuer au bonheur. L'éminent poète était trop croyant pour se permettre de mettre la foi en avant dernière position, laissant la priorité à l'argent, par exemple. Loin de là. Et puis il y a bien d'autres conditions pour être heureux.

Quelles que soient les conditions requises pour le bonheur, on les trouve toutes dans la foi, à la condition que cette foi soit en conformité avec le stade actuel de l'évolution de l'humanité. C'est ce que nous allons voir en étudiant, à titre d'exemple, les neuf conditions du bonheur selon Goethe.

Pour plus de simplicité nous allons suivre l'ordre dans lequel le poète a énuméré ces conditions.


1° LA SANTÉ

Qu'est ce que la santé? L'Organisation Mondiale de la Santé nous en donne la définition suivante:

"La santé est un état de bien-être physique, psychique et social."

Le mot psychique vient du grec PSUKHE que veut dire âme, esprit.

Par conséquent notre santé dépend des facteurs liés à notre état d'esprit. Or tout ce qui concerne l'esprit est du domaine de la religion, tandis que la science s'occupe des facteurs physiques.

Comme il y a interdépendance entre les facteurs physiques et psychiques, il faut que les deux puissances, la religion et la science interviennent simultanément pour assurer notre santé.

Et il en est de même en ce qui concerne les facteurs sociaux.

Là aussi la science et la religion doivent collaborer pour assurer notre santé.

Laissons pour le moment le rôle de la science de côté, pour voir dans quelle mesure la religion contribue à notre santé.

Et quand je dis "religion" j'entends le stade actuel de son évolution, à savoir la religion bahá'ie.

D'abord Goethe a raison en précisant l'interdépendance entre la santé et le travail. Or dans la religion bahá'ie le travail est une obligation pour tous. Et l'une des sagesses de ce commandement c'est précisément le fait que le travail est une nécessité pour le maintien de la santé, laquelle santé est indiscutablement l'une des conditions du bonheur.

Mais concernant la santé laissons la parole à un médecin.

Dans son livre "Bahá'u'lláh et l'Ere Nouvelle" le Dr Esselmont écrit: "Le corps est le serviteur de l'âme, jamais son maître, mais il faut que ce serviteur soit de bonne volonté, soumis et capable, et il doit être traité avec les égards dus à un aide dévoué. S'il n'est pas convenablement traité, il en résulte des maladies et des troubles, et le maître en subit les conséquences désastreuses autant que le serviteur".

Et l'auteur indique quelques enseignements bahá'is concernant le maintien de la santé. Avant tout il souligne l'interdépendance entre la santé physique et la santé psychique, ce que les Écrits bahá'is ont précisé il y a plus de cent ans, et dont la science parle seulement aujourd'hui.

Le Dr. Seyle, spécialiste des nerfs, écrit:

"Nous commençons seulement à nous rendre compte que bien des maladies courantes résultent en grande partie de nos réactions défectueuses en présence des difficultés de la vie plutôt que de l'action des microbes".

Un autre point que le Dr Esselmont mentionne c'est la nécessité de mener une vie simple, à tous les points de vue. A ce propos il cite ces paroles d`Abdu'l-Bahá:

"Celui qui se satisfait de peu de choses garde toujours l'esprit en paix et le coeur en repos".

Et l'on connaît combien l'état d'esprit influence notre santé. Un autre enseignement bahá'i non moins important est l'exhortation des fidèles à ce qu'ils prennent leur part de joie dans tout ce que la vie offre de bon et de beau.

Bahá'u'lláh dit clairement:

"Ne vous privez pas de ce qui a été créé pour vous".

Un autre commandement de Bahá'u'lláh concernant le maintien de la santé c'est la prescription de s'adresser à un médecin en cas de maladie, tout en s'efforçant de traiter le mal de préférence par la diète et en réduisant l'usage des médicaments.

On voit toute la sagesse de cette prescription surtout aujourd'hui où le pharmacien nous sert de mécecin, avec l'embarras de choix qu'il a devant cette multitude de spécialités.

Le voyant se verser des gouttes dans un verre, alors que des fioles sont dispersées autour de son assiette, une femme dit à son mari: "N'oublie pas surtout de prendre ton repas pendant les médicaments".


2° L'ARGENT

Indiscutablement l'un des facteurs qui contribue à notre bonheur c'est la capacité de subvenir à nos besoins et cette capacité est acquise par l'argent.

Selon les enseignements bahá'is l'argent doit être gagné par le travail consciencieux, utile et accompli avec modération. (S'il est conforme à nos capacités spécifiques alors c'est l'idéal).

L'argent ainsi gagné contribue à notre bonheur à la condition qu'il soit dépensé.

Bahá'u'lláh dit:

"Les hommes les meilleurs sont ceux qui gagnent leur vie dans leur métier, et, par amour de Dieu, le Seigneur de tous les mondes, dépensent leur argent pour eux-mêmes et pour leurs semblables".

Et il fait remarquer que ne pas dépenser judicieusement l'argent qu'on a gagné, le destinant à l'accumulation des richesses c'est s'exposer au danger.

L'un des dangers de l'accumulation des richesses c'est l'orgueil.

Or quand on est orgueilleux on n'est aimé, ni respecté de personne, et par conséquent, on en souffre, on n'est pas heureux.

Un autre danger de l'accumulation des richesses c'est l'esclavage, en ce sens que l'argent devient maître et l'on en devient le serviteur, captif en sa main. Et ce qui est triste c'est que c'est un mauvais maître, car chaque fois que le serviteur veut faire une bonne action, il se heurte à son "veto".

Un troisième danger de l'accumulation des richesses c'est le sacrifice de la santé. Car nombreux sont ceux qui pour avoir plus d'argent gaspillent leur santé.

En bref, l'argent contribue au bonheur s'il est gagné par un travail consciencieux, utile, accompli avec modération, et s'il est dépensé pour le bien de tous.


3° LA FORCE NÉCESSAIRE POUR RÉSOUDRE LES DIFFICULTÉS DE LA VIE

De même qu'on apprend les mathématiques en résolvant les problèmes mathématiques, on apprend l'art de vivre en résolvant les problèmes qui se présentent dans la vie.

Ces problèmes peuvent être de toutes sortes. Pour chaque cas il y a une solution. Et cette solution est à la portée de celui à qui la Providence pose ce problème.

La Providence est un maître qui connaît bien son élève. Un maître ne pose jamais à un enfant un problème destiné à un universitaire. L'élève doit donc avoir confiance en son maître, et en lui même. Autrement dit il faut qu'il soit convaincu qu'il est capable de résoudre le problème qui lui a été posé.

Il en est de même en religion.

`Abdu'l-Bahá dit que si Dieu vous pose un problème, Il sait que vous êtes en mesure de le résoudre et Il en donne le moyen.

A nous d'avoir confiance en Dieu et en nous-mêmes.

C'est cette confiance en Dieu qui fait que les bahá'is souvent, en cas de difficultés, récitent cette prière:

"Qui hormis Dieu dissipe les difficultés? Loué soit Dieu ! Lui seul est Dieu. Tous sont ses serviteurs et tous dépendent de son commandement."

A remarquer qu'en récitant cette prière les bahá'is prient aussi pour tous, car la prière dit: Tous sont ses serviteurs. (Je ne suis donc pas le seul à avoir des difficultés et je ne suis pas le seul à avoir besoin de ton assistance).


4° LA VOLONTÉ

L'une des causes de nos ennuis et de nos difficultés ce sont nos propres défauts. Si nous nous engageons à nous en débarrasser nous sommes sur le chemin qui conduit à notre bonheur. Je dis bien "sur le chemin" car le bonheur est un voyage, être heureux c'est rester voyageur. Le bonheur c'est donc dans le mouvement, dans l'action. C'est le ruisseau qui court, non un étang qui dort. Cette action avant tout c'est la recherche de nos défauts, et l'effort pour nous en débarrasser, ce qui demande beaucoup de volonté.

Et c'est l'un des commandements sur lequel les Écrits bahá'is insistent beaucoup, étant donné que c'est par un tel effort qu'on s'achemine vers le bonheur, et tout ce que la foi veut c'est notre bonheur.

Mais ce qui est triste c'est que souvent nous voulons ignorer nos défauts pour en chercher chez les autres et les rendre responsables de nos ennuis.

Sénèque avait une servante aveugle. Ne sachant pas qu'elle était aveugle elle criait constamment: "Il fait noir, pourquoi n'allume-t-on pas les lampes?"

Combien nombreux sont ceux qui ne voient pas leurs propres défauts et accusent les autres.

Une actrice disait: "J'étais folle de Jean et j'étais heureuse. Maintenant je ne peux plus le voir. Que les hommes changent !"


5° LA PATIENCE DANS LES SOUFFRANCES

Qu'est-ce que la patience? C'est la vertu qui fait qu'on supporte les épreuves avec résignation.

Les épreuves sont-elles nécessaires et l'homme doit-il les supporter? Oui, disent les bahá'is. La graine ne doit-elle pas supporter les ténèbres de la terre, la pluie, l'orage, la chaleur du soleil, afin d'être en mesure de donner naissance à un arbre destiné à donner des fruits?

Les épreuves et les contrariétés sont aussi nécessaires que le vent pour le cerf-volant. Si le cerf-volant n'affronte pas le vent il ne peut pas monter.

Par ces analogies je veux dire que les épreuves sont nécessaires pour que l'homme puisse manifester ses capacités latentes, pour que sa vie porte des fruits. C'est grâce aux épreuves que l'homme progresse, surtout dans le domaine moral.

`Abdu'l-Bahá dit:

"Le plant le plus émondé est celui qui, l'été venu, porte les plus belles fleurs et les fruits les plus abondants. Le laboureur fend la terre du soc de sa charrue et de ce sol sort la plus riche, la plus généreuse moisson. Plus un homme est corrigé, plus grande sera la moisson des vertus spirituelles. Un soldat ne deviendra pas un bon général tant qu'il n'aura pas été au premier rang de la bataille et n'aura pas reçu les plus graves blessures".

Selon la foi bahá'ie l'art de vivre ne consiste pas à éviter les épreuves, mais à apprendre à vivre en leur compagnie.

Pour un bahá'i les épreuves sont pour ainsi dire le meilleur des maîtres, le meilleur parce que c'est un maître qui donne les leçons particulières que l'élève n'a plus qu'à apprendre avec patience.


6° LA CHARITÉ

Qu'est ce que la charité '? C'est la vertu qui porte à désirer le bien pour son prochain.

Selon les enseignements bahá'is ce désir du bien ne doit pas être contrainte. Avant tout il faut souhaiter le bien chez son prochain avec sincérité. Autrement si l'on voit le mal et que l'on s'efforce de lui souhaiter le bien, c'est qu'on fait un compromis avec sa conscience. Et c'est de l'hypocrisie.


7° L'AMOUR

Qu'est-ce que l'amour et comment se manifeste-t-il? Selon la définition bahá'ie l'amour est une vertu qui se manifeste extérieurement par le sentiment d'unité.

Ainsi, par exemple, une mère manifeste son amour à l'égard de son enfant par le fait que pour elle son enfant et elle-même ne font qu'un: la joie de l'enfant est sa joie, comme la souffrance de l'enfant est sa souffrance.

Quand on manifeste un tel sentiment à l'égard de son prochain, c'est qu'on l'aime. Et quand on l'aime on fait de lui son ami. Or dans la vie plus on a d'amis plus on est heureux.

Bahá'u'lláh dit:

"Tout ce que nous voulons en ce monde et dans l'autre ce sont des amis".


8° L'ESPERANCE

A ce stade de mon exposé, permettez-moi de ne pas respecter l'ordre dans lequel Goethe a énuméré les neuf conditions du bonheur. C'est ce que je vais justifier dans un instant.

Abordons donc l'étude de la question de l'espérance. Qu'est-ce que l'espérance? C'est l'attente du bien qu'on désire. Cette attente apporte la joie. Et cette joie ne laisse pas de place pour l'inquiétude et les soucis, si néfastes pour le bonheur.

Le Dr. Mayo écrit: "Je n'ai jamais entendu dire qu'un homme soit mort d'avoir trop travaillé, mais j'en ai connu beaucoup qui sont morts d'être trop inquiets".

Puisqu'on parle de la mort, notons qu'un croyant ne peut pas se faire de souci à son sujet, car même s'il est menacé de mort, il a l'espérance d'une vie meilleure. Si un croyant se fait du souci cela revient à dire: "Je ne m'en tirerai pas, puisqu'il n'y a pas de Dieu pour m'aider" ce qui est incompatible avec la croyance en Dieu. Il ne peut donc pas se dire croyant.

Un croyant doit être heureux (comme un enfant est heureux) puisqu'en toutes circonstances il a un Père en qui il peut mettre son espoir, et de qui il n'attend que du bien.


9° LA FOI

Et nous arrivons à la question de la foi qui selon les bahá'is peut à elle seule assurer le bonheur de l'homme ou, pour être plus précis, c'est la seule condition qui garantit le bonheur de l'homme.

En effet quand on a la foi toutes les conditions du bonheur sont remplies. Je dis bien "toutes", car il y a bien plus de conditions encore que celles que Goethe a citées. IL y a le courage, il y a le savoir, le détachement, etc, etc.

Mais tout cela fait partie intégrante de la foi.

Car avoir la foi c'est veiller à sa santé, c'est travailler consciencieusement pour subvenir à ses besoins et aux besoins des autres, c'est avoir la force de surmonter les difficultés, c'est la volonté pour se corriger, c'est la patience dans les souffrances, c'est la charité, c'est l'amour, c'est l'espérance, c'est le courage, c'est la persévérance et toutes les autres qualités si interdépendantes les unes des autres. Ainsi la santé, pour ne citer qu'un exemple, dépend du travail, de la force de surmonter les difficultés, de la bonne volonté pour se corriger, de la patience dans les souffrances, de la charité, de l'amour, de l'espérance, chacune de ces vertus dépendant à son tour plus ou moins de l'état de santé.

Et toutes ces vertus réunies dans la foi garantissent le bonheur.

La foi est donc le bonheur.

Et si les bahá'is sont des gens heureux c'est à cause de leur foi, c'est qu'ils croient, c'est qu'ils croient au bonheur.

Et c'est pour cela que j'ai intitulé mon exposé : Le bonheur c'est croire au bonheur.


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9.8. "Et un petit enfant les conduira" (la vie de Shoghi Effendi)

En parlant du chemin de Dieu que chaque croyant s'engage à suivre, l'éminente poétesse bahá'ie Tahirih écrit:

Si quelqu'un veut suivre mon chemin,
Je le mets dès maintenant au courant,
Les épreuves, les souffrances et le chagrin,
Sont toujours destinés aux amants.

Ces vers résument toute la vie de Shoghi Effendi, le Gardien de la foi bahá'ie.

D'abord sa naissance coïncide avec la période des souffrances de sa famille. En effet il est né le premier mars 1897, et à cette époque toute la famille de son grand père `Abdu'l-Bahá était prisonnière du Sultan de Turquie.

Les épreuves du futur Gardien de la cause de Dieu (Le titre de Shoghi Effendi) commence donc dès sa naissance pour continuer pendant 60 ans, épreuves dont il est toujours sorti vainqueur. Et s'il triomphait toujours c'est qu'il savait choisir les moments pour lancer ses projets. Ces moments, selon lui, étaient les moments des épreuves.

La haute destinée de Shoghi Effendi était prévue depuis des milliers d'années avant sa naissance.

En effet Esaïe (Voir Esaie 11/6 et 11/11) avait prédit que le second retour des enfants d'Israël (Le Premier Retour a eu lieu sous le règne des rois persans cinq siècles avant Jésus Christ) sera pratiquement réalisé sous le ministère du "petit enfant", nouveau né, prophétie qui se réalisa sous le ministère de Shoghi Effendi en 1948 avec la formation de l'Etat d'Israël.

C'est en se référant à cette prophétie qui dit:

"Et un petit enfant les conduira" (Esaïe 11/6) qu'une Américaine demanda à `Abdu'l-Bahá si ce "petit enfant" était déjà né? Et `Abdu'l-Bahá lui répondit par l'affirmative en précisant que grâce à cet "enfant" "tous les horizons du monde seront illuminés" (Allusion à l'extension de la foi sous le ministère de Shoghi Effendi).

`Abdu'l-Bahá avait donc choisi Shoghi Effendi dès sa naissance pour lui succéder et prendre la destinée de la foi bahá'ie en sa main.

Ce choix impliquait un amour infiniment profond pour Shoghi Effendi, amour qu'il ne pouvait pas extérioriser de peur de provoquer la jalousie des autres et de mettre en danger la vie du "petit enfant".

Au fur et à mesure que l'"enfant" grandissait il justifiait par son comportement le choix de son grand-père.

Déjà tout petit Shoghi Effendi manifestait un courage et une vitalité étonnante. Ainsi, par exemple, quand il descendait les marches d'un escalier, il donnait l'impression d'un cascade qui tombait, ce qui effrayait terriblement ses parents.

Déjà tout petit, il était très matinal: toujours le premier à se lever parmi les membres de sa famille.

Et pour l'encourager dans cette habitude, parfois c'est `Abdu'l-Bahá lui-même qui venait le réveiller de bonne heure.

Et dès que cet "enfant" se levait, ü se mettait à prier, souvent avec des larmes dans les yeux.

Et il chantait ses prières tellement haut qu'une fois ses parents lui en ont fait la remarque, à quoi il répondit:

"C'est `Abdu'l-Bahá lui-même qui m'a dit que je chante les prières à haute voix pour qu'il puisse les entendre."

Ses parents demandèrent alors à `Abdu'l-Bahá d'intervenir, à quoi le Maître répondit: "Laissez-le tranquille".

L'"enfant" avait un coeur extrêmement pur, un caractère très sensible. Il ne pouvait pas voir ses compagnons de jeu attristés. Si jamais il se doutait qu'il avait attristé un camarade, le soir il ne pouvait pas aller au lit avant d'avoir trouvé cet enfant pour dissiper le malentendu (s'il y en avait un).

L'"enfant" a souffert surtout quand il avait dix ans en voyant la cruauté avec laquelle les frères mêmes d`Abdu'l-Bahá se comportaient à l'égard de son grand-père bien-aimé.

Il a souffert parce qu'il voyait que tous les amis quittaient 'Akká. Et c'est `Abdu'l-Bahá qui les y encourageait, car à cette époque la vie de tous les fidèles résidant à 'Akká était en danger. Et tout cela à cause de la trahison et des fausses accusations portées contre `Abdu'l-Bahá, par les membres mêmes de sa famille.

Craignant que ces derniers puissent empoisonner son futur successeur `Abdu'l-Bahá avait même interdit à l'"enfant" de prendre ne fut ce qu'une tasse de thé avec eux.

Tout cela faisait souffrir terriblement Shoghi Effendi.

A propos de ses souffrances nous lisons dans les mémoires de la doctoresse allemande qui soignait la famille d`Abdu'l-Bahá:

"Un jour, `Abdu'l-Bahá m'a dit: Comment trouves-tu Shoghi Effendi, mon futur Elie? L'as tu aimé?

- Maître - lui répondis-je - ses grands yeux noirs me disent que cet enfant est destiné à souffrir beaucoup.

- Dans ses yeux - me dit `Abdu'l-Bahá - je vois la loyauté, la persévérance, le rayonnement d'une parfaite conscience. Je l'ai choisi comme mon futur successeur."

Les épreuves qu'allait affronter Shoghi Effendi, c'est d'ailleurs lui-même qui les voyait en rêve déjà à l'âge de dix ans.

Ainsi, par exemple, une nuit Shoghi Effendi voit en rêve que le Báb est entré dans sa chambre poursuivi par un Arabe qui voulait le tuer. Puis se tournant vers l'enfant, l'Arabe en question lui dit: "Maintenant c'est ton tour" Effrayé l'enfant se réveille en sursaut et raconte son rêve à sa nourrice.

On en demande l'interprétation à `Abdu'l-Bahá. En réponse le Maître écrit une lettre à Shoghi Effendi disant en substance ceci: Mon cher Shoghi, être en la sainte présence du Báb est le signe dé la bonté et de la grâce divines. Et il en est de même en ce qui concerne le reste de ton rêve.

Ce qui signifie que par ses souffrances Shoghi Effendi aura une vie de martyr, comme le Báb.

Quant aux études de Shoghi Effendi, la première langue étrangère qu'il a apprise c'était le français, que les Frères d'un Collège de Jésuites lui enseignèrent.

Mais à ce collège il n'était pas heureux.

Alors `Abdu'l-Bahá l'envoya à Beyrouth, comme pensionnaire à l'école catholique.

Ayant appris que là non plus Shoghi Effendi n'était pas heureux le Maître l'inscrivit au Collège américain.

Mais la véritable école pour Shoghi Effendi c'était d'être auprès d`Abdu'l-Bahá, chez qui il passait ses vacances. C'était là qu'il apprenait tout ce dont il allait avoir besoin plus tard pour succéder à son grand-père: l'humilité, l'amour, la justice, la sobriété.

Ainsi il accompagne le Maître en Egypte en 1910 et 1911. Il ne se sépare d`Abdu'l-Bahá que pour quatre mois, pendant lequel le Maître fit son premier voyage en Occident.

Cette séparation a été difficile à supporter non seulement pour Shoghi Effendi, mais également pour `Abdu'l-Bahá, de sorte que l'année suivante (1912) quand le Maître quitte Haïfa pour l'Amérique, il prend Shoghi Effendi avec lui. Mais à Naples les autorités italiennes, pour des raisons injustifiées, empêchent Shoghi Effendi (âgé alors de 15 ans) d'accompagner son grand-père. Il doit donc retourner à Haïfa, ce qui l'attrista profondément.

La seule consolation qui lui restait ce fut la correspondance, par laquelle il s'informe de l'état de santé d`Abdu'l-Bahá et des détails de son voyage.

Shoghi Effendi poursuit brillamment ses études à Beyrouth où en 1918 il reçoit son diplôme de bachelier es-lettres. Et il en est tellement heureux, "car", écrit t il à un ami, "il peut servir son grand-père en lui traduisant les bonnes nouvelles envoyées de l'Occident."

IL devient pratiquement le bras droit du Maître en servant d'intermédiaire entre lui et les croyants occidentaux.

Il accompagne même le Maître presque partout.

En 1920 selon les instructions d`Abdu'l-Bahá, Shoghi Effendi quitte Haïfa pour l'Angleterre afin d'y poursuivre ses études à l'Université d'Oxford.

C'est en Angleterre en 1920 qu'il reçoit la nouvelle du décès d`Abdu'l-Bahá, ce qui porte un coup terrible à sa santé, au point qu'il en devient malade et reste alité pendant plusieurs jours.

A peine rétabli il part pour Haïfa, où il est appelé à prendre connaissance de la mission écrite qu`Abdul'l-Bahá lui avait confiée dans son testament, mission qui, croit-il, serait la formation de la Maison Universelle de Justice, institution suprême qui dirige la Communauté mondiale bahá'ie.

A peine débarqué à Haïfa il va visiter les tombeaux du Báb et d`Abdu'l-Bahá.

Le même jour en présence des membres de la famille d`Abdu'l-Bahá on ouvre le testament du Maître. Shoghi Effendi est absent à cette réunion, mais il apprend qu'il est désigné à succéder à `Abdu'l-Bahá au titre de Gardien de la cause de Dieu.

Shoghi Effendi commence sa mission par une série de lettres adressées aux croyants, et par une lettre officielle au gouverneur de Palestine pour l'informer que dorénavant c'est lui qui selon le testament d`Abdu'l-Bahá est désigné à la tête de la communauté mondiale bahá'ie.

Si seulement les membres de la famille même d`Abdu'l-Bahá, toujours les mêmes infidèles pouvaient le laisser tranquille !

Jaloux et furieux de sa désignation ils interviennent auprès des autorités anglaises en Palestine pour leur demander de se conformer aux lois islamiques qui désigneraient comme successeur d`Abdu'l-Bahá son demi-frère (celui-là même qui du vivant du Maître a tout fait pour le faire disparaître).

Ayant échoué dans leurs démarches, il s'emparèrent de la clé du tombeau de Bahá'u'lláh pour faire croire aux bahá'is que dorénavant c'est à eux qu'ils doivent s'adresser et non à Shoghi Effendi.

Les souffrances dé Shoghi Effendi n'en finirent pas là. Il apprend qu'à Baghdád les musulmans se sont emparé de la Maison de Bahá'u'lláh, l'un des lieux de pèlerinage pour les bahá'is.

Notons en passant que si Jésus a souffert de la trahison de l'un seulement de ses Apôtres, Bahá'u'lláh, `Abdu'l-Bahá et Shoghi Effendi eurent à souffrir durant toute leur vie des oeuvres néfastes de l'un ou de l'autre membre de leur famille.

Shoghi Effendi n'a que 24 ans quand il se trouve soudain dans une ambiance absolument défavorable pour l'accomplissement de sa mission qui consistait à protéger la foi aussi bien à l'extérieur qu'à l'intérieur. Pour en sortir il décide qu'il doit recourir à une retraite temporaire pour arriver à se donner entièrement à Dieu.

Aussi, après avoir constitué une Assemblée de neuf personnes sous la direction de la sueur d`Abdu'l-Bahá, il se retire dans les montagnes pour neuf mois.

A ce propos plusieurs années après, il fera cette confidence à son secrétaire Leroy Ioas:

"La seule chose à laquelle je m'attendais était d'être appelé par le Maître, à préparer la formation de la Maison Universelle de Justice.

Quand à Haïfa j'ai appris que j'avais été désigné comme Gardien de la foi je ne me croyais pas capable d'assumer une telle responsabilité. Aussi me suis-je retiré dans le but d'arriver à triompher de moi-même et de me donner à Dieu.

Dès que je fus arrivé à triompher de moi-même je retournai à Haïfa avec le sentiment d'être en mesure de faire ce que Dieu me demandait.

C'est ce que, d'ailleurs - remarqua-t-il - tout bahá'i doit s'efforcer de faire".

De retour à Haïfa, Shoghi Effendi lance un appel pathétique aux croyants, appel où entre autres il dit:

"Le temps est venu pour qu'on pense non seulement comment on doit servir la Cause, mais comment la Cause doit être servie".

Or la Cause de Dieu ne peut être servie qu'à partir du moment où l'on s'efforce d'acquérir certaines qualités dont Shoghi Effendi lui-même donnait l'exemple parfait.

Il serait donc intéressant de mentionner quelques unes de ces qualités avant de finir cet exposé.

D'abord Shoghi Effendi était extrêmement humble. Il ne parlait jamais de lui-même. Il parlait de Bahá'u'lláh, du Báb et d`Abdu'l-Bahá et puis "des jours après leur ministère". Jamais il ne mentionnait son ministère.

S'il parlait des succès remportés par la foi, il en attribuait le mérite aux amis.

En même temps que cette humilité il faut mentionner son amour pour tout le monde.

Cet amour se manifestait par le fait qu'il lui était impossible de voir un coeur attristé. Si jamais un tel cas se présentait à lui, il savait comment consoler la personne chagrinée.

Un jour il recevait Miss Martha Root (L'une des plus grandes enseignantes de la foi bahá'ie. C'est grâce à elle que la Reine Marie de Roumanie accepta la foi bahá'ie) dans la chambre d`Abdu'l-Bahá. La dame en question avait dans sa main un flacon de parfum qu'elle voulait lui offrir. Mais prise d'émotion sa main trembla, le flacon tomba et se cassa. Miss Martha fut terriblement désolée. Comme on était dans la chambre d`Abdu'l-Bahá, Shoghi Effendi dit à Miss Martha Root:

"Pouvait-on trouver un lieu meilleur qu'ici pour répandre votre parfum?"

Pour Shoghi Effendi le temps avait une valeur religieuse, il devait être consacré à Dieu et à sa Cause.

A peine avait-il pris une décision qu'il la mettait immédiatement à exécution. Ainsi, par exemple, en quelques heures il transformait un rocher en un jardin.

IL y a un proverbe qui dit qu'à celui qui possède la bague de Salomon, il lui suffit de la tourner pour qu'en un clin d'oeil tout ce qu'il désire se réalise.

Les Arabes disaient que Shoghi Effendi possédait la bague de Salomon.

Pour Shoghi Effendi non seulement chaque minute de la vie appartenait à Dieu, mais également chaque centime lui était un dépôt confié par Dieu. IL ne se permettait donc pas de le perdre: il était extrêmement sobre et économe.

IL voyageait en troisième classe, et la chambre qu'il louait était toujours la moins chère, souvent mansardée, de sorte que ses visiteurs se voyaient obligés de se courber.

Au restaurant, il prenait le repas le moins cher. Etudiant à Oxford il repassait ses vêtements lui-même.

Shoghi Effendi avait un respect absolu pour les messagers de Dieu. Son secrétaire Leroy Ioas raconte qu'un jour, ayant appris que la municipalité de Haïfa avait donné le nom BAHÁ à l'une des rues de cette ville, Shoghi Effendi m'appela pour me dire:

"Dites au maire que s'il n'arrache pas la plaque BAHÁ STREET, j'irai le faire moi-même de ma propre main".(Le lecteur aura compris que Shoghi Effendi ne pouvait admettre qu'on donne à une rue le nom d'un messager de Dieu).

Devant une telle fermeté le maire céda et changea BAHÁ STREET en IRAN STREET.

Shoghi Effendi savait apprécier les services rendus à la foi, et manifester ses sentiments de gratitude à ceux qui rendaient de tels services. Et il le faisait aussi bien de leur vivant qu'après leur mort.

Ainsi, par exemple, de passage en Suisse, il ne manqua pas d'aller visiter la tombe de l'un de ceux qui parmi les premiers ont apporté le message bahá'i dans ce pays.

Voilà, chers amis, à titre d'exemple quelques unes des vertus de Shoghi Effendi. Si seulement nous pouvions nous en inspirer dans la vie ...

IL y a beaucoup à dire sur les vertus de Shoghi Effendi, sur ses souffrances dans la vie, sur la mission divine qu'il a accomplie, mais je m'arrête là pour renvoyer ceux qui, avec raison, s'y intéressent davantage, au livre "La Perle inestimable" (Par Ruhiyyih Rabbáni - M.E.B. Bruxelles - éd 1976)


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9.9. Bahá'u'lláh

On nous demande souvent l'origine du mot BAHÁ'I.

Le mot BAHÁ'I vient du nom BAHÁ - fondateur de la foi bahá'ie, le suffixe "I" étant un suffixe oriental dont l'équivalent en français c'est "ISTE". C'est d'ailleurs la raison pour laquelle dans le passé au lieu de dire BAHA'I on disait BAHA'ISTE.

Mais étant donné que par la suite il y a eu une infinité de mouvements inventés par des humains, mouvement dont le nom se terminait par "ISME", et celui de leurs adeptes par "ISTE", afin de faire une distinction bien nette entre d'une part ces mouvements et d'autre part la foi bahá'ie qui est d'origine divine, on a préféré le suffixe "I" au suffixe "ISTE".

Le nom complet du fondateur de la foi bahá'ie est BAHÁ'U'LLÁH, ce qui traduit en français, veut dire "La Gloire de Dieu".

A priori ce nom devait être prédit par les Écritures du passé, puisque la Bible dit:

"Le Seigneur de l'Éternel ne fait rien sans avoir révélé son secret à ses serviteurs, les prophètes". Amos 3/7

Et ce nom ("La Gloire de Dieu") est mentionné à maintes reprises dans la Bible, soit en parlant de la Révélation du Jour, soit en relation avec le salut des enfants d'Israël et leur retour en Terre Sainte au Jour promis.

Ainsi, par exemple on y lit:

"Alors la Gloire de l'Éternel sera révélée" Esaïe 40/50

ou bien:

"Ils verront la Gloire de l'Éternel" Esaïe 35/2

"Il viendra lui-même, il vous sauvera" Esaïe 35/4

Le messager promis dont l'avènement doit coïncider avec le retour des enfants d'Israël en Terre Sainte ne peut être appelé que "La Gloire de Dieu".

Ceci dit voyons s'il y a dans la Bible des prophéties concernant le lieu de naissance de la Révélation bahá'ie.

Or la Révélation bahá'ie a eu comme précurseur le Báb, né dans cette province de l'Iran qui dans le passé s'appelait Elam.

Et la Bible dit: "Je placerai mon trône en Elam" Jérémie 49/38

Ce qui signifie que le message annonçant le règne de Dieu sur terre se fera entendre de l'Iran.

Et Bahá'u'lláh lui-même est né en Iran et c'est encore dans ce pays qu'il a reçu la mission divine d'inaugurer l'ère de la fraternité universelle qui est la volonté même de Dieu, donc l'ère du règne de Dieu sur terre.

Quant à la généalogie de Bahá'u'lláh il descendait d'Abraham.

Étant le fils d'un ministre iranien, il commença sa vie au milieu de la félicité et du bonheur les plus complets. IL ne fréquenta aucun savant, ni aucun théologien, ce qui n'empêche que, plus tard, dans une centaine d'ouvrages il manifesta un savoir extraordinaire aussi bien dans le domaine de la science que dans celui de la religion.

Il avait vingt-deux ans quand son père mourut, et le gouvernement voulut qu'il succède à son père dans les fonctions de ministre d'Etat. Mais il déclina l'offre, et le Premier Ministre dit: "Cette position est indigne de lui. Je ne peux le comprendre, mais je suis convaincu qu'il est destiné à quelque haute mission. Ses pensées sont différentes des nôtres. Laissez-le".

A l'âge de vingt-sept ans, après avoir lu les Écrits du Báb (son Précurseur) il adhéra à sa Cause et devint l'un de ses promoteurs les plus puissants et les plus intrépides.

Sur l'ordre des mullas il fut arrêté et jeté en prison. Cet emprisonnement fut de courte durée, car plusieurs ministres intervinrent en faveur de sa libération. Ce qui lui permit de prendre une part encore plus active dans la lutte contre le fanatisme et les préjugés.

Il fut de nouveau arrêté et cette fois condamné à mort, encore par les mullas. C'était sa première condamnation à mort. Excités par le clergé, les habitants s'amassèrent en foule autour de la mosquée. Les charpentiers apportèrent leurs scies et leurs marteaux, les bouchers vinrent avec leurs couteaux, les maçons portaient leurs pelles sur l'épaule et tous avec l'intention de participer à l'honneur de le tuer.

Furieux de leur échec après l'interrogatoire de Bahá'u'lláh, les mullas décidèrent de le soumettre au supplice de la bastonnade, avant de le livrer à la populace.

Mais ne voulant pas que cette sentence de mort soit exécutée dans une province dont il avait la responsabilité le gouverneur envoya Bahá'u'lláh sous escorte à Tihrán.

A Tihrán, Bahá'u'lláh fut emprisonné dans un cachot souterrain (une répugnante fosse où la lumière du jour ne pénétrait jamais) les pieds dans les fers et une lourde chaîne placée autour de son cou. Cette chaîne était tellement lourde qu'elle blessa son cou et Bahá'u'lláh en porta les traces toute sa vie.

Entouré d'une centaine d'assassins et de voleurs Bahá'u'lláh resta pendant quatre mois dans cette fosse, durant lesquels il a tellement souffert que ses cheveux devinrent tout blancs. Et dire qu'il n'avait alors que trente ans.

C'est dans l'obscurité de ce cachot que l'Esprit symbolisé dans l'Évangile par la colombe, descendit sur lui, le chargeant de la mission d'éduquer les hommes afin qu'ils arrivent à s'unir à l'échelon planétaire.

Si cet Esprit descendit sur Bouddha dans la forêt, sur Moïse au pied d'une montagne, sur Jésus au bord d'une rivière, sur Muhammad dans le désert, ce même Esprit descendit sur Bahá'u'lláh dans les ténèbres d'un cachot.

Ne pourrait-on pas y voir un symbole des ténèbres morales de son époque, ténèbres sans précédent à travers toute l'histoire de l'humanité. Ce que l'historien Carlyle exprime en disant:

"Un siècle qui n'a pas d'histoire et ne pouvait guère en avoir. Le siècle le plus riche en mensonges". ("Frédéric le Grand" Tome 1).

Remarquons que c'est dans cette prison qu'on tenta d'empoisonner Bahá'u'lláh, mais en dehors des souffrances qu'il a éprouvées, le poison n'eut sur lui aucun effet néfaste.

Sorti de la prison en 1853 Bahá'u'lláh fut exilé avec sa famille à Baghdád.

A cette époque personne ne connaissait rien sur la mission dont Bahá'u'lláh venait d'être chargé, car à l'exemple de ses prédécesseurs (Jésus et Muhammad) il ne l'a pas révélée immédiatement.

L'exil à Baghdád a duré onze ans. Pendant cette période Bahá'u'lláh eut à subir de cruelles persécutions, guetté à tout instant par la haine acharnée de ses ennemis.

IL supporta tous ces tourments avec la plus parfaite sérénité. Souvent quand il se levait le matin il ignorait si le soleil à son coucher le trouverait en vie.

Ce fut pendant cette période qu'il se retira seul dans les montagnes pour se recueillir et reprendre la force spirituelle nécessaire pour poursuivre son oeuvre. Cette retraite dura deux ans.

A son retour, sa renommée grandit plus que jamais, et les gens originaires de toutes les religions affluèrent pour l'entendre.

Les ecclésiastiques musulmans décidèrent alors de lui lancer un défi en lui demandant de produire un miracle. A leur délégué Bahá'u'lláh dit :

"Bien que vous n'ayez nul droit de demander cela, car c'est à Dieu d'éprouver ses créatures, et non pas aux créatures d'éprouver Dieu, j'accepte cette demande. Que les ulamás (Clergé islamique) se réunissent et choisissent un miracle d'un commun accord, puis qu'ils certifient par écrit qu'une fois ce miracle accompli, ils ne nourriront aucun doute à mon égard et attesteront la vérité de ma Cause".

A noter que c'était la première fois qu'un messager de Dieu acceptait de produire un miracle.

Même Jésus à qui on attribue tant de miracles (miracle qu'il produisait uniquement par bonté(Ce que faisait Bahá'u'lláh aussi) une fois qu'on lui a demandé cette preuve de l'origine divine de sa mission, il refusa en disant qu'une génération perverse demande des miracles.

La réponse courageuse de Bahá'u'lláh apporta une telle satisfaction au délégué des ecclésiastiques qu'il se leva instantanément, embrassa le genou de Bahá'u'lláh et prit congé pour aller porter sa réponse au clergé.

L'issue de cette démarche des mullas était à prévoir: en effet, comme leur intention était tout autre que la recherche de la vérité, ils se dérobèrent à cet audacieux défi. Leur défaite ne fit que les inciter à fomenter de nouveaux complots pour saper le mouvement à la base.

A leur instigation le Sháh de Perse demanda au Sultan de Turquie d'exiler Bahá'u'lláh de Bagdad.

Cela se passait en 1863. Et ce fut en cette année, avant de quitter Baghdád que Bahá'u'lláh révéla sa mission aux disciples réunis autour de lui. Le jour de sa déclaration (le 21 avril) est célébré par les bahá'is comme la plus grande fête.

Remarquons que cette déclaration de Bahá'u'lláh a eu lieu exactement 1290 ans après la mission divine que reçut Muhammad avant lui.

A noter que ce chiffre 1290 est prédit exactement par Daniel (Voir Daniel 12/11).

Ceci dit, revenons à l'exil de Bahá'u'lláh.

De Bagdad il fut exilé d'abord à Constantinople, puis à Andrinople, où il fit sa déclaration publique et universelle.

A Andrinople Bahá'u'lláh demeura cinq ans et il y a souffert plus que partout ailleurs, et cette fois, surtout à cause de son demi-frère qui 'a trahi, comme Judas avait trahi Jésus, avec cette différence que ce dernier se repentit et se suicida, et ne s'était d'ailleurs pas opposé ouvertement à lui tandis que le demi-frère de Bahá'u'lláh tenta même d'empoisonner Bahá'u'lláh. Une fois de plus le poison, bien que mortel, ne mit pas fin à ses jours, car il était prédit par les Écritures qu'il devait vivre quarante ans après avoir été chargé de la mission divine, et de recevoir pendant quarante ans cette même révélation divine destinée à donner dans une centaine d'ouvrages, la solution à tous les problèmes du monde.

D'Andrinople, Bahá'u'lláh fut exilé à 'Akká (St Jean d'Acre). IL est impossible de dépeindre toutes les souffrances, toutes les cruautés qu'il a dû subir dans cette prison, d'où il écrivit à tous les monarques du monde pour déclarer sa mission et leur exposer succinctement ses principes et ses enseignements.

Au Sháh de Perse, il parle surtout de ses souffrances dans l'accomplissement de sa mission "mes yeux pleurent jusqu'à tremper mon lit" - lui écrit-il. Et c'est dans la même lettre qu'il lui dit clairement:

"Rassemblez les ulamás (clergé islamique) et convoquez-moi afin que les témoignages et les preuves puissent être établis".

Et ce fut un autre défi de Bahá'u'lláh, cette fois lancé à un roi. A remarquer qu'il a lancé ce même défi au Sultan de Turquie par l'intermédiaire de l'un de ses fonctionnaires.

Dans sa "Tablette à Napoléon III" il lui demande d'intervenir pour arrêter le massacre des femmes et des enfants bahá'is, tout en ajoutant que c'est Dieu qui le lui demande.

"S'il est Dieu, je suis deux fois dieu" aurait dit Napoléon III en jetant par terre sa lettre. Alors Bahá'u'lláh lui écrit une deuxième lettre où il prédit à Napoléon III sa chute imminente, prédiction qui ne tarda pas à se réaliser, ce qui amena le représentant français à 'Akká à devenir l'un des adeptes de Bahá'u'lláh.

Vers les dernières années de, sa vie les sévérités de la prison se relâchèrent et ses portes s'ouvrirent permettant à Bahá'u'lláh de s'installer à Bahjí, non loin d'Akká.

C'est à Bahjí que Bahá'u'lláh reçut le Professeur Browne de l'Université de Cambridge, à qui il exposa le but de sa mission.

A propos de cette visite le Professeur en question écrira plus tard:

"Je me prosternais devant celui qui fait l'objet d'une vénération et d'un amour que les rois lui envieraient et auxquels les empereurs aspireraient en vain."

Et il finira ses impressions en ces termes:

"Que ceux qui les lisent se demandent sincèrement si un être qui professe de telles doctrines mérite la mort et les chaînes, si le monde doit gagner ou perdre à leur diffusion".

Bahá'u'lláh s'éteignit à l'âge de soixante-quinze ans en 1892, c'est-à-dire quarante ans après avoir reçu la mission divine en tant qu'éducateur de l'humanité à l'ère de sa maturité.


Maison d'Éditions Baha'ies - D/1547/1982/4

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