Read: Dieu passe pres de nous - Partie 4 - Chapitre 24


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DIEU PASSE PRES DE NOUS

Shoghi Effendi

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4ième Période: Début de l'âge de formation de la foi, 1921-1944

CHAPITRE XXIV: Emancipation et reconnaissance de la foi et des institutions

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Tandis que les premières dispositions en vue de la création des cadres de l'ordre administratif de la foi de Bahá'u'lláh étaient prises simultanément par ses fidèles, dans les pays de l'Orient et de l'Occident, une attaque violente était déclenchée, dans un obscur village d'Egypte, contre une poignée de croyants qui tâchaient d'y établir une des premières institutions de cet ordre, attaque qui, considérée du point de vue de l'histoire, sera jugée par les générations futures comme un événement marquant, non

seulement pour la période de formation de la foi, mais pour l'histoire du premier siècle Bahá'i. En fait, on peut dire que, par ses conséquences, cette attaque ouvrit un nouveau chapitre dans l'évolution de la foi elle-même, évolution qui, la conduisant à travers les phases successives de répression, d'émancipation, de reconnaissance comme révélation indépendante et comme religion d'Etat, doit conduire à l'établissement de l'Etat Bahá'i et aboutir à l'avènement de la fédération mondiale Bahá'i.

Commencé dans un pays qui peut, à juste titre, se vanter d'être le centre reconnu des mondes arabe et musulman, accéléré par l'action dans laquelle s'engagèrent, de leur propre initiative, les représentants ecclésiastiques de la plus grande confrérie de l'islám, faisant directement suite à une série de troubles provoqués par certains des membres de cette confrérie, dans le but de mettre fin aux activités de certains adhérents à la foi qui avaient fait partie du clergé, ce développement notable de la prospérité d'une communauté engagée dans la lutte a contribué nettement, et dans une large mesure, à fortifier et à rehausser le prestige de l'ordre administratif qu'elle avait commencé à établir. Par ailleurs, au fur et à mesure que ses répercussions seront plus largement ressenties par d'autres nations islamiques, et que sa profonde signification sera plus clairement comprise des adhérents de la chrétienté et de l'islám, ce développement hâtera la fin de la période de transition par laquelle la foi, actuellement au stade de sa formation, est en train de passer.

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C'est dans le village de Kawmu's-Sa'àyidih, district de Beba, province de Beni Suef, en Haute-Egypte, où la formation d'une assemblée Bahá'i avait éveillé le fanatisme religieux dans le cœur du chef de ce village, lequel avait porté de graves accusation devant l'officier de police du district et le gouverneur de la province - accusations qui excitèrent tellement les musulmans qu'ils en arrivèrent à commettre des actes honteux contre leurs victimes - , c'est dans ledit village que le notaire, en sa qualité de plaignant d'un ordre religieux agréé par le ministère de la justice, entama une action contre trois résidents Bahá'i de ce village, demandant que divorcent leurs épouses qui étaient musulmanes, sous prétexte que leurs maris avaient abandonné l'islám après leur mariage légal en tant que musulmans.

Après jugement, la cour d'appel religieuse de Beba rendit son verdict le 10 mai 1925. Sanctionné par la suite par les plus hautes autorités ecclésiastiques du Caire qui le déclarèrent définitif, imprimé et mis en circulation par les autorités musulmanes elles-mêmes, ce verdict annulait les mariages contractés par les trois défendeurs Bahá'i et condamnait en masse, comme hérétiques, ceux qui avaient violé les lois et ordonnances de l'islám. Le jugement alla même jusqu'à faire la déclaration positive, surprenante et véritablement historique, que la foi embrassée par ces hérétiques devait être considérée comme une religion distincte, entièrement indépendante des systèmes religieux qui l'avaient précédée, affirmation contestée ou délibérément ignorée jusque-là par les ennemis de la foi, en Orient ou en Occident.

Après avoir énoncé les principes fondamentaux et les ordonnances de l'islám et donné un exposé détaillé des enseignements Bahá'i, appuyés par diverses citations tirées du Kitáb-i-Aqdas, des écrits d'Abdu'l-Bahá et de Mirzá Abu'l-Fadl, et par une mention spéciale de certaines lois Bahá'i, et après avoir démontré que, à la lumière de ces assertions, les défendeurs avaient positivement abjuré la foi de Muhammad, ce jugement officiel stipule, en termes des plus nets: "La foi Bahá'i est une nouvelle religion, entièrement indépendante, avec des croyances, des principes et des lois qui lui sont propres, qui sont différents des croyances, principes et lois de l'islám, et sont en désaccord complet avec ceux-ci. Par conséquent, un Bahá'i ne peut être considéré comme musulman et vice-versa, de même qu'un bouddhiste, un brahmaniste ou un chrétien ne peut être considéré comme musulman et réciproquement." Ordonnant la dissolution des contrats de mariage des parties en cause et la "séparation" des maris d'avec leurs femmes, cette déclaration officielle et mémorable se terminait par ces mots: " Si l'un d'entre eux (des époux) se repent, s'il croit et reconnaît tout Ce que ... Muhammad, l'Apôtre de Dieu ... a apporté de la part de Dieu .... s'il revient vers la noble foi de l'islám ... et atteste que ... Muhammad ... est le sceau des prophètes et des messagers, qu'aucune religion ne succédera à sa religion, que nulle loi n'abrogera sa loi, que le Qur'án est le dernier des livres de Dieu et sa dernière révélation à ses prophètes et à ses messagers ... il sera accepté et aura le droit de renouveler son contrat de mariage."

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Cette déclaration d'une portée considérable, appuyée par des preuves irréfutables qu'apportaient eux-mêmes les ennemis avérés de la foi de Bahá'u'lláh, faite dans un pays qui ambitionne de prendre la tête de l'islám en rétablissant le califat, et qui reçut la sanction des autorités ecclésiastiques les plus hautes de ce pays, ce témoignage officiel que les chefs de l'islám shi'ah, à la fois en Perse et en 'Iráq, ont évité avec soin pendant un siècle de prononcer, réduit au silence, une fois pour toutes, ces détracteurs y compris les ecclésiastiques chrétiens d'Occident - qui, dans le passé, ont discrédité la foi, la traitant de culte, de secte bábi, de branche dérivée de l'islám, ou bien la représentant comme une synthèse des religions. Une telle déclaration fut acclamée par toutes les communautés Bahá'i des deux mondes, comme la première charte libérant la cause de Bahá'u'lláh des chaînes de l'orthodoxie islamique, comme le premier pas historique effectué, non pas par ses adhérents comme on aurait pu s'y attendre mais par ses adversaires, dans le chemin conduisant à sa reconnaissance finale à travers le monde.

Un tel jugement, impliquant d'incalculables possibilités, fut immédiatement reconnu comme un défi formidable que les constructeurs de l'ordre administratif de la foi de Bahá'u'lláh ne furent pas longs à regarder en face ni à accepter. Il fit peser sur eux une obligation sacrée dont ils furent prêts à s'acquitter. Conçu par ses auteurs en vue d'empêcher leurs adversaires d'accéder aux tribunaux musulmans et de les placer, de ce fait, dans une situation embrouillée et embarrassante, ce jugement devint un levier que la communauté Bahá'i d'Egypte, suivie plus tard par les communautés soeurs d'autres pays, utilisa promptement comme un moyen pour affirmer l'indépendance de sa foi et pour tâcher de la faire reconnaître par son gouvernement. Traduit en plusieurs langues et distribué aux communautés Bahá'i d'Orient et d'Occident, il prépara graduellement le terrain à l'ouverture de négociations entre les représentants élus de ces communautés et les autorités civiles en Egypte, en Terre sainte, en Perse et même aux Etats-Unis d'Amérique, dans le but d'obtenir, de la part de ces autorités, la reconnaissance officielle de la foi comme religion indépendante.

En Egypte, ce fut le signal de l'adoption d'une série de mesures qui S'ajoutèrent pour faciliter énormément une telle reconnaissance de la part d'un gouvernement encore officiellement associé avec la religion de l'islám, et qui accepte que ses lois et règlements soient fondés, pour une large part, sur les vues et les déclarations de ses chefs ecclésiastiques. La détermination inflexible des croyants égyptiens de ne pas dévier de l'épaisseur d'un cheveu des principes de leur foi, en évitant toutes relations avec un tribunal ecclésiastique musulman quelconque dans ce pays, et en refusant toute situation qu'on pourrait leur offrir au sein du clergé, la codification et la publication des lois fondamentales du Kitáb-i-Aqdas concernant les questions touchant le statut individuel comme le mariage, le divorce,

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l'enterrement et les héritages, et la présentation de ces lois au ministère égyptien, la délivrance de certificats de mariage et de divorce par l'assemblée spirituelle nationale d'Egypte, la prise en charge, par cette assemblée, de tous les devoirs et responsabilités se rapportant aux formalités des mariages et divorces Bahá'i ainsi que de l'enterrement des morts, l'observance, par tous les membres de cette communauté, des neuf jours saints pendant lesquels le travail, selon les enseignements Bahá'i, doit être entièrement suspendu, la présentation d'une pétition adressée par les représentants nationaux élus de cette communauté au Premier ministre égyptien, au ministre de l'intérieur et au ministre de la justice (appuyée par une communication semblable de l'assemblée spirituelle nationale d'Amérique envoyée au gouvernement égyptien), présentation à laquelle était jointe une copie du jugement du tribunal et une copie de leur constitution nationale Bahá'i et de leurs règlements locaux - pétition qui demandait aux ministres de reconnaître leur assemblée comme un corps qualifié pour exercer les fonctions de tribunal indépendant, autorisé à appliquer, dans toutes les questions touchant leur statut personnel, les lois et ordonnances révélées par l'auteur de leur foi -, tous ces faits se détachent comme les conséquences premières d'une déclaration historique qui doit finalement conduire à l'établissement de cette foi sur une base d'égalité absolue avec ses soeurs, les autres religions en ce pays.

Corollaire de cette déclaration historique et conséquence directe des troubles intermittents provoqués à Port-Saïd et à Ismà'iliyyih par une population fanatique, à l'occasion de l'enterrement de quelques membres de la communauté Bahá'i, la fatvà (sentence) officielle rendue à la demande du ministère de la justice par le grand mufti d'Egypte fut tout aussi remarquable. Peu après avoir été prononcée, elle fut publiée dans la presse égyptienne et contribua à fortifier davantage le statut indépendant de la foi. Elle fit suite aux émeutes qui éclatèrent avec une exceptionnelle violence à Ismà'iliyyih, lorsqu'une foule en fureur entoura le cortège funèbre de Muhammad Sulaymàn, un éminent Bahá'i décédé en cette ville. Un tel tumulte en résulta que la police dut intervenir, et s'étant saisie du corps et l'ayant ramené à la maison mortuaire, on fut forcé de le transporter sans escorte, la nuit, aux confins du désert, et de l'enterrer dans un lieu sauvage.

Ce jugement fut rendu à la suite de la demande écrite adressée le 24 janvier 1939 par le ministère égyptien de l'Intérieur au ministère de la justice. Accompagnée d'une copie de la compilation des lois Bahá'i relatives au statut individuel - compilation publiée par l'Assemblée Spirituelle Nationale des Bahá'is d'Egypte -, cette demande réclamait une décision de la part du mufti, au sujet de la pétition que ladite assemblée avait envoyée au gouvernement égyptien pour solliciter l'attribution de quatre parcelles de terrain destinées à servir de cimetière aux communautés Bahá'i du Caire, d'Alexandrie, de Port-Saïd et d'Ismà'iliyyih. " Nous sommes en possession ", écrivit le mufti dans sa réponse du 11 mars 1939 à la communication qu'il reçut du ministère de la justice, "de votre lettre... datée du 21 février 1939, avec ses pièces jointes.... demandant s'il serait ou non légal d'enterrer les Bahá'is décédés dans les cimetières musulmans.

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Nous déclarons par la présente que cette communauté ne doit pas être considérée comme musulmane, étant donné les croyances qu'elle professe La lecture de ce qu'elle nomme 'les lois Bahá'i touchant aux questions de statut individuel', et qui sont jointes aux documents, en est une preuve suffisante. Celui que a été musulman et qui en fait partie a renoncé à l'islám en vertu de sa croyance dans les prétentions de cette communauté. il est considéré comme étant mis au ban de l'islám et se trouve sous le coup des lois régissant l'apostasie telles qu'elles sont établies dans la vraie foi islamique. Cette communauté n'étant pas musulmane, il serait illégal d'enterrer ses morts en cimetière musulman, fussent-ils musulmans d'origine ou non... "

C'est à la suite de ce verdict péremptoire, définitif et clairement exprimé par le plus haut représentant de la loi islamique en Egypte, et après des négociations prolongées qui aboutirent d'abord à l'attribution, à la communauté Bahá'i du Caire, d'une parcelle de terrain dans la partie du cimetière réservée aux libres penseurs de cette ville, que le gouvernement égyptien consentit à accorder à cette communauté ainsi qu'aux Bahá'is d'Ismà'iliyyih, deux pièces de terrain pour enterrer leurs morts. Cet édit, d'importance historique, fut chaudement accueilli par les membres de communautés douloureusement opprimés et pleins d'endurance, et il servit à démontrer encore mieux le caractère d'indépendance de leur foi ainsi qu'à agrandir le champ d'action ressortissant à ses institutions représentatives.

C'est dans le premier de ces deux cimetières officiellement réservés aux Bahá'is que, selon la décision de l'assemblée nationale Bahá'i d'Egypte, et avec le concours de sa consoeur, l'assemblée de Perse, les restes de l'illustre Mirzá Abu'l-Fadl furent transférés et reçurent une sépulture digne de sa Position élevée, cérémonie qui marqua d'une manière convenable la naissance de la première institution Bahá'i officielle de ce genre établie en Orient. Ce résultat fut, peu après, mis en valeur par l'exhumation du corps de cette illustre éducatrice-mère de l'Occident, Mme E. Getsinger qui se trouvait au cimetière chrétien du Caire et qui, avec l'aide accordée par l'assemblée nationale Bahá'i d'Amérique et par le ministère des Affaires étrangères à Washington, fut enterrée au centre de ce cimetière, près du lieu de repos de cet auteur distingué, ce champion de la foi.

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En Terre sainte, où un cimetière Bahá'i avait été aménagé pendant le ministère d'Abdu'l-Bahá avant ces déclarations, on prit la décision, de portée historique, d'enterrer les Bahá'is décédés face au qiblih d'Akká. L'importance de cette décision fut accentuée par la résolution de cesser tout recours aux tribunaux musulmans comme on le faisait auparavant pour régler les questions de mariages et de divorces, et de suivre complètement, sans se cacher aucunement, les rites prescrits par Bahá'u'lláh pour la cérémonie funèbre et l'ensevelissement des morts. Ceci fut bientôt suivi par la présentation d'une pétition officielle en date du 4 mai 1929, adressée par les représentants de la communauté Bahá'i locale de Haïfa aux autorités de Palestine, les priant de reconnaître officiellement la communauté et de lui accorder "pleins pouvoirs pour administrer ses propres affaires, comme le faisaient actuellement les autres communautés religieuses de Palestine ", en attendant que soit adoptée une loi civile uniforme de statuts individuels applicables à tous les résidents de la nation, indépendamment de leurs croyances religieuses.

L'acceptation de cette pétition - fait d'une importance considérable et absolument sans précédent dans l'histoire de la foi de n'importe quel pays marquant la reconnaissance officielle, par les autorités civiles, des certificats de mariage fournis par les délégués de la communauté locale, certificats dont la validité était tacitement reconnue par le représentant officiel du gouvernement persan en Palestine, fut suivie d'une série de décisions exonérant des taxes d'Etat toutes les propriétés et institutions considérées par la communauté Bahá'i comme des lieux saints, ou consacrées à l'érection des tombeaux de ses fondateurs, au centre mondial. Par ailleurs, d'après ces décisions, toutes les fournitures destinées à l'ornementation ou à l'ameublement des tombeaux furent exemptées de droits de douane, et les filiales des assemblées spirituelles nationales Bahá'i d'Amérique et des Indes furent capables d'agir en tant que " sociétés religieuses " selon les lois du pays, et de détenir et administrer des propriétés, en qualité de mandataires de ces assemblées.

En Perse où une communauté beaucoup plus vaste, déjà numériquement supérieure aux minorités chrétienne, juive et zoroastrienne résidant en ce pays, avait réussi, malgré l'attitude hostile traditionnelle des autorités civiles et ecclésiastiques, à former la structure de ses institutions administratives, la réaction à une déclaration aussi capitale fut à même d'inspirer ses membres et de les conduire à exploiter, dans toute la mesure du possible, les avantages énormes que leur conférait ce témoignage totalement inattendu. Ayant survécu aux épreuves de feu auxquelles les chefs cruels, arrogants et implacables d'un clergé tout-puissant - aujourd'hui sérieusement humilié - l'avaient soumise, cette communauté triomphante, sortant tout juste de l'obscurité, était déterminée plus que jamais à poursuivre ses revendications, dans les limites prescrites par ses fondateurs, afin d'être reconnue comme une entité religieuse indépendante et de sauvegarder, par tous les moyens possibles, son intégrité, la solidarité de ses membres et la solidité de ses institutions élues.

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Alors que ses adversaires déclarés avaient fait, dans un pays comme celui-là et en un tel langage, une déclaration à ce point positive et radicale sur une question d'une telle importance, et . avaient déchiré le voile qui, pendant si longtemps, avait été tiré sur certaines des vérités distinctives qui se trouvaient à la base de sa doctrine, elle ne pouvait rester silencieuse plus longtemps ni tolérer sans protester les restrictions qu'on lui imposait dans le but de limiter ses pouvoirs, d'étouffer son existence en tant que communauté, et de lui contester son droit d'être placée sur un pied d'égalité absolue avec les autres communautés religieuses de ce pays.

Fermement résolus à cesser d'être considérés comme des musulmans, des juifs, des chrétiens ou des zoroastriens, les membres de cette communauté décidèrent, pour commencer, de prendre des mesures capables de justifier contre toute contestation la condition de religion distincte que ses ennemis avérés avaient proclamée pour leur foi. Conscients de leur devoir à la fois clair, inéluctable et sacré, d'obéir sans réserve aux lois de leur pays pour toutes questions de caractère purement administratif, mais fermement résolus à affirmer et à démontrer par tous les moyens légitimes à leur disposition, le caractère indépendant de leur foi, ils se tracèrent une ligne de conduite et entreprirent des tâches destinées à les mener vers une étape plus proche du but qu'ils s'étaient proposé d'atteindre.

La ferme résolution de ne pas dissimuler leur foi quels que soient les sacrifices qui pourraient s'ensuivre, leur prise de position intraitable qui refusait de soumettre toutes questions concernant leur statut individuel à un tribunal musulman, chrétien, juif ou zoroastrien, le refus de s'affilier à une organisation quelconque ou d'accepter un poste d'ecclésiastique appartenant à l'une des religions reconnues dans leur pays, l'observance totale des lois prescrites dans le Kitáb-i-Aqdas et relatives aux prières obligatoires, au jeûne, mariage, divorce, aux héritages, à l'enterrement des morts et à l'usage de l'opium et des boissons alcooliques, la création et la mise en circulation de certificats pour les naissances, décès, mariages et divorces, selon les directives des assemblées Bahá'i reconnues et avec leurs cachets, la traduction, en persan, des "lois Bahá'i concernant les questions de statut individuel ", qui fut d'abord publiée par l'assemblée national Bahá'i d'Egypte, l'arrêt du travail pendant les jours saints Bahá'i, la création de cimetières Bahá'i dans la capitale ainsi que dans les provinces, pour permettre d'ensevelir en un même lieu les fidèles de tous rangs, quelle que soit leur origine religieuse, l'insistance avec laquelle les Bahá'is refusaient d'être désormais inscrits comme musulmans, chrétiens, juifs ou zoroastriens sur les cartes d'identité, les certificats de mariage, les passeports et autres documents officiels, l'accent mis sur l'institution de la fête des dix-neuf jours d'après les données de Bahá'u'lláh dans son très saint Livre, les sanctions prises par les assemblées Bahá'i élues - qui assumaient maintenant les devoirs et les fonctions de tribunaux religieux contre les membres récalcitrants de la communauté, leur retirant le droit de vote et celui d'être membre de ces assemblées et de leurs comités, toutes ces mesures doivent être rattachées aux premières activités d'une communauté qui avait établi les fondements de son ordre administratif et qui, sous l'effet stimulant du verdict judiciaire historique rendu par l'Egypte, était maintenant résolue à obtenir que les autorités civiles acceptent, non pas par la force mais par la persuasion, le statut dont ses adversaires ecclésiastiques s'étaient portés garants de façon aussi catégorique.

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Le fait qu'à sa première tentative cette communauté n'ait rencontré qu'un succès partiel, qu'elle ait éveillé parfois la suspicion des autorités et qu'elle ait été grossièrement calomniée par ses vigilants ennemis, ne saurait surprendre. Elle réussit, sous certains rapports, dans ses négociations avec les autorités civiles, obtenant entre autre du gouvernement un décret qui supprimait toute allusion à une affiliation religieuse dans les passeports délivrés aux Persans, ainsi que l'autorisation tacite, accordée aux Bahá'is de plusieurs localités, de ne pas remplir les colonnes relatives à la religion dans certains documents officiels mais de faire enregistrer, par leurs propres assemblées, leurs mariage, divorce, naissance et décès, et de procéder à leurs funérailles selon leurs rites religieux. Sous d'autres rapports cependant, elle fut en butte à de graves difficultés: Les écoles qu'elle possédait, qu'elle avait fondées et contrôlait exclusivement, furent obligées de fermer parce qu'elles refusaient de travailler pendant les jours saints Bahá'i; les membres de cette communauté, hommes et femmes, furent poursuivis, et ceux qui détenaient des postes civils ou militaires furent parfois licenciés. L'importation, l'impression et la mise en circulation des ouvrages littéraires furent interdites et toutes les réunions publiques Bahá'i furent proscrites.

A tous les règlements administratifs que les autorités civiles ont établis de temps à autre ou établiront à l'avenir dans ce pays comme dans tous les autres, la communauté Bahá'i, fidèle à ses obligations sacrées envers le gouvernement et consciente de ses devoirs civiques, s'est soumise avec une obéissance absolue. La fermeture immédiate de ses écoles qu'elle effectua en Perse en est une preuve. Mais à des ordres qui impliqueraient l'abjuration de sa foi ou constitueraient des actes de déloyauté envers ses principes et préceptes spirituels fondamentaux, venant de Dieu, elle refusera obstinément de s'incliner, préférant l'emprisonnement, la déportation et toutes les formes de persécution, y compris la mort - déjà subie par les vingt mille martyrs qui ont laissé leur vie dans le chemin de ses fondateurs -, plutôt que d'obéir aux diktats d'une autorité temporelle exigeant le renoncement de sa fidélité à la cause.

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"Si vous taillez en pièces les hommes, femmes et enfants de toute la région d'Abàdih", lit-on dans le message mémorable envoyé par les courageux descendants de quelques-uns des martyrs de ce centre turbulent au gouverneur de Fàrs, qui avait décidé de les contraindre à se déclarer musulmans, Il nous ne nous soumettrons jamais à vos désirs", message qui, aussitôt parvenu entre les mains de ce provocant gouverneur, lui fit renoncer à pousser l'affaire plus loin.

Aux Etats-Unis d'Amérique, la communauté Bahá'i, qui avait déjà donné un exemple inspirateur en créant et perfectionnant le mécanisme de son ordre administratif, était consciente de l'étendue des conséquences du verdict rendu par le tribunal musulman d'Egypte et du sens exact de la réaction produite en Terre sainte, et la courageuse ténacité manifestée par cette communauté-soeur de Perse lui fut un stimulant. Elle décida de compléter ses remarquables réalisations par de nouvelles mesures destinées à donner plus de relief aux statuts acquis par la foi de Bahá'u'lláh dans l'Amérique du Nord. Elle était numériquement moins importante que la communauté des croyants persans. En raison de la multiplicité de lois qui réglementaient les Etats de l'Union, elle eut à faire face, en matière de statut individuel pour ses membres, à une situation radicalement différente et beaucoup plus complexe que celle où se trouvaient les croyants d'Orient. Cependant, consciente de devoir donner, une fois encore, un élan puissant au développement d'un ordre divinement prescrit, elle prit crânement l'initiative de mesures capables de faire ressortir le caractère d'indépendance d'une révélation qu'elle avait déjà si noblement défendue.

La reconnaissance de son assemblée spirituelle nationale par les autorités fédérales comme un organisme religieux autorisé à détenir, en qualité d'administrateur, les biens consacrés aux intérêts de la foi, la constitution de dotations Bahá'i et leur exonération de taxes par les autorités civiles, en tant que propriétés appartenant à une communauté purement religieuse et administrées pour son seul bénéfice, devaient être maintenant complétées par des décisions et des mesures destinées à donner plus d'importance à la nature des liens qui unissaient ses membres. L'insistance spéciale placée sur certaines lois fondamentales contenues dans le Kitáb-i-Aqdas au sujet des prières quotidiennes obligatoires, la pratique du jeûne, le consentement préalable des parents exigé pour les mariages, l'indispensable séparation d'un an entre mari et femme pour obtenir le divorce, l'abstinence de toutes boissons alcooliques, l'importance attribuée à l'institution de la fête des dix-neuf jours ordonnée par Bahá'u'lláh dans ce même livre, la cessation de toute appartenance et affiliation aux organisations ecclésiastiques et le refus d'accepter un poste d'ecclésiastique quelconque, ces mesures servirent à souligner énergiquement le caractère distinctif de la confrérie des Bahá'is et à la dissocier, dans l'esprit du public, des rites, cérémonies et institutions d'origine humaine inséparablement liés aux systèmes religieux du passé.

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D'une importance particulière et historique fut la demande de l'Assemblée Spirituelle des Bahá'is de Chicago - premier centre établi sur e continent nord-américain, première assemblée enregistrée entre toutes, et première à prendre l'initiative de préparer la voie à l'érection d'un temple Bahá'i en Occident -, demande présentée aux autorités civiles de l'Etat d'Illinois pour obtenir la reconnaissance civile du droit de célébrer légalement les mariages selon les ordonnances du Kitáb-i-Aqdas, et d'enregistrer des certificats de mariage ayant préalablement reçu la sanction officielle de cette assemblée. L'acceptation de cette requête par les autorités, nécessitant un amendement des règlements de toutes les assemblées locales pour leur permettre de procéder légalement à tous les mariages Bahá'i et de donner le pouvoir au président ou au secrétaire de l'assemblée de Chicago de représenter cet organisme dans leur célébration, l'attribution, le 22 septembre 1939, de la première licence de mariage Bahá'i par l'Etat d'Illinois, autorisant la susdite assemblée à procéder à ces cérémonies et à en délivrer des certificats, la réussite des démarches effectuées dans la suite par les assemblées des autres Etats de l'Union comme celles de New York, New jersey, Wisconsin et Ohio afin d'obtenir des privilèges analogues, contribuèrent d'autre part à donner une plus grande valeur au statut religieux indépendant de la foi. A tout ceci, il faut ajouter une acceptation similaire, et non moins importante, accordée aux Etats-Unis depuis le début du conflit actuel par le ministère de la Guerre - comme le prouve la communication adressée à l'Assemblée Spirituelle Nationale des Bahá'is d'Amérique, par l'intendant général de ce ministère, le 14 août 19,42 -: C'est l'autorisation d'employer le symbole du très grand Nom sur les pierres tombales des Bahá'is tués pendant la guerre et ensevelis dans des cimetières militaires ou privés, afin de distinguer ces tombes de celles qui portent la croix latine ou l'étoile de David, symboles respectifs des religions chrétienne et juive.

Il ne faudrait pas oublier de mentionner la requête présentée, avec succès également, par l'Assemblée Spirituelle Nationale des Bahá'is d'Amérique à l'office administratif des prix, à Washington, demandant que les présidents et secrétaires des assemblées locales Bahá'i, vu leur rôle d'officiers d'assemblées conduisant les réunions religieuses, et autorisés dans certains Etats à procéder aux célébrations des mariages, soient admis à bénéficier d'un surplus* d'essence pour un parcours de faveur selon les dispositions de la Section des Règlements sur l'essence, afin qu'ils puissent satisfaire aux besoins religieux des localités qu'ils desservent.

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Les communautés Bahá'i des autres nations telles que l'Inde, l'Iráq, la Grande-Bretagne et l'Australie ne furent pas longues non plus, soit à apprécier les avantages découlant de la publication de ce verdict historique, soit à exploiter, chacune selon ses capacités, et dans les limites que lui imposaient les exigences du moment, l'occasion offerte par une telle déclaration publique pour démontrer, une fois de plus, le caractère indépendant de la foi dont elles avaient déjà constitué la structure administrative. Par la mise en vigueur, dans la mesure du possible, des lois ordonnées dans leur très saint Livre, par la rupture de tous liens d'affiliation et d'appartenance aux institutions ecclésiastiques de toutes dénominations, par une procédure entreprise dans le seul but de donner davantage de publicité à ce résultat capital qui marquait un grand tournant dans l'évolution de la foi, et de faciliter son implantation finale, conscientes de leur solidarité et parfaitement averties des perspectives glorieuses qui s'ouvraient à elles, ces communautés, et en fait toutes les institutions Bahá'i organisées d'Orient ou d'Occident, si isolées ou insuffisamment développées fussent-elles, se dressèrent pour proclamer d'une voix unanime le caractère indépendant de la religion de Bahá'u'lláh, et pour préparer la voie à son émancipation de toutes les entraves, ecclésiastiques ou autres, qui pourraient empêcher ou retarder sa reconnaissance finale de la part du monde entier.

Au statut déjà obtenu pour leur foi, principalement grâce à leurs propres efforts et aux œuvres qu'elles accomplirent sans aide, des tributs ont été rendus par des observateurs appartenant à divers milieux, dont le témoignage fut bien accueilli des communautés qui le considèrent comme un encouragement de plus à progresser dans leur laborieuse et rude ascension vers les sommets qu'elles doivent finalement conquérir.

considérée comme le sol non pas de trois mais de quatre religions, parce que la croyance Bahá'i, dont le centre spirituel et aussi de pèlerinage est à 'Akká et Haïfa, est en train de prendre le caractère d'une religion mondiale. Aussi loin que s'étende son influence dans le pays, elle est un facteur de compréhension entre nations et entre religions. " " En 1920 ", déclara dans son testament le célèbre savant et psychiatre suisse, le Dr Auguste Forel, "j'ai appris, à Karlsruhe, l'existence de la religion supra confessionnelle et mondiale des Bahá'is, fondée en Orient il y a soixante-dix ans par un Persan, Bahá'u'lláh. C'est la vraie religion du "bien-être social', sans dogmes ni prêtres, reliant entre eux tous les hommes de ce petit globe terrestre qui est le nôtre. je suis devenu Bahá'i. Que cette religion vive et Prospère pour le bien de l'humanité, c'est là mon vœu le plus ardent.

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"Il est obligatoire qu'il y ait un Etat mondial, une langue universelle et une religion unique", a-t-il ajouté, et "le mouvement Bahá'i pour l'unité de l'humanité est, à mon avis, le plus grand mouvement actuel travaillant pour la paix et la fraternité universelles." " Une religion qui relie toutes les croyances", dit cet autre témoignage émanant de la plume de la défunte reine, Marie de Roumanie, " ... une religion animée de l'esprit profond du divin ... Elle enseigne que toutes les haines, intrigues, suspicions, paroles méchantes et même patriotismes agressifs sont étrangers à la loi essentielle de Dieu, et que les convictions particulières ne reposent que sur l'apparence des choses, alors que le cœur qui bat d'un amour divin ne connaît ni race ni tribu."

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